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28/03/2018 | FRANCE | N°16-26324

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2018, 16-26324


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 809 du code de procédure civile et l'article 2, deuxième alinéa, du décret n° 83-40, du 26 janvier 1983, relatif aux modalités d'application du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises ;

Attendu, selon le second de ces textes, que la répartition de la durée hebdomadaire du travail effectif sur un nombre de jours inférieur à cinq ne peut être effectuée qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, Ã

  défaut, des délégués du personnel s'ils existent ;

Attendu, selon l'arrêt atta...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 809 du code de procédure civile et l'article 2, deuxième alinéa, du décret n° 83-40, du 26 janvier 1983, relatif aux modalités d'application du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises ;

Attendu, selon le second de ces textes, que la répartition de la durée hebdomadaire du travail effectif sur un nombre de jours inférieur à cinq ne peut être effectuée qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant en référé, que le comité d'entreprise de la société GTLE Transports, exerçant une activité de transport routier, et le syndicat Force ouvrière des transports du Rhône ont saisi le juge des référés afin qu'il soit ordonné à cette société de recueillir, sous astreinte, l'accord de ce comité pour organiser le temps de travail sur une durée inférieure à cinq jours, la suspension de l'organisation du temps de travail sur une période inférieure à cinq jours dans l'attente de la consultation dudit comité et la condamnation de ladite société au paiement de diverses sommes ;

Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à référé, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'en moyenne, au cours de la période allant du mois de janvier au mois d'avril 2015, un salarié sur trois seulement a connu ponctuellement une durée de travail inférieure à cinq jours, tandis que le nombre des semaines travaillées selon ces modalités n'a représenté que 10 % du nombre total de semaines travaillées, étant observé qu'il n'existe aucune régularité d'un mois sur l'autre tant en ce qui concerne les salariés que les semaines soumis à ce type d'horaire de travail ; qu'il en résulte que c'est exceptionnellement et non pas habituellement que l'employeur est amené à adapter le nombre de jours travaillés dans une semaine en fonction des nécessités du service ; que la durée hebdomadaire du travail n'est pas répartie sur moins de cinq jours au sens de l'article 2 du décret du 26 janvier 1983 dès lors que ce texte vise l'hypothèse d'une véritable organisation générale du travail, c'est à dire d'une répartition programmée du temps de travail sur une durée de moins de cinq jours ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que, au cours de l'ensemble de la période considérée, la durée hebdomadaire du travail effectif d'une proportion significative des salariés avait été répartie sur un nombre de jours inférieur à cinq en l'absence d'accord du comité d'entreprise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne la société GTLE Transports aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GTLE Transports et la condamne à payer au comité d'entreprise de la société GTLE Transports et au syndicat Force ouvrière des transports du Rhône la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me A..., avocat aux Conseils, pour le comité d'entreprise de la société GTLE Transports et le syndicat Force ouvrière des transports du Rhône.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé et D'AVOIR débouté le comité d'entreprise de la société GTLE Transports et le syndicat Force ouvrière des transports du Rhône de l'intégralité de leurs demandes ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, sous réserve du respect des articles L. 221-1 et suivants du code du travail relatifs au repos hebdomadaire et après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent, l'employeur peut répartir sur l'ensemble ou seulement sur certains des six autres jours de la semaine la durée légale du travail effectif, prévue à l'article L. 212-1 du code du travail, sans que la durée journalière du travail puisse excéder le maximum prévu audit article ; que toutefois, la répartition de cette durée du travail sur un nombre de jours inférieur à cinq ne peut être effectuée qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ; que dans les entreprises qui ne sont pas légalement dotées d'une représentation du personnel, cette répartition pourra être autorisée par l'inspecteur du travail après enquête auprès des salariés ; que dans l'hypothèse où la répartition de la durée légale hebdomadaire de travail entraîne un repos d'une durée n'excédant pas deux jours, celui-ci doit être donné sans interruption ; qu'il peut être dérogé à cette consécutivité pour le personnel roulant effectuant des transports de voyageurs, lorsque les nécessités de l'exploitation le justifient et après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ; que, pour le personnel roulant, le repos visé au paragraphe ci-dessus peut débuter à une heure quelconque de la journée ; qu'il résulte des états récapitulatifs des temps de travail des conducteurs pour la période de janvier à avril 2015 produits aux débats par l'employeur, mais également des fiches d'organisation du travail pour la même période récapitulant mensuellement le nombre de jours et d'heures travaillés par chacun des salariés, qui sont versées au dossier par le comité d'entreprise : - qu'au titre du mois de janvier 2015, 55 salariés sur 143, soit 38 % de l'effectif, ont été amenés à effectuer des semaines de moins de cinq jours, ce qui représente 81 semaines sur un total de 572 semaines complètes travaillées, soit 14 %, - qu'au titre du mois de février2015, 25 salariés sur 140, soit 18 % de l'effectif, ont été amenés à effectuer des semaines de moins de cinq jours, ce qui représente 28 semaines sur un total de 560 semaines complètes travaillées, soit 5 %, - qu'au titre du mois de mars 2015, 40 salariés sur 140, soit 28 % de l'effectif, ont été amenés à effectuer des semaines de moins de cinq jours, ce qui représente 45 semaines sur un total de 560 semaines complètes travaillées soit 8 %, - qu'au titre du mois d'avril 2015, 73 salariés sur 142, soit 51 % de l'effectif, ont été amenés à effectuer des semaines de moins de cinq jours, ce qui représente 80 semaines sur un total de semaines complètes travaillées, soit 14 % ; qu'ainsi, en moyenne au titre de cette période, un salarié sur trois seulement a connu ponctuellement une durée de travail inférieure à cinq jours, tandis que le nombre des semaines travaillées selon ces modalités n'a représenté que 10 % du nombre total de semaines travaillées, étant observé qu'il n'existe aucune régularité d'un mois sur l'autre tant en ce qui concerne les salariés soumis à ce type d'horaires de travail que les semaines ; qu'il résulte de ces éléments chiffrés que c'est exceptionnellement, et non pas habituellement, que la société GTLE Transports est amenée à adapter le nombre de jours travaillés dans une semaine en fonction des nécessités du service, ce qui ressort très clairement de l'attestation circonstanciée, non démentie, du responsable d'exploitation, selon laquelle les commandes sont transmises majoritairement au jour le jour, tandis que la répartition de la charge de travail est effectuée entre les salariés sur la base de plusieurs critères (habilitation des conducteurs, catégorie des conducteurs, proximité du domicile par rapport aux impératifs clients, disponibilité du matériel, absences pour raisons multiples) ; que la durée hebdomadaire du travail n'était pas répartie sur moins de cinq jours au sens de l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, qui vise l'hypothèse d'une véritable organisation générale du travail, c'est-à-dire d'une répartition programmée du temps de travail sur une durée de moins de cinq jours ; que d'ailleurs, répondant aux remarques de la Direccte, la société GTLE Transports, par un courrier du 7 mai 2014, a fourni les explications demandées s'agissant des horaires de travail et n'a fait l'objet d'aucune injonction ou poursuite ultérieure, ce qui laisse présumer que l'administration n'a pas elle-même considéré que la pratique de l'entreprise en matière de durée du travail était illégale ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article 809 du code de procédure civile, le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, ordonner toute mesure conservatoire ou de remise en état qui s'impose pour faire cesser un trouble manifestement illicite ou prévenir un dommage imminent ; qu'en application de l'article du décret du 26 janvier 1983 régissant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises l'employeur peut, sous réserve du respect des dispositions relatives au repos hebdomadaire, répartir la durée légal du travail effectif sur l'ensemble ou seulement sur certains des six jours de la semaine, sans que la durée journalière du travail excède le maximum légal prévu, l'alinéa 2 précisant toutefois que la répartition de cette durée du travail sur un nombre de jour inférieur à cinq ne peut être affectée qu'avec l'accord du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel s'ils existent ; que s'il ressort des états récapitulatifs des temps de travail des conducteurs de la société GTLE Transports versés aux débats pour la période de janvier à avril 2015 qu'environ un quart des salariés ont chaque mois travaillé moins de cinq jours certaines semaines, non seulement cette situation se constate sur environ 6,5 % du nombre de semaines de travail totalisées par les 140 conducteurs mais elle ne se reproduit en outre pas de façon similaire considérées, et résulte, comme le mentionne d'ailleurs le comité d'entreprise sur les états qu'il produit dans l'explication de la rubrique RO, d'un repos forcé qui est imposé au conducteur du jour au lendemain, en fonction des aléas des commandes qui sont transmises quotidiennement par les clients ; qu'elle ne traduit dès lors pas une répartition programmée du temps de travail sur une durée de moins de cinq jours sur les semaines où celle-ci a pu être relevée et les demandeurs ne peuvent en conséquence se prévaloir d'une violation manifeste des dispositions de l'article 2 du décret du 26 janvier 1983 susceptible de justifier une mesure de remise en état par le juge des référés ;

ALORS, 1°), QU'en application de l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, l'employeur ne peut répartir la durée légale du travail effectif sur un nombre de jours inférieur à cinq qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ; que le défaut de consultation du comité d'entreprise préalablement à la mise en place d'une telle répartition du temps de travail constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser ; qu'en écartant l'existence d'un trouble manifestement illicite après avoir constaté que, sur la période considérée, des salariés avaient été amenés à effectuer des semaines de moins de cinq jours sans que le comité d'entreprise ait été consulté préalablement à la mise en place d'une répartition de la durée du travail sur un nombre de jours inférieur à cinq, la cour d'appel a violé l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QU'en application de l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, l'employeur ne peut répartir la durée légale du travail effectif sur un nombre de jours inférieur à cinq qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ; que le défaut de consultation du comité d'entreprise préalablement à la mise en place d'une telle répartition du temps de travail constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser ; qu'en se déterminant par des considérations dont il résulte qu'elle a, pour écarter l'existence d'un trouble manifestement illicite, subordonné la nécessité de consulter le comité d'entreprise à l'existence d'une répartition de la durée du travail sur moins de cinq jours qui soit à la fois programmée et récurrente, la cour d'appel, qui a ajouté au règlement une condition qu'il ne prévoit pas, a violé l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, ensemble l'article 809 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°), QU'en application de l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, l'employeur ne peut répartir la durée légale du travail effectif sur un nombre de jours inférieur à cinq qu'avec l'accord du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent ; que le défaut de consultation du comité d'entreprise préalablement à la mise en place d'une telle répartition du temps de travail constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser ; qu'en considérant, pour écarter l'existence d'un trouble manifestement illicite, que ce n'est qu'exceptionnellement et non pas habituellement que la société GTLE Transports avait été conduite à adapter le nombre de jours travaillés dans une semaine de sorte que la durée hebdomadaire du travail n'avait pas été répartie sur moins de cinq jours, après avoir pourtant relevé que, sur la période considérée, la répartition du temps de travail sur un nombre de jours inférieur à cinq avait été récurrente puisqu'il y avait été recouru chaque mois et qu'elle avait concerné, en moyenne, le quart de l'effectif de la société GTLE Transport et même plus de la moitié, au mois d'avril 2015, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 2 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, ensemble l'article 809 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26324
Date de la décision : 28/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 23 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2018, pourvoi n°16-26324


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26324
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