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15/03/2018 | FRANCE | N°17-10882

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 15 mars 2018, 17-10882


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société BMH Invest du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société civile professionnelle L... Y... , Olivier X..., Stéphane M..., Raynald Y..., Thibault Z... et Valérie A... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 31 août 2016), que, par acte notarié du 15 avril 2005, Joseph F... a consenti une promesse unilatérale de vente de parcelles à la société BMH Invest ; que celle-ci a levé l'option dans le délai prévu au contrat ; que, invoquant le car

actère lésionnaire de la vente, Mme K..., venant aux droits de Joseph F..., décéd...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société BMH Invest du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société civile professionnelle L... Y... , Olivier X..., Stéphane M..., Raynald Y..., Thibault Z... et Valérie A... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 31 août 2016), que, par acte notarié du 15 avril 2005, Joseph F... a consenti une promesse unilatérale de vente de parcelles à la société BMH Invest ; que celle-ci a levé l'option dans le délai prévu au contrat ; que, invoquant le caractère lésionnaire de la vente, Mme K..., venant aux droits de Joseph F..., décédé, a tenté de renégocier le prix et a recherché un autre acquéreur ; que, le 25 mars 2008, Mme K... a assigné la société BMH Invest en caducité de la promesse unilatérale de vente et, à titre subsidiaire, en rescision pour lésion ; qu'un jugement du 12 mars 2009 a déclaré caduque la promesse unilatérale de vente du 15 avril 2005 ; que, par acte du 4 juin 2009, publié le 3 mai 2010, Mme K... a conclu une promesse synallagmatique de vente des mêmes parcelles avec la société nouvelle BCP, à laquelle s'est substituée la société Newco investimmo ; qu'un arrêt du 30 juin 2010 a infirmé le jugement du 12 mars 2009, déclaré parfaite la vente au profit de la société BMH Invest et ordonné une expertise judiciaire sur son caractère lésionnaire ; que, par acte du 15 juillet 2010, dressé par M. Y..., notaire, et publié le 26 juillet 2010, Mme K... a vendu à la société Newco investimmo les parcelles en cause au prix de 305 000 euros ; que les experts judiciaires ont conclu au caractère lésionnaire de la vente au profit de la société BMH Invest ; que la société Newco investimmo a assigné la société BMH Invest, Mme K... et la société civile professionnelle notariale Y... (la SCP), en inopposabilité de la vente conclue par Joseph F... avec la société BMH Invest, faute de publication, et indemnisation de ses préjudices liés à l'interruption des travaux ; que la société BMH Invest a appelé en intervention forcée la société Pierreval aménagement, venant aux droits de la société Newco investimmo, dans l'instance relative à la vente entre Mme K... et la société BMH Invest ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que la société BMH Invest fait grief à l'arrêt de déclarer inopposables à la société Pierreval aménagement la promesse unilatérale de vente consentie par Joseph F... à la société BMH Invest, la levée d'option actée par cette société le 14 juin 2007 et la vente déclarée parfaite entre ces parties par arrêt du 30 juin 2010 ;

Mais attendu qu'ayant relevé que ni la promesse unilatérale de vente du 15 avril 2005, ni l'acte de levée d'option, ni aucun des actes dont se prévalait la société BMH Invest n'avaient été publiés, la cour d'appel, devant qui cette société n'avait pas soutenu que la société Pierreval aménagement aurait eu connaissance de la vente qui lui avait été consentie au jour où celle-ci avait fait publier la promesse de vente, a exactement déduit, de ces seuls motifs, que cette vente n'était pas opposable à la société Pierreval aménagement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que la société BMH Invest fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de dommages-intérêts envers Mme K... ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'il ressortait du rapport des trois experts judiciaires que le caractère lésionnaire de la promesse de vente consentie par Joseph F... à la société BMH Invest était établi et que cette société, qui aurait pu conserver le bien en payant le complément de prix sous la déduction du dixième, n'avait pas fait une proposition correcte de complément du prix à Mme K..., la cour d'appel a pu retenir qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à celle-ci pour avoir invoqué la lésion et engagé une instance en ce sens tout en recherchant un nouvel acquéreur, et a ainsi légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société BMH Invest aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société BMH Invest à payer la somme de 3 000 euros à Mme K... et rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société BMH Invest, demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré inopposable à la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT la promesse unilatérale de vente consentie par M. F... à la société BMH INVEST le 15 avril 2005, la levée d'option réalisée par cette société le 14 juin 2007, et la vente déclarée parfaite par arrêt de la Cour d'appel de Rouen du 30 juin 2010 ;

AUX MOTIFS D'ABORD QUE « pour l'exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions remises au greffe par Madame K... le 22 avril 2016, à celles remises au greffe par la société BMH Invest le 29 septembre 2015, à celles remises au greffe par la société Pierreval Aménagement le 26 septembre 2012 (en raison de l'irrecevabilité de ses conclusions récapitulatives du 24 août 2015) et à celles remises au greffe par la G...            , Olivier X..., Stéphane M..., Raynald Y..., Thibaut Z..., Valérie A..., Vincent P... et Emmanuelle M... (ci-après dénommée la H... ) le 23 décembre 2014 » (arrêt, p. 7) ;

AUX MOTIFS ENSUITE QUE « la société Pierreval Aménagement, qui a conclu uniquement sur l'appel du jugement du tribunal de grande instance de Bernay et avant que ne soit rendu l'arrêt du 7 novembre 2012, demande à la cour de débouter la société BMH Invest de l'ensemble de ses demandes et, à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente du jugement du tribunal de grande instance d'Evreux saisi de la question de l'opposabilité à son égard de la vente Baye-F... BMH ; qu'à titre subsidiaire, elle conclut à l'irrecevabilité des demandes de la société BMH Invest ; qu'à titre plus subsidiaire, la société Pierreval Aménagement demande à la cour de lui juger inopposable la vente régularisée entre Madame K... et la société BMH Invest portant sur les parcelles cadastrées section [...]         et [...] à Beuzeville, de déclarer la société BMH Invest sans droit ni titre qui lui soit opposable sur les parcelles litigieuses et de débouter cette dernière de toutes ses demandes indemnitaires dirigées à son encontre ; qu'à titre infiniment subsidiaire, elle sollicite la condamnation de Madame K... à la garantir et relever indemne de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre au profit de la société BMH Invest ; qu'en tout état de cause, la société Pierreval Aménagement sollicite la condamnation de la société BMH Invest ou de toute partie succombant à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile » (arrêt, p. 8) ;

ET AUX MOTIFS ENFIN QUE « pour voir déclarer opposable à la société Pierreval Aménagement la vente intervenue entre Madame K... et elle, la société BMH Invest fait valoir que la connaissance par la société Pierreval Aménagement, second acquéreur, de la vente antérieure qui avait été consentie au premier acquéreur fait obstacle, en application du principe "la fraude corrompt tout", à l'application de la règle prévue par les articles 28 et suivants et notamment 30 du décret du 4 janvier 1955 ; que toutefois, la simple connaissance par le vendeur et le second acquéreur de l'existence d'une première vente est sans incidence sur l'application des règles de publicité foncière applicables en cas de concours entre deux titres de propriété et ne constitue pas une concertation frauduleuse, dès lors qu'il n'est pas justifié de la signification avant le 15 juillet 2010 de l'arrêt du 30 juin 2010 ; qu'il résulte de l'article 30 du décret susvisé que "les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même obligation de publicité et publiées
" ; qu'en l'espèce, ni l'acte du 15 avril 2005, contenant promesse unilatérale de vente par M. F... au profit de la société BMII Invest, ni l'acte de levée d'option, ni aucun des actes dont se prévaut cette dernière n'ont été publiés avant que la promesse de vente consentie par Madame K... à la nouvelle société BCP, aux droits de laquelle sont venues successivement la société Newco Investimmo puis la société Pierreval Aménagement, ait été publiée à la conservation des hypothèques de Pont Audemer le 3 mai 2010, l'acte de vente des parcelles litigieuses au profit de la société Pierreval Aménagement en date du 15 juillet 2010 ayant ensuite été publié le 26 juillet 2010 ; que c'est en conséquence à juste titre que le tribunal de grande instance d'Evreux a retenu dans les motifs de la décision entreprise que la vente des mêmes parcelles à la société BMH Invest était inopposable à la société Pierreval Aménagement ; qu'il conviendra d'ajouter au jugement entrepris, qui a omis de statuer de ce chef dans son dispositif » (arrêt, p. 9-10) ;

ALORS QUE, premièrement, l'appel ne défère aux juges du second degré que la connaissance des chefs du jugement frappé de l'appel ; qu'à cet égard, la jonction d'instances ne créant pas une procédure unique, les demandes des parties sont déterminées, pour chaque instance, par l'acte introductif d'instance et par les conclusions déposées dans celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que les conclusions de la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT prises sur l'appel interjeté contre le jugement du Tribunal de grande instance d'Évreux du 2 mai 2014 ont été déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 février 2016 pour avoir été déposées au-delà du délai de deux mois prévu par l'article 909 du Code de procédure civile ; qu'en décidant néanmoins, pour statuer sur l'appel formé contre ce jugement, de se prononcer sur la base des conclusions déposées par la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT sur l'appel interjeté contre un jugement du Tribunal de grande instance de Bernay du 12 mars 2009, la cour d'appel a violé les articles 368 et 954 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, deuxièmement, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'à ce titre, il est exclu que les juges statuent sur une demande subsidiaire dès lors qu'il a été fait droit à la demande principale ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions du 26 septembre 2012 prises avant l'arrêt du 7 novembre 2012, la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT demandait à titre principal qu'il soit sursis à statuer et, à titre subsidiaire seulement, de déclarer la vente inopposable ; que par arrêt du 7 novembre 2012, la Cour d'appel de Rouen a fait droit à la demande principale de la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT en prononçant le sursis à statuer jusqu'à ce que le litige relatif à l'opposabilité de la vente ait reçu une solution définitive ; qu'en décidant néanmoins, pour réparer une omission de statuer du jugement du Tribunal de grande instance d'Évreux du 2 mai 2014, de se fonder sur une demande subsidiaire qui avait été privée de son objet dès lors que l'arrêt du 7 novembre 2012 avait fait droit à la demande principale de la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS QUE, troisièmement, l'étendue de la saisine de la cour d'appel est limitée aux chefs critiqués par les appelants ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses dernières conclusions d'appel, Mme K..., appelante principale, avait exclu des chefs critiqués la question de l'opposabilité de la vente ; que la société BMH INVEST, appelante incidente, demandait l'infirmation du jugement et le rejet des demandes de la société BMH INVEST ; que les conclusions d'appel de la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT ayant été déclarées irrecevables, celle-ci ne formulait plus aucune demande en cause d'appel à l'encontre du jugement du Tribunal de grande instance d'Évreux du 2 mai 2014 ; que la H... a elle-même été mise hors de cause ; que par suite, dès lors que la cour d'appel constatait que le Tribunal de grande instance d'Évreux n'avait pas statué sur la demande en inopposabilité de la vente, ni l'appel limité de Mme K..., ni la demande d'infirmation de la société BMH INVEST, ni les conclusions tendant à la confirmation du jugement déposées par la H... ne la saisissaient d'un chef de demande que la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT n'avait pas formulé à temps sur l'appel de ce jugement ; qu'en décidant malgré tout de réparer cette omission de statuer des premiers juges, la cour d'appel s'est emparée d'office d'une demande qui ne lui était pas soumise ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 4, 463 et 562 du Code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, quatrièmement, et en tout cas, les juges sont tenus de faire respecter et de respecter eux-mêmes le principe de la contradiction ; qu'en s'abstenant de solliciter les observations préalables des parties avant de réparer d'office l'omission de statuer des premiers juges, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a déclaré inopposable à la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT la promesse unilatérale de vente consentie par M. F... à la société BMH INVEST le 15 avril 2005, la levée d'option réalisée par cette société le 14 juin 2007, et la vente déclarée parfaite par arrêt de la Cour d'appel de Rouen du 30 juin 2010 ;

AUX MOTIFS QUE « pour voir déclarer opposable à la société Pierreval Aménagement la vente intervenue entre Madame K... et elle, la société BMH Invest fait valoir que la connaissance par la société Pierreval Aménagement, second acquéreur, de la vente antérieure qui avait été consentie au premier acquéreur fait obstacle, en application du principe "la fraude corrompt tout", à l'application de la règle prévue par les articles 28 et suivants et notamment 30 du décret du 4 janvier 1955 ; que toutefois, la simple connaissance par le vendeur et le second acquéreur de l'existence d'une première vente est sans incidence sur l'application des règles de publicité foncière applicables en cas de concours entre deux titres de propriété et ne constitue pas une concertation frauduleuse, dès lors qu'il n'est pas justifié de la signification avant le 15 juillet 2010 de l'arrêt du 30 juin 2010 ; qu'il résulte de l'article 30 du décret susvisé que "les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même obligation de publicité et publiées
" ; qu'en l'espèce, ni l'acte du 15 avril 2005, contenant promesse unilatérale de vente par M. F... au profit de la société BMII Invest, ni l'acte de levée d'option, ni aucun des actes dont se prévaut cette dernière n'ont été publiés avant que la promesse de vente consentie par Madame K... à la nouvelle société BCP, aux droits de laquelle sont venues successivement la société Newco Investimmo puis la société Pierreval Aménagement, ait été publiée à la conservation des hypothèques de Pont Audemer le 3 mai 2010, l'acte de vente des parcelles litigieuses au profit de la société Pierreval Aménagement en date du 15 juillet 2010 ayant ensuite été publié le 26 juillet 2010 ; que c'est en conséquence à juste titre que le tribunal de grande instance d'Evreux a retenu dans les motifs de la décision entreprise que la vente des mêmes parcelles à la société BMH Invest était inopposable à la société Pierreval Aménagement ; qu'il conviendra d'ajouter au jugement entrepris, qui a omis de statuer de ce chef dans son dispositif » (arrêt, p. 9-10) ;

ALORS QUE, premièrement, lorsque deux acquéreurs successifs de droits portant sur un même immeuble tiennent leur droit d'un même auteur, celui qui publie son titre le premier est préféré au second à moins qu'il ait eu connaissance, au jour de son acquisition, de l'antériorité du titre de l'autre acquéreur ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de ce que la société NEWCO INVESTIMMO ait pu avoir connaissance de l'existence de la vente précédemment conclue avec la société BMH INVEST, la cour d'appel a violé l'article 30, § 1, du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

ALORS QUE, deuxièmement, l'absence de prise en compte de la mauvaise foi de l'inscrivant dans les règles de la publicité foncière porte une atteinte non nécessaire et disproportionné au droit au respect des biens de l'acquéreur concurrent ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de ce que la société PIERREVAL AMÉNAGEMENT avait fait publier ses droits en connaissance de la précédente acquisition de la société BMH INVEST, la cour d'appel a violé l'article 1er du premier protocole à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

ET ALORS QUE, troisièmement, et subsidiairement, la conclusion et la publication d'un acte de vente en connaissance mutuelle par le vendeur et par l'acquéreur de l'existence d'une précédente vente consentie au profit d'un autre acquéreur constitue une collusion frauduleuse faisant exception aux règles de la publicité foncière et à la primauté du titre obtenu en fraude des droits du précédent acquéreurs ; qu'en décidant que cette simple connaissance par le vendeur et le second acquéreur était sans incidence sur les règles de la publicité foncière, la cour d'appel a de toute façon violé l'article 30, § 1, du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU' il a débouté la société BMH INVEST des demandes de dommages-intérêts formulées à titre subsidiaire contre Mme K... ;

AUX MOTIFS QUE « pour voir condamner Madame K..., dans l'hypothèse retenue par la cour où la vente à son profit serait déclarée inopposable à la société Pierreval Aménagement, à lui payer la somme de 279.436,14 euros à titre de dommages et intérêts, la société BMH Invest souligne que, sans le retard imputable au refus de Madame K..., la vente aurait pu être régularisée à son profit en octobre 2007 ; qu'elle invoque les nombreux frais qu'elle a dû engager en pure perte en vue de la réalisation de la vente et de la construction du lotissement qu'elle projetait de commercialiser, ainsi que la plus-value non réalisée ; qu'à cet égard, les premiers juges ont retenu que la cause première du dommage était imputable à Madame K... qui, sommée le 17 mars 2008 de régulariser l'acte authentique de vente ensuite de la levée d'option par la société BMH Invest, s'y était refusée pour ensuite vendre à une autre société à un prix supérieur les parcelles concernées par la promesse de vente consentie par son père, au mépris des droits du bénéficiaire de cette promesse de vente ; que toutefois, il résulte du rapport d'expertise judiciaire de Messieurs I..., J... et N... , dont les conclusions ne sont pas contestées, que les parcelles litigieuses avaient une valeur de 240.000 euros (et non 245.000 comme indiqué par les deux parties concernées) à la date de la levée effective de l'option de vente, de telle sorte que le caractère lésionnaire de la promesse de vente concédée par M. Joseph F... au prix de 74.800 euros est établi en application des dispositions des articles 1674 et suivants du code civil, la différence de 165.200 euros entre ces deux sommes correspondant à plus des sept douzièmes de la valeur du bien ; qu'il s'ensuit que la société BMH Invest aurait pu garder le bien en payant le complément de prix sous la déduction du dixième du prix total ainsi que le prévoit l'article 1681 du code civil, soit 141.200 euros (240 000 - 240 000/10 - 74800) ; qu'il résulte des échanges entre les parties tels que résultant des pièces 50 à 53 communiquées par la société BMH Invest que cette dernière, si elle a manifesté dès le 14 juin 2007, jour de la levée de son option, sa volonté de payer le supplément de prix, déclarant le 6 juillet 2007 réfléchir sur la proposition de Madame K... à hauteur de 435 000 euros sans toutefois avoir donné son accord., n'a jamais fait aucune contre, proposition à sa venderesse ; que la lésion étant en l'espèce de plus des sept douzièmes et en l'absence de proposition correcte de complément du prix de la part de l'acquéreur, il ne peut être reproché à Madame K... d'avoir invoqué le caractère lésionnaire de la vente et d'avoir engagé une action judiciaire en ce sens tout en recherchant un nouvel acquéreur ; que le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a retenu un comportement fautif de Madame K... et la société BMH Invest sera déboutée de ses demandes d'indemnisation de son préjudice faites à l'encontre de cette dernière » (arrêt, p. 11) ;

ALORS QUE, premièrement, dans le cas où l'action en rescision est accueillie, l'acquéreur a le choix ou de rendre la chose en retirant le prix qu'il en a payé, ou de conserver le bien en payant le supplément du juste prix, sous la déduction du dixième du prix total ; que par suite, le vendeur qui revend le bien litigieux au cours de son action en rescision pour lésion prive l'acquéreur de l'exercice de cette faculté de rachat ; qu'en décidant néanmoins que Mme K... n'avait commis aucune faute en revendant les parcelles litigieuses avant l'issue de son action en rescision pour lésion, la cour d'appel a violé les articles 1583, 1611 et 1681 du code civil ;

ALORS QUE, deuxièmement, et subsidiairement, la société BMH INVEST reprochait à Mme K... d'avoir revendu les parcelles litigieuses à la société NEWCO INVESTIMMO sans attendre l'issue de son action en rescision pour lésion ; qu'en décidant que Mme K... n'avait commis aucune faute en agissant en rescision pour lésion tout en recherchant un nouvel acquéreur, cependant que la société BMH INVEST lui reprochait, non pas seulement d'avoir recherché un nouvel acquéreur, mais d'avoir revendu son bien au cours de cette procédure, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale au regard des articles 1583, 1611 et 1681 du code civil ;

ET ALORS QUE, troisièmement, l'acquéreur peut, jusqu'au jour de l'exécution de la décision prononçant la rescision de la vente, exercer sa faculté de rachat de la lésion sur la base de l'évaluation du collège d'expert ; qu'en l'espèce, il était constant que Mme K..., après avoir introduit une action en rescision pour lésion à l'encontre de la société BMH INVEST, avait revendu les parcelles le 15 juillet 2010 à la société NEWCO INVESTIMMO pour un prix de 305.000 euros, cependant que le collège d'expert n'avait rendu son rapport que le 25 mai 2011 en fixant alors le juste prix à la somme de 240.000 euros ; qu'en reprochant néanmoins à la société BMH INVEST de n'avoir fait aucune contre-proposition avant cette date à la demande de Mme K... de réévaluer le prix de vente à la somme de 435.000 euros, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles 1583, 1611 et 1681 du code civil. Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Pierreval aménagement, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement et débouté la société Pierreval Aménagement de ses demandes indemnitaires à l'encontre de la société BMH Invest,

AUX MOTIFS QUE pour condamner la société BMH Invest à payer diverses sommes à la société Pierreval Aménagement en réparation de ses préjudices, les premiers juges ont retenu que l'interruption par cette dernière des travaux de réalisation du lotissement avait été causée par la revendication adressée le 22 septembre 2010 par la société BMH Invest, alors que cette dernière ne pouvait ignorer l'absence de publication de son titre ; qu'ils ont considéré que, dans ces conditions, la société Newco Investimmo ne pouvait qu'interrompre ses travaux, sauf à prendre un risque égal à leur montant ; que toutefois, ainsi que le souligne la société BMH Invest, la société Newco Investimmo, aux droits de laquelle vient la société Pierreval Aménagement, avait entrepris les travaux en parfaite connaissance du risque pris puisque son l'acte d'acquisition des parcelles litigieuses en date du 15 juillet 2010 mentionnait en pages 9 et 10 l'existence de la procédure judiciaire en cours entre Madame K... et la société BMH Invest, précisant que cette dernière avait interjeté appel du jugement ayant constaté la caducité de la promesse de vente du 15 avril 2005 et que l'affaire avait été plaidée le 3 mai 2010 ; que dans ces conditions, le courrier adressé par la société BMH Invest à la société Newco Investimmo le 22 septembre 2010 par lequel elle informait cette dernière de la teneur de l'arrêt rendu, lui précisait qu'elle allait poursuivre l'annulation de la vente du 15 juillet 2010 et solliciter l'indemnisation de son préjudice, ne saurait être considéré comme fautif, étant précisé qu'elle ne lui demandait d'ailleurs pas à la société Newco Investimmo d'interrompre les travaux en cours ; que c'est en conséquence par une décision personnelle prise après un réexamen du risque déjà connu d'elle auparavant que la société Newco Investimmo a donné l'ordre aux entreprises présentes sur le chantier d'interrompre les travaux ; qu'en l'absence de faute caractérisée de la société BMH Invest, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné cette dernière à payer diverses sommes à la société Pierreval Aménagement en réparation de ses préjudices ;

1° ALORS QUE pour retenir la responsabilité de la société BMH Invest à l'égard de la société Pierreval Amenagement, le tribunal avait constaté que celle-ci avait dû interrompre le chantier à la suite d'une revendication de la propriété du terrain qui lui avait été adressée par la société BMH Invest par un courrier du 22 septembre 2010, alors que celle-ci ne pouvait ignorer que son titre n'avait pas été publié et qu'il n'était donc pas opposable aux tiers ; qu'en se bornant à affirmer que ce courrier n'était pas fautif, sans rechercher si la société BMH Invest n'avait pas commis une faute en revendiquant un droit de propriété sur le terrain qu'elle savait pertinemment inopposable à la société Pierreval Amenagement, faute de publication de son titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240, ensemble l'article 472 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE le tribunal avait également relevé que la société Pierreval Amenagement avait été contrainte d'interrompre les travaux, sauf à prendre un risque égal à leur montant, en raison de la revendication faite par la société BMH Invest dans ce courrier du 22 septembre 2010 ; qu'en affirmant que cette interruption des travaux était la conséquence d'une décision personnelle prise après un réexamen du risque, sans rechercher si la société Pierreval Amenagement n'avait pas été maintenue ans l'ignorance de l'arrêt du 30 juin 2010 jusqu'à ce courrier, de telle sorte qu'elle ne pouvait imaginer, lors de la signature de l'acte authentique de vente, que la société BMH Invest pourrait revendiquer la propriété du terrain, et si ce n'était pas ce courrier et la revendication faite par la société BMH Invest qui l'avaient conduite à prendre conscience de ce risque et, en conséquence, à interrompre les travaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240, ensemble l'article 472 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10882
Date de la décision : 15/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 31 août 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 15 mar. 2018, pourvoi n°17-10882


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Foussard et Froger, SCP Gaschignard, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10882
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