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14/03/2018 | FRANCE | N°16-22050

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 mars 2018, 16-22050


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Ace European Group limited que sur le pourvoi incident relevé par les sociétés CP Ships Uk ltd, 35 CPS n° 5 ltd et 35 Canada maritime ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Laboratoire Clarins a donné instruction à la société Galax d'organiser le transport de produits cosmétiques d'une valeur de 131 750,37 USD entre ses établissements d'Amiens et le Canada ; que la société Galax a sous-traité l'organisation du transport m

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Ace European Group limited que sur le pourvoi incident relevé par les sociétés CP Ships Uk ltd, 35 CPS n° 5 ltd et 35 Canada maritime ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Laboratoire Clarins a donné instruction à la société Galax d'organiser le transport de produits cosmétiques d'une valeur de 131 750,37 USD entre ses établissements d'Amiens et le Canada ; que la société Galax a sous-traité l'organisation du transport maritime à la société Galax Seahawk Container Line (la société Galax Seahawk) ; que l'exécution du transport maritime a été confiée à la société Canada maritime et aux sociétés CP Ships Uk ltd et CPS n° 5 ltd (les transporteurs) ; que la société Compagnie nouvelle de manutentions portuaires (la société CNMP) est intervenue en qualité de manutentionnaire ; qu'au cours de la traversée maritime, dans la nuit du 8 au 9 mars 2003, 54 conteneurs sont tombés à la mer à la suite d'un fort coup de vent ayant entraîné la rupture d'une partie de l'arrimage ; que la société Ace European Group limited, venant aux droits de la société Ace Insurance (la société Ace), assureur de la société Laboratoire Clarins, après l'avoir indemnisée de la perte des marchandises à hauteur de 131 750,37 USD, a assigné les sociétés Galax et Galax Seahawk, ainsi que les sociétés 35 Canada maritime, CPS n° 5, CP Ships Uk ltd et CNMP devant un tribunal de commerce en réparation de son préjudice ; que les sociétés Galax, Galax Seahawk et leur assureur, la société Groupama Transport, devenue Helvetia assurances, ont assigné en garantie les transporteurs et le manutentionnaire ;

Sur la recevabilité du pourvoi incident, en ce qu'il est formé par les sociétés 35 Canada maritime et CPS n° 5 ltd, contestée par la défense ;

Vu les articles 31 et 609 du code de procédure civile ;

Attendu que les sociétés Canada maritime et CPS n° 5 ltd sont sans intérêt à critiquer l'arrêt qui les met hors de cause ; que leur pourvoi incident n'est pas recevable ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident formé par la société CP Ships Uk ltd :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner la société CP Ships Uk limited, in solidum avec les commissionnaires et leur assureur, à ne payer que la somme de 8 000 euros, l'arrêt retient que la société Galax n'est pas recherchée à titre personnel mais du fait de ses substitués et peut se prévaloir de la clause limitative de responsabilité stipulant une prise en charge de 8 000 euros par envoi, que la responsabilité des dommages est imputable tant au transporteur maritime qu'au manutentionnaire et qu'aucune faute inexcusable ne peut être imputée aux sociétés Galax ni au transporteur ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse, stipulée dans les conditions générales du contrat liant le commissionnaire de transport et son commettant, n'était invoquée que par les sociétés Galax, Galax Seahawk et Helvetia assurances, tandis que, dans ses conclusions d'appel, la société CP Ships Uk limited, soutenant qu'elle n'était pas concernée directement par l'application ou l'inopposabilité des conditions générales de la société Galax, ne se prévalait pas de la clause limitative du contrat de commission, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois principal et incident :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi incident en tant que formé par les sociétés Canada maritime et CPS n° 5 ltd ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société CP Ships Uk ltd au paiement de la seule somme de 8 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 25 mars 2004 et capitalisation des intérêts par année entière, l'arrêt rendu le 9 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Met hors de cause, sur leurs demandes, les sociétés Compagnie nouvelle de manutentions portuaires, Galax, Galax Seahawk Container Line et Helvetia assurances, dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ;

Condamne la société CP Ships Uk ltd aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande présentée par les sociétés CP Ships Uk ltd, Canada maritime et CPS n° 5 ltd et les condamne à payer à la société Ace European Group limited la somme globale de 3 000 euros, condamne la société Ace European Group limited à payer aux sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line et Helvetia assurances la somme globale de 3 000 euros et à la société Compagnie nouvelle de manutentions portuaires la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Ace European Group limited, demanderesse au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné in solidum les sociétés Galax, Galax Seahawk Containers Line, Helvetia Assurances et CP Ships UK Ltd à ne payer à la société Ace European Group Limited que la somme, en principal, de 8 000 € ;

AUX MOTIFS QUE Sur les responsabilités dans la survenance du sinistre (
) Concernant la société CP Ships UK Ltd, il résulte du rapport d'expertise judiciaire qu'elle a avalisé un plan de chargement qui ne respectait pas la pyramide des poids ; qu'en effet, l'expert note que le travail complexe de suivi des opérations de chargement n'est jamais effectué dans le détail par les équipages qui ne disposent pas du temps et des moyens nécessaires pour le réaliser, mais relève que cependant, les officiers et le second capitaine doivent savoir que les derniers plans devaient être constitués de conteneurs vides, que ce critère était facilement vérifiable à partir du plan prévisionnel ; Que l'expert n'est pas d'accord avec l'affirmation que le rôle du bord se limite à vérifier que le plan de chargement est compatible avec la stabilité et l'assiette du navire, qu'il était extrêmement facile de vérifier la nature des containers placés en quatrième plan sur le pont et qu'un simple coup d'oeil sur le plan prévisionnel permettait de voir que les containers de 23 tonnes n'avaient pas à y être positionnés. L'expert conclut que la perte des conteneurs en pontée situés dans les travées 22 et 34 du navire Canmar Pride dans la nuit du 8 au 9 mars 2003 résulte de conditions météorologiques particulièrement mauvaises associées à un arrimage de ses conteneurs non conforme à la bonne règle. L'étude du plan de chargement montre que non seulement le poids maximal des conteneurs situés au dernier plan était très largement dépassé, ce qui d'ailleurs était également le cas, mais dans une moindre mesure, pour les conteneurs chargés dans les autres ports européens, mais que de surcroît, la règle qui consiste à placer les conteneurs les plus lourds dans les plans inférieurs n'était pas respectée. L'audition des différents intervenants dans les opérations de chargement du navire a permis de mettre en évidence un manque de communication entre les différents services. On constate notamment que le navire n'a pas été rendu destinataire par CNMP du plan final de chargement. De la même manière, le shiplanner n'a pas été rendu destinataire, par le manutentionnaire, du plan prévisionnel et n'a reçu le plan final qu'au moment de l'appareillage du navire. Normalement, les procédures prévoyaient la communication par le manutentionnaire au shiplanner des plans de chargement après chaque modification apportée, ce qui n'a pas été fait. Le positionnement des containers sur le navire a été effectué par le manutentionnaire CNMP, sauf pour ce qui concerne les conteneurs spéciaux dont la place était fixée par le shiplanner avant l'arrivée du navire au Havre. C'est donc CNMP qui a choisi de placer les conteneurs classés hotstow pesant chacun 23 tonnes sur les derniers plans des travées 22 et 34. Le fait que ces conteneurs étaient classés prioritaires au déchargement ne signifiait pas qu'il fallait obligatoirement les placer sur les plans supérieurs de la pontée..... On retiendra toutefois que certaines règles d'arrimage sont communes à tous les navires et toutes les lignes et doivent être appliquées par les professionnels que sont les manutentionnaires. La règle qui consiste à respecter la pyramide des poids en fait partie. Il s'agit d'une notion importante qui d'ailleurs avait été rappelée par l'armateur du Canmar Pride aux intervenants dans les opérations de chargement des navires, par courrier du mois de janvier 2003. Il résulte de ces différents éléments que le manutentionnaire et le transporteur maritime ont commis des fautes qui sont à l'origine de la perte des marchandises ;

ET AUX MOTIFS QUE Sur la responsabilité des sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line et CP Ships (
) l'article L 132-4 du code de commerce énonce que le commissionnaire de transport est garant de l'arrivée des marchandises et effets dans le délai déterminé par la lettre de voiture hors les cas de la force majeure légalement constatés. Les sociétés Galax, en leur qualité de commissionnaire et sous-commissionnaire de transport sont donc responsables du préjudice du fait de leurs substitués. La société Galax objecte néanmoins une clause limitative de responsabilité prévue à l'article 7 de ses conditions générales de vente selon laquelle : La responsabilité de Galax est strictement limitée à celle encourue par ses sous-traitants (transporteurs mandataires, entrepôts et leurs substitués) dans le cadre de l'opération confiée ; Dans tous les cas où la responsabilité de Galax est engagée pour quelque cause et à quelque titre que ce soit, elle est strictement limitée : pour les dommages à la marchandise par suite de pertes et avaries et pour toutes les conséquences pouvant en résulter, à 23 € par kilo, avec un maximum de 750 € par colis quels qu'en soient le poids, la nature et les dimensions, et 8 000 € par envoi. La société Ace European Group Limited fait valoir, d'une part, que cette clause est obscure et ne s'applique qu'à la responsabilité personnelle du commissionnaire et d'autre part, qu'elle lui est inopposable ; Sur le premier point, en stipulant que « dans tous les cas où la responsabilité de Galax est engagée à quelque titre que ce soit, elle est strictement limitée », la clause concernée vise l'ensemble des hypothèses dans lesquelles la responsabilité de Galax est engagée, en ce compris la responsabilité encourue du fait de ses substitués ; des termes clairs et précis de la clause, il résulte que la société Galax répond des faits de ses substitués ; Sur le second point, les conditions générales de vente ne sont applicables que si elles font l'objet d'un accord entre le commissionnaire et le commettant (Cass. com., 20 février 1996). En l'espèce, il résulte des 11 factures versées aux débats datant du 8 janvier 2002 au 20 janvier 2003 que la société Galax était en relation d'affaires constante avec la société Clarins et qu'elle avait nécessairement connaissance des conditions générales de vente figurant au verso des factures du commissionnaire de transport. La société Galax n'est pas recherchée à titre personnel, mais du fait de ses substitués, et peut donc se prévaloir de cette clause limitative de responsabilité stipulant une prise en charge de 8000 € par envoi. C'est pourquoi cette limitation contractuelle de responsabilité est opposable à la compagnie d'assurances de la société Clarins. Aucune faute inexcusable ne peut être imputée aux sociétés Galax alors même qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la responsabilité des dommages est imputable tant au transporteur maritime qu'au manutentionnaire; à cet égard, cette cour, dans un arrêt du 26 janvier 2012 relatif au même sinistre, avait reconnu la responsabilité de la CNMP à hauteur de 60 % du préjudice et celle des sociétés CP Ships à hauteur de 40 %. La société Ace European Group Limited fait valoir que le transporteur maritime a commis une faute inexcusable qui fait perdre au commissionnaire de transport le bénéfice non seulement des limitations du substitué en cause, mais également de ses propres limitations de responsabilité. La faute inexcusable se définit comme celle qui résulte d'un acte ou d'une omission du transporteur qui a eu lieu, soit avec l'intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu'un dommage en résulterait probablement. Sur ce point, l'expert retient que la perte des conteneurs en pontée situés dans les travées 22 et 34 du navire Canmar Pride dans la nuit du 8 au 9 mars 2003 résulte de conditions météorologiques particulièrement mauvaises associées à un arrimage de ses conteneurs non conforme à la bonne règle ; il décrit les manquements commis à ce titre par le transporteur et par le manutentionnaire. S'il résulte des conclusions de l'expert que ces fautes proviennent de négligences et d'imprudences, aucun élément du dossier n'établit qu'elles constituent une faute inexcusable telle que définie ci-dessus ; Il y a lieu par conséquent, réformant le jugement entrepris, de dire que la responsabilité des sociétés Galax et CP Ships UK Ltd dont le principe a été admis précédemment est limitée à 8 000 € ;

1) ALORS QUE le commissionnaire de transport, responsable en raison de la faute commise par ses substitués, est soumis aux limitations légalement prévues et applicables auxdits substitués, toute clause prévoyant une indemnisation inférieure aux plafonds légaux étant dépourvue d'effet à l'égard de son commettant ; qu'en admettant que la société Galax, commissionnaire de transport, puisse opposer à la société Laboratoires Clarins, commettant, et à son assureur subrogé dans ses droits, la société Ace European Group Limited, une clause limitant à 8 000 euros l'indemnisation due notamment en cas de perte de la marchandise, après avoir constaté que la responsabilité du commissionnaire était recherchée du fait de ses substitués et non de son fait personnel, la cour d'appel a violé les articles L. 132-4 à L. 132-6 du code de commerce, ensemble l'article 4, § 5 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979 ;

2) ALORS, subsidiairement, QUE les juges ne peuvent dénaturer les stipulations claires et précises insérées dans les conventions des parties ; qu'en l'espèce, la clause insérée au dos des factures adressées par la société Galax à la société Laboratoires Clarins, intitulée « article 7 : Responsabilité », comportait deux alinéas clairement distincts consacrés respectivement, d'un côté, à la responsabilité du commissionnaire de transport du fait de ses substitués et, de l'autre, à la responsabilité née de son fait personnel, la limitation forfaitaire d'indemnisation à 8 000 euros n'étant prévue que dans l'hypothèse de la faute personnelle du commissionnaire, tandis qu'aucune limitation autre que celle applicable aux substitués en vertu de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, telle qu'amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979 n'était prévue dans l'hypothèse de la responsabilité du commissionnaire du fait de ses substitués ; qu'en jugeant néanmoins que la stipulation limitant l'indemnisation à 8 000 euros concernait l'ensemble des hypothèses dans lesquelles la responsabilité du commissionnaire était engagée, y compris du fait de ses substitués, la cour d'appel l'a dénaturée, en violation de l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3) ALORS, en toute hypothèse, QU'un mauvais arrimage de conteneurs résultant de manquements aux règles élémentaires applicables en la matière, tenant notamment au non-respect de la pyramide des poids et à une insuffisance de communication entre les divers intervenants lors des opérations de chargement, caractérise une faute inexcusable, c'est-à-dire un acte ou une omission du transporteur qui a eu lieu témérairement et avec conscience qu'un dommage en résulterait probablement ; qu'en écartant la faute inexcusable du transporteur après avoir pourtant constaté que l'expert attribuait l'origine de la perte de la marchandise à un arrimage des conteneurs non conforme aux règles en la matière, imputable au manutentionnaire et au transporteur, lequel avait avalisé un plan de chargement qui ne respectait pas la pyramide des poids, alors même que l'armateur du navire avait insisté, auprès des intervenants aux opérations de chargement, sur l'importance de cette règle, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 4, § 5, e), de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, telle qu'amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société CP Ships UK Ltd in solidum avec les sociétés Galax, Galax Seahawk Containers Line, Helvetia Assurances et CP Ships UK à ne payer à la société Ace European Group Limited que la somme, en principal, de 8 000 € ;

AUX MOTIFS QUE Sur la responsabilité des sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line et CP Ships (
) l'article L 132-4 du code de commerce énonce que le commissionnaire de transport est garant de l'arrivée des marchandises et effets dans le délai déterminé par la lettre de voiture hors les cas de la force majeure légalement constatés. Les sociétés Galax, en leur qualité de commissionnaire et sous-commissionnaire de transport sont donc responsables du préjudice du fait de leurs substitués. La société Galax objecte néanmoins une clause limitative de responsabilité prévue à l'article 7 de ses conditions générales de vente selon laquelle : La responsabilité de Galax est strictement limitée à celle encourue par ses sous-traitants (transporteurs mandataires, entrepôts et leurs substitués) dans le cadre de l'opération confiée ; Dans tous les cas où la responsabilité de Galax est engagée pour quelque cause et à quelque titre que ce soit, elle est strictement limitée : pour les dommages à la marchandise par suite de pertes et avaries et pour toutes les conséquences pouvant en résulter, à 23 € par kilo, avec un maximum de 750 € par colis quels qu'en soient le poids, la nature et les dimensions, et 8 000 € par envoi. La société Ace European Group Limited fait valoir, d'une part, que cette clause est obscure et ne s'applique qu'à la responsabilité personnelle du commissionnaire et d'autre part, qu'elle lui est inopposable ; Sur le premier point, en stipulant que « dans tous les cas où la responsabilité de Galax est engagée à quelque titre que ce soit, elle est strictement limitée », la clause concernée vise l'ensemble des hypothèses dans lesquelles la responsabilité de Galax est engagée, en ce compris la responsabilité encourue du fait de ses substitués ; des termes clairs et précis de la clause, il résulte que la société Galax répond des faits de ses substitués ; Sur le second point, les conditions générales de vente ne sont applicables que si elles font l'objet d'un accord entre le commissionnaire et le commettant (Cass. com., 20 février 1996). En l'espèce, il résulte des 11 factures versées aux débats datant du 8 janvier 2002 au 20 janvier 2003 que la société Galax était en relation d'affaires constante avec la société Clarins et qu'elle avait nécessairement connaissance des conditions générales de vente figurant au verso des factures du commissionnaire de transport. La société Galax n'est pas recherchée à titre personnel, mais du fait de ses substitués, et peut donc se prévaloir de cette clause limitative de responsabilité stipulant une prise en charge de 8 000 € par envoi. C'est pourquoi cette limitation contractuelle de responsabilité est opposable à la compagnie d'assurances de la société Clarins. Aucune faute inexcusable ne peut être imputée aux sociétés Galax alors même qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire que la responsabilité des dommages est imputable tant au transporteur maritime qu'au manutentionnaire; à cet égard, cette cour, dans un arrêt du 26 janvier 2012 relatif au même sinistre, avait reconnu la responsabilité de la CNMP à hauteur de 60 % du préjudice et celle des sociétés CP Ships à hauteur de 40 %. La société Ace European Group Limited fait valoir que le transporteur maritime a commis une faute inexcusable qui fait perdre au commissionnaire de transport le bénéfice non seulement des limitations du substitué en cause, mais également de ses propres limitations de responsabilité. La faute inexcusable se définit comme celle qui résulte d'un acte ou d'une omission du transporteur qui a eu lieu, soit avec l'intention de provoquer un dommage, soit témérairement et avec conscience qu'un dommage en résulterait probablement. Sur ce point, l'expert retient que la perte des conteneurs en pontée situés dans les travées 22 et 34 du navire Canmar Pride dans la nuit du 8 au 9 mars 2003 résulte de conditions météorologiques particulièrement mauvaises associées à un arrimage de ses conteneurs non conforme à la bonne règle ; il décrit les manquements commis à ce titre par le transporteur et par le manutentionnaire. S'il résulte des conclusions de l'expert que ces fautes proviennent de négligences et d'imprudences, aucun élément du dossier n'établit qu'elles constituent une faute inexcusable telle que définie ci-dessus ; Il y a lieu par conséquent, réformant le jugement entrepris, de dire que la responsabilité des sociétés Galax et CP Ships UK Ltd dont le principe a été admis précédemment est limitée à 8 000 € ;

1) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans ses écritures d'appel, la société CP Ships (UK) Limited n'a jamais prétendu limiter sa responsabilité par application de la clause limitative de responsabilité invoquée par le commissionnaire, le sous-commissionnaire et son assureur, mais demandait, au contraire, que celle-ci soit écartée comme ne pouvant concerner l'hypothèse où la responsabilité du commissionnaire est recherchée en qualité de garant de ses substitués ; qu'en limitant à la somme de 8 000 euros en principal la condamnation prononcée à l'encontre du transporteur par application d'une clause limitative de responsabilité invoquée par les seules sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line et Helvetia, quand de son côté, la société CP Ships (UK) Limited concluait, au contraire, à la non application de la limitation de responsabilité stipulée par le commissionnaire de transport, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2) ALORS, subsidiairement, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; qu'en limitant la condamnation in solidum à 8 000 euros en principal à l'égard du transporteur sans répondre au moyen développé par la société Ace European Group en cause d'appel, faisant valoir qu'en tout état de cause, à supposer que le commissionnaire de transport puisse valablement limiter sa responsabilité à l'égard du donneur d'ordres et de son assureur subrogé dans ses droits, le transporteur, à l'encontre duquel le donneur d'ordres peut exercer une action directe, ne pouvait en aucun cas se prévaloir de la clause litigieuse qui lui était totalement étrangère (conclusions d'appel de l'exposante signifiées le 16 octobre 2015, p. 11), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'effet relatif des conventions interdit au transporteur d'invoquer à son profit les éventuelles clauses limitatives de responsabilité insérées dans des factures adressées au donneur d'ordres par le commissionnaire de transport ; qu'en limitant à la somme de 8 000 euros en principal la condamnation prononcée à l'encontre du transporteur par application d'une clause limitative de responsabilité insérée dans les factures adressées par le commissionnaire de transport au donneur d'ordres, après avoir constaté la faute tant du manutentionnaire que du transporteur, tiers au contrat liant le donneur d'ordres au commissionnaire, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif impropre à justifier la limitation de l'indemnisation due par le transporteur au donneur d'ordres ayant subi la perte de la marchandise, et donc à son assureur subrogé dans ses droits, a violé l'article 1165 du code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l'article 4, § 5 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, telle qu'amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979. Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés 35 Canada maritime, 35 CPS n° 5 limited et CP Ships Uk limited, demanderesses au pourvoi incident

LE MOYEN reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué,

D'AVOIR, en confirmant le jugement entrepris sur le principe de la condamnation solidaire des sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line, Helvetia assurances et CP Ships UK Ltd. au profit de la société Ace European Group Ltd., reçu cette dernière en ses demandes à l'encontre des sociétés Galax, Seahawk Container Line, Helvetia Assurance et CP Ships UK Ltd.,

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la recevabilité de la demande de la compagnie d'assurances Ace European Group Limited à l'encontre des commissionnaires de transport et des transporteurs maritimes, au soutien de leur appel les sociétés appelantes exposent que faute de droits de l'assuré nés du dommage l'assureur ne saurait se prévaloir d'une quelconque subrogation ; que si l'assureur du vendeur ex works l'indemnise il fait un geste commercial mais non un paiement conforme aux conditions de la garantie de sorte que la subrogation est exclue ; que la société laboratoire Clarins était liée par incoterm ex works à la société Clarins North América et qu'elle n'avait donc aucun droit sur la marchandise à transmettre à son assureur ; que la société CP Ships Ltd reprend à son compte cette argumentation estimant que si la société Clarins France n'avait aucun droit sur la marchandise en tant que vendeur ex works déchargé de toute obligation quant au transport de celle-ci, elle n'avait aucun droit en échange du paiement de l'indemnité d'assurance intervenue à titre commercial; que l'action introduite par la société Ace en qualité de subrogée dans les droits de Clarins France est nécessairement irrecevable ; que la société Ace European Limited réplique que la société Clarine France a vendu ex works à la société Clarins North America divers produits cosmétiques selon factures versées à la procédure ; qu'il ressort des avoirs que Clarins France a établi au profit de Clarins North America que la première était bien en risque au moment du sinistre ; que ces avoirs ne sont pas dépourvus de portée juridique mais qu'ils constituent des documents comptables ayant valeur probante et démontrant que la société Clarins France subit in fine un préjudice du fait de la perte des marchandises ; qu'au surplus le transporteur n'est pas autorisé à invoquer les termes du contrat de vente qui soustend l'opération de transport ; que la société Clarins France a donc intérêt à agir en tant que chargeur réel des marchandises titulaire d'un droit d'action contre les responsables du sinistre ; qu'elle rapporte la preuve du règlement de l'indemnité d'assurance au titre du risque de dommages ou pertes en couts de transport; qu'elle se trouve donc subrogée dans les droits et actions de la société Clarins France ; qu'en application de la convention de Bruxelles amendée le transporteur maritime est présumé responsable de toute perte ou dommages causés aux marchandises transportées sauf à démontrer l'existence d'un des cas exceptés et le lien de causalité entre ce cas excepté et les dommages subis ; qu'en l'espèce la société Canada Maritime et les sociétés CP Ships sont défaillantes à établir l'existence de ce cas excepté ; que l'article L 121-12 du code des assurances prévoit que l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur ; que le contrat de vente et le contrat de transport étant indépendants, les commissionnaires de transport et les transporteurs ne peuvent se prévaloir des effets de la vente quant aux droits et obligations du vendeur, pour dénier au chargeur des marchandises, le droit d'agir contre eux ( Cass com 30 octobre 2012) ; que, s'agissant de l'application du contrat de transport, l'action en responsabilité du chargeur pour perte ou avarie contre le transporteur est recevable dès lors que le chargeur est seul à avoir supporté le préjudice résultant du transport (Cass. Com 22 décembre 1989) ; qu'en l'espèce, la société Clarins France justifie avoir dédommagé sa cliente, la société Clarins North America, par des avoirs d'un montant total de 131 750,37 dollars le 4 avril 2003 sous forme de virements ; qu'il est ainsi démontré qu'elle est seule à avoir supporté le préjudice résultant du transport ; que la société Ace European Limited produit aux débats la police d'assurance conclue avec la société Clarins France ainsi que le justificatif du paiement, le 23 mars 2004, de l'indemnité d'assurance ; qu'elle est fondée en conséquence à opposer aux appelantes, qui invoquent une disposition particulière d'un contrat auquel elles ne sont pas parties, l'indépendance entre les contrats de vente et de transport, et à se prévaloir de la règle de l'effet relatif des contrats posée par l'article 1165 du code civil ; que, compte tenu de ces éléments la société Ace European Group Limited qui justifie être subrogée dans les droits de son assurée sera déclarée recevable en son action contre les sociétés Galax, Galax Seahawk Container Line et Helvetia assurances et CP Ships UK Ltd » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les sociétés Galax et CP SHIPS opposent l'irrecevabilité de la société Clarins France dans la mesure où cette dernière a vendu la marchandise litigieuse sur la base « ex works » Amiens et qu'elle ne serait plus propriétaire de la marchandise au moment des faits litigieux ; que cependant le contrat de vente et le contrat de transport sont indépendants et qu'en l'espèce le litige concerne les effets du contrat de transport formé entre Clarins France et Galax d'une part, et Galax et CP Ships d'autre part ; que la société Clarins France a donné des instructions d'expédition à la société Galax qui a établi un connaissement avec pour chargeur : Clarins North America et pour destinataire : Clarins Canada, que cette dernière s'est désistée de tous ses droits et actions en faveur de Clarins France par lettre du 11 décembre 2003 ; que la société Clarins France justifie avoir dédommagé son client Clarins North America en ayant établi des avoirs pour la somme de 131 750, 37 US dollars en date du 4 avril 2003, annulant les factures de vente du même montant; que la société Ace, assureur de la société Clarins France, produit la police d'assurance n° 9.817.655/01.004 couvrant notamment les marchandises transportées par mer, ainsi qu'une attestation datée du 8 décembre 2011 confirmant qu'elle a réglé la somme de 131 750,37US dollars à la société des Laboratoires Clarins France en date du 23 mars 2004, avec les références du règlement, du compte bancaire et du litige du navire Canmar Pride ; que conformément aux termes de l'article L. 172-19 du code des assurances sur la subrogation légale, « l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leurs faits, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur » ; que le tribunal jugera que la société Ace bénéficie de la subrogation légale de la société Clarins France et est recevable en son action contre les sociétés Galax, Seahawk Container Line, Groupama transport » ;

1°/ALORS, d'une part, QUE l'assureur qui verse l'indemnité d'assurance à son assuré sans y être tenu en exécution de la police d'assurance n'est pas légalement subrogé dans ses droits ; et que, dans une vente conclue départ usine (ex works), le vendeur n'a pas la qualité d'expéditeur ; que, dans ses écritures d'appel, la société CP Ships a fait valoir que la société Clarins France, suivant les factures versées au débat, a vendu les marchandises ex works, ce dont il résultait qu'elle n'assumait pas les risques du transport et que la société Ace l'avait indemnisée sans y être tenue et donc à titre commercial ; qu'en refusant cependant de se prononcer sur cette circonstance, au seul prétexte de l'indépendance des contrats de transport et de vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du code des assurances ;

2°/ALORS, d'autre part et en toute hypothèse, QUE, dans ses écritures d'appel (concl., p. 4-5), la société CP Ships a fait valoir que le connaissement désigne la société Clarins North America comme chargeur et la société Clarins Canada comme destinataire, et non pas la société Clarins France, dont la qualité d'expéditeur réel n'était pas rapportée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans avoir égard aux mentions du connaissement, invoquées par l'exposante, pour apprécier la qualité à agir à l'encontre du transporteur maritime de la société Clarins France, dans les droits de laquelle la société Ace, assureur, se prétendait subrogée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-22050
Date de la décision : 14/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 09 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 mar. 2018, pourvoi n°16-22050


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boullez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22050
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