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07/03/2018 | FRANCE | N°16-21810

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2018, 16-21810


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2016), que M. Y... a été engagé le 5 janvier 2009 en qualité de directeur des ventes France par la société Dresser produits industriels ; que licencié pour insuffisance professionnelle le 13 avril 2011, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens, ci-après annexés :

Attendu que, sous le couvert des griefs de violation d

e la loi et de manque de base légale, les moyens critiquent une omission de statu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2016), que M. Y... a été engagé le 5 janvier 2009 en qualité de directeur des ventes France par la société Dresser produits industriels ; que licencié pour insuffisance professionnelle le 13 avril 2011, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens, ci-après annexés :

Attendu que, sous le couvert des griefs de violation de la loi et de manque de base légale, les moyens critiquent une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile ; qu'ils ne sont pas recevables ;

Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :

Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la cinquième branche, a estimé, en écartant par là-même toute autre cause de licenciement, que l'insuffisance professionnelle du salarié était caractérisée et décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Yann Y... de ses demandes de rappels d'heures supplémentaires et congés payés afférents, de dommages intérêts pour privation des repos compensateurs obligatoires et pour exécution déloyale et fautive du contrat de travail

AUX MOTIFS QUE en cause d'appel, M. Y... estime avoir été abusivement soumis à une convention de forfait en jours insuffisante au regard des exigences légales et devant être privée d'effet, ouvrant droit au paiement d'heures supplémentaires effectuées, à la réparation du préjudice subi pour violation des repos compensateurs ; qu'il réclame également une indemnité pour travail dissimulé, le travail dissimulé résultant du défaut de convention individuelle de forfait en jours écrite, ainsi que des dommages intérêts en réparation des conditions de travail non conformes et contraires aux obligations légales ; que le contrat de travail prévoit que « de par sa fonction », M. Y... sera soumis à un « forfait cadre sans référence horaire » et que ainsi que le fait valoir la société Dresser en se référant aux dispositions de l'article 15 de l'accord national du 28 juillet 1998, cette mention ne renvoie pas à l'existence d'un cadre au forfait jour mais à la qualité de cadre dirigeant ; que l'article 15 de cet accord reprend la définition du cadre dirigeant énoncée par l'article L. 3111-2 du code du travail en exigeant, pour avoir cette qualité, à la fois des responsabilités impliquant une indépendance du salarié dans l'organisation de son emploi du temps, l'habilitation à prendre des décisions de manière largement autonome et une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés pratiqués dans l'entreprise ou l'établissement ; qu'il résulte des pièces produites que M. Y..., qui exerçait les fonctions de Directeur des ventes France et avait été nommé membre du Comité de Direction par décision de l'associé unique du 20 janvier 2009, remplissait l'ensemble de ces conditions ; qu'en application du même article L. 3111-2 du code du travail et comme le rappelle l'accord précité, les cadres dirigeants sont exclus des dispositions sur la durée du travail ; que compte tenu de ces éléments M. Y... ne peut prétendre au régime des heures supplémentaires et repos compensateurs ; qu'il n'est pas démontré de faute de la société Dresser dans l'organisation de l'emploi du temps du salarié ni de préjudice consécutif subi par celui-ci ; qu'en conséquence M. Y... sera débouté de ses demandes relatives aux rappels de salaire au titre des heures supplémentaires, aux repos compensateurs, aux congés payés et dommages intérêts afférents, à la dissimulation d'emploi salarié et à l'exécution déloyale et fautive du contrat de travail

1) ALORS QUE les cadres dirigeants exclus du bénéfice de la législation sur la durée du travail, les jours fériés et le repos hebdomadaire sont « les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome, et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ou leur établissement » ; que ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie, les cadres participant à la direction de l'entreprise ; qu'en attribuant à M. Y... cette qualité alors qu'il résultait de ses énonciations, de même que de celles du jugement confirmé, d'une part que M. Y... « n'était pas en charge de la politique générale liée à la réorganisation de l'entreprise », et d'autre part qu'il était soumis à des «instructions » de son supérieur hiérarchique quant au nombre de visites hebdomadaires à effectuer auprès des clients, devait fournir régulièrement des rapports sur la réalisation de ces visites et qu'il avait fait l'objet de plusieurs rappels à l'ordre sur ce point, ce dont il découlait que le salarié ne participait pas à la direction de l'entreprise, pas plus qu'il n'était libre de l'organisation de son emploi du temps la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3111-2 du code du travail, ensemble l'article 15 de l'accord national du 28 juillet 1998 sur l'organisation du travail dans la métallurgie

2) ET ALORS en toute hypothèse QU'en se bornant à énoncer, pour retenir cette qualité, que M. Y... exerçait les fonctions de Directeur des ventes France et avait été nommé membre du Comité de Direction sans caractériser sa participation effective à la direction de l'entreprise et sans rechercher s'il était habilité à prendre des décisions de manière largement autonome, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3111-2 du Code du travail et 15 de l'accord national du 28 juillet 1998 ;

3) ET ALORS de plus QU'aux termes de l'article L. 3111-2 du code du travail la qualité de cadre dirigeant ne peut être attribuée qu'au salariés se trouvant au sommet de la hiérarchie des rémunérations et jouissant d'un grand degré d'indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, l'article 15-1 de l'accord du 28 juillet 1998 exigeant que sa rémunération soit comprise dans le dernier quartile des rémunérations pratiquées dans l'entreprise ou l'établissement ; Qu'en se contentant d'énoncer que M. Y... remplissant l'ensemble des conditions prévues par ces textes sans préciser quel était le niveau de sa rémunération par rapport aux autres salariés de l'entreprise ni vérifier que celle-ci se situait dans le dernier quartile des rémunérations qui y étaient pratiquées et sans davantage s'assurer que le salarié jouissait d'un grand degré d'autonomie dans l'organisation de son emploi du temps, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 3111-2 du code du travail et 15-1 de l'accord national du 28 juillet 1998 sur l'organisation du travail dans la métallurgie

4) ET ALORS en tout état de cause QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; Qu'en retenant « qu'il résulte des pièces produites » que M. Y... remplissait l'ensemble des conditions posées par l'article L. 3111-2 à la reconnaissance de la qualité de cadre dirigeant exclu du bénéfice de la législation sur la durée du travail, sans analyser ne serait-ce que sommairement et sans même viser les éléments auxquels elle entendait se référer, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et statué en violation de l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. Y... de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé

AUX MOTIFS PRÉCITÉS ET AU MOTIF QUE la preuve des éléments constitutifs, tant matériel qu'intentionnel, du délit de travail dissimulé, n'est pas rapportée par le salarié

ALORS QUE la cassation à intervenir, sur le premier moyen, du chef de dispositif de l'arrêt ayant débouté M. Y... de sa demande au titre des heures supplémentaires ne pourra qu'entraîner, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif relatif au travail dissimulé, la prétendue qualité de cadre dirigeant de M. Y... ayant seule conduit la Cour d'appel à estimer que les éléments matériel et intentionnel du délit de dissimulation d'emploi n'était pas caractérisés, en sorte que la censure devra être prononcée en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. Y... de sa demande de dommages intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS PRÉCITÉS ET AU MOTIF QU'il n'est pas démontré de faute de la société Dresser dans l'organisation de l'emploi du temps de M. Y... ni de préjudice consécutif subi par celui-ci ;

1) ALORS QUE la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur le premier moyen entraînera également celle du chef de dispositif par lequel la Cour d'appel a débouté M. Y... de sa demande de dommages intérêts pour violation des obligations légales en matière de protection de la santé du salarié, en réparation du préjudice résultant de cette exécution fautive et déloyale du contrat de travail, avec lequel il est uni par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile

2) ET ALORS QUE M. Y... faisait valoir, dans ses écritures d'appel, qu'il avait subi des conditions de travail non conformes aux dispositions légales relatives à la protection de la santé des salariés, notamment en ce que l'employeur ne respectait ni les règles relatives aux repos quotidien et hebdomadaire, ni celles afférentes aux congés payés ; que la Cour d'appel ne pouvait, pour le débouter de sa demande du préjudice résultant de l'exécution fautive et déloyale du contrat de travail, se contenter de retenir qu'il n'était pas démontré de faute de la société Dresser dans l'organisation de l'emploi du temps du salarié sans déterminer, comme elle y était invitée, quel était le volume de travail imposé à M. Y... et si cette charge, qui l'obligeait même à travailler pendant ses congés, n'était pas excessive et de nature à caractériser une faute de l'employeur dans l'exécution de ses obligations contractuelles ; Qu'en s'abstenant de procéder à ces constatations nécessaires, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. Y... de ses demandes de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et prononcé dans des conditions vexatoires

AUX MOTIFS QUE dans un premier grief, la société Dresser reproche à M. Y... son manque d'implication et de « leadership » ; qu'à cet égard, le reproche lié à la dégradation progressive des relations avec le personnel est incertain ; qu'en effet les élus du personnel avaient déjà exprimé leur insatisfaction avant l'arrivée de M. Y... et que celui-ci n'était pas en charge de la politique générale liée à la réorganisation de l'entreprise ; que par contre la société Dresser établit le manquement lié au remplacement de M. Z... ; qu'ainsi, le départ à la retraite de M. Z... était fixé le 29 avril 2011 ; que son remplacement, avec transmission de ses compétences, au poste de responsable commercial pièces de rechange EDF était essentiel compte tenu de l'importance du client EDF pour l'entreprise ; qu'il revenait au Directeur des ventes de gérer fonctionnellement l'activité du service des pièces de rechange en lien direct avec le service des ventes ; qu'au mois de février 2011 le transfert du savoir-faire de M. Z... n'était pas effectif comme il ressort du courriel adressé par M. Y... à son supérieur hiérarchique pour lui proposer de recourir à un coûteux « package financier » afin de convaincre le salarié de décaler son départ ; qu'il est avéré que M. Z... a finalement quitté l'entreprise sans transmettre ses compétences ; que le défaut d'anticipation et de supervision de M. Y... a aussi placé l'entreprise dans la nécessité de faire seconder M. A..., qui a succédé à M. Z... dans ses fonctions, par M. B... ; que s'agissant de l'absence d'engagement dans les priorités fixées, il ressort des éléments produits une insuffisance du nombre de visites réalisées par M. Y... et les équipes dont il avait la responsabilité auprès de clients et ce en dépit des rappels et des demandes effectués par M. C..., notamment dans des courriels des 12 et 29 octobre 2010 ; que l'absence de visite ou des visites insuffisantes par rapport aux objectifs assignés ont également été constatées le 7 novembre et au cours de la 46ème semaine de 2010 ; que malgré de nouveaux rappels, cette situation a perduré en décembre 2010 ; qu'au mois de février 2011, M. C... a fait un nouveau rappel mais qu'un seul des vendeurs de l'équipe a atteint les objectifs de visites au cours de ce mois ; qu'il s'avère que les instructions réitérées à maintes reprises pour rappeler qu'il fallait accomplir des visites et trouver des opportunités commerciales ont été mises en échec ; que le non respect des règles internes relatives à la passation des commandes se rapporte au défaut de conformité à la politique de l'entreprise ; que ce grief est avéré en ce qui concerne une commande passée avec la société EDF en septembre 2010 pour un montant de près de 650 000 euros, devant être livrée en mars 2011 et intégrée dans les comptes en décembre 2010, sans avoir été préalablement validée par la réception de l'un des documents exigés par les règles de l'entreprise ; que l'appelant ne peut valablement invoquer la règle « non bis in idem », le courrier qui lui avait été adressé à ce sujet n'étant pas constitutif d'un avertissement ; que ces griefs conduisent à considérer que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera confirmé de ce chef ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté M. Y... de ses demandes formées au titre d'un préjudice moral et d'un licenciement vexatoire alors que l'appelant n'établit ni l'existence d'une faute ou d'une mesure vexatoire de la part de l'employeur ni l'existence d'un préjudice particulier en relation causale

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' il est reproché au salarié un défaut d'anticipation pour organiser la succession du Responsable Commercial pièces de Rechange EDF, M. Z... dont le départ à la retraite était connu depuis le mois de janvier 2009 ; l'employeur fait valoir que M. Z... occupait ses fonctions depuis le 8 mai 1978, de sorte qu'il avait acquis une grande expérience auprès de ce client important, EDF, et qu'il était essentiel pour la société de le conserver après le départ de M. Z... ; qu'ainsi le recrutement d'un remplaçant, mais également le transfert de compétences devaient être largement anticipés par rapport à la date de départ de M. Z... fixé au 29 avril 2011 ; il est établi au regard de la fiche de poste de M. Y... et de l'organigramme de la société que ce dernier était en lien direct avec le service des Ventes ; M. Y... prétend qu'il s'est saisi de ce dossier en mars 2010, date à laquelle il aurait envisagé de procéder au remplacement de M. Z... par M. A... qui occupait déjà les fonctions de coordinateur devis pièces de rechange et saisie de commandes sous la supervision de M. Z... ; qu'un avenant en date du 1er juin 2010 a été régularisé afin qu'il penne ses fonctions à compter du 1er octobre 2010 et notamment celle e Chef de groupe pièces de rechange ; toutefois, et bien que le successeur soit désigné, le salarié a été licencié pour ne pas avoir assuré à temps le transfert du savoir-faire de M. Z..., ainsi qu'il le reconnaît lui même dans un email du 22 février 2011, soit bien après que M. rivière ait été installé dans ses nouvelles fonctions ; la gravité de cette situation n'était pas ignorée de M. Y... puisque ce dernier proposait dans cet email du 22 février 2011 adressé à M. C... que M. Z... décale son départ à la retraite et transmette lui-même son savoir-faire en lui proposant un « package financier attractif » ; il résulte de ce qui précède que M. Y... a de toute évidence manqué à ses obligations quant au remplacement de M. Z... et n'a pas pris la pleine mesure de la situation et ne l'a pas supervisée de manière satisfaisante au regard de ce que pouvait attendre son employeur ; qu' il est reproché à M. Y... un nombre insuffisant de visites auprès de ses clients alors que dès la conclusion de son contrat de travail, il était informé de l'importance et de la nécessité de devoir réaliser fréquemment les visites auprès de ses clients ainsi que cela ressort de sa fiche de poste ; l'employeur produit à cet égard des échanges d'emails entre M. Y... et M. C..., notamment les 12 et 15 octobre 2010 faisant état de la nécessité de passer davantage de temps en clientèle ou demandant à M. Y... dans des échanges d'emails des 26 et 29 octobre 2010, le nombre de visites qu'il avait réalisées avec son équipe au cours de la semaine avec le nom des clients et les résultats obtenus ; un rappel était encore fait par M. C... sur la nécessité pour le salarié d'augmenter le nombre de visites auprès des clients par ses emails des 4 et 7 novembre 2010 ; or, il apparaît au vu du rapport des visites hebdomadaires adressé par M. Y... le 22 novembre 2010, que sur les 26 visites mentionnées pour la semaine 46, ce dernier n'a effectué qu'une seule visite ; par ailleurs, il ne se serait pas assuré que les 12 commerciaux composant son équipe effectuaient des visites clients puisqu'au vu du rapport précité, seulement 9 commerciaux sont mentionnés ; le Conseil constate que M. C... une nouvelle fois a rappelé à M. Y... la nécessité d'augmenter les visites pour assurer les ventes et lui a fait observer que les commerciaux ne passaient pas assez de temps de visites chez les clients (email du 22 novembre et 17 décembre et 20 décembre 2010) ; de nombreux emails établissent ainsi les difficultés rencontrées par le supérieur hiérarchique de M. Y... pour obtenir de ce dernier qu'il remplisse ses objectifs au regard des visites que la Direction considérait devoir être faites en considération des objectifs à réaliser ; M. Y... ne saurait se retrancher derrière une situation économique difficile alors qu'en sa qualité de Directeur des ventes, il a nécessairement pour fonction de dynamiser la clientèle et de tout mettre en oeuvre pour augmenter le volume des ventes, ce qui implique des visites fréquentes, alors qu'au vu des éléments fournis, il apparaît que cela n'a pas été le cas malgré les demandes répétées de sa hiérarchie ; qu'il résulte des documents versés aux débats que les règles internes relatives aux commandes n'ont pas été respectées par M. Y... en ce qui concerne une commande importante de matériel de 650 000 € passée avec le client EDF qui devait être livrée en mars 2011 mais n'avait pas été formellement passée et enregistrée faussant ainsi le prévisionnel établi sur une base comptable erronée ; sans qu'il soit nécessaire d'examiner plus avant les autres motifs de licenciement, le Conseil retient que les motifs susvisés justifient le licenciement de M. Y... pour cause réelle et sérieuse ; que le conseil constate que M. Y... ne rapporte pas la preuve des mesures vexatoires qu'il dit avoir subies.

ALORS QUE s'agissant du manquement lié au remplacement de M. Z..., invoqué par l'employeur pour justifier son licenciement et consistant en un prétendu défaut d'anticipation, 1) QUE M. Y... faisait pertinemment valoir devant la Cour d'appel que le transfert des compétences de ce salarié vers son successeur, dont les juges du fond ont constaté la désignation effective dès le mois de juin 2011, s'était avéré impossible avant le départ en retraite de M. Z... en l'état du refus de ce dernier, gravement fautif mais non sanctionné par l'employeur, de transmettre son savoir-faire sans le versement d'une contrepartie financière que la société DPI avait refusé de lui accorder ; qu'en jugeant fondé le grief ainsi formulé, sans rechercher comme elle y était invitée si l'absence de transmission des compétences de M. Z... n'était pas imputable à la faute de ce salarié, qui a pris soin d'effacer tout son travail avant de quitter l'entreprise, et à l'inertie de l'employeur qui, informé de la situation n'avait pris aucune mesure pour y remédier, ce qui était de nature à écarter le défaut d'anticipation reproché à M. Y..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1232-1 du code du travail ;

2) QUE de PLUS que le salarié soulignait également, dans ses écritures à hauteur d'appel, que « la gravité de la situation » entraînée par le départ à la retraite de M. Z... et relevée par les premiers juges, n'était que la conséquence de l'incurie de l'employeur qui avait confié, dès 1978, la charge du client EDF au seul M. Z... qui avait dès lors acquis le monopole de la gestion du client le plus important de la société et permis à ce dernier d'être en position de négocier le transfert de son savoir-faire et de refuser d'effectuer ce transfert face au refus de la société DPI d'accéder à ses exigences ; qu'en ne recherchant pas si le manquement reproché à M. Y..., qui n'avait intégré la société qu'en 2009, ne résultait pas du comportement de l'employeur qui s'est lui-même placé, très antérieurement, dans une situation qui a fait obstacle au transfert du savoir-faire de M. Z... avant son départ en retraite, la Cour d'appel a encore privé sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé;

ALORS de surcroît sur l'absence d'engagement dans les priorités fixées, 3) QUE l'insuffisance professionnelle résultant du défaut de réalisation des objectifs assignés par l'employeur ne constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement que si ces objectifs sont réalisables et compatibles avec la situation du marché ; Qu'à cet égard, M. Y..., qui ne contestait nullement que l'organisation de visites fréquentes auprès de la clientèle par son équipe puisse relever de ses fonctions, faisait valoir que l'objectif de 7 visites hebdomadaires était irréalisable compte tenu de la situation économique obérée ; qu'en se bornant, pour dire fondé le grief tiré du nombre insuffisant de visites effectuées auprès des clients, à retenir que M. Y... ne pouvait se retrancher derrière une situation économique difficile alors qu'en sa qualité de directeur des ventes il lui incombait de tout mettre en oeuvre pour augmenter le volume des ventes, ce qui impliquait des visites fréquentes, sans rechercher si, comme le soutenait expressément le salarié, le contexte économique dans lequel se trouvait l'entreprise, sur lequel il n'avait aucune maîtrise, ne lui rendait pas impossible la réalisation de l'objectif de 7 visites hebdomadaires fixé par l'employeur à son équipe, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1232-1 du code du travail ;

4) QUE le salarié exposait, dans ses conclusions devant la Cour d'appel, qu'un salarié ayant son niveau de responsabilités et sa charge de travail ne pouvait raisonnablement être soumis aux mêmes objectifs quantitatifs de visites auprès de la clientèle que le reste de son équipe et doive passer, comme l'exigeait l'employeur des commerciaux, « 70 % de son temps à l'extérieur de l'établissement » ; qu'en estimant fondé le grief tiré du nombre insuffisant de visites effectuées auprès des clients sans répondre à ce moyen déterminant des écritures du salarié, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS sur le non respect des règles internes relatives à la passation des marchés,

5) QU'un même manquement ne peut donner lieu à deux sanctions ; Que la Cour d'appel, devant laquelle était invoquée la violation du principe « non bis in idem », l'a écartée au seul motif que le courriel qui avait été précédemment adressé au salarié au sujet du non-respect des règles internes relatives à la passation de commandes n'était pas constitutif d'un avertissement ; qu'en statuant ainsi quand un courriel, qualifié par l'employeur de rappel à l'ordre, reprochant au salarié de ne pas respecter les procédures internes à l'entreprise et lui enjoignant de se soumettre à ces règles, constitue une sanction disciplinaire interdisant à l'employeur de sanctionner le même fait par un licenciement, la Cour d'appel a violé l'article L. 1331-1 du code du travail ensemble le principe « non bis in idem »;

6) QUE par ailleurs M. Y... soutenait que ce grief disciplinaire, qui concernait des faits dont l'employeur avait eu connaissance au plus tard au mois d'octobre 2010, date à laquelle il lui avait adressé un courriel les lui reprochant, était nécessairement prescrits lors de l'engagement de la procédure de licenciement au mois d'avril 2011 ; qu'en laissant sans réponse ce chef péremptoire des écritures du salarié, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

7) ET ALORS en toute hypothèse QU'il incombe au juge de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; que M. Y... soutenait que le véritable motif de son licenciement était autre que celui invoqué par son employeur, en l'état des réorganisations successives de la société, initiées par l'employeur dès 2009 et s'étant poursuivies après son licenciement, lequel n'a pas été suivi de son remplacement ; qu'en se bornant à dire établi le manquement reproché au salarié, la cour d'appel qui n'a pas recherché comme elle y était invitée si la cause véritable du licenciement n'était de nature économique, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les articles L.1232-1 et L.1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-21810
Date de la décision : 07/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 09 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2018, pourvoi n°16-21810


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.21810
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