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01/03/2018 | FRANCE | N°17-10368

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 01 mars 2018, 17-10368


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa troisième branche :

Vu les articles 145, 493 et 875 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se plaignant d'actes de concurrence déloyale commis par les sociétés LM Informatique et LM Le Monde, la société Partesys a saisi le président d'un tribunal de commerce à fin de voir désigner un huissier de justice pour effectuer diverses mesures sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; que la requête ayant été acc

ueillie, la société Partesys, devenue la société Syxperiane, a saisi un juge des ré...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa troisième branche :

Vu les articles 145, 493 et 875 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se plaignant d'actes de concurrence déloyale commis par les sociétés LM Informatique et LM Le Monde, la société Partesys a saisi le président d'un tribunal de commerce à fin de voir désigner un huissier de justice pour effectuer diverses mesures sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile ; que la requête ayant été accueillie, la société Partesys, devenue la société Syxperiane, a saisi un juge des référés pour obtenir la rétractation de l'ordonnance ;

Attendu que pour infirmer la décision ayant rétracté l'ordonnance rendue sur requête, la cour d'appel retient que la nécessité d'agir de façon non contradictoire est suffisamment établie par le « caractère volatile » des informations enregistrées auxquelles la société Partesys souhaitait accéder et au risque manifeste de dépérissement des preuves qui constituaient le soutien nécessaire de l'action envisagée, que tant la requête que l'ordonnance, qui visent respectivement les articles 812 du code de procédure civile, et 493 du code de procédure civile, ont nécessairement déduit des éléments présentés, un risque évident de déperdition des preuves ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des productions que ni la requête, ni l'ordonnance rendue ne comportaient de motifs sur les circonstances justifiant qu'il soit dérogé au principe de la contradiction, lesquelles ne pouvaient se déduire d'un simple visa des articles 493 et 812 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rétracte l'ordonnance sur requête du 10 avril 2014 ;

Rejette l'ordonnance ;

Condamne la société Syxperiane aux dépens exposés devant les juges du fond et devant la Cour de cassation ;

Rejette les demandes formées devant la cour d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Syxperiane, la condamne à payer aux sociétés LM Informatique et LM Family ainsi qu'à M. X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Z..., avocat aux Conseils, pour les sociétés LMI Solutions et LM Family et M. X....

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 10 avril 2014 ;

AUX MOTIFS QUE la requête de la société Partesys, étant fondée sur les dispositions des articles 812 et 145 du code de procédure civile, il lui appartient de démontrer qu'elle avait un intérêt légitime à solliciter une mesure de saisie dans les ordinateurs des sociétés LM Le Monde et LM Informatique et de M. X..., des fichiers clients de la société UBI, des facturations émises aux clients de la société UBI, des correspondance électroniques établissant les actes de concurrence déloyale par détournements de commandes, débauchage de salariés, détournements de fichiers clients, et que cette mesure devait être obtenue hors débat contradictoire ; que la société Partesys a fait valoir devant le juge des requêtes que la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg a fait droit à sa demande de reprise de la société UBI et écarté les offres de reprises de la société LM Informatique, société créée et dirigée par M. X..., salarié de la société UBI non repris, lequel avait ainsi accès aux fichiers clients et à l'ensemble des données de la société UBI qu'il a pu copier au profit des sociétés LM Informatique et LM Le Monde également spécialisée en informatique et téléphonie, et dont les activités sont imbriquées, que ce dernier, et les sociétés qu'il dirige, se sont livrés à des actes de concurrence déloyale, en détournant des commandes au détriment de la société Partesys, telles que les commandes des sociétés Mangin Boly Entreprises, Noremat, Ohs, Vosgeslis, clientes de UBI, qui ont été détournées au profit de la société LM Informatique, que M. B..., ingénieur commercial de UBI a attesté de ce que M. X... allait le commissionner sur les commandes Vosgeslis et Ohs gérées par LM Informatique, en utilisant les moyens humains et matériels de la société Partesys au bénéfice des sociétés nouvellement créées, notamment en débauchant huit salariés de la société Partesys le lendemain même du jugement de cession, que les investigations ont établi la réalité de ces actes de concurrence déloyale, l'entier fichier client de UBI ayant été retrouvé dans la boîte mail d'un salarié de LM Informatique, de même que le fichier emailing de UBI et le plan d'action de Partesys étaient en possession de M. X... ; qu'il découle de l'ensemble de ces éléments, l'existence d'indices suffisamment précis et concordants de ce que M. X..., ex-salarié de UBI, et dirigeant des sociétés LM Informatique et LM Le Monde, et ces sociétés, lesquelles ont les mêmes dirigeants, les mêmes locaux, et des activités similaires et complémentaires, auraient commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre de la société Partesys ayant nouvellement repris la société UBI, ce qui suffit à établir l'intérêt légitime de la société Partesys à obtenir la mesure sollicitée ; que quant à la nécessité d'agir de façon non contradictoire elle est suffisamment établie par le « caractère volatile » des informations enregistrées auxquelles la société Partesys souhaitait accéder et au risque manifeste de dépérissement des preuves qui constituaient le soutien nécessaire de l'action envisagée, que tant la requête que l'ordonnance, qui visent respectivement les articles 812 du code de procédure civile, et 493 du code de procédure civile, permettant de solliciter non contradictoirement des mesures, ont nécessairement déduit des éléments présentés, un risque évident de déperdition des preuves ; que si aux termes des dispositions de l'article 494 du code de procédure civile, « la requête est présentée en double exemplaire. Elle doit être motivée. Elle doit comporter l'indication précise des pièces invoquées » ce qui était le cas en l'espèce comme l'a relevé le premier juge, les dispositions de l'article 495 du code de procédure civile, qui imposent la remise de la requête et de l'ordonnance à la personne à laquelle elle est opposée, n'exigent nullement sous peine de nullité, qu'un bordereau des pièces invoquées soit signifié ; qu'en conséquence, il y a lieu d'infirmer l'ordonnance du 25 mars 2015 dans toutes ses dispositions et de dire qu'il n'y a pas lieu à rétractation de l'ordonnance sur requête du 10 avril 2014 ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE l'indication précise des pièces invoquées constitue une condition de la recevabilité de la requête ; que par son ordonnance du 25 mars 2015 frappée d'appel, le président du tribunal de commerce de Nancy relevait à cet égard, après avoir rappelé cette exigence, « que la requête signifiée aux demandeurs renvoie à des pièces justificatives intitulées "annexe x" dont la teneur n'est détaillée que dans le bordereau des pièces versées aux débats, bordereau dont il n'est pas démontré par la Sarl Partesys, sur qui pèse la charge de la preuve, qu'il aurait été communiqué aux demandeurs lors de la signification de l'ordonnance » et rappelait que « l'indication précise des pièces invoquées exigées par l'article 494 (du code de procédure civile) est précisément destinée à assurer le respect du principe de la contradiction », pour conclure que, « la Sarl Partesys ne démontrant pas que les demandeurs aient eu connaissance, avant la présente instance, de la liste des pièces invoquées au soutien de la requête, il y a lieu de conclure qu'elle a violé les dispositions de l'article 494 CPC précité » (ordonnance du 25 mars 2015, p. 5 in fine et p. 6, alinéas 1 et 2) ; qu'en considérant que l'exigence tenant à l'indication précise des pièces invoquées avait été respectée en l'espèce « comme l'a relevé le premier juge » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), cependant que tout au contraire celui-ci constatait que cette exigence avait été méconnue par la société Partesys, la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance du 25 mars 2015 déférée à sa censure et a ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE l'indication précise des pièces invoquées constitue une condition de la recevabilité de la requête ; qu'en considérant que cette condition avait été respectée en l'espèce, au seul motif, erroné, que le premier juge l'aurait constaté (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 4), alors que la requête ne comporte en réalité aucune mention précise des pièces invoquées, puisque la requérante y fait état d'un certain nombre de faits au titre desquels elle se borne à employer la formule « annexe x », sans que ces annexes soient jointes à l'acte, la cour d'appel a violé l'article 494 du code de procédure civile ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QU'une mesure ne peut être ordonnée sur requête que lorsque les circonstances exigent qu'elle ne le soit pas contradictoirement ; que les circonstances justifiant une dérogation au principe de la contradiction doivent être caractérisées par la requête ou par l'ordonnance rendue sur celle-ci et qu'il ne peut y être ultérieurement suppléé ; qu'il appartient au juge, saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête, de vérifier que cette exigence a été satisfaite ; qu'en l'espèce, la requête n'énonce à aucun moment la nécessité de ne pas respecter le principe du contradictoire et l'ordonnance sur requête se borne à faire droit à la requête sans exposer les circonstances exigeant que la mesure réclamée ne soit pas prise contradictoirement ; qu'en refusant cependant de rétracter l'ordonnance sur requête, au motif que la requête et l'ordonnance sur requête avaient « nécessairement déduit des éléments présentés un risque évident de déperdition des preuves » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 3), la cour d'appel, qui par voie d'affirmation est venue suppléer a posteriori les carences des actes litigieux sur la nécessité d'avoir recours à une procédure non contradictoire, a violé les articles 16, 493 et 494 du code de procédure civile ;

ALORS, EN DERNIER LIEU, QUE le juge saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance prise sur requête doit vérifier, au besoin d'office, si la requête et l'ordonnance comportent des motifs caractérisant des circonstances justifiant qu'il soit dérogé au principe de la contradiction ; qu'au cas présent, pour infirmer l'ordonnance entreprise et valider l'ordonnance sur requête, la cour d'appel a comblé les lacunes de l'ordonnance et de la requête litigieuses en entreprenant de caractériser elle-même de telles circonstances et en énonçant sur ce point que « la nécessité d'agir de façon non contradictoire (
) est suffisamment établie par le caractère "volatile" des informations enregistrées auxquelles la société Partesys souhaitait accéder et au risque manifeste de dépérissement des preuves » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 3) ; qu'en statuant ainsi, sans préciser concrètement les risques qui pesaient sur la conservation des preuves, la cour d'appel a violé les articles violé les articles 16, 145, 493 et 494 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-10368
Date de la décision : 01/03/2018
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 09 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 01 mar. 2018, pourvoi n°17-10368


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10368
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