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28/02/2018 | FRANCE | N°16-26004

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 février 2018, 16-26004


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi principal et le pourvoi incident réunis :

Vu l'article L. 2142-1-1 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que par une lettre recommandée avec accusé de réception du 12 août 2016, le syndicat CFDT-RATP a procédé à des désignations de représentants de sections syndicales dont celle de M. X... en qualité de représentant de section syndicale au sein de l'établissement Véhicules utilitaires de la RATP ;

Attendu que pour valider cette désignation le jugement

énonce que le syndicat CFDT-RATP est désaffilié de la confédération CFDT depuis le 9 ma...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi principal et le pourvoi incident réunis :

Vu l'article L. 2142-1-1 du code du travail ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que par une lettre recommandée avec accusé de réception du 12 août 2016, le syndicat CFDT-RATP a procédé à des désignations de représentants de sections syndicales dont celle de M. X... en qualité de représentant de section syndicale au sein de l'établissement Véhicules utilitaires de la RATP ;

Attendu que pour valider cette désignation le jugement énonce que le syndicat CFDT-RATP est désaffilié de la confédération CFDT depuis le 9 mars 2016 et que cette décision a fait l'objet d'une notification le 20 avril 2016, que si en vertu de la décision de désaffiliation de la confédération CFDT, le syndicat CFDT-RATP ne pouvait plus se prévaloir de l'appartenance à la CFDT, cet élément ne rend pas la désignation effectuée invalide puisque les deux conditions posées par l'article L. 2142-1-1 du code du travail sont réunies en l'espèce ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le syndicat CFDT RATP avait été radié par le bureau confédéral de la CFDT le 31 mars 2016, décision notifiée tant à l'employeur qu'au syndicat, que ce dernier n'avait pas contesté la décision de radiation ni qu'il lui appartenait de modifier ses statuts et que la Fédération générale des transports et de l'équipement CFDT avait procédé à la révocation des précédentes désignations syndicales et désigné de nouveaux délégués syndicaux et représentants de section syndicale CFDT dans l'entreprise, le tribunal, qui devait en déduire que l'utilisation par le syndicat en cause du sigle confédéral malgré l'opposition exprimée par la confédération et la fédération CFDT rendait les désignations de représentants de sections syndicales nulles, a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 novembre 2016, entre les parties, par le tribunal d'instance de Saint-Ouen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Annule la désignation par le syndicat CFDT-RATP du 12 août 2016 de M. Christophe X... en qualité de représentant de section syndicale au sein de l'établissement Véhicules utilitaires de la RATP ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour la Confération française démocratique du travail, la Fédération générale des transports et de l'équipement et le syndicat des personnels de la RATP CFDT.

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR validé la désignation de Monsieur Christophe X... en qualité de représentant de section syndicale au sein de l'établissement Véhicules auxiliaires de la société RATP, opérée par courrier du 12 août 2016 par le syndicat CFDT RATP, se prétendant désormais SGPG RATP ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L 2142-1-1 du code du travail, chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1 une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement d'au moins cinquante salariés peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement ; par courrier recommandée du 12 août 2016 adressé à la RATP, le syndicat CFDT RATP a procédé à la désignation de plusieurs représentants de section syndicale dont Monsieur Christophe X... pour l'établissement Véhicules auxiliaires ; il sera noté que ce courrier, qui est versé aux débats, porte à différents endroits la référence au syndicat CFDT (le sigle CFDT RATP figure en en-tête, ainsi que la dénomination syndicat CFDT RATP ; en objet la mention « désignation RSS du syndicat CFDT-RATP » est inscrite ; dans le corps du texte il figure la mention « le syndicat CFDT RATP vous adresse la liste des personnes qu'il désigne ...» ; en bas de page, sont inscrits le nom, l'adresse postale du syndicat CFDT RATP et le site [...] ); il ressort pourtant des pièces produites et versées aux débats que le syndicat CFDT RATP est désaffilié de la Confédération CFDT depuis le 9 mars 2016 et que cette décision a fait l'objet d'une notification le 20 avril 2016 ; de plus, la société RATP a été avisée par la Confédération RATP de cette décision par courrier du 15 avril 2016 ; par la suite, la RATP a adressé plusieurs courriels au syndicat CFDT RATP les 28 avril 2016 et 19 mai 2016 lui indiquant qu'il ne pouvait plus se prévaloir d'une appartenance à la CFDT ; en outre, il sera relevé que le syndicat CFDT RATP se présente oralement à l'audience et par l'intitulé de ses conclusions sous le nom de SGPG RATP, cette nouvelle appellation n'ayant aucune valeur juridique puisque des nouveaux statuts ne sont pas présentés ; néanmoins, même sans valeur juridique, ce changement d'appellation démontre que le syndicat CFDT RATP reconnaît lui-même ne plus avoir le droit de se réclamer de la CFDT depuis la décision de désaffiliation ; au jour de la désignation de Monsieur Christophe X... en tant que représentant de section syndicale, il ressort des pièces versées aux débats que le syndicat CFDT RATP avait toujours la personnalité morale et le nom officiel de CFDT RATP ; aucune des parties à l'instance ne conteste son existence, ainsi que l'existence de sections syndicales pouvant être créées en son nom, ni sa faculté de pouvoir désigner des représentants de section syndicale, mais uniquement à la condition qu'il n'utilise plus le nom CFDT RATP ; pour pouvoir désigner un représentant de section syndicale, les seules conditions qui sont posées par l'article L 2142-1-1 du code du travail sont que le syndicat constitue une section syndicale dans un établissement d'au moins 50 salariés et n'y soit pas représentatif ; si en vertu de la décision de désaffiliation de la Confédération CFDT, le syndicat CFDT RATP ne pouvait plus se prévaloir de l'appartenance à la CFDT, cet élément ne rend pas les désignations effectuées invalides puisque les deux conditions posées par l'article L 2142-1-1 du code du travail sont réunies en l'espèce ;

Et AUX MOTIFS QU'en revanche, si l'utilisation du nom de CFDT RATP pour effectuer les désignations de représentants de section syndicale, et ce malgré une décision de désaffiliation antérieure, ne rend pas à lui seul ces désignations invalides, en revanche il est certain que l'utilisation abusive du sigle CFDT a causé un préjudice certain et réparable à la confédération CFDT, la FGTE CFDT et le SP RATP CFDT ; de plus, le syndicat CFDT RATP n'apporte aucunement la preuve qu'il soit empêché d'une quelconque manière par la Confédération CFDT de réaliser les opérations nécessaires de mise à jour de ses statuts ; ce comportement abusif du syndicat CFDT RATP conduit pour la Confédération CFDT, la FGTE CFDT et le SP RATP CFDT à un préjudice distinct de celui nécessité par la simple défense en justice et fragilise nécessairement l'action de ces syndicats et unions de syndicats au sein de la société RATP ; en conséquence, la désignation de Monsieur Christophe X... effectuée le 12 août 2016 par le syndicat CFDT RATP en tant que représentant de section syndicale ne peut être annulée et sera donc validée ; le syndicat CFDT RATP sera condamné à payer la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts à la Confédération CFDT, la FGTE CFDT et le SP RATP CFDT pour usage abusif de l'appartenance à la Confédération CFDT, malgré la décision de désaffiliation ;

ALORS QU'un syndicat qui n'est plus affilié à une Confédération ne peut plus se prévaloir de son appartenance à celle-ci ni utiliser son sigle ; que la désignation qu'il effectue sous ce sigle est donc irrégulière ; que le tribunal a constaté que la désignation du représentant de section syndicale avait été effectuée par le syndicat CFDT RATP, en utilisant le sigle CFDT de façon abusive du fait de la désaffiliation à la CFDT, et en faisant un usage abusif de l'appartenance à la Confédération CFDT et ce, dans des conditions préjudiciables à celle-ci et aux syndicats qui lui sont affiliés ; qu'en validant néanmoins cette désignation, le tribunal qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé l'article L2142-1-1 du code du travail ;

Et ALORS QUE le représentant de section syndicale représente dans l'entreprise le syndicat qui procède à sa désignation ; qu'il résulte des constatations du tribunal que, malgré la désaffiliation, le syndicat en cause n'avait modifié ni ses statuts ni son nom et avait procédé à la désignation contestée en utilisant une dénomination qu'il n'était plus en droit d'utiliser, en faisant un usage abusif de l'appartenance à la Confédération CFDT ; qu'en validant néanmoins la désignation, quand le représentant de la section syndicale ne pouvait pas valablement représenter un syndicat dont le nom et les statuts faisaient référence à une affiliation dont il ne pouvait plus se prévaloir, le tribunal a violé l'article L 2142-1-1 du code du travail ;

ALORS encore QUE, saisi d'une contestation portant sur la désignation d'un représentant de la section syndicale faite au nom de la CFDT, le juge ne peut statuer que sur cette désignation sans la modifier et la requalifier comme non faite sous ce sigle ; qu'en retenant que, peu important son libellé, en sorte que, remplissant les conditions légales, elle était valable, et en statuant ainsi sur une autre désignation que celle qui lui était déférée, le tribunal a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Et ALORS QUE nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ; que le tribunal a constaté que la désignation avait été effectuée par un syndicat qui se prévalait abusivement de l'affiliation à la CFDT et utilisait abusivement ce sigle, mais a refusé d'annuler la désignation en retenant que ledit syndicat n'avait pas changé sa dénomination statutaire et avait toujours le nom officiel de CFDT RATP ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a méconnu le principe selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Régie autonome des transports parisiens.

Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'avoir validé la désignation de Monsieur Christophe X... en qualité de RSS au sein de l'établissement VEHICULES AUXILIAIRES de la RATP opérée par courrier du 12 août 2016 par le syndicat CFDT-RATP, cependant non affilié à la CFDT, se prétendant désormais Syndicat général des personnels du groupe RATP ;

AUX MOTIFS QU' « Aux termes de l'article L 2142-1-1 du code du travail, chaque syndicat qui constitue, conformément à l'article L. 2142-1, une section syndicale au sein de l'entreprise ou de l'établissement d'au moins cinquante salariés peut, s'il n'est pas représentatif dans l'entreprise ou l'établissement, désigner un représentant de la section pour le représenter au sein de l'entreprise ou de l'établissement ; que par courrier recommandée du 12 août 2016 adressé à la RATP, le syndicat CFDT RATP a procédé à la désignation de plusieurs représentants de section syndicale dont Monsieur Christophe X... pour l'établissement Véhicules auxiliaires ; qu'il sera noté que ce courrier, qui est versé aux débats, porte à différents endroits la référence au syndicat CFDT (le sigle CFDT RATP figure en en-tête, ainsi que la dénomination syndicat CFDT RATP; en objet la mention « désignation RSS du syndicat CFDT-RATP » est inscrite; dans le corps du texte il figure la mention « le syndicat CFDT RATP vous adresse la liste des personnes qu'il désigne ...»; en bas de page, sont inscrits le nom, l'adresse postale du syndicat CFDT RATP et le site [...]) ; qu'il ressort pourtant des pièces produites et versées aux débats que le syndicat CFDT RATP est désaffilié de la Confédération CFDT depuis le 9 mars 2016 et que cette décision a fait l'objet d'une notification le 20 avril 2016 ; que, de plus, la société RATP a été avisée par la Confédération RATP de cette décision par courrier du 15 avril 2016 ; que, par la suite, la RATP a adressé plusieurs courriels au syndicat CFDT RATP les 28 avril 2016 et 19 mai 2016 lui indiquant qu'il ne pouvait plus se prévaloir d'une appartenance à la CFDT ; qu'en outre, il sera relevé que le syndicat CFDT RATP se présente oralement à l'audience et par l'intitulé de ses conclusions sous le nom de SGPG RATP, cette nouvelle appellation n'ayant aucune valeur juridique puisque des nouveaux statuts ne sont pas présentés. Néanmoins, même sans valeur juridique, ce changement d'appellation démontre que le syndicat CFDT RATP reconnaît lui-même ne plus avoir le droit de se réclamer de la CFDT depuis la décision de désaffiliation ; qu'au jour de la désignation de Monsieur Christophe X... en tant que représentant de section syndicale, il ressort des pièces versées aux débats que le syndicat CFDT RATP avait toujours la personnalité morale et le nom officiel de CFDT RATP ; qu'aucune des parties à l'instance ne conteste son existence, ainsi que l'existence de sections syndicales pouvant être créées en son nom, ni sa faculté de pouvoir désigner des représentants de section syndicale, mais uniquement à la condition qu'il n'utilise plus le nom CFDT RATP ; que pour pouvoir désigner un représentant de section syndicale, les seules conditions qui sont posées par l'article L 2142-1-1 du code du travail sont que le syndicat constitue une section syndicale dans un établissement d'au moins 50 salariés et n'y soit pas représentatif ; que si en vertu de la décision de désaffiliation de la Confédération CFDT, le syndicat CFDT RATP ne pouvait plus se prévaloir de l'appartenance à la CFDT, cet élément ne rend pas les désignations effectuées invalides puisque les deux conditions posées par l'article L 2142-1-1 du code du travail sont réunies en l'espèce ; qu'en revanche, si l'utilisation du nom de CFDT RATP pour effectuer les désignations de représentants de section syndicale, et ce malgré une décision de désaffiliation antérieure, ne rend pas à lui seul ces désignations invalides, en revanche il est certain que l'utilisation abusive du sigle CFDT a causé un préjudice certain et réparable à la confédération CFDT, la FGTE CFDT et le SP RATP CFDT ; que, de plus, le syndicat CFDT RATP n'apporte aucunement la preuve qu'il soit empêché d'une quelconque manière par la Confédération CFDT de réaliser les opérations nécessaires de mise à jour de ses statuts ; que ce comportement abusif du syndicat CFDT RATP conduit pour la Confédération CFDT, la FGTE CFDT et le SP RATP CFDT à un préjudice distinct de celui nécessité par la simple défense en justice et fragilise nécessairement l'action de ces syndicats et unions de syndicats au sein de la société RATP » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'affiliation confédérale sous laquelle un syndicat procède à des désignations constitue un élément déterminant de l'adhésion des salariés ; qu'il s'ensuit qu'en cas de désaffiliation, le syndicat ne peut se prévaloir du sigle de l'organisation confédérale pour procéder à des désignations ; qu'en validant cependant la désignation opérée par le syndicat CFDT-RATP, tout en constatant que ce syndicat n'était plus affilé à la CFDT, le tribunal d'instance a violé l'article L.2142-1-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en déclarant abusif l'usage, par le syndicat désignant, du sigle CFDT parce qu'il « fragilise nécessairement l'action » des organisations CFDT, le juge d'instance caractérise, par-là même, un risque de confusion auprès du personnel de l'établissement et prive sa décision de base légale au regard de l'article L.2142-1 du code du travail, en décidant qu'il n'y a pas lieu d'annuler la désignation de Monsieur X....


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26004
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Saint-Ouen, 10 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-26004


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26004
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