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28/02/2018 | FRANCE | N°16-25805

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 février 2018, 16-25805


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième et cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 septembre 2016), que la société Nokad a été mise en liquidation judiciaire le 13 janvier 2014, M. Y... étant nommé liquidateur ; que ce dernier a assigné la société en report de la date de cessation des paiements, initialement fixée au 1er décembre 2013 ;

Attendu que la société Nokad fait grief à l'arrêt de reporter au 22 octobre 2013 la date de cessation des paiemen

ts alors, selon le moyen :

1°/ qu'un moratoire accordé, même tacitement, par un créan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième et cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 septembre 2016), que la société Nokad a été mise en liquidation judiciaire le 13 janvier 2014, M. Y... étant nommé liquidateur ; que ce dernier a assigné la société en report de la date de cessation des paiements, initialement fixée au 1er décembre 2013 ;

Attendu que la société Nokad fait grief à l'arrêt de reporter au 22 octobre 2013 la date de cessation des paiements alors, selon le moyen :

1°/ qu'un moratoire accordé, même tacitement, par un créancier, doit être pris en compte dans l'existence du passif exigible ; qu'en considérant qu'un tel moratoire nécessitait un écrit des créanciers, la cour d'appel a violé l'article L. 631-1 du code de commerce ;

2°/ que l'écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'accord écrit donné par la société Génopole à un moratoire ne résultait pas de plusieurs courriers électroniques envoyés par elle sur lesquels elle avait reconnu avoir accepté un système d'échelonnement du règlement des factures de prestations tenant compte des contraintes de trésorerie de la société Nokad, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1316-3 du code civil ;

3°/ que le juge ne peut retenir une date de cessation des paiements antérieure au retour à une situation permettant au débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, même si antérieurement, la cessation des paiements préexistait ; qu'en refusant de prendre en considération, au titre de l'actif disponible, un crédit d'impôt de 119 524 euros qui aurait permis de faire face au passif exigible de 117 088 euros, au motif que le versement de la somme de 119 524 euros ne serait intervenue qu'en décembre 2013 et non au 22 octobre 2013, la cour d'appel a violé l'article L. 631-8 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que, dans ses conclusions devant la cour d'appel, la société Nokad, s'agissant de ses dettes envers la société Génopole, se bornait à faire état de l'absence de tout doute sur l'existence d'un moratoire tacite, et ne déduisait l'existence des autres moratoires prétendument accordés par la société Audit consultant et la chambre de commerce et d'industrie de l'Essonne que du seul fait que ces créanciers lui avaient, par le passé, consenti des délais de paiement et que des discussions étaient en cours ; qu'en l'absence, aux termes de ces conclusions, de toute preuve de l'existence de moratoires, même tacites, la cour d'appel a pu, en dépit d'une maladresse d'expression sur l'exigence du caractère écrit de l'accord des créanciers, tenir compte de ces différentes dettes ;

Attendu, d'autre part, que, sous le couvert du grief non fondé de manque de base légale au regard de l'article 1316-3 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine par laquelle la cour d'appel a estimé que n'était pas rapportée la preuve d'un moratoire conclu avec la société Génopole ;

Et attendu, enfin, que l'arrêt relève, par motifs propres, qu'au 22 octobre 2013, le passif exigible s'élevait à une somme supérieure à 110 000 euros et que la société Nokad soutenait elle-même que le crédit d'impôt recherche de 119 524 euros ne devait lui être versé qu'en décembre 2013, sans autre précision, et, par motifs adoptés, que le dirigeant a déclaré la cessation des paiements le 23 décembre 2013 ; qu'en l'état de ces constatations, desquelles il ressort que la cessation des paiements a persisté entre le 22 octobre 2013 et le 23 décembre 2013, de sorte que la société débitrice n'était pas revenue à meilleure fortune durant cette période, la cour d'appel a pu en déduire que, ce crédit d'impôt ne pouvant être inclus dans l'actif exigible au 22 octobre 2013, la cessation des paiements devait être fixée à cette dernière date ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses première et quatrième branches, qui n'est pas manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Nokad aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Nokad

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir reporté au 22 octobre 2013 la date de cessation des paiements de la société Nokad, initialement fixée au 1er décembre 2013 ;

Aux motifs que si l'URSSAF avait, par courrier du 26 juillet 2013, accordé un moratoire sur la somme de 17 023 euros, il résultait d'un courrier de la société Nokad du 14 octobre 2013 qu'elle était débitrice de la cotisation du troisième trimestre 2013 pour un montant de 23 723 euros qu'elle était dans l'impossibilité de payer ; que s'agissant des cotisations de retraite d'un montant de 6 365 euros, si un moratoire avait été sollicité, aucun accord n'avait été donné « de la part de celles-ci », de sorte que ce passif était exigible ; que les premiers juges avaient relevé qu'au 22 octobre 2013, les dettes envers les fournisseurs s'élevaient à 87 000 euros ; que la société Nokad soutenait que certaines créances, rééchelonnées, ne devaient pas être comptabilisées dans le passif exigible ; que cependant, pour que le passif ne soit pas considéré comme exigible, le débiteur devait apporter la preuve que les créanciers lui avaient consenti un moratoire, ce qui n'était pas le cas, faute d'accord écrit de leur part ; que le premier juge avait, à juste titre, retenu que le passif exigible dû aux fournisseurs s'élevait à 87 000 euros ; que le passif exigible s'élevait donc, au 22 octobre 2013, à plus de 110 000 euros ; que concernant l'actif disponible, le technicien désigné par le juge-commissaire avait mis en évidence qu'au 22 octobre 2013, compte tenu des opérations bancaires en cours, le solde bancaire réel était négatif à hauteur de 2 949 euros ; que le crédit d'impôt recherche estimé à 119 524 euros fin décembre 2013 ne constituait pas un actif disponible au 22 octobre 2013 ; qu'enfin, la subvention de 120 000 euros reçue le 30 octobre 2013 par la société Nokad avait servi à payer immédiatement les salaires que le dirigeant de la société Nokad considérait lui être dus pour 2012 et 2013 à hauteur de 112 000 euros, de sorte qu'elle avait en réalité été absorbée, pour ce montant, par un passif que le dirigeant estimait exigible ; qu'il s'ensuivait que l'état de cessation des paiements subsistait encore au 30 octobre 2013 ; qu'il convenait en conséquence de constater que le 22 octobre 2013, la société Nokad ne bénéficiait d'aucun actif disponible lui permettant de faire face à son passif exigible et que les premiers juges avaient à juste titre fixé la cessation des paiements à cette date ;

Alors 1°) que le tribunal, dans son rappel des prétentions des parties, avait indiqué que selon Me Y..., liquidateur de la société Nokad, les dettes envers les fournisseurs, au 22 octobre 2013, s'élevaient à la somme de 87 000 euros ; qu'en ayant énoncé que les premiers juges avaient relevé et retenu qu'au 22 octobre 2013, les dettes de la société Nokad envers les fournisseurs s'élevaient à la somme de 87 000 euros, quand une telle affirmation ne résultait que du rappel des prétentions des parties, la cour d'appel a dénaturé le jugement, en méconnaissance de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Alors 2°) qu'un moratoire accordé, même tacitement, par un créancier, doit être pris en compte dans l'existence du passif exigible ; qu'en considérant qu'un tel moratoire nécessitait un écrit des créanciers, la cour d'appel a violé l'article L. 631-1 du code de commerce ;

Alors 3°) et en tout état de cause, que l'écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si l'accord écrit donné par la société Génopole à un moratoire ne résultait pas de plusieurs courriers électroniques envoyés par elle sur lesquels elle avait reconnu avoir accepté un système d'échelonnement du règlement des factures de prestations tenant compte des contraintes de trésorerie de la société Nokad, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1316-3 du code civil ;

Alors 4°) que les créances litigieuses doivent être exclues du passif exigible ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si, outre le rééchelonnement de certaines dettes, d'autres créances fournisseurs n'avaient pas fait l'objet de contestations de la part de M. A..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-1 du code de commerce ;

Alors 5°) que le juge ne peut retenir une date de cessation des paiements antérieure au retour à une situation permettant au débiteur de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, même si antérieurement, la cessation des paiements préexistait ; qu'en refusant de prendre en considération, au titre de l'actif disponible, un crédit d'impôt de 119 524 euros qui aurait permis de faire face au passif exigible de 117 088 euros, au motif que le versement de la somme de 119 524 euros ne serait intervenue qu'en décembre 2013 et non au 22 octobre 2013, la cour d'appel a violé l'article L. 631-8 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-25805
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-25805


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.25805
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