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28/02/2018 | FRANCE | N°16-22234

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 février 2018, 16-22234


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 2016), que travaillant pour la société Laboratoires Bottu en qualité de visiteuse médicale du 7 décembre 1981 au 5 février 1988, Mme Y... a été engagée le 22 février 1988 par la société Laboratoires Choay en qualité de délégué régional exclusif ; qu'en 1999, suite à une opération de fusion, la société Laboratoires Choay a été intégrée au groupe Sanofi Synthelabo, devenu en 2004 le groupe société Sanofi Aventis ; que son ancienneté a été repris

e à compter du 22 février 1988 ; que le 1er avril 2011, la société Sanofi Aventis. a m...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 2016), que travaillant pour la société Laboratoires Bottu en qualité de visiteuse médicale du 7 décembre 1981 au 5 février 1988, Mme Y... a été engagée le 22 février 1988 par la société Laboratoires Choay en qualité de délégué régional exclusif ; qu'en 1999, suite à une opération de fusion, la société Laboratoires Choay a été intégrée au groupe Sanofi Synthelabo, devenu en 2004 le groupe société Sanofi Aventis ; que son ancienneté a été reprise à compter du 22 février 1988 ; que le 1er avril 2011, la société Sanofi Aventis. a mis en place un plan de sauvegarde de l'emploi incluant un dispositif de cessation anticipée d'activité auquel la salariée a adhéré, une convention de rupture d'un commun accord pour motif économique ayant été signée par les parties le 23 mai 2011, la salariée percevant dans ce cadre une rente jusqu'à la liquidation de ses droits à la retraite ; qu'elle a saisi, le 30 avril 2012, la juridiction prud'homale de demandes tendant au paiement d'un complément d'indemnité de rupture et d'un rappel de salaires au titre de la gratification d'ancienneté ; qu'estimant qu'une erreur avait été commise dans le calcul du montant de la rente versée chaque mois en l'absence de pondération au titre de son travail exercé à temps partiel, l'employeur a informé le 7 août 2012 la salariée d'une réduction de la rente qui lui serait payée à compter de septembre 2012 ; que celle-ci a complété ses demandes auprès de la juridiction prud'homale et a sollicité un rappel au titre de la rente viagère ;

Sur le pourvoi principal de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée la somme de 15 007,68 euros bruts à titre de rappel de rente temporaire sur la période du 1er septembre 2012 au 30 avril 2016, et de dire qu'à compter du 1er mai 2016, la rente serait payée sur la base d'un montant annuel brut de 45 474 euros au 1er septembre 2011 revalorisé de 2 % au 1er janvier de chaque année, et ce jusqu'au 31 mars 2018, alors selon le moyen :

1°/ que le juge est tenu de respecter la loi des parties ; que la cour d'appel a constaté que la salariée avait adhéré au dispositif de cessation anticipée d'activité dans le cadre du PSE mis en place par la société Sanofi et avait signé une convention de rupture d'un commun accord, laquelle renvoyait aux stipulations du PSE ; que le dispositif de cessation anticipée créé par le PSE prévoyait une prise en compte du taux d'activité du salarié sur l'ensemble de sa carrière pour le calcul de sa rente ; qu'en condamnant la société Sanofi à verser à la salariée une rente sur la base d'un montant annuel brut de 45 474 euros, sans tenir compte des stipulations du PSE, et sans constater d'accord de volontés des parties pour déroger au PSE, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°/ que le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'attestation de rente temporaire du 9 septembre 2011 remise à la salariée par la société Sanofi ne comportait aucun engagement quant au versement de la rente mais décrivait uniquement l'état de la rente tel qu'il était à cette date et précisait que la « rente s'inscrit dans le cadre du dispositif de cessation anticipée d'activité mis en place par le plan de sauvegarde de l'emploi » ; qu'en affirmant néanmoins que la société Sanofi s'était engagée sur un montant de rente déterminé sur la base de cette attestation, la cour d'appel l'a dénaturée et a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;

3°/ que le juge doit respecter l'objet du litige ; que la société Sanofi invoquait l'existence d'une erreur dans le calcul de la rente de la salariée consistant en une omission de la pondération du salaire de référence par le taux d'activité à temps partiel de la salariée ; qu'en se fondant néanmoins sur le fait que la société Sanofi ne faisait aucune allusion, dans son courrier du 7 août 2012 adressé à la salariée, au cumul des taux de 1,5 % et 1,7 % pour la revalorisation correspondant à l'augmentation collective de 2011, quand l'erreur dont se prévalait la société Sanofi pour le calcul de la rente de la salariée ne portait pas sur le taux de revalorisation correspondant à l'augmentation collective, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; que la société Sanofi produisait devant la cour d'appel les derniers bulletins de salaire de la salariée, soit pour la période d'août 2010 à août 2011, lesquels mentionnaient un horaire mensuel de travail de 138,67 heures ; qu'en affirmant que la société Sanofi ne justifiait pas que Mme Y... était à temps partiel à la date d'adhésion au dispositif CAA, la cour d'appel a dénaturé, par omission, les bulletins de salaire produits et violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;

5°/ que le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en soulevant d'office le moyen pris de ce que qu'il ne serait pas justifié que Mme Y... ait été à temps partiel à la date d'adhésion au dispositif, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

6°/ que le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en soulevant d'office le moyen pris de ce que la société Sanofi ne justifierait pas du mode de calcul ayant permis d'obtenir le taux d'activité de 90,14 %, ni que le montant du salaire initial de référence n'aurait pas déjà été proratisé, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

7°/ que le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; que la salariée se prévalait d'un « simili bulletin de paie de la rémunération de référence », lequel mentionnait expressément que « ce document n'a qu'une valeur indicative et ne saurait présager de modifications éventuelles de textes législatifs, réglementaires et conventionnels » ; qu'en se fondant néanmoins sur ce « simili bulletin de paie » pour faire droit à la demande de la salariée, quand ce document n'avait expressément qu'une valeur indicative, la cour a dénaturé ledit document et a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;

Mais attendu que c'est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel a constaté, hors toute dénaturation et sans modifier les termes du litige, que la commune intention des parties était que l'employeur s'était engagé le 9 septembre 2011 à verser à la salariée une rente au titre de la cessation anticipée d'activité d'un montant annuel brut de 45 474 euros ; qu'elle a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le pourvoi incident de la salariée :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la condamnation de la société Sanofi Aventis France à lui verser les sommes de 26 862,15 euros à titre d'indemnité de rupture complémentaire et 2 942 euros à titre de rappels de salaires sur gratification d'ancienneté, alors selon le moyen :

1°/ que l'employeur doit traiter de manière égale les salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage considéré ; que la salariée sollicitait l'octroi du même avantage que celui accordé à d'autres salariés dans le cadre de leur départ volontaire en cessation anticipée d'activité, à savoir, la reprise de l'ancienneté acquise au sein de laboratoires qui avaient ensuite intégré le groupe Sanofi Aventis ; qu'en rejetant cette demande aux seuls motifs que « les salariées avec lesquelles la salariée se compare ont quitté la société dans des cadres distincts, à savoir dans le cadre d'un plan de départ volontaire mis en oeuvre en 2009 s'agissant de Mmes A... et B... et non pas, comme Mme Y..., dans le cadre du plan adopté en 2011, lequel pouvait comporter des modalités indemnitaires différentes, si bien que les situations n'étaient pas identiques », la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la différence de traitement reposait sur un élément objectif et pertinent, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du principe d'égalité de traitement et du principe « à travail égal, salaire égal » ;

2°/ que les articles 2 des accords du 8 février 2007 relatifs aux indemnités de rupture et à la gratification d'ancienneté précisaient s'agissant des périodes prises en compte pour le calcul de l'ancienneté dans le groupe qu'étaient également prises en compte les périodes continues ou discontinues ayant donné lieu à un contrat de travail dans une des entreprises du groupe : contrat à durée déterminée, contrat de professionnalisation, contrat de formation en alternance, contrat d'apprentissage, sans exclure le contrat à durée indéterminée ; qu'en affirmant que les accords susvisés réservaient expressément la reprise de l'ancienneté aux seuls salariés ayant travaillé dans le cadre de contrats précaires, la cour d'appel a violé l'article 2 de l'accord relatif aux gratifications d'ancienneté dans le groupe Sanofi Aventis en France du 8 février 2007 et l'article 2 de l'accord relatif aux indemnités de rupture dans le groupe Sanofi Aventis en France du 8 février 2007 ;

3°/ que la réponse donnée par la direction de la société Sanofi à la question 18 retranscrite dans le compte rendu de la réunion des délégués du personnel de la société Sanofi Aventis France du 10 décembre 2008 démontrait que l'employeur n'avait pas entendu limiter aux seuls salariés embauchés par des contrats précaires la prise en compte des périodes continues ou discontinues ayant donné lieu à un contrat de travail dans l'une des entreprises du groupe ; qu'en affirmant que la réponse apportée dans le cadre de la réunion des déléguée du personnel de 2008 se bornait à rappeler les dispositions de l'accord de 2007 relatif aux gratifications d'ancienneté pour les salariés ayant changé d'activité dans des sociétés du même groupe, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du compte rendu de la réunion des délégués du personnel de la société Sanofi Aventis France du 10 décembre 2008 ;

Mais attendu d'abord que lorsque deux procédures de licenciement économique collectif sont successivement engagées dans l'entreprise accompagnées de plans de sauvegarde de l'emploi distincts, les salariés licenciés dans le cadre de la seconde procédure ne sont pas dans une situation identique à celle des salariés licenciés dans le cadre de la première procédure au cours de laquelle a été élaboré le plan prévoyant l'avantage revendiqué sur le fondement du principe d'égalité de traitement par les salariés licenciés dans la seconde procédure ; qu'ayant constaté, hors toute dénaturation, que les salariées avec lesquelles la salariée se comparait avaient quitté l'entreprise dans le cadre d'un précédent plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre en 2009 et qu'elle ne justifiait pas qu'elle aurait été traitée différemment d'autres candidats au départ dans le cadre du plan de sauvegarde de l'emploi de 2011, la cour d'appel a pu en déduire qu'elle ne pouvait prétendre à la reprise d'une ancienneté à la date du 7 décembre 1981 ;

Et attendu ensuite, que c'est encourir les griefs des deuxième et troisième branches, que la cour d'appel a retenu que la salariée, engagée par contrat à durée indéterminée, ne pouvait prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 2 de l'accord du 8 février 2007 relatif aux gratifications d'ancienneté dans le groupe Sanofi Aventis en France réservant la reprise d'ancienneté acquise auprès des précédents employeurs faisant partie du groupe aux seuls titulaires de contrats précaires ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à la charge de chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Sanofi Aventis France (demanderesse au pourvoi principal).

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société Sanofi Aventis France à payer à Mme Y... la somme de 15 007,68 euros bruts à titre de rappel de rente temporaire sur la période du 1er septembre 2012 au 30 avril 2016, d'AVOIR dit qu'à compter du 1er mai 2016, la rente sera payée sur la base d'un montant annuel brut de 45 474 euros au 1er septembre 2011 revalorisé de 2% au 1er janvier de chaque année, et ce jusqu'au 31 mars 2018 et d'AVOIR condamné la société Sanofi Aventis France à payer une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens.

AUX MOTIFS QUE « Par lettre du 7 août 2012, la société SANOFI-AVENTIS a écrit à madame Y... que, suite à différents contrôle internes, une erreur avait été constatée dans le montant de la rente brute, laquelle n'aurait pas été calculée selon les termes du dispositif CAA ; aussi l'a-t-elle informée que, à compter du mois de septembre 2012, sa situation serait mise en conformité avec les termes du dispositif ; A ce courrier était jointe une fiche mentionnant les trois dernières rémunérations annuelles, un taux d'activité retenu (90,14%) et le montant net mensuel de la rente à compter de septembre 2012, soit 2.799,54 Euros (au lieu de 2.993,69 Euros ) ; Pour justifier cette modification à la baisse du montant de la rente, la société SANOFI-AVENTIS prétend que cette correction était conforme aux engagements conventionnels qu'elle avait pris dans le cadre du dispositif CAA ; qu'en revanche, elle n'avait pris aucun engagement contractuel auprès des salariés sur un chiffrage précis de la rente qui leur serait servie ; que les documents remis mentionnaient expressément leur valeur 'indicative' et 'estimative' ; Toutefois, ainsi que madame Y... le fait valoir à juste titre, la société SANOFI-AVENTIS s'est bien engagée sur un montant de rente déterminé en lui délivrant, le 9 septembre 2011, une 'attestation de rente temporaire CAA société SANOFI-AVENTIS à effet du 1er septembre 2011" mentionnant expressément le montant annuel brut de la rente soit 45.474 Euros, sans assortir cette attestation d'aucune réserve qui conférerait à ce montant un caractère indicatif ou estimatif; En outre, si la société SANOFI-AVENTIS fait valoir que l'erreur n'est pas créatrice de droit, encore faut-il que celle-ci soit démontrée ; selon son courrier du 7 août, la fiche 'estimative' aurait intégré la revalorisation correspondant au taux de l'augmentation collective de 2011 soit 1,5% et le dispositif prévoyait une pondération en fonction de l'activité à temps partiel ; toutefois, si l'on se reporte aux indications de la direction lors du comité d'entreprise du 22 juin 2012, ce n'est pas le '1,5%' qui serait erroné mais le 'cumul' de '1,5% et 1,7%', taux auquel la société ne fait aucune allusion dans son courrier précitée ; quant au coefficient de pondération, il est en effet mentionné, sans autre précision, dans le 'projet ' de règlement intérieur du dispositif CAA, exclusivement pour les collaborateurs à temps partiel 'à la date d'adhésion au dispositif' ; d'une part la société SANOFI-AVENTIS ne justifie pas auprès de la Cour que tel était le cas de madame Y...; et d'autre part elle ne justifie pas non plus du mode de calcul lui ayant permis d'obtenir le taux de 90,14% qu'elle a décidé d'appliquer en définitive à madame Y..., ni que le montant du salaire initial de référence n'avait pas déjà été proratisé; or précisément, madame Y... verse aux débats un 'simili bulletin de paie de la rémunération de référence' établi par la société, qui fait expressément état, pour le calcul de la rente qui lui a été initialement servie, d'un montant correspondant à la 'rente brute garantie minimum proratisée pour les temps partiels' ; et il n'est pas établi par la société que le calcul résultant de ce 'simili' était moins exact que celui qui lui a permis de minorer, de façon unilatérale, le montant de la rente qu'elle s'était engagée à servir et qu'elle payait d'ailleurs déjà depuis trois mois ; Il convient, au vu de ce qui précède, d'infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes et de faire droit aux demandes de madame Y... relatives au rappel de rente, critiquées par la société SANOFI-AVENTIS dans leur principe mais pas dans leur montant ».

1) ALORS QUE le juge est tenu de respecter la loi des parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Mme Y... avait adhéré au dispositif de cessation anticipée d'activité dans le cadre du PSE mis en place par la société Sanofi et avait signé une convention de rupture d'un commun accord, laquelle renvoyait aux stipulations du PSE ; que le dispositif de cessation anticipée créé par le PSE prévoyait une prise en compte du taux d'activité du salarié sur l'ensemble de sa carrière pour le calcul de sa rente ; qu'en condamnant la société Sanofi à verser à Mme Y... une rente sur la base d'un montant annuel brut de 45 474 euros, sans tenir compte des stipulations du PSE, et sans constater d'accord de volontés des parties pour déroger au PSE, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

2) ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'attestation de rente temporaire du 9 septembre 2011 remise à la salariée par la société Sanofi ne comportait aucun engagement quant au versement de la rente mais décrivait uniquement l'état de la rente tel qu'il était à cette date et précisait que la « rente s'inscrit dans le cadre du dispositif de cessation anticipée d'activité mis en place par le plan de sauvegarde de l'emploi » ; qu'en affirmant néanmoins que la société Sanofi s'était engagée sur un montant de rente déterminé sur la base de cette attestation, la cour d'appel l'a dénaturée et a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.

3) ALORS QUE le juge doit respecter l'objet du litige ; qu'en l'espèce, la société Sanofi invoquait l'existence d'une erreur dans le calcul de la rente de Mme Y... consistant en une omission de la pondération du salaire de référence par le taux d'activité à temps partiel de la salariée ; qu'en se fondant néanmoins sur le fait que la société Sanofi ne faisait aucune allusion, dans son courrier du 7 août 2012 adressé à Mme Y..., au cumul des taux de 1,5% et 1,7% pour la revalorisation correspondant à l'augmentation collective de 2011, quand l'erreur dont se prévalait la société Sanofi pour le calcul de la rente de Mme Y... ne portait pas sur le taux de revalorisation correspondant à l'augmentation collective, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile.

4) ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la société Sanofi produisait devant la cour d'appel les derniers bulletins de salaire de Mme Y..., soit pour la période d'août 2010 à août 2011, lesquels mentionnaient un horaire mensuel de travail de 138,67 heures ; qu'en affirmant que la société Sanofi ne justifiait pas que Mme Y... était à temps partiel à la date d'adhésion au dispositif CAA, la cour d'appel a dénaturé, par omission, les bulletins de salaire produits et violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause.

5) ALORS QUE le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en soulevant d'office le moyen pris de ce que qu'il ne serait pas justifié que Mme Y... ait été à temps partiel à la date d'adhésion au dispositif, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

6) ALORS QUE le juge ne peut soulever un moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, en soulevant d'office le moyen pris de ce que la société Sanofi ne justifierait pas du mode de calcul ayant permis d'obtenir le taux d'activité de 90,14%, ni que le montant du salaire initial de référence n'aurait pas déjà été proratisé, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

7) ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, Mme Y... se prévalait d'un « simili bulletin de paie de la rémunération de référence », lequel mentionnait expressément que « ce document n'a qu'une valeur indicative et ne saurait présager de modifications éventuelles de textes législatifs, réglementaires et conventionnels » ; qu'en se fondant néanmoins sur ce « simili bulletin de paie » pour faire droit à la demande de Mme Y..., quand ce document n'avait expressément qu'une valeur indicative, la cour a dénaturé ledit document et a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, et le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause. Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme Y... (demanderesse au pourvoi incident).

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de sa demande tendant à la condamnation de la société Sanofi Aventis France à lui verser les sommes de 26.862,15 euros à titre d'indemnité de rupture complémentaire et 2.942 euros à titre de rappels de salaires sur gratification d'ancienneté ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'il est constant que le contrat de travail de Mme Y... ne prévoyait aucune reprise d'ancienneté pour son activité au sein de la société Laboratoires Bottu ; que néanmoins, Mme Y... la revendique en invoquant d'une part le principe d'égalité de traitement entre les salariés et d'autre part les accords applicables au sein du groupe Sanofi-Aventis ; qu'en application du principe « à travail égal, salaire égal », énoncé par les articles L. 2261-22-II-, L. 2771-1-8 et L. 3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique ; qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence ; que Mme Y... fait valoir que les Laboratoires Bottu ont été acquis par le groupe Rhône Poulenc en 1988, dont la branche pharmaceutique, avec la fusion d'autres sociétés, a donné naissance au groupe Aventis, lequel a fusionné avec Sanofi en 2004 ; que d'autres salariés bénéficiaires d'un dispositif CAA qui avaient travaillé au sein de divers laboratoires rachetés postérieurement à leur départ par Rhône-Poulenc (Roussel-Uclaf, Spert-Mauchant) ont bénéficié d'une reprise de l'ancienneté acquise au sein de ces laboratoires ; qu'elle verse aux débats les documents relatifs à la reprise d'ancienneté en juin 2009 de Mme A... pour ses périodes d'activité professionnelle chez Roussel (1981 à 1989) et chez Specia (1989 à 1991) et l'attestation de Mme B..., qui déclare avoir bénéficié d'une reprise de son ancienneté chez Spret Mauchant (Pharmuk) du 11 septembre 1978 au 30 juin 1980 lors de sa cessation anticipée d'activité également en 2009 ; que toutefois, la société Sanofi-Aventis fait valoir, à juste titre que ces salariées avec lesquelles Mme Y... se compare ont quitté la société dans des cadres distincts, à savoir dans le cadre d'un plan de départ volontaire mis en oeuvre en 2009 s'agissant de Mmes A... et B... et non pas, comme Mme Y..., dans le cadre du plan adopté en 2011, lequel pouvait comporter des modalités indemnitaires différentes, si bien que les situations n'étaient pas identiques ; que force est de constater que l'intéressée ne verse aux débats aucune pièce pour établir qu'elle aurait été traitée de façon différente que d'autres candidats au départ dans le cadre du plan de départ volontaire de 2011 ; que ce premier moyen doit donc être écarté ; qu'en ce qui concerne les dispositions conventionnelles, l'article 23 de la convention collective applicable précise que l'ancienneté s'entend depuis la date d'entrée dans l'entreprise et que lorsqu'un salarié change d'emploi dans une filiale ou dans le groupe qui l'emploie, il conserve son ancienneté dans le nouvel établissement ; qu'or il ressort des pièces produites que lors de l'embauche de Mme Y... par la société Laboratoires Choay, la société Laboratoires Bottu ne faisait pas partie du groupe Sanofi et n'avait d'ailleurs même pas encore été rachetée par Rhône Poulenc ; quant aux accords de 2007 relatifs aux indemnités de rupture et à la gratification d'ancienneté, ils renvoient aux dispositions conventionnelles et précisent, en leur article 2 que doivent être prises en compte, pour la reprise de l'ancienneté, « les périodes continues ou discontinues ayant donné lieu à un contrat de travail dans une des entreprises du groupe : contrat à durée déterminée, contrat de professionnalisation, contrat en alternance, contrat d'apprentissage » ; qu'or, il est constant que Mme Y... a été embauchée en contrat à durée indéterminée par la société Laboratoires Bottu et qu'elle en a démissionné pour intégrer les Laboratoires Choay, si bien qu'elle ne peut se prévaloir des dispositions que les accords susvisés ont expressément réservé, de façon claire et précise et non sujette à interprétation, aux salariés ayant travaillé dans le cadre de contrats précaires ; que la réponse dont elle se prévaut, apportée dans le cadre d'une réunion de délégués du personnel de 2008, se borne à rappeler les dispositions de l'accord de 2007 relatif aux gratifications d'ancienneté, et notamment la référence aux conventions collectives permettant une reprise d'ancienneté pour les salariés ayant changé d'activité dans des sociétés du même groupe ; qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme Y... de ses demandes de rappel d'indemnité de rupture et de rappel de gratification ;

AUX MOTIFS EVENTIUELLEMENT ADOPTES QUE Mme Y... est embauchée par le Laboratoire Bottu le 7 décembre 1981 ; qu'elle démissionne de ce poste le 5 février 1988 ; qu'elle est embauchée par le Laboratoire Choay le 22 février 1988 ; que le contrat de travail ne précise pas de reprise d'ancienneté et stipule l'existence d'une période d'essai ; que l'article 23 » de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique précise que seul un accord d'entreprise peut organiser à loisir la reprise d'ancienneté ; que les articles 2 des accords d'entreprise du 8 février 2007 précisent les types de contrats de travail qui entrainent une reprise d'ancienneté ; que les CDI ne font pas partie de cette liste ; que la demanderesse ne peut se prévaloir de l'application d'une mesure conventionnelle ou collective ; que le conseil la déboute de la demande de reprise d'ancienneté ;

1°) ALORS QUE l'employeur doit traiter de manière égale les salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage considéré ; que Mme Y... sollicitait l'octroi du même avantage que celui accordé à d'autres salariés dans le cadre de leur départ volontaire en cessation anticipée d'activité, à savoir, la reprise de l'ancienneté acquise au sein de laboratoires qui avaient ensuite intégré le groupe Sanofi Aventis ; qu'en rejetant cette demande aux seuls motifs que « les salariées avec lesquelles Mme Y... se compare ont quitté la société dans des cadres distincts, à savoir dans le cadre d'un plan de départ volontaire mis en oeuvre en 2009 s'agissant de Mmes A... et B... et non pas, comme Mme Y..., dans le cadre du plan adopté en 2011, lequel pouvait comporter des modalités indemnitaires différentes, si bien que les situations n'étaient pas identiques », la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la différence de traitement reposait sur un élément objectif et pertinent, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du principe d'égalité de traitement et du principe « à travail égal, salaire égal » ;

2°) ALORS QUE les articles 2 des accords du 8 février 2007 relatifs aux indemnités de rupture et à la gratification d'ancienneté précisaient s'agissant des périodes prises en compte pour le calcul de l'ancienneté dans le groupe qu'étaient également prises en compte les périodes continues ou discontinues ayant donné lieu à un contrat de travail dans une des entreprises du groupe : contrat à durée déterminée, contrat de professionnalisation, contrat de formation en alternance, contrat d'apprentissage, sans exclure le contrat à durée indéterminée ; qu'en affirmant que les accords susvisés réservaient expressément la reprise de l'ancienneté aux seuls salariés ayant travaillé dans le cadre de contrats précaires, la cour d'appel a violé l'article 2 de l'accord relatif aux gratifications d'ancienneté dans le groupe Sanofi-Aventis en France du 8 février 2007 et l'article 2 de l'accord relatif aux indemnités de rupture dans le groupe Sanofi-Aventis en France du 8 février 2007 ;

3°) ALORS QUE la réponse donnée par la direction de la société Sanofi à la question 18 retranscrite dans le compte rendu de la réunion des délégués du personnel de la société Sanofi Aventis France du 10 décembre 2008 démontrait que l'employeur n'avait pas entendu limiter aux seuls salariés embauchés par des contrats précaires la prise en compte des périodes continues ou discontinues ayant donné lieu à un contrat de travail dans l'une des entreprises du groupe ; qu'en affirmant que la réponse apportée dans le cadre de la réunion des déléguée du personnel de 2008 se bornait à rappeler les dispositions de l'accord de 2007 relatif aux gratifications d'ancienneté pour les salariés ayant changé d'activité dans des sociétés du même groupe, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du compte rendu de la réunion des délégués du personnel de la société Sanofi Aventis France du 10 décembre 2008.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22234
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-22234


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.22234
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