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28/02/2018 | FRANCE | N°15-20116

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 février 2018, 15-20116


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les décisions attaquées (Rennes, 15 mai 2013 et 9 avril 2015), que la société Akabois a assigné M. et Mme X... en paiement de sommes ; que, M. X... a interjeté appel du jugement du 4 octobre 2011 ; que, par ordonnance du 21 novembre 2012, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Akabois du 14 mai 2012 ; que, par ordonnance du 15 mai 2013, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. X... tendant à l'irrecevabilité des concl

usions de la société Akabois du 7 mars 2013 ;

Sur le premier moyen :
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les décisions attaquées (Rennes, 15 mai 2013 et 9 avril 2015), que la société Akabois a assigné M. et Mme X... en paiement de sommes ; que, M. X... a interjeté appel du jugement du 4 octobre 2011 ; que, par ordonnance du 21 novembre 2012, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Akabois du 14 mai 2012 ; que, par ordonnance du 15 mai 2013, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. X... tendant à l'irrecevabilité des conclusions de la société Akabois du 7 mars 2013 ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 909 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer les conclusions du 7 mars 2013 recevables, l'ordonnance retient que les dispositions des articles 908 et suivants du code de procédure civile ne visent que les premiers échanges de conclusions, aucun texte ne venant sanctionner les échanges de conclusions postérieurs ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'irrégularité des premières conclusions de la société Akabois la privait de conclure à nouveau, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence de l'arrêt du 4 décembre 2014 et de l'arrêt du 9 avril 2015 ;

Et attendu qu'aucun grief n'est dirigé contre l'ordonnance rendue le 21 novembre 2012 par le conseiller de la mise en état ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'ordonnance rendue le 21 novembre 2012 par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Rennes ;

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, l'ordonnance du conseiller de la mise en état rendue 15 mai 2013 et les arrêts rendus les 4 décembre 2014 et 9 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant cour d'appel de Rennes autrement composée ;

Condamne la société Akabois aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Akabois et la condamne à payer la somme de 2 500 euros à M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance et des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 mai 2013 encourt la censure ;

EN CE QU'elle a rejeté la demande de M. X... tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions prises le 7 mars 2013 par la société AKABOIS ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « à la suite de l'ordonnance rendue le 21 novembre 2012, aucun calendrier de procédure n'a été établi, ce dont il résulte que par application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, il était permis aux parties de continuer à conclure ; que les dispositions des articles 908 et suivants du même code ne visent que les premiers échanges de conclusions, aucun texte ne venant sanctionner les échanges de conclusions postérieurs ; que dès lors, en déposant un second jeu de conclusions, contenant de nouveaux moyens et de nouvelles pièces, le 20 septembre 2012, Monsieur X... a ouvert un droit de réponse à la société AKABOIS ; qu'en effet, tant le principe du contradictoire que celui du droit à un procès équitable s'opposent à ce que les sanctions réglementaires susvisées puissent permettre à une partie, en se prévalant de l'irrecevabilité de conclusions antérieures de son adversaire, de continuer à développer son argumentation contre lui sans qu'il lui soit permis d'y répondre en défense ; que par conséquent, Monsieur X... est débouté de sa demande visant à voir déclarer irrecevables les conclusions du 7 mars 2013 de la société AKABOIS » (ordonnance, p. 2) ;

ALORS QUE, premièrement, l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour conclure à son tour ; que cette exigence fait obligation à l'intimé de produire, dans ce délai, des conclusions qui ne soient pas irrecevables pour une autre cause ; qu'en l'espèce, M. X... a notifié ses conclusions d'appelant le 23 mars 2012 ; que par ordonnance du 21 novembre 2012, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions prises le 14 mai 2012 par la société AKABOIS pour n'avoir pas été notifiées à Mme X... ; qu'en déclarant néanmoins recevables les nouvelles conclusions de la société AKABOIS datées du 7 mars 2013, l'ordonnance attaquée a été rendue en violation des articles 2, 909 et 914 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, l'expiration du délai de deux mois prévu à l'article 909 du code de procédure civile prive l'intimé de la possibilité de conclure, peu important que l'appelant ait par la suite déposé de nouvelles conclusions pour développer ses propres prétentions ; qu'en l'espèce, les premières conclusions d'intimé prises le 14 mai 2012 par la société AKABOIS ont été déclarées irrecevables par ordonnance de mise en état du 21 novembre 2012 ; qu'en déclarant néanmoins recevables les conclusions ultérieurement déposées le 7 mars 2013 par la société intimée pour cette seule raison que M. X... avait lui-même déposé de nouvelles conclusions le 20 septembre 2012, l'ordonnance attaquée a une nouvelle fois violé les articles 2, 909 et 914 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt du 9 avril 2015 encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de M. X... tendant à ce que la société AKABOIS remédie aux désordres et fait droit à la demande en payement de la société AKABOIS ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la demande de payement du solde de prix présentée par la société AKABOIS, le contrat de construction de maison individuelle liant les parties prévoit que la réception de l'ouvrage devait être réalisée sans assistance du maître de l'ouvrage par un professionnel ; que dès lors, par application de l'article R 231-7 du code de la construction et de l'habitation, le payement du solde du prix était payable dans les huit jours qui suivent la remise de clefs consécutive à la réception, en l'absence de réserves ou en présence de réserves à la date de levée de celle-ci ; qu'est versé aux débats un document du 16 décembre 2008, signé du maître d'ouvrage, aux termes duquel la réception est prononcée sans réserve, accompagné d'un second document énumérant des finitions à réaliser ; que les parties s'accordent dans leurs écritures sur la nature sans réserve de la réception, analyse qui n'a pas été modifiée dans le cadre de la réouverture des débats, mais considèrent que les finitions dénoncées dans le second document devaient être reprises à tout le moins dans le cadre de la garantie de parfait achèvement ; qu'au regard de ces éléments, le payement du solde du prix de la construction devait donc être effectué à l'issue de l'exécution des travaux de finition ; que sur ce point, les courriers échangés entre les parties et notamment ceux de la société AKABOIS des 21 avril et 5 juin 2009 montrent que les finitions énoncées le 16 décembre 2008 ont été réalisées ; que Monsieur X..., dans ses courriers postérieurs de novembre 2009 et de mars 2010, ne visent pas ces travaux mais des désordres ou défauts et notamment la hauteur des hublots et la difficulté de nettoyage, listés dans un constat d'huissier du 11 février 2009, défauts pour l'essentiel apparents à la réception et qui ont pour certains été repris par la société AKABOIS, comme le montrent les indications portées par l'appelant sur le constat ; qu'en conséquence, le maître de l'ouvrage qui ne peut invoquer utilement l'exception d'inexécution doit être condamné au payement du solde de prix de 10 968,54 euros avec intérêts à taux légal à compter de la mise en demeure du 5 novembre 2009 ; que le jugement doit être confirmé sur ce point ; que sur la demande de M. X... de voir remédier sous astreinte aux désordres énoncés dans le rapport du 20 janvier 2010, Monsieur X... fonde expressément sa demande sur la garantie décennale et sur la garantie de parfait achèvement ; qu'outre que les défauts relevés dans ce rapport n'ont pas été établis au contradictoire de la société AKABOIS, il apparaît qu'ils étaient pour un grand nombre apparents à la réception (réserves nécessaires à la pose de la porte d'accès au premier étage, hublots non-ouvrants et inaccessibles, absence de serrure extérieure de la porte fenêtre du second étage, absence d'arrêtoirs des portes coulissantes, mise en jeu de la porte coulissante de la salle de bains, absence de finition de champs plats ou plinthes de la terrasse) et à défaut d'avoir fait l'objet de réserves lors des opérations de réception le 16 décembre 2008 sont donc couverts par celleci et ne peuvent plus être invoqués ; que pour les autres défauts, ils ne peuvent entrer dans le cadre de la garantie de parfait achèvement qui est expirée depuis le 16 décembre 2009, ni dans celui de la garantie décennale, dès lors qu'il n'est pas démontré qu'ils portent atteinte à la solidité de l'ouvrage ou l'affectant dans un élément constitutif ou d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; que le propre expert de l'appelant ne fait état pour aucun des désordres cachés à la réception d'une possible évolution vers un désordre de nature décennale dans le délai d'épreuve ; qu'il en est de même du document de synthèse de études thermiques par infrarouge qui, tout en constatant des défauts, fuites d'air et ponts thermiques, énoncent cependant que la résistance thermique est suffisante au vu des normes applicables au moment de la construction et n'envisage aucune impropriété à destination de l'ouvrage dans un délai de dix ans ; qu'en conséquence, la demande d'exécution de travaux de M. X... ne peut être accueillie » (arrêt, p. 4) ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « sur la demande de payement, suivant contrat de construction du 29 octobre 2007, les époux X... confiaient à la société AKABOIS, constructeur de maisons en bois, l'édification d'un immeuble à usage d'habitation, situé [...]                à l'ILE TUDY ; que le 16 décembre 2008, les travaux donnaient lieu à une réception sans réserve ; que la société AKABOIS a donc exécuté ses obligations contractuelles ; que le fait qu'une liste de travaux restant à effectuer ou à parfaire était dressée le même jour que la signature du procès verbal de réception sans réserve est sans incidence en la matière, ce dernier constituant le point de départ des différentes garanties en ce domaine ; qu'en conséquence, il convient de débouter les époux X... de leur exception d'inexécution et de les condamner solidairement à payer à la société AKABOIS la somme de 10 968,54 euros ; avec intérêts au taux légal sur ladite somme à compter de la date de la mise en demeure de payer du 5 novembre 2009 ; que sur les autres demandes, il convient de débouter les époux X... de leur demande tendant à constater que les désordres invoqués par les maîtres d'ouvrage rendent la maison en bois construite par la société AKABOIS impropre à sa destintion ; qu'en effet, le propre expert des demandeurs, à savoir, EXPERTISE BRETAGNE ENVIRONNEMENT ne conclut pas en ce sens, faisant valoir que les désordres mis en évidence devront être repris dans le cadre de la garantie de parfait achèvement et de parfait fonctionnement, ce qui a pour effet d'en relativiser la portée ; que de la même manière, il convient de débouter les époux X... de leur demande (dont le fondement juridique n'est d'ailleurs pas précisé) tendant à la condamnation de la société AKABOIS à remédier aux désordres constatés suivant le rapport d'expertise en date du 20 janvier 2010, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard, en l'absence de caractère contradictoire des opérations ainsi menées à leur seule initiative » (jugement, p. 3) ;

ALORS QUE, premièrement, la cassation à intervenir de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 mai 2013 entraînera l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 9 avril 2015 ;

ALORS QUE, deuxièmement, l'exception d'inexécution peut être opposée par le maître de l'ouvrage au constructeur de la maison lorsque ce dernier n'a pas exécuté – même partiellement – ses obligations à l'encontre du maître de l'ouvrage ; que M. X... invoquait pour justifier le bien-fondé de l'exception d'inexécution opposée à la société AKABOIS certaines malfaçons ou non-façons ; que les juges du fond ont opposé que ces défauts étaient « pour l'essentiel apparents à la réception » et qu'ils avaient « pour certains, été repris par la société AKABOIS » (arrêt, p. 4 alinéa 2) ; que ce faisant, les juges du fond qui n'ont pas examiné si chacune des malfaçons ou non-façons invoquées étaient fondés, ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;

ALORS QUE, troisièmement, si les juges du fond ont entendu signifier par l'usage des formules « pour l'essentiel apparents à la réception » et « pour certains, [
] repris par la société AKABOIS » (arrêt, p. 4 alinéa 2) que certaines obligations invoquées par M. X... n'avaient pas été exécutées, ils auraient dû à tout le moins rechercher si à leur regard, l'exception d'inexécution était bien-fondée ; que faute de l'avoir fait, ils ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-20116
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 09 avril 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 28 fév. 2018, pourvoi n°15-20116


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:15.20116
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