LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Z 17-80.659 F-P+B
N° 3623
ND
31 JANVIER 2018
CASSATION SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
CASSATION SANS RENVOI sur les pourvois formés par M. Guillaume X..., l'association Les Républicains, partie civile, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 12 janvier 2017 qui, dans l'information suivie contre le premier des chefs de faux et usage de faux, abus de confiance, tentative d'escroquerie, complicité et recel de ces délits, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction déclarant recevable la constitution de partie civile de l'association Anticor AR ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 décembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller D'HUY, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONDON, les avocats ayant eu la parole en dernier ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 30 janvier 2017, joignant les pourvois et déclarant la requête sollicitant l'examen immédiat du pourvoi sans objet ;
Vu les mémoires, produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par M. Guillaume X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 2, 2-23, 3, 85, 86, 87, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance ayant déclaré recevable la constitution de partie civile de l'association Anticor ;
"aux motifs que, s'agissant de la forme, la constitution de partie civile dite incidente ou par intervention au cours de l'information judiciaire peut, aux termes des dispositions de l'article 87 du code de procédure pénale intervenir à tout moment de l'instruction ; qu'une telle constitution de partie civile n'est soumise, de par la loi, à aucune forme particulière, qu'elle peut résulter d'une simple lettre adressée au magistrat instructeur, l'unique prescription légale étant celle de l'article 89 du code de procédure pénale imposant à la partie civile d'effectuer une déclaration d'adresse ; qu'il n'est pas fait obligation à la partie civile de qualifier les faits ni de viser les textes applicables ni de joindre de quelconque justificatif à sa déclaration de constitution ; qu'il suffit que la volonté de constituer partie civile soit dépourvue d'équivoque et concerne les seuls faits pour lesquels l'information est ouverte ; qu'il résulte des statuts de l'association versés par l'avocat de celle-ci en annexe à son mémoire et déjà à sa déclaration de constitution, qu'en application de l'article 13, son avocat d'administration autorise le président à ester en justice ; que, par mémoire de la partie civile, "les Républicains" déposé la veille de l'audience du 1er novembre 2016, notamment la constitution de partie civile a été contestée quant au pouvoir qu'avait son représentant légal d'ester en justice au regard des statuts de l'association ; qu'aucune disposition légale n'interdit à la partie civile contestée de produire postérieurement à sa déclaration de constitution des documents complémentaires, notamment dans le cadre du contentieux devant la cour ; qu'aucune disposition légale n'édicte sur ce point une quelconque irrecevabilité des documents régulièrement versés ; qu'en exécution de l'arrêt avant dire droit précité, l'association Anticor, par l'intermédiaire de son avocat, produit en photocopie un extrait, signé de M. Grégoire B..., secrétaire général d'Anticor et de M. Jean-Christophe Y..., président d'Anticor, daté du 22 décembre 2016 et certifié conforme du compte rendu du conseil d'administration d'Anticor du 12 septembre 2015 ; qu'il résulte de cet extrait que le conseil d'administration valide le principe d'une plainte avec constitution de partie civile dans l'affaire Bygmalion ; que la constitution de partie civile résulte, comme ci-dessus mentionné, de la correspondance du 18 octobre 2015 adressée au magistrat instructeur par Me Jérôme Z..., avocat de l'association Anticor, qui déclarait se constituer partie civile dans l'affaire dite Bygmalion, soit un mois plus tard ; que cette correspondance mentionne expressément que l'association Anticor se constitue partie civile, dans un dossier "dit affaire Bygmalion", mettant en cause un système de fausses facturations entre l'UMP et la société Bygmalion, afin de permettre à M. Nicolas A... candidat à l'élection présidentielle de 2012, de faire des dépenses liées à sa campagne électorale prises en charge par l'UMP et non comptées dans les dépenses de campagne plafonnées par la loi ; qu'elle est nominativement adressée à M. Tournaire, juge d'instruction en charge de l'information susvisée ; qu'il en résulte que la volonté de constituer de se constituer partie civile est dépourvue d'équivoque et concerne les seuls faits pour lesquels l'information est ouverte ; que d'autre part il résulte de la procédure que l'association Anticor est une association habilitée au sens de l'article 2-23 du code de procédure pénale, et que l'information ne concerne aucune des infractions visées audit article ; que les magistrats instructeurs ont à juste titre relevé dans leur ordonnance qu'aucune de ces infractions n'est visée dans le réquisitoire introductif, ni dans les réquisitoires supplétifs délivrés par le parquet dans cette procédure; qu'aucune personne n'a été mise en examen d'un de ces chefs ; que cependant conformément à l'avis du ministère public du 30 mai 2016 exprimé à la suite de la contestation formulée par les avocats de M. Guillaume X... le 27 mai 2016, les juges d'instruction ont examiné la recevabilité de la constitution de partie civile au regard de l'article 2 du code de procédure pénale, l'association Anticor ayant pour objet de lutter contre toutes infractions à la probité publique ; que devant la juridiction d'instruction, pour qu'une constitution de partie civile soit recevable, il suffit que les circonstances sur lesquelles elle s'appuie permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale ; qu'il ne peut être exigé de la partie civile la justification de l'existence d'un préjudice personnel directement causé par l'infraction et que seule la possibilité de l'existence de celui-ci doit être démontrée et appréciée ; que par arrêté du 19 février 2015, l'association Anticor a reçu l'agrément, en vue de l'exercice des droits de la partie civile, d'association de lutte contre la corruption ; que cet arrêté dispose que l'association a fait l'objet d'une déclaration auprès de la préfecture de police le 25 avril 2003 paru le 7 juin 2003 ; que le 3 juin 2009 l'association Anticor a précisé son objet, ayant pour but de mener des actions en vue notamment de lutter contre la corruption et plus particulièrement celles afférentes aux milieux politiques et aux élus de la nation, que l'association exerce au travers de diverses manifestations publiques, campagnes de communication, diffusion de publications une action effective et publique en vue de lutter contre la corruption et la probité publique ; que l'association Anticor remplit donc les conditions prévues à l'article premier du décret numéro 2014-327 du 12 mars 2014 relatif aux conditions d'agrément des associations de lutte contre la corruption en vue de l'exercice des droits reconnus à la partie civile ; considérant que cet agrément n'a pour objet que de faciliter la constitution de partie civile de l'association s'agissant d'une liste limitative d'infractions visées à l'article 2-23 du code de procédure pénale ; que ni l'agrément ni l'article 2-23 ne peuvent avoir pour effet de priver l'association Anticor du droit de se constituer partie civile hors le champ des infractions limitativement énumérées par ce texte, si elle remplit les conditions pour ce faire ; que de par ses statuts, l'association Anticor a pour objet "de mener des actions en vue de réhabiliter la démocratie représentative, de promouvoir l'éthique en politique, de lutter contre la corruption et contre la fraude fiscale sur le plan national et international ; qu'elle produit et communique de l'information sur ses thématiques et mène des actions ayant le rôle d'éducation et de prévention à destination de tous les citoyens ; que, sous le terme de corruption, l'association vise toutes les formes de malversations et de manquements, notamment conflit d'intérêts, abus de biens sociaux, trafic d'influence, détournement de fonds publics, prise illégale d'intérêts et plus généralement toutes infractions à la probité publique" (article 1 des statuts) ; que les infractions visées aux réquisitoires introductif et supplétifs ci-dessus mentionnés sont de celles que l'association Anticor s'est fait pour mission de prévenir, en consacrant ses moyens à sa mission, comme elle en justifie par les pièces versées avec son mémoire, notamment par ses interventions publiques, ses actions de communication et ses publications ; que l'association Anticor justifie de nombreuses auditions par les pouvoirs publics en lien direct avec son objet social, notamment en 2009 par le président du Sénat, en 2010 au conseil d'Etat, en 2011 par la commission nationale chargée de formuler des propositions sur les conflits d'intérêts, la même année à l'Assemblée nationale, en 2012 par l'OCDE ainsi que le 17 avril 2012 au Sénat à propos du financement de la vie politique, et encore en septembre 2012 à Matignon ; qu'elle justifie également de sa participation à des émissions télévisuelles comme en octobre 2008 pour l'encadrement et la transparence des activités de lobbying, de l'organisation "d'universités annuelles" et qu'elle public des articles et des revues en lien direct avec son objet social qu'elle est donc fondée à agir en justice au nom des intérêts collectifs qui entrent directement dans son objet social ; qu'à les supposés établis, les délits poursuivis, spécialement ceux d'escroquerie commise au préjudice de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et du Conseil constitutionnel, s'agissant de la minoration des dépenses engagées à l'occasion de la campagne présidentielle 2012 et présentées dans le cadre du contrôle des comptes de campagne, et de financement illégal de campagne électorale, seraient de nature à causer à l'association Anticor un préjudice direct et personnel en raison de la spécificité du but et de l'objet de sa mission ; que l'ordonnance de recevabilité de constitution de partie civile doit être confirmée ;
"1°) alors qu'aux termes de l'article 2 du code de procédure pénale, l'action civile ne peut être exercée devant les juridictions pénales que par celui qui a subi un préjudice personnel prenant directement sa source dans l'infraction poursuivie ; que par exception, le législateur a prévu des habilitations spécifiques pour certaines associations, qui peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne certaines infractions précisément énumérées ; qu'il en va ainsi pour les associations se proposant de lutter contre la corruption, habilitées par l'article 2-23 du code de procédure pénale pour exercer les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction ne pouvait déclarer recevable la constitution de partie civile de l'association Anticor après avoir expressément constaté, tout comme les magistrat instructeurs dans leur ordonnance, que "l'information ne concerne aucune des infractions visées audit article" ;
"2°) alors que l'habilitation légale à exercer les droits reconnus par la partie civile prévue par l'article 2-23 du code de procédure pénale ne peut trouver à s'appliquer que pour les infractions limitativement énumérées par ce texte ; que "sous le terme de corruption, l'association vise toutes les formes de malversations et de manquements, notamment conflit d'intérêts, abus de biens sociaux, trafic d'influence, détournement de fonds publics, prise illégale d'intérêts et plus généralement toutes infractions à la probité publique" pour en déduire que "les infractions visées aux réquisitoires introductif et supplétifs ci-dessus mentionnés sont de celles que l'association Anticor s'est fait pour mission de prévenir, en consacrant ses moyens à sa mission", la chambre de l'instruction a forcé le système d'habilitation légale et violé l'article 2-23 du code de procédure pénale ;
"3°) alors qu'en tout état de cause, aux termes de l'article 2 du code de procédure pénale, l'action civile ne peut être exercée devant les juridictions pénales que par celui qui a subi un préjudice personnel prenant directement sa source dans l'infraction poursuivie ; que le fait pour une association de prendre de défendre un intérêt collectif ne permet pas de considérer que l'atteinte qui y est porté lui cause un préjudice personnel ; que la chambre de l'instruction s'est manifestement prononcée par des motifs erronés en considérant que l'association Anticor était "fondée à agir en justice au nom des intérêts collectifs qui entrent directement dans son objet social" et qu'à les supposer établis, les délits poursuivis seraient de nature à lui causer "un préjudice direct et personnel en raison de la spécificité du but et de l'objet de sa mission" ;
"4°) alors qu'enfin, aux termes de l'article 2 du code de procédure pénale, et sauf dérogation législative, l'action civile ne peut être exercée devant les juridictions pénales que par celui qui a subi un préjudice personnel prenant directement sa source dans l'infraction poursuivie ; que s'il résulte de l'article 85 du même code que la constitution de partie civile est appréciée plus souplement au stade de l'instruction, encore faut-il qu'il puisse être considéré que le préjudice allégué est personnel et s'inscrit en relation direct avec l'infraction poursuivie ; qu'en déduisant de ce dernier texte "qu'il ne peut être exigé de la partie civile la justification de l'existence d'un préjudice personnel directement causé par l'infraction et que seule la possibilité de l'existence de celui-ci doit être démontrée et appréciée" pour admettre la constitution de partie civile d'Anticor, la chambre de l'instruction a fait une mauvaise application des articles 2 et 85 du code de procédure pénale" ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour l'association Les Républicains, pris de la violation des articles 2, 2-23, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'association Anticor ;
"aux motifs propres que s'agissant de la forme, la constitution de partie civile dite incidente ou par intervention au cours de l'information judiciaire peut, aux termes des dispositions de l'article 87 du code de procédure pénale intervenir à tout moment de l'instruction ; qu'une telle constitution de partie civile n'est soumise, de par la loi, à aucune forme particulière qu'elle peut résulter d'une simple lettre adressée au magistrat instructeur, l'unique prescription légale étant celle de l'article 89 du code de procédure pénale imposant à la partie civile d'effectuer une déclaration d'adresse ; qu'il n'est pas fait obligation à la partie civile de qualifier les faits ni de viser les textes applicables ni de joindre de quelconque justificatif à sa déclaration de constitution ; qu'il suffit que la volonté de se constituer partie civile soit dépourvue d'équivoque et concerne les seuls faits pour lesquels l'information est ouverte ; qu'il résulte des statuts de l'association versés par l'avocat de celle-ci en annexe à son mémoire et déjà à sa déclaration de constitution qu'en application de l'article 13, son conseil d'administration autorise le président à ester en justice ; que par mémoire de la partie civile "les Républicains", déposé la veille de l'audience du 1er novembre 2016, notamment la constitution de partie civile a été contestée quant au pouvoir qu'avait son représentant légal d'ester en justice au regard des statuts de l'association ; qu'aucune disposition légale n'interdit à la partie civile contestée de produire postérieurement à sa déclaration de constitution des documents complémentaires, notamment dans le cadre du contentieux devant la cour ; qu'aucune disposition légale n'édicte sur ce point une quelconque irrecevabilité des documents régulièrement versés ; qu'en exécution de l'arrêt avant dire droit précité l'association Anticor, par l'intermédiaire de son avocat, produit en photocopie un extrait, signé de M. B..., secrétaire général d'Anticor et de M. Y..., président d'Anticor, daté du 22 décembre 2016 et certifié conforme du compte rendu du conseil d'administration d'Anticor du 12 septembre 2015; qu'il résulte de cet extrait que le conseil d'administration valide le principe d'une plainte avec constitution de partie civile dans l'affaire Bygmalion ; que la constitution de partie civile résulte, comme ci-dessus mentionné, de la correspondance du 18 octobre 2015 adressée au magistrat instructeur par Me Z..., avocat de l'association Anticor, qui déclarait se constituer partie civile dans l'affaire dite Bygmalion, soit un mois plus tard ; que cette correspondance mentionne expressément que l'association Anticor se constitue partie civile "dans un dossier "dit affaire Bygmalion" mettant en cause un système de fausses facturations entre l'UMP et la société Bygmalion afin de permettre à M. A..., candidat à l'élection présidentielle de 2012, de faire des dépenses liées à sa campagne électorale prises en charge par l'UMP et non comptées dans les dépenses de campagne plafonnées par la loi" ; qu'elle est nominativement adressée à M. Tournaire, juge d'instruction en charge de l'information susvisée ; qu'il en résulte que la volonté de se constituer partie civile est dépourvue d'équivoque et concerne les seuls faits pour lesquels l'information est ouverte ; que d'autre part qu'il résulte de la procédure que l'association Anticor est une association habilitée au sens de l'article 2-23 du code de procédure pénale, et que l'information ne concerne aucune des infractions visées audit article ; que les magistrats instructeurs ont à juste titre relevé dans leur ordonnance qu'aucune de ces infractions n'est visée dans le réquisitoire introductif, ni dans les réquisitoires supplétifs délivrés par le parquet dans cette procédure ; qu'aucune personne n'a été mise en examen d'un de ces chefs ; que cependant conformément à l'avis du ministère public du 30 mai 2016 exprimé à la suite de la contestation formulée par les avocats de M. X... le 27 mai 2016, les juges d'instruction ont examiné la recevabilité de la constitution de partie civile au regard de l'article 2 du code de procédure pénale, l'association Anticor ayant pour objet de lutter contre toutes infractions à la probité publique ; que devant la juridiction d'instruction, pour qu'une constitution de partie civile soit recevable, il suffit que les circonstances sur lesquelles elle s'appuie permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale ; qu'il ne peut être exigé de la partie civile la justification de l'existence d'un préjudice personnel directement causé par l'infraction et que seule la possibilité de l'existence de celui-ci doit être démontrée et appréciée ; que, par arrêté du 19 février 2015, l'association Anticor a reçu l'agrément, en vue de l'exercice des droits de la partie civile, d'association de lutte contre la corruption ; que cet arrêté dispose que l'association a fait l'objet d'une déclaration auprès de la préfecture de police le 25 avril 2003 paru le 7 juin 2003 ; que, le 3 juin 2009, l'association Anticor a précisé son objet ,ayant pour but de mener des actions en vue notamment de lutter contre la corruption et plus particulièrement celles afférentes aux milieux politiques et aux élus de la nation, que l'association exerce au travers de diverses manifestations publiques, campagnes de communication, diffusion de publications une action effective et publique en vue de lutter contre la corruption et la probité publique ; que l'association Anticor remplit donc les conditions prévues à l'article premier du décret numéro 2014-327 du 12 mars 2014 relatif aux conditions d'agrément des associations de lutte contre la corruption en vue de l'exercice des droits reconnus à la partie civile ; que cet agrément n'a pour objet que de faciliter la constitution de partie civile de l'association s'agissant d'une liste limitative d'infractions visées à l'article 2-23 du code de procédure pénale ; que ni l'agrément ni l'article 2-23 ne peuvent avoir pour effet de priver l'association Anticor du droit de se constituer partie civile hors le champ des infractions limitativement énumérées par ce texte, si elle remplit les conditions pour ce faire ; que de par ses statuts l'association Anticor a pour objet "de mener des actions en vue de réhabiliter la démocratie représentative, de promouvoir l'éthique en politique, de lutter contre la corruption et contre la fraude fiscale sur le plan national et international, elle produit et communique de l'information sur ses thématiques et mène des actions ayant un rôle d'éducation et de prévention à destination de tous les citoyens ; que sous le terme de corruption, l'association vise toutes les formes de malversations et de manquements, notamment conflit d'intérêts, abus de biens sociaux, trafic d'influence, détournement de fonds publics, prise illégale d'intérêts et plus généralement toutes infractions à la probité publique" (article 1 des statuts) ; que les infractions visées aux réquisitoires introductif et supplétifs ci-dessus mentionnés sont de celles que l'association Anticor s'est fait pour mission de prévenir, en consacrant ses moyens à sa mission, comme elle en justifie par les pièces versées avec son mémoire, notamment par ses interventions publiques, ses actions de communication et ses publications ; que l'association Anticor justifie de nombreuses auditions par les pouvoirs publics en lien direct avec son objet social, notamment en 2009 par le président du Sénat ,en 2010 au Conseil d'Etat, en 2011 par la commission nationale chargée de formuler des propositions sur les conflits d'intérêts, la même année à l'Assemblée nationale, en 2012 par l'OCDE ainsi que le 17 avril 2012 au Sénat à propos du financement de la vie politique, et encore en septembre 2012 à Matignon ; qu'elle justifie également de sa participation à des émissions télévisuelles comme en octobre 2008 pour l'encadrement et la transparence des activités de lobbying, de l'organisation "d'universités annuelles" et qu'elle publie des articles et des revues en lien direct avec son objet social qu'elle est donc fondée à agir en justice au nom des intérêts collectifs qui entrent directement dans son objet social ; qu'à les supposés établis, les délits poursuivis, spécialement ceux d'escroquerie commise au préjudice de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et du Conseil constitutionnel, s'agissant de la minoration des dépenses engagées à l'occasion de la campagne présidentielle 2012 et présentées dans le cadre du contrôle des comptes de campagne, et de financement illégal de campagne électorale, seraient de nature à causer à l'association Anticor un préjudice direct et personnel en raison de la spécificité du but et de l'objet de sa mission ; que l'ordonnance de recevabilité de constitution de partie civile doit être confirmée ;
"et aux motifs, à les supposer adoptés, que l'association Anticor a été agréée par arrêté du ministère de la justice du 19 février 2015 pour exercer les droits de la partie civile au titre de l'article 2-23 du code de procédure pénale ; que cet article ne vise que les infractions traduisant un manquement au devoir de probité, réprimées aux articles 432-10 à 432-15 du code pénal, les infractions de corruption et trafic d'influence, réprimées aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435.10 et 445-1 à 445.2-1 du même code, les infractions de recel ou de blanchiment, réprimées aux articles 3214, 321-2, 324-1 et 324-2 dudit code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux Leet 20 de cet article, les infractions réprimées aux articles L. 106 à L. 109 du code électoral ; qu'aucune de ces infractions n'est visée dans le réquisitoire introductif, ni dans les réquisitoires supplétifs délivrés par le parquet dans cette procédure ; qu'aucune personne n'a été mise en examen d'un de ces chefs ; que toutefois qu'il résulte d'une jurisprudence de la Cour de cassation que par application de l'article 2 du code de procédure pénale, une association, peut, même hors habilitation législative, agir en justice au nom d'intérêts collectifs dès lors que ceux-ci entrent dans son objet social (notamment Crim. 9 novembre 2010) ; qu'il ressort des statuts de l'association Anticor que celle-ci a notamment pour objet "de mener des actions en vue de réhabiliter la démocratie représentative, de promouvoir l'éthique en politique, de lutter contre la corruption et contre la fraude fiscale sur le plan national et international ; qu'elle produit et communique de l'information sur ces thématiques et mène des actions ayant un rôle d'éducation et de prévention à destination de tous les citoyens ; que sous le terme de corruption, l'association vise toutes les formes de malversations et de manquements, notamment conflits d'intérêt, abus de biens sociaux, trafics d'influence, détournements de fonds publics, prise illégale d'intérêt et plus généralement toute infraction à la probité publique" ; que les faits dont nous sommes saisis sous la qualification de faux et usage de faux, abus de confiance, escroquerie et tentative d'escroquerie, financement illégal de campagne électorale, concernent notamment un montage de fausse facturation qui aurait été mis en place par des responsables de l'UMP, de l'équipe de campagne du candidat M. A..., et des dirigeants de l'agence événementielle Event etamp; Cie, afin de minorer le montant des dépenses de meetings du candidat ; que l'information judiciaire a aussi mis à jour l'omission de nombreuses autres dépenses électorales dans les comptes de campagne ; que ces faits qui visaient à dissimuler le dépassement du plafond légal par le candidat, étaient susceptibles de remettre en cause les principes de transparence et d'égalité entre les candidats prévus par le législateur ; qu'ils ont en outre conduit I'UMP, dont une large partie du financement est d'origine publique, à supporter des charges indues, avec pour conséquence d'augmenter son endettement dans des proportions importantes ; que dans ces conditions, et à les supposer établis, ces faits ont causé à l'association Anticor un préjudice personnel directement causé par les infractions dénoncées, qui portent atteinte aux intérêts collectifs qu'elle défend et qui constituent un des aspects de son activité ;
"alors qu'en dehors des habilitations législatives spécifiques, l'action civile d'une association n'est recevable que si elle a été directement et personnellement lésée par l'infraction reprochée au prévenu ; que pour juger que les délits poursuivis, notamment celui d'escroquerie commise au préjudice de la commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques, seraient de nature à causer un préjudice direct et personnel à l'association Anticor, la chambre de l'instruction s'est exclusivement fondée sur l'objet statutaire de cette association et sur ses actions de communication et d'information, circonstances impropres à caractériser un préjudice direct et personnel, violant ainsi les dispositions susvisées" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 2 et 2-23 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, l'action civile en réparation du dommage causé par un délit appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par cette infraction et que le second limite l'exercice de l'action civile par les associations agréées de lutte contre la corruption aux seules infractions visées par ce texte ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de la procédure que les juges d'instruction ont déclaré recevable la constitution de partie civile de l'association Anticor, agréée déclarée depuis au moins cinq ans et se proposant par ses statuts de lutter contre la corruption, dans le cadre de l'information ouverte contre le demandeur au pourvoi des chefs susvisés ; que ce dernier, ainsi que l'association Les Républicains, partie civile, ont interjeté appel de cette décision ;
Attendu que pour confirmer l'ordonnance des juges d'instruction, l'arrêt attaqué prononce par les motifs intégralement repris aux moyens ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi alors que, d'une part, comme le relève l'arrêt, l'information judiciaire ne concerne aucune des infractions mentionnées à l'article 2-23 du code de procédure pénale, d'autre part, l'association Anticor ne justifie pas d'un préjudice personnel directement causé par les délits poursuivis, au sens de l'article 2 du même code, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 12 janvier 2017 ;
DECLARE irrecevable la constitution de partie civile de l'association Anticor ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi DAR ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge où à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente et un janvier deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.