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31/01/2018 | FRANCE | N°16-20480

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 janvier 2018, 16-20480


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Alpa Senso de son désistement à l'égard de Pôle emploi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé à compter du 24 février 1997 par la société CVPA, aujourd'hui dénommée Alpa Senso, en qualité d'ingénieur conseil et de commercial ; que licencié pour inaptitude physique totale et définitive et impossibilité de reclassement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 31 mars 2010 de diverses demandes ;

Sur les premier, deuxième, quatrième

et cinquième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Alpa Senso de son désistement à l'égard de Pôle emploi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé à compter du 24 février 1997 par la société CVPA, aujourd'hui dénommée Alpa Senso, en qualité d'ingénieur conseil et de commercial ; que licencié pour inaptitude physique totale et définitive et impossibilité de reclassement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 31 mars 2010 de diverses demandes ;

Sur les premier, deuxième, quatrième et cinquième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 8221-5 du code du travail dans sa version applicable au litige ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser au salarié une somme au titre du travail dissimulé, l'arrêt retient que les circonstances sus-évoquées suffisent à établir l'intention de dissimulation ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans avoir caractérisé l'élément intentionnel du travail dissimulé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le sixième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Alpa Senso à payer à M. Y... la somme de 15 012,36 euros au titre du travail dissimulé, l'arrêt rendu le 13 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation ,chambre sociale, prononcé et signé par Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président et M. Schamber, conseiller en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile en l'audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour la société Alpa Senso

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR annulé l'avertissement qu'elle a notifié à M. Y... le 10 avril 2007 ;

AUX MOTIFS QU'« il était fait reproche à M. Y... de retards dans l'envoi aux clients des rapports d'intervention, retards que rien ne justifiait et que le salarié n'aurait pas mis tout en oeuvre pour éviter ; que la lettre fait référence à l'explication donnée par le salarié, à savoir une panne d'ordinateur, à laquelle il aurait pu, selon l'employeur, être remédié par une intervention dans un cybercafé ; qu'en réponse à cet avertissement, M. Y... s'était expliqué longuement par écrit en rappelant les défaillances du matériel mis à sa disposition, la difficulté de trouver un cybercafé quand il est en déplacement et l'impossibilité de transmission des rapports à partir des hôtels où il se trouve ; qu'aucune explication factuelle complémentaire, ni élément de preuve ne sont produits aux débats par la société Alpa Senso, notamment quant à la fréquence et à la durée des retards observés et, en cet état, il ne peut qu'être constaté l'absence de démonstration d'un comportement fautif qui seul pouvait appeler une réponse disciplinaire » ;

1°) ALORS QU'en reprochant à la société Alpa Senso de ne pas rapporter la preuve d'un comportement fautif de son salarié, quand M. Y... se bornait à justifier ses retards, sans en nier la réalité, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, à tout le moins, QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (conclusions, p. 29, § 1er), si M. Y... n'avait pas la possibilité d'aviser l'entreprise d'une quelconque difficulté quant à l'envoi aux clients de la société Alpa Senso des rapports d'intervention, de telle sorte que toute disposition utile aurait pu être prise pour gérer les relations avec les clients en question, ce dont il aurait résulté qu'en s'abstenant de le faire, le salarié avait commis une faute, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué DE L'AVOIR condamnée à payer à M. Y... la somme de 13 521,66 € à titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents et celle de 2 212,49 € au titre du repos compensateur ;

AUX MOTIFS QUE « suivant l'avenant du 1er décembre 2006, le poste comportait une forte mobilité sur le quart nord-ouest avec des interventions, en particulier en Normandie, Pays de Loire, Centre, Bretagne et Ile de France, les missions consistant dans le suivi des clients (toutes localisations), de sorte qu'il impliquait des déplacements sur des lieux de travail nécessairement autres que le siège de la société, le contrat de travail prévoyant en outre un remboursement des frais de déplacement pour les déplacements effectués "dans le cadre des fonctions" ; qu'il sera relevé encore que l'analyse des temps de travail demandée à Mme B... incluait l'analyse des temps de déplacement, le procès-verbal de réunion de DP énonçant d'ailleurs qu'"il avait été convenu que les consultants soumettraient une réflexion sur la notion de trajet moyen pour pouvoir établir le temps de travail effectif", toutes observations qui ne peuvent que conduire la société intimée à soutenir sérieusement que les temps de déplacement n'étaient en aucun cas du temps de travail effectif ; que par ailleurs, il sera relevé qu'il n'appartient pas à la cour de rechercher dans les annotations manuscrites portées, en marge des décomptes figurant au dossier de la société, de façon interrogative ou sous forme de commentaires tenant en un mot avec un point d'exclamation, de ce qui correspondrait à des contestations qui ne sont émises dans les conclusions qu'en des termes généraux sans référence à des dates précises, étant encore relevé que la seule référence aux heures de prise de carburant ou de paiement de la note d'hôtel ne suffit pas à établir une déclaration mensongère sur le temps de travail » ;

1°) ALORS QU'en se bornant à affirmer que les missions confiées à M. Y... impliquaient nécessairement des déplacements professionnels assimilables à du temps de travail effectif, sans procéder à l'analyse concrète des déplacements litigieux, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE les juges ne peuvent écarter la demande d'une partie au seul motif qu'il appartenait à celle-ci de reprendre expressément dans ses conclusions les éléments précis figurant dans un élément de preuve versé aux débats et qu'ils sont tenus d'examiner ; qu'en estimant qu'il ne lui appartient pas de rechercher dans les annotations manuscrites portées, en marge des décomptes figurant au dossier de la société ce qui correspondrait à des contestations, la cour d'appel a méconnu son office et violé les articles 4 et 12 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la cassation à intervenir du chef des heures supplémentaires entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef de l'arrêt relatif au repos compensateur qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué DE L'AVOIR condamnée à payer à M. Y... la somme de 15 012,36 € au titre du travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE « les circonstances sus-évoquées [relatives aux heures supplémentaires] suffisent à établir l'intention de dissimulation » ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir du chef des heures supplémentaires entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef de l'arrêt relatif au travail dissimulé qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE le simple constat de réalisation d'heures supplémentaires non rémunérées ne peut suffire à caractériser l'intention de l'employeur de dissimuler l'emploi de son salarié ; qu'en se bornant à retenir que les circonstances évoquées relatives aux heures supplémentaires suffisent à établir l'intention de dissimulation, sans autrement caractériser cette intention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 8221-5 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué DE L'AVOIR condamnée à verser à M. Y... la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la somme de 7 506,18 € à titre d'indemnité de préavis et à titre de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « outre que l'avis du médecin du travail, établi dans les conditions de l'article R. 4624-31 du code du travail, était non un avis d'inaptitude mais un avis d'aptitude à la fonction d'ingénieur conseil sous réserve d'un aménagement tenant à la réduction du secteur géographique, l'employeur n'a étudié aucune possibilité d'aménagement de ce poste, procédant à la pure affirmation que ce poste ne pouvait, par définition, être aménagé, ce qui a conduit le médecin du travail à préciser que le salarié était inapte au poste antérieur non aménagé ; que cette précision quant à l'inaptitude apportée dans la lettre du 19 janvier ne l'a effectivement été qu'en réponse aux seules affirmations de l'employeur sur une impossibilité d'aménagement mais elle n'est en aucun cas la démonstration, laquelle incombe à ce dernier, de ce que le poste antérieur ne pouvait faire l'objet d'aménagement par réduction du secteur géographique et force est de relever qu'aucun autre élément n'est apporté en ce sens, la société intimée se bornant à invoquer le contenu de la lettre susvisée sans apporter le moindre élément sur l'impossibilité d'aménagement du poste d'ingénieur conseil ; que, s'agissant de la proposition du poste de technicien préleveur, il ne peut qu'être constaté qu'elle n'était pas conforme aux prescriptions du médecin du travail en ce qu'elle ne comportait aucune réduction du temps de travail quotidien trajet compris, puisque l'horaire demeurait celui de 38 heures par semaine auquel devaient s'ajouter les trajets entre le domicile du salarié à Saint Lô et le siège social représentant 280 kilomètres par jour» ;

1°) ALORS QU'en l'absence de recours, exercé devant l'inspecteur du travail, contre les avis du médecin du travail, ceux-ci s'imposent au juge ; qu'en ne donnant aucun effet à l'avis définitivement donné par le médecin du travail le 19 janvier 2009 concluant à l'inaptitude à la reprise de M. Y... sur le poste antérieur, quand celui-ci n'avait cependant pas été frappé de recours, la cour d'appel a violé l'article L. 4624-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en retenant que la proposition de poste faite à M. Y... n'était pas conforme aux prescriptions médicales, dans la mesure où elle n'emportait aucune réduction du temps de travail quotidien trajet compris, quand le médecin du travail préconisait, dans son dernier avis en date du 19 janvier 2009, la réduction du temps de travail quotidien et hebdomadaire « hors temps de trajet domicile-lieu de travail », la cour d'appel a, malgré l'interdiction qui lui est faite, dénaturé ce document.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué DE L'AVOIR condamnée à verser à M. Y... la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts pour comportements vexatoires ;

AUX MOTIFS QUE « les circonstances de délivrance d'avertissement et reproche injustifiés justifient l'octroi de dommages et intérêts distincts » ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de l'annulation de l'avertissement du 10 avril 2007 entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef de l'arrêt relatif à la condamnation pour comportements vexatoires, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, à tout le moins, QU'en retenant que les circonstances de délivrance d'avertissement et reproche injustifiés justifient l'octroi de dommages et intérêts distincts, la cour d'appel, qui a statué par des motifs insuffisants à caractériser la faute de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail, a violé l'article 1147 du code civil.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Alpa Senso fait grief à l'arrêt attaqué DE L'AVOIR condamnée à rembourser à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées à M. Y... dans la limite de six mois ;

ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître les exigences de l'article 455 du code de procédure civile, prononcer une telle condamnation sans l'assortir d'aucun motif.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-20480
Date de la décision : 31/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 13 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 jan. 2018, pourvoi n°16-20480


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Zribi et Texier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.20480
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