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25/01/2018 | FRANCE | N°17-10496

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 janvier 2018, 17-10496


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1792 du code civil, ensemble les articles 1147 et 1203 du même code, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que chaque responsable d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 novembre 2016), que la société Blanc a confié à la société Lagarrigue, assurée auprès de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des trava

ux publics (la SMABTP), la fourniture et la pose du carrelage des terrasses de quatre bâtiments d...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1792 du code civil, ensemble les articles 1147 et 1203 du même code, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu que chaque responsable d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 novembre 2016), que la société Blanc a confié à la société Lagarrigue, assurée auprès de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP), la fourniture et la pose du carrelage des terrasses de quatre bâtiments d'un ensemble immobilier lui appartenant ; que les travaux ont été réalisés du mois d'octobre 2008 au mois de juin 2009 ; que, des désordres étant apparus durant l'hiver 2009/2010, la société Nuova ceramica casa, fabricant des carrelages, a procédé à leur remplacement ; qu'à la suite de l'apparition de ces désordres, la société Blanc, après avoir obtenu en référé la désignation d'un expert, a assigné la société Lagarrigue et son assureur en indemnisation ;

Attendu que, pour limiter à 25 % du coût total des travaux de reprise la condamnation prononcée à l'encontre de la société Lagarrigue et de la SMABTP au profit de la société Blanc, l'arrêt retient que l'expert propose d'imputer à la société Nuova ceramica casa une part de responsabilité dans le sinistre de 75 % et à la société Lagarrigue une part de 25 %, que, s'agissant de la part du sinistre dont l'expert attribue distinctement la responsabilité au fournisseur, il incombe à la société Blanc de démontrer que la société Lagarrigue y a participé pour obtenir sa condamnation, que les travaux ont été exécutés par la société Lagarrigue du mois d'octobre 2008 au mois de juin 2009 tandis que l'intervention de la société Nuova ceramica casa est postérieure à l'hiver 2009/2010, au cours duquel l'émail recouvrant le grès s'est dégradé et écaillé, et que l'expert a constaté que, si les profilés n'avaient pas été gélifs et si le fabricant n'avait pas repris de façon inacceptable le chantier, le désordre n'aurait pas présenté l'ampleur connue à ce jour ;

Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que la société Lagarrigue, à laquelle il pouvait être reproché l'insuffisance des joints de fractionnement, l'absence de joint de dilatation aux droits des maçonneries, l'insuffisance ou l'absence de double encollage ponctuel, l'insuffisance de pente et la pose de carreaux de surface supérieurs à 2 200 cm², interdite avec les systèmes mis en oeuvre, avait commis, dans l'exécution de l'ouvrage, des malfaçons ayant contribué, avec les fautes de la société Nuova ceramica casa, à la réalisation des désordres, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne, ensemble, la société Lagarrigue et la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Lagarrigue et de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics et les condamne, ensemble, à payer à la société Blanc la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Blanc

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir condamné in solidum la société Lagarrigue et la SMABTP à indemniser la SCI Blanc à hauteur seulement de 25% de la somme de 218 785, 89 € TTC, indexée sur l'indice BT01 à compter du 27 novembre 2014, d'Avoir rejeté toute autre demande et d'Avoir dit que les frais et dépens, incluant les frais de référé, d'expertise et d'appel, seront supportés à concurrence de 75% par la SCI Blanc et de 25% par la société Lagarrigue et la SMABTP ;

Aux motifs que, aux termes de l'article 1792 du Code Civil : « tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maitre ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, mêmes résultats d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destinations » ; que les sociétés LAGARRIGUE et SMABTP ne contestent pas le caractère décennal des désordres constatés par l'expert qui a affirmé qu'ils rendent l'ouvrage impropre à sa destination ; qu'il résulte du rapport d'expertise que la SARL LAGARRIGUE a mis en oeuvre les carreaux sur une nappe drainante en acceptant le support pour les bâtiment principaux n°1 et 2 (maison de maître et son extension)ou en refaisant une nouvelle chape pour les bâtiments secondaires n°3 et 4 ; que le produit fourni, le torello, qui était gélif et donc affecté d'un vice de fabrication par le fournisseur, la nappe drainante faisait son office et l'eau s'évacuait en tête des terrasses comme prévu ; que la société NUOVA CERAMICA CASA a procédé au remplacement du torello gélif par un torello de profil et de dimension différents mais surtout avec un système de pose différent, à savoir collé en tête de terrasse et non tenu mécaniquement ; que pour le poser dans de bonnes conditions, il fallait, sinon remettre l'exact identique torello mais au moins un profilé de rive tenu mécaniquement et ne bloquant pas la sortie d'eau de terrasse ; que l'expert a expliqué que la pose d'un profilé de rive avec nappe PVC obligeait à déposer, une voire deux rangs de carreaux en bout de terrasse, sur toute la longueur des terrasses, pour passer sous le carreau, la structure PVC le maintenant mécaniquement et qu'il s'agissait là d'un travail important et délicat car il convenait de reprendre la nappe drainante tout le long des terrasses et de reprendre également le collage ou bien la tenue mécanique des carreaux contre la tranche des terrasses ; que l'expert a constaté que la société NUOVA CERAMICA CASA, loin d'assurer la prestation ainsi exigée, s'est contentée de venir coller un profilé contre le nez de terrasse, en sorte que l'écoulement de l'eau en provenance de la nappe drainante a été bloqué, ce qui explique la chute des torellos mais également le blocage de l'eau dans la nappe drainante sous les carreaux, ce qui a eu pour conséquence de favoriser leur décollement par amas et délitement de la colle ; que l'expert a ainsi retenu que la part la plus importante du sinistre résulte de la faute technique commise par la société NUOVA CERAMICA CASA et consistant, d'une part, dans la fourniture d'un torello gélif et, d'autre part et surtout, dans une répartition tout à fait inadaptée, incomplète et ne respectant aucunement le système de drainage existant ; que l'expert a prononcé d'imputer à la société NUOVA CERAMICA CASA une part de responsabilité dans le sinistre de 75% et la SARL LAGARRIGUE une part de 25% ; que, s'agissant de la part du sinistre dont l'expert attribue distinctement la responsabilité au fournisseur dont il a précisément décrit l'intervention et le mode opératoire, il incombe à la SCI BLANC de démontrer que la SARL LAGARRIGUE y a participé pour obtenir sa condamnation ; qu'à cet égard, l'examen de la facture finale des travaux réalisés par la SARL LAGARRIGUE en date du 30 septembre 2009 et une situation récapitulative des situations qui révèle que les travaux ont été exécutés du mois d'octobre 2008 au mois de juin 2009 ; Or que ce n'est qu'au cours de l'hiver 2009-2010 que l'émail recouvrant le grès s'est dégradé et écaillé provoquant l'intervention de la société NUOVA CERAMICA CASA qui a procédé au remplacement des torellos défectueux qu'elle a fournis et posés sans aucune participation de la SARL LAGARRIGUE dont les prestations avaient été achevées l'été précédent et payées ; que l'expert a, par ailleurs, reproché à la SARL LAGARRIGUE l'insuffisance de joints de fractionnement, l'absence de joint de dilation aux droits des maçonneries, l'insuffisance ou l'absence de double encollage ponctuel, l'insuffisance de pente sur environ 50% de la surface des terrasses et la pose de carreaux de surface supérieur de 2200 m², interdite avec les systèmes mis en oeuvre ; qu'il a précisé que le défaut de collage ponctuel des carreaux peut avoir comme conséquence le défaut d'adhérence et le soulèvement de carreaux mais que si les profilés n'avaient pas été gélifs, et si la société NUOVA CERAMICA CASA n'avait pas repris de façon inacceptable le chantier tel qu'il l'a constaté, le désordre n'aurait pas présenté l'ampleur connue à ce jour ; qu'il s'ensuit que, conformément à la proposition de l'expert, il convient de retenir à la charge de la SARL LAGARRIGUE et de la SMABTP une part de 25% du coût total des travaux de reprise ; que la SMABTP demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu'elle a versées en vertu du jugement assorti de l'exécution provisoire ; que, cependant, le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement ; qu'il s'ensuit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande ;

Alors que, chacun des coauteurs d'un même dommage doit être condamné in solidum envers la victime à le réparer intégralement, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée ; qu'en l'espèce, la cour a expressément relevé que la société Lagarrigue et la société Nuova ceramica casa avaient contribué chacune à la réalisation du sinistre subi par la SCI Blanc ; qu'en limitant à 25% la condamnation à réparation de la société Lagarrigue au titre du coût total des travaux de reprise, soit à proportion de sa part de responsabilité vis-à-vis de la société Nuova ceramica casa telle que retenue par l'expert-judiciaire, la Cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble les articles 1203 et 1147 anciens et 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-10496
Date de la décision : 25/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 14 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 jan. 2018, pourvoi n°17-10496


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.10496
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