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24/01/2018 | FRANCE | N°16-21701

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 janvier 2018, 16-21701


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 624-3 du code de commerce ;

Attendu qu'en vertu de ce texte, le débiteur peut exercer seul, sans l'assistance de l'administrateur judiciaire désigné par le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, fût-il investi d'une mission d'assistance pour tous les actes de gestion, le recours contre la décision du juge-commissaire statuant en matière de vérification et d'admission des créances ; qu'il en résulte que, lorsqu'à la date du jugement d'ouvertur

e de la procédure de sauvegarde, une instance était en cours au sens de l'art...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 624-3 du code de commerce ;

Attendu qu'en vertu de ce texte, le débiteur peut exercer seul, sans l'assistance de l'administrateur judiciaire désigné par le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, fût-il investi d'une mission d'assistance pour tous les actes de gestion, le recours contre la décision du juge-commissaire statuant en matière de vérification et d'admission des créances ; qu'il en résulte que, lorsqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, une instance était en cours au sens de l'article L. 622-22 du code de commerce, le débiteur a également, dans ce cas, le droit d'exercer seul le recours prévu par la loi contre la décision fixant la créance, après la reprise de l'instance ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Dartess, mise en sauvegarde après avoir été assignée en paiement par la société Lavinia France, a interjeté appel du jugement ayant fixé la créance de cette dernière au passif de sa procédure ; qu'elle a intimé l'administrateur judiciaire investi d'une mission d'assistance et le mandataire judiciaire qui avaient été mis en cause devant les premiers juges ; que le conseiller de la mise en état a déclaré nulle la déclaration d'appel pour défaut de qualité à agir de la société débitrice au motif qu'elle avait été déposée sans l'assistance de son administrateur judiciaire ;

Attendu que, pour rejeter le déféré formé contre cette décision, l'arrêt, après avoir constaté que le jugement d'ouverture avait désigné un administrateur judiciaire et l'avait investi d'une mission d'assistance de la société Dartess pour tous les actes concernant la gestion, retient que la déclaration d'appel devait nécessairement être formalisée, même dans le cadre d'une procédure de sauvegarde, avec l'assistance de l'administrateur judiciaire, la débitrice n'ayant pas, dans ce cas, le pouvoir d'agir seule ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;

Condamne la société Lavinia France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 2 500 euros à la société Dartess et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Dartess, M. Y..., ès qualités, et la société Malmezat-Prat, ès qualités.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du Conseiller de la mise en état de la Cour d'appel de Bordeaux du 17 décembre 2015, ayant déclaré nulle la déclaration d'appel n° 15/01869 reçue le 24 avril 2015 de la part de la Société DARTESS, formée contre le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux du 2 avril 2015, rendu au profit de la Société LAVINIA FRANCE ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est par de justes motifs qu'il convient d'adopter que le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la nullité de la déclaration d'appel ; que pour répondre aux moyens des parties, il sera néanmoins précisé que le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux du 5 mars 2014, qui a ouvert la procédure de sauvegarde de la Société Dartess, a désigné Me Y... avec pour mission d'assister le débiteur pour tous les actes concernant la gestion, de sorte que si l'intéressé ne dispose pas du pouvoir de représenter l'entreprise, les actes de gestion de celle-ci doivent être accomplis avec son concours, que l'appel de la Société Dartess ayant été interjeté après l'ouverture de la procédure collective, la déclaration d'appel, qui est un acte de gestion, devait nécessairement être formalisé, même dans le cadre d'une procédure de sauvegarde, avec l'assistance de l'administrateur désigné par le Tribunal de commerce, le débiteur n'ayant pas dans ce cas le pouvoir d'agir seul, que l'administrateur ne peut régulariser l'appel intervenu sans son assistance que dans le délai d'exercice de cette voie de recours, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, puisque le délai d'appel expirait le 27 mai 2015 en ce qui le concerne et qu'il n'a constitué avocat que le 12 juin suivant et que c'est au jour de la déclaration d'appel que doit être appréciée la recevabilité de celui-ci et qu'il importe dès lors peu que la mission de l'administrateur ait cessé le 14 octobre 2015, alors que la déclaration d'appel de la Société Dartess est intervenue le 24 avril 2015 ; que l'ordonnance attaquée sera en conséquence confirmée ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la Société Lavinia France avait attrait la Société Dartess devant le Tribunal de commerce de Bordeaux par acte du 12 novembre 2013 ; que pendant le cours de cette instance, par jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux du 5 mars 2014, une procédure de sauvegarde a été ouverte à l'égard de la Société Dartess et Me Y... désigné en qualité d'administrateur, avec pour mission d'assister le débiteur pour tous les actes concernant la gestion, et la Société Malmezat Prat en qualité de mandataire judiciaire : que la Société Lavinia France a attrait le 26 août 2014 Me Y... et la Société Malmezat Prat dans l'instance en cours depuis le 12 novembre 2013 ; que le 2 avril 2015, le Tribunal de commerce de Bordeaux a rendu le jugement susvisé, qui a été signifié le 27 avril 2015 à Me Y... et à la Société Malmezat Prat, et le 5 mai 2015 à la Société Dartess ; que la Société Lavinia France relève à bon droit que l'action en justice constitue un acte de gestion et que le jugement ayant ouvert la procédure de sauvegarde précise que le débiteur doit être assisté pour tous les actes de la gestion ; qu'elle fonde sa demande sur le fait que la Société Dartess a seule interjeté appel le 24 avril 2015, ce pour quoi elle n'avait pas qualité ; que c'est à tort que la Société Dartess oppose qu'elle aurait conservé la faculté de faire appel, en ce qu'il a été jugé que le débiteur avait le droit propre d'exercer les voies de recours dans une instance tendant à sa condamnation à payer une somme pour une cause antérieure au jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire ; que pour autant, en effet, la question soulevée par le présent incident ne concerne pas une procédure de liquidation judiciaire, ni le point de savoir si le débiteur conserve une action propre ; que l'acte d'appel du 24 avril 2015 est un acte de gestion qui aurait ici nécessairement dû être fait avec l'assistance de l'administrateur nommé le 5 mars précédent ; que de même, la Société Dartess, qui est appelante à titre principal, ne saurait se prévaloir d'un quelconque appel incident de sa part, en tout état de cause insusceptible de régulariser l'appel litigieux ; que l'appel formalisé par un débiteur en procédure collective sans l'assistance de l'administrateur désigné avec une mission d'assistance pour les actes de gestion peut toutefois être régularisé par l'intervention de cet administrateur avant l'expiration du délai prescrit pour exercer le recours que la signification du jugement à ce mandataire a fait courir ; que toutefois, en l'espèce, les organes de la procédure ne sont pas intervenus volontairement dans le délai que la signification du jugement faisait courir à leur égard jusqu'au 27 mai 2015 ; que dès lors, la déclaration d'appel du 24 avril 2015, faite par une partie dépourvue de qualité pour y procéder seule, condition de fond, encourt la nullité, qui sera prononcée ; que la nullité de la déclaration d'appel anéantit l'acte d'appel même, de sorte que cet appel n'a pas à être en sus déclaré irrecevable, comme le demande la Société Lavinia France ;

ALORS QUE le débiteur, même dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, a le droit propre, lorsqu'est en cours à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, une instance tendant à sa condamnation au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure à ce jugement, d'exercer des voies de recours prévues par la loi contre la décision statuant sur l'exercice et le montant de la créance, pourvu qu'il le fasse contre le liquidateur ou en sa présence ; qu'en décidant néanmoins qu'une procédure de sauvegarde ayant été ouverte à l'égard de la Société DARTESS par jugement du 5 mars 2014 et Maître Y... ayant été désigné en qualité d'administrateur avec pour mission d'assister le débiteur pour tous les actes concernant la gestion, la Société DARTESS n'était pas recevable à interjeter seule appel du jugement rendu antérieurement, ayant fixé la créance de la Société LAVINIA FRANCE au passif de la procédure de sauvegarde à la somme de 62.481,27 euros en principal, la Cour d'appel a violé les articles L 621-4, L 622-1, L 622-3, et L 641-9 I., du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-21701
Date de la décision : 24/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Sauvegarde - Plan de sauvegarde - Vérification et admission des créances - Contestation d'une créance - Décision du juge-commissaire - Appel du débiteur - Ouverture - Conditions - Détermination - Portée

En vertu de l'article L. 624-3 du code de commerce, le débiteur peut exercer seul, sans l'assistance de l'administrateur judiciaire désigné par le jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, fût-il investi d'une mission d'assistance pour tous les actes de gestion, le recours contre la décision du juge-commissaire statuant en matière de vérification et d'admission des créances. Il en résulte que, lorsqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, une instance était en cours au sens de l'article L. 622-22 du code de commerce, le débiteur a également, dans ce cas, le droit d'exercer seul le recours prévu par la loi contre la décision fixant la créance, après la reprise de l'instance


Références :

articles L. 622-22 et L. 624-3 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 27 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 jan. 2018, pourvoi n°16-21701, Bull. civ.Bull. 2018, IV, n° 15
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, IV, n° 15

Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Richard, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.21701
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