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10/01/2018 | FRANCE | N°17-83974

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 janvier 2018, 17-83974


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 17-83.974 FS-P+B

N° 3360

CG10
10 JANVIER 2018

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Mimoun Y..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la co

ur d'appel de Douai, en date du 6 janvier 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs notamment d'infractio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 17-83.974 FS-P+B

N° 3360

CG10
10 JANVIER 2018

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

CASSATION sur le pourvoi formé par M. Mimoun Y..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 6 janvier 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs notamment d'infractions à la législation sur les stupéfiants et blanchiment, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure AR ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 29 novembre 2017 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Castel, M. Raybaud, M. Moreau, M. Stephan, M. de Larosière de Champfeu, conseillers de la chambre, M. Laurent, Mme Carbonaro, M. Beghin, conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme Moracchini ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRY, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 6 octobre 2017, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 695-11, 695-13, 695-18, 695-20, 591 et 593 du code procédure pénale :

"en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de l'irrégularité de la poursuite de M. Y... pour des faits antérieurs à sa remise aux autorités françaises dans le cadre de l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

"au motifs qu'il résulte des pièces de procédure sus décrites que la procédure d'extension des effets du mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 a été régulièrement suivie par les autorités judiciaires françaises, (l'interrogatoire préalable visant ledit acte, de même que la requête du procureur de la République) ; que si cette dernière mentionne, par erreur, au titre des "pièces jointes" à sa requête, le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 délivré par le juge d'instruction saisi de la présente information, la décision des autorités belges, qui en tout état de cause ne saurait être remise en cause devant le juge français, indique clairement qu'elle autorise l'extension des effets du mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 aux faits dont le juge d'instruction est saisi dans la présente procédure et ne fait pas mention du mandat d'arrêt du 12 novembre (qui d'ailleurs n'était pas un mandat d'arrêt européen) ; que contrairement à ce que soutient le requérant, la procédure d'extension des effets d'un mandat d'arrêt ne nécessitait pas que soit délivré à l'encontre de la personne en cause un nouveau mandat ; qu'en l'absence de lien entre le mandat d'arrêt délivré le 12 novembre 2015 et celui du 17 avril 2015 sur le fondement duquel la demande en extension a été présentée aux autorités belges, la nullité du mandat du 12 novembre 2016 ne peut entraîner celle de la demande en extension des effets du mandat du 17 avril 2015 ; que le mandat d'arrêt en vertu duquel M. Y... a été conduit devant le juge d'instruction a déjà été annulé par la chambre de l'instruction par arrêt du 17 mars 2016 ; que sa demande en annulation dans le cadre de la présente requête est sans objet ; que s'agissant du procès-verbal de première comparution de M. Y..., en date du 1er mars 2016, à la suite duquel il a été mis en examen pour des faits pour lesquels une extension du mandat d'arrêt du 17 avril 2015 a été régulièrement et définitivement acquise auprès des autorités judiciaires belges dans les conditions sus exposées, il y a lieu de constater que cet interrogatoire vient en exécution d'un mandat d'arrêt régulier, M. Y... ayant comparu devant le juge d'instruction dans le cadre de l'exécution d'un ordre d'extraction ; que le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 annulé par la chambre de l'instruction n'en est pas le support nécessaire et qu'en conséquence il convient de rejeter la demande en annulation de ce procès-verbal et des actes subséquents ;

"1°) alors que aux termes de l'article 695-18, 3°, du code de procédure pénale, l'autorisation expresse des autorités judiciaires de l'Etat membre d'exécution est requise pour pouvoir poursuivre une personne pour des faits commis antérieurement à la remise effectuée dans le cadre du mandat d'arrêt européen ; que pour obtenir une telle autorisation, l'Etat qui formule la requête doit respecter les formes du mandat d'arrêt européen prescrites par l'article 695-13 du code de procédure pénale et donc fonder cette demande sur une décision judiciaire ; qu'en l'espèce la requête à fin d'extension effectuée le 12 novembre 2015 par le ministère public se fonde sur le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 déclaré nul par un précédent arrêt de la chambre d'instruction ; que par conséquent, la demande d'extension ne reposait sur aucune décision valable, de sorte que c'est à tort que la chambre de l'instruction a refusé d'en constater la nullité ainsi que celle de la procédure subséquente ;

"2°) alors qu'en avançant que la demande d'extension du mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 "mentionne, par erreur au titre des "pièces jointes" à sa requête, le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 délivré par le juge d'instruction saisi de la présente information", lorsqu'il ressort clairement de la procédure que c'est bien sur ce mandat qu'a entendu se fonder le magistrat pour solliciter une demande d'extension, la chambre de l'instruction s'est prononcée par des motifs erronés ;

"3°) alors que la demande d'extension d'un mandat d'arrêt doit impérativement se fonder sur une décision judiciaire nationale ; qu'en l'espèce, en précisant que la décision des autorités belges "ne fait pas mention du mandat d'arrêt du 12 novembre (qui d'ailleurs n'était pas un mandat d'arrêt européen)" et en constatant ensuite "l'absence de lien entre le mandat d'arrêt délivré le 12 novembre 2015 et celui du 17 avril 2015 sur le fondement duquel la demande en extension a été présentée aux autorités belges", la chambre de l'instruction a cédé à une confusion entre le mandat d'arrêt européen et la décision sur le fondement de laquelle cette demande d'extension était formulée, de sorte qu'elle n'a pas justifié sa décision ;

"4°) alors que c'est à tort et par des motifs péremptoires que la chambre de l'instruction a fait état de "l'absence de lien" entre la demande en extension et le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 sur laquelle elle était pourtant expressément fondée, afin de considérer que ce mandat d'arrêt n'en était pas le support nécessaire" ;

Vu les articles 695-13, 695-16, alinéa 2, 695-18, 3°, et 695-20 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de ces textes, d'une part, que la demande adressée par le ministère public à l'autorité judiciaire de l'Etat d'exécution du mandat d'arrêt européen en vue d'obtenir son consentement à l'extension des effets dudit mandat doit contenir l'indication de la décision judiciaire qui la fonde, d'autre part, qu'en l'absence de renonciation au bénéfice du principe de spécialité, lorsque la personne a déjà été remise à la France pour un fait quelconque autre que celui pour lequel elle est de nouveau recherchée, le ministère public près la juridiction de jugement, d'instruction ou d'application des peines ayant décerné un mandat d'amener met celui-ci à exécution sous la forme d'un mandat d'arrêt européen ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Y... a été remis le 11 mai 2015 par les autorités belges à la France en exécution d'un mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 délivré par le procureur général près la cour d'appel de Pau pour l'exécution d'une peine de quatre années d'emprisonnement prononcée à son encontre le 21 mars 2013 par la chambre des appels correctionnels ; qu'il a été placé en garde à vue le 6 juillet 2015 pour trafic de produits stupéfiants en bande organisée, blanchiment et participation à une association de malfaiteurs, infractions commises courant 2014 et jusqu'au 22 janvier 2015 ; qu'il a été mis en examen pour ces faits le 8 juillet 2015 par un juge d'instruction du tribunal de Béthune ; que sur requête du ministère public, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai a, par arrêt du 23 octobre 2015, annulé la garde à vue, la mise en examen et le placement en détention provisoire de l'intéressé, pour non-respect du principe de spécialité ; que le procureur de la République près le tribunal de Béthune a sollicité des autorités belges leur consentement à l'extension des effets du mandat d'arrêt européen délivré le 17 avril 2015, sur la base d'un mandat d'arrêt délivré contre M. Y... par le juge d'instruction du tribunal de Béthune le 12 novembre 2015, que ces autorités judiciaires ont, le 23 novembre 2015, fait droit à la requête ; que le magistrat instructeur ayant de nouveau mis M. Y... en examen, la chambre de l'instruction, saisie d'un appel de l'ordonnance de placement en détention provisoire, a annulé le mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 et le mandat de dépôt qui a suivi ; que le 7 avril 2016, le mis en examen a saisi la chambre de l'instruction d'une nouvelle requête en nullité ;

Attendu que pour rejeter la requête en nullité prise de l'irrégularité de la procédure d'extension des effets du mandat d'arrêt européen en raison de l'annulation du mandat d'arrêt du 12 novembre 2015 sur lequel elle était fondée, l'arrêt retient que la décision des autorités belges, qui ne saurait être remise en cause devant le juge français, autorise l'extension des effets du mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 sans faire mention du mandat d'arrêt du 12 novembre ; que les juges ajoutent que la procédure d'extension des effets d'un mandat d'arrêt ne nécessitait pas que soit délivré à l'encontre de la personne en cause un nouveau mandat et que la nullité du mandat d'arrêt délivré le 12 novembre 2015 ne peut entraîner celle de la demande d'extension des effets du mandat d'arrêt européen du 17 avril 2015 ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi alors que le mandat d'arrêt délivré le 12 novembre 2015 avait été annulé, et qu'un mandat d'amener n'avait pas été décerné pour fonder la décision de demande de consentement à l'extension des effets du mandat d'arrêt européen, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 6 janvier 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, autrement composée, ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil DAR ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix janvier deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 17-83974
Date de la décision : 10/01/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

MANDAT D'ARRET EUROPEEN - Exécution - Procédure - Extension des effets d'un mandat d'arrêt européen

Il résulte de la combinaison des articles 695-13, 695-16, alinéa 2, 695-18, 3°, et 695-20 du code de procédure pénale qu'en l'absence de renonciation au bénéfice du principe de spécialité, la demande, adressée à l'autorité judiciaire de l'Etat d'exécution, en vue d'obtenir son consentement à l'extension des effets d'un mandat d'arrêt européen, doit reposer sur un mandat d'amener, dans le cas où un mandat d'arrêt ne peut légalement être prononcé


Références :

articles 695-13, 695-16, alinéa 2, 695-18, 3°, et 695-20 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, 06 janvier 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 jan. 2018, pourvoi n°17-83974, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.83974
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