La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2017 | FRANCE | N°16-25665

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 21 décembre 2017, 16-25665


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, qui est recevable :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 20 septembre 2016), que la société civile immobilière Gerland Plaza (la SCI) a confié aux sociétés Chosset et Luchessa et Allouis la réalisation du lot « menuiseries extérieures » à l'occasion d'une opération de construction de bureaux ; que les travaux ont été réceptionnés avec rés

erves ; que la SCI n'a acquitté que partiellement les situations de travaux ; que la socié...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, qui est recevable :

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 20 septembre 2016), que la société civile immobilière Gerland Plaza (la SCI) a confié aux sociétés Chosset et Luchessa et Allouis la réalisation du lot « menuiseries extérieures » à l'occasion d'une opération de construction de bureaux ; que les travaux ont été réceptionnés avec réserves ; que la SCI n'a acquitté que partiellement les situations de travaux ; que la société Chosset et Luchessa a assigné la SCI en paiement du solde du marché ; que la société Allouis, intervenue volontairement, a formé les mêmes demandes ;

Attendu que, pour déclarer ces demandes recevables, l'arrêt retient que l'assignation en paiement délivrée, le 11 janvier 2011, par les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis à la SCI, ainsi que la poursuite de l'instance devant le juge des référés après la notification du décompte définitif, le 14 janvier 2011, traduisent le désaccord exprès des sociétés Chosset et Luchessa et Allouis sur ce décompte ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la manifestation de ce désaccord obéissait aux conditions exigées par l'article 19.6.3 du cahier des clauses administratives générales, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés Chosset et Luchessa et Allouis et les condamne à payer à la SCI Gerland Plaza la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Delamarre, avocat aux Conseils, pour la SCI Gerland Plaza.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré les demandes des sociétés Chosset et Luchessa et Allouis recevables ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« sur la forclusion invoquée par la SCI Gerland Plaza : que par des motifs pertinents que la cour adopte, le premier juge a mis en évidence d'une part, que faute pour les sociétés Chosset et Luchessa d'avoir mis en demeure la SCI Gerland Plaza à l'expiration du délai de 45 jours à dater de la réception du mémoire définitif, l'acceptation du mémoire définitif par cette dernière ne pouvait être retenue et d'autre part, que les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA ne pouvaient être réputées avoir accepté le décompte définitif notifié le 14 janvier 2011 par la SCI Gerland Plaza, compte tenu du désaccord exprimé expressément ; que la décision critiquée sera donc confirmée en ce qu'écartant la forclusion invoquée par la SCI Gerland Plaza, elle a déclaré les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA recevables en leur demande » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

« l'assignation délivrée le 11 janvier 2011, aux fins de la voir condamnée au paiement provisionnel de la somme de 160 123,12 € ainsi que la poursuite de l'instance devant le juge des référés postérieurement à la notification du décompte définitif par celle-ci le 14 janvier suivant, traduisent le désaccord des demanderesses sur celui-ci qui ne peut être réputé avoir été accepté par ces dernières » ;

ALORS, D'UNE PART, QUE

La clause qui fixe un terme au droit d'agir du créancier institue un délai de forclusion ; que les causes d'interruption des délais légaux pour agir énumérées par l'article 2241 du code civil ne s'appliquent pas aux délais de forclusion conventionnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les modalités d'établissement du décompte définitif étaient fixées par l'article 19.6 du cahier des clauses administratives générales, lequel stipule : « l'entrepreneur dispose de trente jours à compter de la notification pour présenter, par écrit, ses observations éventuelles au maître d'oeuvre et pour en aviser simultanément le maître de l'ouvrage. Passé ce délai, il est réputé avoir accepté le décompte définitif » ; qu'il en résulte que le seul mode d'interruption du délai de forclusion conventionnelle consistait dans des observations écrites présentées par l'entrepreneur au maître d'oeuvre et au maître de l'ouvrage dans un délai de 30 jours ; qu'en retenant pourtant qu'en conséquence de l'assignation et de la poursuite de l'action en référé par la société Chosset et Luchessa, les entrepreneurs ne pouvaient être réputés avoir accepté le décompte définitif, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, par refus d'application, et 2241 de ce code, par fausse application, dans leur rédaction applicable en la cause ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE

La SCI Gerland Plaza faisait valoir dans ses conclusions que, conformément à l'article 19.6.3 du cahier des clauses administratives générales, seules des observations écrites, motivées et circonstanciées de l'entrepreneur adressées au maître d'oeuvre pouvaient valoir contestation du décompte définitif (conclusions, p. 10 et 11) ; qu'en retenant pourtant qu'en poursuivant l'action en référé après notification du décompte définitif, les entrepreneurs avaient « exprimé expressément » un « désaccord » sans aucunement rechercher, comme elle était invitée à le faire, si ce désaccord revêtait les conditions exigées par l'article 19.6.3 pour interrompre le délai de forclusion, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir condamné la SCI Gerland Plaza, déduction faite de la somme versée en vertu de l'exécution provisoire de la décision déférée, à payer aux sociétés Chosset et Luchessa et Allouis la somme de 93 600 € outre intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 11 janvier 2011;

AUX MOTIFS QUE

« sur le bien-fondé des pénalités de retard invoquées par la SCI Gerland Plaza : que s'il n'est pas contestable que les différents documents contractuels, et notamment le contrat de marché de travaux régularisé entre les parties le 27 avril 2009, faisaient référence à un planning contractuel, le délai d'achèvement était fixé initialement au 15 janvier 2009, et les pénalités de retard appliquées par la SCI Gerland Plaza se fondent sur un planning modificatif issu d'une concertation du 23 novembre 2009, se substituant au planning initial ; qu'il convient de relever cependant que seul un planning formellement accepté par les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA peut s'imposer à elles et permettre à la SCI Gerland Plaza de prétendre au paiement des pénalités de retard prévues au contrat ; qu'or, si l'ensemble les documents produits aux débats établissent que les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA avaient connaissance des exigences formulées par le maître d'oeuvre de la SCI Gerland Plaza sur les délais à respecter, il n'est pas établi qu'elles ont accepté de s'engager à respecter ce délai, sous peine de mise en oeuvre des pénalités de retard prévues initialement ; que le seul fait que le respect du planning soit inhérent au bon déroulement et au pilotage d'une opération de construction, ne peut pallier l'absence de preuve d'un engagement formel des sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA sur les dates d'achèvement de leurs prestations ; qu'il convient donc, réformant la décision déférée sur ce point, de débouter la SCI Gerland Plaza de ses demandes à ce titre ; que compte tenu d'un solde restant dû de 160.123,12 euros et d'un règlement effectué par la SCI Gerland Plaza à hauteur de 38.443,12 euros, il reste dû aux sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA la somme de 121.680 euros ; que les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA tenant compte de la somme versée par la SCI Gerland Plaza en application de l'exécution provisoire attachée à la décision déférée, demandent paiement de la somme de 93.600 euros ; qu'il convient de faire droit à leur demande et de condamner la SCI Gerland Plaza au paiement de la somme de 93.600 euro outre intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 11 janvier 2011 et capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil » ;

ALORS QUE Le caractère consensuel d'un contrat n'impose pas que les volontés soient formulées de manière expresse ; qu'en l'espèce, pour écarter la demande de la SCI Gerland Plaza au titre des pénalités de retard, la cour d'appel a retenu que « seul un planning formellement accepté par les sociétés Chosset et Luchessa et Allouis SA peut s'imposer à elles et permettre à la SCI Gerland Plaza de prétendre au paiement des pénalités de retard prévues au contrat » (arrêt, p. 5, alinéa 6) ; qu'en subordonnant ainsi l'acceptation du planning des travaux à une manifestation formelle de volonté, la cour d'appel a méconnu le principe du consensualisme, en violation de l'article 1101 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-25665
Date de la décision : 21/12/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 20 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 21 déc. 2017, pourvoi n°16-25665


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Delamarre et Jehannin

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.25665
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award