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21/12/2017 | FRANCE | N°16-13343

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 décembre 2017, 16-13343


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 19 janvier 2004 en qualité de chef gérant par la société Avenance, devenue la société Elres, a été placée en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail survenu le 21 septembre 2011 ; que le 28 novembre suivant, elle a été licenciée pour motif personnel ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé que les méthodes de gestion répétées sur une longue période mises en oeuvre par l'employeur, au mé

pris des réelles difficultés signalées par la salariée pour faire face à sa charge de travai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 19 janvier 2004 en qualité de chef gérant par la société Avenance, devenue la société Elres, a été placée en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail survenu le 21 septembre 2011 ; que le 28 novembre suivant, elle a été licenciée pour motif personnel ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé que les méthodes de gestion répétées sur une longue période mises en oeuvre par l'employeur, au mépris des réelles difficultés signalées par la salariée pour faire face à sa charge de travail, avaient provoqué une altération de la santé physique et mentale de celle-ci, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 26-A de la convention collective nationale pour le personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 ;

Attendu, selon ce texte, que le salarié victime d'un accident du travail ou de trajet reconnu comme accident de travail, ou d'une maladie professionnelle, au service de l'employeur qui l'occupe au moment de l'événement, bénéficie des garanties d'emploi, et éventuellement d'indemnisation, prévues aux articles L. 122-32-1 à L. 122-32-9 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur au paiement d'une somme au titre de la garantie d'emploi, l'arrêt retient qu'il ressort des dispositions claires et précises de l'article 26, section 7 maladie, accident du travail, de la convention collective nationale de la restauration des collectivités applicable à compter du 23 mai 2010, qu'une période de garantie d'emploi a été convenue pour une durée de huit mois après cinq ans d'ancienneté ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les articles L. 122-32-1 à L. 122-32-9 devenus L. 1226-6 à L. 1226-21 et R. 1226-9 du code du travail ne prévoyaient pas, pour les salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, le bénéfice d'une garantie d'emploi de huit mois après cinq ans d'ancienneté, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Elres à payer à Mme X... la somme de 20 330 euros au titre de la garantie de l'emploi, l'arrêt rendu le 12 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la demande formée par Mme X... au titre de l'article 26 de la convention collective nationale pour le personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un décembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Elres

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Elres à payer à Mme X... la somme de 20 330 euros au titre de la garantie d'emploi ;

Aux motifs que la société Elres soutient que les articles auxquels la convention collective de la restauration de collectivité fait référence, soit les articles L. 122-32-1 à L. 122-32-9 du code du travail, ne font pas état d'une garantie d'emploi de huit mois ; que Mme X... réplique que l'article 26.2 de la convention collective nationale stipule que le salarié a droit en cas d'accident de travail, à une période de garantie d'emploi de huit mois après cinq ans d'ancienneté ; qu'en l'espèce, il ressort des dispositions claires et précises de l'article 26, section 7 maladie, accident du travail, de la convention collective nationale de la restauration des collectivités applicable à compter du 23 mai 2010, qu'une période de garantie d'emploi a été convenue pour une durée de huit mois après cinq ans d'ancienneté ; que Mme X..., victime d'un accident du travail le 21 septembre 2011 et licenciée le 28 novembre 2011, est dès lors bien fondée à prétendre à cette garantie d'emploi, soit la somme de (2 541,25 euros x 8 mois) = 20 330 euros et non de 17 004 euros par infirmation du jugement entrepris, étant observé que les articles cités par l'employeur, désormais codifiés sous la référence L. 1226-7 et suivants, fixant les indemnités au titre de l'inaptitude consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, n'excluent pas expressément la garantie de l'emploi fixée conventionnellement ;

Alors que l'article 26 de la convention collective nationale pour le personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983 dispose que « le salarié victime d'un accident du travail ou de trajet reconnu comme accident de travail, ou d'une maladie professionnelle, au service de l'employeur qui l'occupe au moment de l'événement, bénéficie des garanties d'emploi et éventuellement d'indemnisation, prévues aux articles L. 122-32-1 à L.122-32-9 du code du travail », textes qui ont fait l'objet d'une recodification à droit constant applicable à compter du 1er mai 2008 aux articles L. 1226-7 et suivants du code du travail, et qui ne comportent aucune référence à une garantie d'emploi de huit mois ; qu'en allouant à Mme X... la somme de 20 330 euros à titre de garantie d'emploi, la cour d'appel a violé les textes précités.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Elres à payer à Mme X... la somme de 12 753 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;

Aux motifs propres que la société Elres soutient que Mme X... ne produit aucun document permettant d'identifier un éventuel auteur de ces prétendus agissements de harcèlement moral ; que Mme X... réplique que les harcèlements sont anciens, qu'ils remontent à 2007, qu'elle effectuait en réalité un double emploi, qu'elle était non seulement cuisinière mais aussi gestionnaire avec de nombreuses tâches administratives et femme de ménage, que c'est bien la société Elres qui est responsable de son accident du travail à l'origine de son licenciement ; qu'aux termes de l'article L.1152-1 du code de travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que l'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et qu'il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il revient à la juridiction saisie de dire si, pris dans leur ensemble, les éléments matériellement établis laissent présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, d'apprécier les éléments de preuve fournis par l'employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral ; que Mme X... a été placée en arrêt de travail le 23 septembre 2011 pour troubles anxieux avec palpitations dans un contexte d'un harcèlement socio-professionnel au vu des certificats médicaux du CHI Meulan-Les-Mureaux et du Dr Y... ; que le Dr Z..., psychiatre, a attesté le 08 mai 2013, que Mme X... « présente un état dépressif sévère réactionnel à un harcèlement dans le cadre de son activité professionnelle » ajoutant que l'arrêt de travail prescrit a été reconnu par l'assurance maladie comme conséquence d'un accident du travail (cf le harcèlement), pris en charge par la CPAM de l'Eure, par lettre en date du 30 décembre 2011 ; qu'il ne peut être sérieusement contesté que dès le 27 mars 2007, Mme X... alertait son employeur sur les conditions de travail risquant d'engendrer une surcharge, que néanmoins celui-ci persistait à méconnaître les difficultés avérées de Mme X... à exercer la charge qui lui incombait, liées principalement au sous-effectif de personnel sus-relaté, s'agissant de gérer la restauration de 320 personnes ; qu'il en résulte que ces méthodes de gestion répétées sur une longue période au mépris des réelles difficultés pour Mme X... d'assurer un travail de qualité, sont nécessairement à l'origine de l'altération de la santé physique et mentale de la salariée et de son arrêt de travail reconnu comme accident du travail par la CPAM de l'Eure ; que ces faits sont par confirmation du jugement entrepris, constitutifs de harcèlement moral ;

Et aux motifs éventuellement adoptés que Mme X..., de par son contrat de travail et sa fiche de poste, doit assurer les tâches quotidiennes du bon fonctionnement du restaurant scolaire dont elle a la charge et la qualification ; que sur les éléments présentés au dossier, le dommage doit être réparé par la société Elres à hauteur de la réalité de la situation constatée ;

Alors que les méthodes de gestion mises en oeuvre par l'employeur ne peuvent caractériser un harcèlement moral que si elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en s'étant bornée à relever un sous-effectif du personnel pour gérer la restauration, risquant d'engendrer une surcharge de travail, sans avoir constaté d'agissements répétés de la société Elres envers Mme X... ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-13343
Date de la décision : 21/12/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 12 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 déc. 2017, pourvoi n°16-13343


Composition du Tribunal
Président : Mme Guyot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.13343
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