LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le second moyen :
Vu l'article 47 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le ministère public a assigné M. X..., se disant né le 1er janvier 1983 à Rufisque (Sénégal), aux fins d'annulation du certificat de nationalité française, délivré à l'intéressé le 28 octobre 2013, et de constatation de son extranéité, en invoquant le défaut de force probante de son acte de naissance dressé le 31 décembre 1983 ;
Attendu que, pour rejeter l'action négatoire du ministère public, l'arrêt retient que l'omission de la mention « inscription de déclaration tardive » exigée par l'article 51 du code de la famille sénégalais ne suffit pas à établir le défaut de caractère probant de cet acte, dès lors qu'il a été authentifié par les autorités consulaires françaises et que la délivrance du certificat de nationalité française contesté a donné lieu à plusieurs vérifications sérieuses préalables ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le certificat de nationalité française avait été délivré sur la présentation d'un acte de naissance qui n'avait pas été établi selon les formes usitées au Sénégal, ce qui le privait de force probante, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par le procureur général près la cour d'appel de Douai
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que M. Mouhamadou X... est de nationalité française et ordonné la mention prévue par l'article 28 du code civil
Aux motifs que "Aux termes des dispositions de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause.
Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la nationalité de français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants.
Il résulte des dispositions de l'article 47 du même code que tout acte de l'état civil des français et des étrangers, fait en pays étrangers et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.
En application des dispositions de l'article 30 du code civil précité, il appartient au ministère public de rapporter la preuve de ce que le certificat de nationalité française dont M. X... est titulaire a été délivré à tort.
En l'espèce, si la copie littérale d'acte de naissance de M. X... produite aux débats n'a été établie que le 31 décembre 1983 alors même que l'intéressé était né le 1er janvier 1983 sans que la mention "inscription de déclaration tardive" ne figure sur l'acte en application des dispositions de l'article 51 du code de la famille sénégalais, force est de constater que cet acte a été authentifié par le Consulat de France à Dakar ainsi qu'un acte de reconnaissance de l'intéressé par son père en date du 31 décembre 1983 authentifié par le Consulat de France à Dakar.
En outre, ainsi que le relève justement le premier juge, la délivrance du certificat de nationalité française contestée a donné lieu à plusieurs vérifications sérieuses préalables ; en effet, il résulte des termes du certificat que le Ministère de l'Intégration et de la Lutte contre l'Exclusion (PRENAT) a été consulté le 25 juillet 2013 ; en outre, des vérifications ont été opérées s'agissant de la filiation du père de M. X... pour lequel un certificat de nationalité française a été délivré par le service de la nationalité à Paris le 6 avril 1999 sous le numéro CS9803052, ce dernier étant en outre conjoint d'un originaire du territoire de la république française tel qu'il était constitué le 28 juillet 1960, M. Daouda X..., père de l'intéressé, ayant conservé de plein droit la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance des territoires qui avaient eu antérieurement le statut de territoire d'outre-mer (article 32 alinéa 2 du code civil) ; enfin, il a été vérifié que M. Daouda X... n'était pas libéré de ses liens d'allégeance à l'égard de la France en application de l'article 23-4 du code civil.
Il convient de relever que les éléments produits aux débats ne suffisant pas à remettre en cause la validité de l'acte de naissance authentifié par le Consulat de France à Dakar, la présomption édictée à l'article 47 du code civil trouvant à s'appliquer en l'espèce ; en conséquence la décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions".
1/ Alors que, d'une part, l'article 455 du code de procédure civile dispose que le jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en l'espèce, le ministère public, comme l'a d'ailleurs indiqué la cour d'appel en exposant de manière détaillée les moyens des parties, avait contesté le caractère probant de l'acte de naissance versé aux débats par M. Mouhamadou X... en ce que cet acte était irrégulier comme n'ayant pas respecté les prescriptions de l'article 51 du code de la famille sénégalais (car dressé tardivement, sans mentionner cet élément) et qu'il n'était donc pas probant au sens de l'article 47 du code civil ; qu'en ne se prononçant pas sur l'irrégularité de cet acte de naissance, la cour d'appel n'a pas répondu à un moyen déterminant du ministère public et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2/ Alors que, d'autre part, pour qu'un acte de l'état civil dressé à l'étranger puisse faire foi au sens de l'article 47 du code civil, il faut non seulement que cet acte soit authentique et exact, mais aussi qu'il soit rédigé dans les formes usitées dans ce pays, c'est-à-dire régulièrement dressé conformément à l'ensemble des dispositions de la législation locale relative à l'état civil ; qu'il suffit donc que cet acte soit irrégulier pour ne pouvoir faire foi ; qu'il suffit également que cette irrégularité résulte des éléments tirés de l'acte lui-même ; que, tout en rappelant de manière détaillée l'argument du ministère public selon lequel l'acte de naissance sénégalais de M. Mouhamadou X... est irrégulier comme n'ayant pas respecté les prescriptions de l'article 51 du code de la famille sénégalais, la cour d'appel retient cependant que "les éléments produits aux débats ne suffisent pas à remettre en cause la validité de l'acte de naissance [de M. Mouhamadou X...] authentifié par le Consulat de France à Dakar" ; qu'en statuant ainsi, alors que le seul fait que l'acte avait été irrégulièrement dressé suffisait pour considérer que l'acte de naissance de M. Mouhamadou X... ne faisait pas foi, la cour d'appel a violé l'article 47 du code civil.