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22/11/2017 | FRANCE | N°16-23788

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 novembre 2017, 16-23788


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., de nationalité marocaine, alors étudiant, a été admis à bénéficier d'un stage de fin d'études au sein de la société Sopra Steria Group pour la période du 7 février au 5 août 2011 au cours de laquelle il a été mis à disposition de la SNCF à compter du 7 juillet 2011 ; que précédemment, le 6 juin 2011, la société Sopra Steria Group lui avait proposé un contrat à durée indéterminée à compter du 5 septembre 2011 sous condition qu'il obtienne un titre d

e séjour l'autorisant à travailler ; que faute de régularisation, le stage a été pr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., de nationalité marocaine, alors étudiant, a été admis à bénéficier d'un stage de fin d'études au sein de la société Sopra Steria Group pour la période du 7 février au 5 août 2011 au cours de laquelle il a été mis à disposition de la SNCF à compter du 7 juillet 2011 ; que précédemment, le 6 juin 2011, la société Sopra Steria Group lui avait proposé un contrat à durée indéterminée à compter du 5 septembre 2011 sous condition qu'il obtienne un titre de séjour l'autorisant à travailler ; que faute de régularisation, le stage a été prolongé jusqu'au 30 septembre 2011 ; que dans l'attente du renouvellement de sa carte de séjour expirant le 19 novembre 2011, un contrat à durée déterminée a été proposé le 1er octobre 2011 au salarié, renouvelé par avenant du 20 novembre 2011 jusqu'au 30 avril 2012, fin de mission à la SNCF ; que contestant les conditions d'exécution de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier la convention de stage et les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de le condamner aux indemnités subséquentes, alors, selon le moyen, que l'interdiction de l'exercice en France d'une activité professionnelle salariée par un travailleur étranger, résultant de ce que celui-ci ne dispose pas d'un titre de séjour en France ou d'une autorisation de travail lui permettant légalement d'exercer en France une telle activité et est ressortissant d'un Etat dont les ressortissants sont soumis à l'exigence du bénéfice, pour l'exercice en France d'une activité professionnelle, d'un tel titre de séjour en France ou d'une telle autorisation de travail, fait obstacle à ce que le juge retienne, à la suite de la requalification d'un autre contrat, que ce travailleur étranger et un employeur sont ou ont été liés par un contrat de travail, lorsque ce contrat prévoit l'exercice de ladite activité professionnelle salariée ; qu'en requalifiant dès lors, en l'espèce, la convention de stage en date du 31 janvier 2011 pour la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011 et le contrat de travail à durée déterminée pour la période du 1er octobre 2011 au 30 avril 2012 en contrat de travail à durée indéterminée et en condamnant, en conséquence, la société Sopra Steria Group à payer diverses sommes à M. X... et à lui délivrer divers documents, après avoir relevé que celui-ci était de nationalité marocaine, sans caractériser que, contrairement à ce que prétendait la société Sopra Steria Group, l'intéressé bénéficiait d'un titre de séjour en France ou d'une autorisation de travail lui permettant légalement d'exercer en France une activité professionnelle salariée dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 5221-2, L. 5221-1, L. 8251-1, R. 5221-1 et R. 5221-2 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que les deux contrats à durée déterminée n'avaient été conclus que dans l'attente de l'obtention par le salarié de son titre administratif afin de finaliser un contrat à durée indéterminée, a, sans être tenue de procéder à des vérifications que ses constatations rendaient inutiles, justement prononcé la requalification en contrat à durée indéterminée des contrats à durée déterminée ne répondant pas aux exigences légales ;

Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi principal du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal du salarié :

Vu l'article L. 1221-24, alinéa 2, du code du travail, en sa rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon ce texte, que lorsque le stagiaire est embauché par l'entreprise à l'issue d'un stage d'une durée supérieure à deux mois, au sens de l'article L. 612-11 du code de l'éducation, la durée de ce stage est prise en compte pour l'ouverture et le calcul des droits liés à l'ancienneté ;

Attendu que pour limiter le montant de l'indemnité légale de licenciement, l'arrêt énonce que le salarié sollicite une indemnité légale de licenciement calculée sur la période de février 2011 à avril 2012, en application de l'article L. 612-11 du code de l'éducation, permettant d'intégrer la période du stage à la durée de l'ancienneté, que la période à considérer débutant au 7 juillet 2011, c'est une somme de 480 euros (2 880x1/ 5x10/ 12) qui lui sera octroyée de ce chef ;

Qu'en statuant ainsi, en écartant la période de stage de six mois effectuée auparavant entre février et juillet 2011, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite à la somme de 480 euros le montant de l'indemnité légale de licenciement de M. X..., l'arrêt rendu le 19 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Sopra Steria Group aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sopra Steria Group à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par le président et M. Schamber, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de condamnation de la société à lui payer une indemnité pour travail dissimulé de 18 000 euros ;

AUX MOTIFS propres QUE pour confirmation du jugement, la SA SOPRA STERIA GROUP expose avoir toujours soutenu Monsieur Kamal X... dans ses démarches administratives, la proposition de CDI de juin 2011 en étant la première étape, et que les CDD n'avaient été passés que dans la mesure où en qualité d'étudiant étranger il ne pouvait avoir d'activité salariée qu'accessoirement et dans la limite de 964h par an ; qu'il expose que Monsieur Jérémie Y...son ressource manager ne l'avait saisi de cette difficulté qu'en mars 2012, de sorte que la régularisation avait eu lieu, aucune intention de dissimulation n'étant démontrée ; que pour infirmation, Monsieur Kamal X... justifie que son ressource manager était non pas Monsieur Jérémie Y...mais Monsieur Edouard Z..., qui ne l'a pas soutenu pour obtenir un CDD plus tôt lorsqu'il l'a relancé en septembre 2011 par une demande de rendez-vous commune avec Monsieur Pascal A...pour évoquer ses difficultés financières, et il prouve également qu'il a tenu informé le service RH dès le 5 août 2011 de sa difficulté administrative et a revendiqué un salaire à la place de son indemnité de stage pour le travail de consultant à la SNCF qu'il effectuait depuis juillet 2011 ; qu'il déduit de ces éléments la volonté de l'employeur de dissimuler son activité de travail réelle pour laquelle il se faisait payer par factures ; qu'il ressort des pièces que Monsieur Kamal X..., indemnisé au titre de la convention de stage, a été mis à la disposition d'un client de STERIA dans le cadre d'une promesse d'embauche par contrat de travail à durée déterminée, prévoyant un rappel d'ancienneté à compter du début du stage ; que le report de cette promesse dans le temps n'a été lié qu'aux difficultés qu'a rencontrées Monsieur Kamal X... pour faire renouveler sa carte de séjour avec changement de statut, élément extérieur s'imposant à l'employeur ; qu'en régularisant le contrat de travail après des tentatives de rapprochement avec Monsieur Kamal X... et son délégué syndical et avant le jugement du conseil de prud'hommes et en procédant simultanément aux rappels de salaires et rectification de l'attestation Pôle Emploi, la SA SOPRA STERIA GROUP a manifesté sa bonne foi exclusive de l'intention de dissimulation d'emploi requise par la loi ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur Kamal X... de sa demande d'indemnité forfaitaire ;

AUX MOTIFS adoptés QUE il ressort des débats et des dossiers remis au Conseil :- que c'est en raison de la situation administrative de M. X... en mai 2011, à la suite de la « circulaire Guéant » sur le travail des étudiants étrangers en France, que Steria s'est vue contrainte de prolonger son stage, à la demande de M. X... lui-même, car il n'avait pas entrepris les démarches nécessaires pour obtenir dans les délais requis une autorisation de travail ;- qu'il n'en est résulté aucun dommage pour M. X..., bien au contraire, puisqu'il a pu être affecté par Steria pendant quelques mois à une mission auprès de la SNCF qui l'a par la suite recruté ;- que les demandes de M. X... (…) relatives au travail dissimulé (…) sont donc sans fondement ;

ALORS QU'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour l'employeur de se soustraire intentionnellement à ses obligations légales relatives à l'accomplissement de la déclaration préalable à l'embauche et à la délivrance d'un bulletin de paie ; que l'existence d'un contrat de travail se caractérise par l'existence d'un lien de subordination entre les parties ;

1°) QUE le salarié avait indiqué avoir été mis à disposition de la société SNCF dès le 7 juillet 2011 jusqu'au 30 septembre 2011 ; qu'en estimant que la société avait manifesté sa bonne foi exclusive de l'intention de dissimulation d'emploi aux motifs, inopérants, que le report de la promesse d'embauche dans le temps n'avait été lié qu'aux difficultés rencontrées par le salarié pour faire renouveler sa carte de séjour avec changement de statut, élément extérieur s'imposant à l'employeur, sans rechercher, comme elle y était invitée, si pendant la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011, il avait existé une véritable relation de travail caractérisée par l'existence d'un lien de subordination, des tâches confiées sans rapport avec ses études et une absence de formation par l'organisme signataire de la convention, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 8221-5 du code du travail ;

2°) QU'en retenant que la société avait manifesté sa bonne foi exclusive de l'intention de dissimulation d'emploi requise par la loi aux motifs, inopérants, que le contrat de travail avait été régularisé après des tentatives de rapprochement avec le salarié et le délégué syndical et avant le jugement du conseil de prud'hommes en procédant simultanément aux rappels de salaires et rectifications de l'attestation Pôle Emploi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si pendant la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011, il avait existé une véritable relation de travail caractérisée par l'existence d'un lien de subordination, des tâches confiées sans rapport avec ses études et une absence de formation par l'organisme signataire de la convention ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 8221-5 du code du travail ;

3°) QU'en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé aux motifs, inopérants, qu'il n'en est résulté aucun dommage pour le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 8221-5 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé le salaire mensuel moyen brut à la somme de 2 880 euros et d'AVOIR en conséquence condamné la société à payer au salarié une indemnité de requalification de contrat, une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents sur cette base ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 1245-2 du Code du travail, il est dû à Monsieur Kamal X... une indemnité de requalification qui ne peut pas être inférieure à un mois de salaire, la base de calcul étant la rémunération perçue avant la requalification, soit 2 880 € ; que la fin du contrat de travail s'analysant en rupture d'un contrat à durée indéterminée, elle produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'il est donc dû à M. X..., compte tenu de son coefficient les sommes suivantes :-2 880 € à titre d'indemnité de préavis,-288 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

1°) ALORS QUE le salarié avait fait valoir qu'en application de l'article L. 1242-15 du code du travail, la rémunération perçue par un salarié titulaire d'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être inférieure à celle que percevrait un salarié bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée, dans la même entreprise, de qualification professionnelle équivalente et occupant les mêmes fonctions ; qu'en l'espèce, la rémunération qui lui avait été proposée dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée qui lui avait été soumis pour signature le 16 juin 2011 était de 3 000 euros tandis qu'elle n'était que de 2 880 euros dans le cadre de son contrat de travail à durée déterminée ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen clair et déterminant des conclusions d'appel pour fixer comme base de calcul de l'indemnité de requalification la rémunération perçue avant la requalification quand la rémunération perçue par un salarié bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée, dans la même entreprise, de qualification professionnelle équivalente et occupant les mêmes fonctions que M. X... était supérieure, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur la branche qui précède emportera par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif de l'arrêt qui a limité la condamnation de l'employeur à payer une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis sur la base de la rémunération perçue par le salarié avant la requalification, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE l'article 15 de la convention collective applicable prévoit un préavis de trois mois pour les ingénieurs et cadres ; qu'en décidant de faire application d'un préavis d'un mois et de condamner la société à payer au salarié une indemnité compensatrice de préavis d'un mois et les congés payés afférents quand son statut était celui d'un consultant junior appartenant aux ingénieurs et cadres, la cour d'appel a violé l'article 15 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des ingénieurs conseils et des sociétés de conseils.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la société à payer au salarié la somme de 480 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Kamal X... sollicite une indemnité légale de licenciement calculée sur la période de février 2011 à avril 2012, en application de l'article L. 612-11 du code de l'éducation, permettant d'intégrer la période du stage à la durée de l'ancienneté ; que la période à considérer débutant au 7 juillet 2011, c'est une somme de 480 € (2 880 x 1/ 5 x 10/ 12) qui lui sera octroyée de ce chef ;

1°) ALORS QUE la cassation qui sera prononcée sur le deuxième moyen en sa première branche emportera par voie de conséquence la cassation du chef du dispositif de l'arrêt qui a limité la condamnation de la société à payer au salarié la somme de 480 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE lorsque le stagiaire est embauché par l'entreprise à l'issue d'un stage d'une durée supérieure à deux mois au sens de l'article L. 124-6 du code de l'éducation, la durée de ce stage est prise en compte pour l'ouverture et le calcul des droits liés à l'ancienneté ; qu'en estimant que la période à considérer pour le calcul de l'indemnité légale de licenciement débutait au 7 juillet 2011, ce qui revenait à écarter la période de stage de six mois effectué auparavant entre février et juillet 2011, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-24 du code du travail.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour la société Sopra Steria Group

Le pourvoi fait grief à l'arrêt, sur ces points, infirmatif attaqué D'AVOIR requalifié la convention de stage en date du 31 janvier 2011 pour la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011 et le contrat de travail à durée déterminée pour la période du 1er octobre 2011 au 30 avril 2012 en contrat de travail à durée indéterminée, D'AVOIR condamné la société Sopra Steria group à payer à M. Kamal X... la somme de 2 880 euros à titre d'indemnité de requalification, la somme de 2 880 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 288 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, la somme de 480 euros à titre d'indemnité de licenciement, la somme d'un euro à titre d'indemnité pour licenciement abusif, la somme d'un euro à titre d'indemnité pour licenciement irrégulier, D'AVOIR dit que les sommes à caractère salarial porteraient intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2012 et les sommes à caractère indemnitaire à compter de son arrêt, D'AVOIR dit que les intérêts porteraient eux-mêmes intérêts dans les conditions et limites prévues par l'article 1154 du code civil et D'AVOIR ordonné à la société Sopra Steria group de délivrer à M. Kamal X... un bulletin de salaire récapitulatif et les documents de fin de contrat conformes ;

AUX MOTIFS QU'« en application des articles L. 1242-1 et L. 1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3 de ce code, il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas, entre autres, de remplacement d'un salarié, d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ou pour des emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois./ Par contrat en date du 31 janvier 2011 passé entre la direction de l'Esc Bordeaux, la société Steria et Monsieur Kamal X..., ce dernier étudiant a obtenu un stage pratique en qualité de consultant stagiaire en finances et services pour la période du 7 février 2011 au 31 juillet 2011, moyennant 35 heures par semaine en contrepartie d'une gratification mensuelle de 1 295 € brut. Il y est prévu qu'un avenant à la convention pourra être établi en cas de prolongation de stage faite à la demande de l'entreprise et de l'élève stagiaire et que le stage sera résilié en cas de recrutement pendant son cours./ Le 16 juin 2011, Monsieur Kamal X... et Monsieur Pascal A...en qualité de directeur de département ont conclu un Cdi avec période d'essai pour le poste de consultant junior position 2. 11, coefficient 115, à effet à compter du 5 septembre 2011 avec reprise d'ancienneté au 7 février 2011. Monsieur Kamal X... étant de nationalité marocaine, il devait aux termes de ce contrat et sous peine de nullité produire 2 jours avant la prise d'effet de l'embauche le titre de séjour et de travail valable. Il a entamé les démarches en préfecture pour obtenir son changement de statut comme cela lui a été demandé dès le 16 juin 2011 et il a sollicité de l'Esc, qui l'a donnée le 21 juin 2011, l'autorisation de prolonger son stage jusqu'au 30 septembre 2011./ Il est constant que dans le cadre de ce stage, le tuteur de M. X... chez Steria, Monsieur Édouard Z..., ressource manager département conseil, l'a mis à disposition de la Sncf à compter du 1er juillet 2011 jusqu'au 29 février 2012 en qualité de collaborateur./ Par message électronique du 5 août 2011, Monsieur Kamal X... a avisé le service Rh de Steria que la préfecture venait de l'informer qu'il devait changer d'adresse de province à Paris pour obtenir son changement de statut et qu'il n'avait obtenu le rendez-vous utile que pour le 19 octobre 2011 de sorte qu'il a sollicité que Steria lui consente un Cdd pour lui permettre de toucher un salaire de consultant, les conditions de son Cdi ne pouvant plus être remplies./ Par message électronique du 9 septembre 2011, il a précisé que sa carte de séjour d'étudiant expirait au 19 novembre 2011. Un contrat à durée déterminée a été conclu les 16 et 30 septembre 2011 à effet au 1er octobre 2011 jusqu'au 19 novembre 2011 au motif de surcroît temporaire d'activité moyennant un salaire mensuel de 2 880 € brut outre une indemnité de fin de contrat. Le 10 novembre 2011, Monsieur Kamal X... a communiqué au service Rh le récépissé de sa carte de séjour l'autorisant à travailler à titre accessoire dans la limite de 964 heures puis quelques jours plus tard sa carte de séjour 2011/ 2012 valable jusqu'au 19 novembre 2012. Par avenant en date du 20 novembre 2011, le Cdd a été prolongé jusqu'au 30 avril 2012./ Par mail du 19 mars 2012, Monsieur Jérémie Y..., délégué syndical Steria Avenir, a mis en demeure la Sa Steria de régulariser le travail dissimulé de Monsieur Kamal X... pour la période du 1er juillet 2011 au 30 septembre 2011 et de lui délivrer des bulletins de salaire avec les rectifications et rappels nécessaires./ Monsieur Kamal X... a finalement été embauché par la Sncf comme chef de projet informatique le 16 mai 2012 à compter du 21 mai 2012 moyennant un salaire mensuel brut de 3 075 €./ Il résulte de la chronologie des faits que la Sa Steria a été empêchée d'embaucher par Cdi Monsieur Kamal X..., titulaire d'une carte de séjour d'étudiant, alors qu'elle souhaitait le faire dès la fin de son stage de formation, en raison de l'absence à cette date de la nouvelle carte de séjour espérée l'autorisant à travailler. Il est clair et reconnu par la Sa Steria que les deux Cdd passés à compter du 1er octobre 2011 au 30 avril 2012 n'étaient destinés qu'à permettre à Monsieur Kamal X..., à sa demande, d'attendre ce titre administratif afin de déboucher sur le Cdi promis, comme le rappelait encore le service Rh par son message du novembre 2011, et non pas à faire face à un surcroît temporaire d'activité./ Il est constant également qu'à compter du 7 juillet 2011 Monsieur Kamal X... a exclusivement travaillé sur une mission confiée à Steria par un client et qu'en lui délivrant finalement le 5 juillet 2012 les documents de fin de contrat rectifiés pour débuter au 7 juillet 2011, la Sa Steria a reconnu l'existence d'un contrat de travail avec lui à compter du 7 juillet 2011 et jusqu'au 30 avril 2012./ Il convient donc, en application des dispositions de l'article L. 1242-12 du code du travail, de requalifier le contrat de stage pour la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011 ainsi que le contrat de travail à durée déterminée du 1er octobre 2011 prolongé jusqu'au 30 avril 2012 en contrat à durée indéterminée./ […] En application de l'article L. 1245-2 du code du travail, il est dû à Monsieur Kamal X... une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire, la base de calcul étant la rémunération perçue avant la requalification, soit 2 880 €./ La fin du contrat de travail s'analysant en rupture d'un contrat à durée déterminée, elle produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse./ Il est donc dû à M. X..., compte tenu de son coefficient les sommes suivantes :-2 880 € à titre d'indemnité de préavis ;-288 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis./ Monsieur Kamal X... sollicite une indemnité légale de licenciement calculée sur la période de février 2011 à avril 2012, en application de l'article L. 612-11 du code de l'éducation, permettant d'intégrer la période du stage à la durée de l'ancienneté. La période à considérer débutant au 7 juillet 2011, c'est une somme de 480 € (2 880 x 1/ 5 x 10/ 12) qui lui sera octroyée de ce chef./ En application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail applicable aux salariés licenciés ayant moins de 2 ans d'ancienneté, M. X... peut prétendre à une indemnité pour irrégularité de procédure qui se cumule avec l'indemnité correspondant au préjudice subi du fait de la rupture abusive de son contrat de travail. Il résulte des circonstances rappelées que Monsieur Kamal X... a préféré se faire embaucher par la Sncf en Cdi vingt et un jours après la fin de ses relations avec Steria, plutôt que de signer un Cdi avec cette dernière entreprise dans la foulée comme prévu et comme rappelé par courrier du 3 avril 2012./ Il recevra 1 euro à titre d'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1 euro, au titre du non-respect de la procédure./ […] M. X... demande la délivrance des bulletins de paye conformes pour la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011 et les documents de rupture rectifiés. Sa demande fondée sera accueillie./ Sur les intérêts légaux. En application de l'article 1153 du code civil les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2012 et les sommes à caractère indemnitaire à compter de la décision qui alloue en application de l'article 1153-1 du code civil, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil, soit pour les intérêts qui seront dus depuis plus d'un an » (cf., arrêt attaqué, p. 4 à 6 ; p. 7 à 9) ;

ALORS QUE l'interdiction de l'exercice en France d'une activité professionnelle salariée par un travailleur étranger, résultant de ce que celui-ci ne dispose pas d'un titre de séjour en France ou d'une autorisation de travail lui permettant légalement d'exercer en France une telle activité et est ressortissant d'un État dont les ressortissants sont soumis à l'exigence du bénéfice, pour l'exercice en France d'une activité professionnelle, d'un tel titre de séjour en France ou d'une telle autorisation de travail, fait obstacle à ce que le juge retienne, à la suite de la requalification d'un autre contrat, que ce travailleur étranger et un employeur sont ou ont été liés par un contrat de travail, lorsque ce contrat prévoit l'exercice de ladite activité professionnelle salariée ; qu'en requalifiant, dès lors, en l'espèce, la convention de stage en date du 31 janvier 2011 pour la période du 7 juillet 2011 au 30 septembre 2011 et le contrat de travail à durée déterminée pour la période du 1er octobre 2011 au 30 avril 2012 en contrat de travail à durée indéterminée et en condamnant, en conséquence, la société Sopra Steria group à payer diverses sommes à M. Kamal X... et à lui délivrer divers documents, après avoir relevé que M. Kamal X... était de nationalité marocaine, sans caractériser que, contrairement à ce que prétendait la société Sopra Steria group, M. Kamal X... bénéficiait d'un titre de séjour en France ou d'une autorisation de travail lui permettant légalement d'exercer en France une activité professionnelle salariée dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 5221-2, L. 5221-1, L. 8251-1, R. 5221-1 et R. 5221-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-23788
Date de la décision : 22/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 19 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 nov. 2017, pourvoi n°16-23788


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.23788
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