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16/11/2017 | FRANCE | N°16-14835

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 novembre 2017, 16-14835


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 janvier 2016), que M. X..., engagé par le comité régie entreprise (CRE) de la RATP à compter du 3 juillet 1995 en qualité de responsable du service de l'administration du personnel et de la gestion de la paie, a, le 23 août 2000, saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à l'annulation d'un avertissement et au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral ; qu'il a été licencié pour faute grave le 17 avril 2001 ; qu

e ce licenciement a été déclaré nul et la réintégration du salarié ordonnée...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 janvier 2016), que M. X..., engagé par le comité régie entreprise (CRE) de la RATP à compter du 3 juillet 1995 en qualité de responsable du service de l'administration du personnel et de la gestion de la paie, a, le 23 août 2000, saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à l'annulation d'un avertissement et au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral ; qu'il a été licencié pour faute grave le 17 avril 2001 ; que ce licenciement a été déclaré nul et la réintégration du salarié ordonnée par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 25 septembre 2007 rendu sur renvoi de cassation (Soc., 28 mars 2006, n° 04-41.695) ; que le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté (Soc., 13 novembre 2008, n° 07-45.024) ; que par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 12 novembre 2009, l'employeur a été condamné à indemniser le préjudice du salarié résultant de la nullité du licenciement ; que le salarié a sollicité un congé sans solde d'un an pour création d'entreprise à compter du 27 mai 2008, renouvelé jusqu'en juillet 2010, à l'issue duquel il a demandé à retrouver ses fonctions ; qu'il a été licencié le 5 janvier 2011 faute de poste similaire disponible ; qu'invoquant la nullité de ce licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le débouter de sa demande de nullité du licenciement, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en matière de harcèlement moral, si le salarié établit des faits laissant présumer l'existence d'un tel harcèlement ou discrimination, c'est à l'employeur d'établir les éléments objectifs démontrant que ses agissements sont étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes afférentes à la nullité de son licenciement, la cour d'appel a retenu que le salarié n'avait pas établi les attitudes harcelantes ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ qu'en matière de discrimination, si le salarié établit des faits laissant présumer l'existence d'une telle discrimination, c'est à l'employeur d'établir les éléments objectifs démontrant que ses agissements sont étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de ses demandes afférentes à la nullité de son licenciement, la cour d'appel a retenu que le salarié n'avait pas établi les attitudes discriminatoires ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1134-1 du code du travail ;

3°/ que tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'en l'espèce, M. X... soutenait avoir faire l'objet de pratiques discriminatoires pour solliciter la nullité de son licenciement ; qu'en s'abstenant de motiver sa décision de rejet des demandes formulées à ce titre, et en se bornant à affirmer que le salarié n'établissait pas les faits allégués concernant la discrimination, la cour d'appel, par motifs adoptés, a violé l'article 455 de code de procédure civile ;

4°/ que la preuve est libre en matière prud'homale ; que le principe « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même » n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; que le salarié peut donc établir les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ou d'une discrimination par tous moyens ; que cette preuve peut, notamment, résulter de documents établis par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, pour dire que le harcèlement ou la discrimination n'étaient pas établis, la cour d'appel a relevé que l'offre probatoire de M. X... reposait sur des documents établis par lui ou par son conseil ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe de la liberté de la preuve, ensemble les articles L. 1134-1 et L. 1154-1 du code du travail ;

5°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que M. X..., pour établir la présomption de harcèlement, de discrimination et d'atteinte à ses libertés fondamentales, faisait précisément valoir dans ses conclusions que les délégués du personnel avaient exercé un droit d'alerte relatif aux conditions d'exécution de son contrat de travail à la suite de sa réintégration ; qu'en affirmant péremptoirement, sans répondre à ce chef des conclusions de l'exposant, que la discrimination ou le harcèlement n'était pas établi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que le fait de priver unilatéralement le salarié de ses missions et responsabilités professionnels constitue un fait de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à l'issue de son congé pour création d'entreprise, M. X... ne s'était vu confier aucun travail par le CRE RATP ; que la cour d'appel, pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la nullité du licenciement, a néanmoins retenu que le harcèlement moral n'était pas établi ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail ;

7°/ que dès lors que le salarié établit des faits laissant présumer le harcèlement moral, il appartient à l'employeur de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il appartenait de rechercher si le refus de réintégrer le salarié à l'issue de son congé pour création d'entreprise est fondé ou s'il procède d'un harcèlement, d'une discrimination ou d'une violation d'une liberté ou d'un droit fondamental ; qu'elle a ensuite constaté que l'employeur avait failli à son obligation légale à ce titre, n'avait pas proposé à M. X... le poste d'adjoint en C3 laissé vacant par M. Y..., sans justifier de raison objective de cette absence de proposition d'un poste équivalent, ni démontrer que le salarié n'était pas en mesure d'occuper ce poste qui aurait dû lui être proposé ; qu'elle a encore constaté que le CRE-RATP ne justifiait d'aucune démarche de recherche de poste disponible au profit de M. X... entre le premier entretien préalable et le second ; qu'en écartant pourtant la nullité du licenciement pour harcèlement moral, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur ne justifiait pas objectivement son refus de réintégrer le salarié, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail ;

8°/ que dès lors que le salarié établit des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination, il appartient à l'employeur de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'une telle discrimination et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il appartenait de rechercher si le refus de réintégrer le salarié à l'issue de son congé pour création d'entreprise est fondé ou s'il procède d'un harcèlement, d'une discrimination ou d'une violation d'une liberté ou d'un droit fondamental ; qu'elle a ensuite constaté que l'employeur avait failli à son obligation légale à ce titre, n'avait pas proposé à M. X... le poste d'adjoint en C3 laissé vacant par M. Y..., sans justifier de raison objective de cette absence de proposition d'un poste équivalent, ni démontrer que le salarié n'était pas en mesure d'occuper ce poste qui aurait dû lui être proposé ; qu'elle a encore constaté que le CRE-RATP ne justifiait d'aucune démarche de recherche de poste disponible au profit de M. X... entre le premier entretien préalable et le second ; qu'en écartant pourtant la nullité du licenciement pour discrimination, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur ne justifiait pas objectivement son refus de réintégrer le salarié, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-2 et L. 1134-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé le mécanisme probatoire prévu par les articles L. 1154-1 et L. 1134-1 du code du travail, la cour d'appel, qui, sans être tenue de rentrer dans le détail de l'argumentation du salarié s'agissant de l'exercice du droit d'alerte non allégué au titre du harcèlement moral, a souverainement retenu, par une décision motivée et sans inverser la charge de la preuve, que les attitudes harcelantes et discriminatoires dont le salarié soutenait qu'elles l'avaient contraint à solliciter un congé de création d'entreprise, accepté et renouvelé par l'employeur sans difficulté, n'étaient pas établies ;

Attendu ensuite qu'après avoir estimé que si l'employeur avait failli à son obligation légale de réintégrer le salarié dans son précédent emploi ou dans un poste similaire à l'issue du congé pour création d'entreprise, il justifiait par des raisons objectives l'absence de proposition au salarié du poste d'adjoint au directeur des ressources humaines et de responsable administratif du personnel, la cour d'appel a souverainement décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient des articles précités, qu'aucun agissement répété de harcèlement moral ou discrimination ne pouvait être retenu ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa quatrième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, disant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR débouté M. X... de sa demande de voir son licenciement jugé nul et de nul effet, avec toutes conséquences

AUX MOTIFS QUE « Sur la nullité du licenciement pour faits de discrimination, de harcèlement moral et violation des droits et libertés fondamentales ; que s'il n'est pas douteux que le premier licenciement d'avril 2001 procédait d'une violation d'une liberté fondamentale ainsi que l'ont jugé définitivement les arrêts de la cour d'appel de Versailles des 25 septembre 2007 et 11 novembre 2009, il est aussi clair que cet arrêt a indemnisé le préjudice moral et matériel subi par le salarié du fait de ce licenciement annulé jusqu'à sa réintégration effective au 30 novembre 2007 constatée par cet arrêt définitif ; qu'il appartient au salarié appelant qui estime être à nouveau victime de faits de harcèlement moral et discriminatoires et procédant d'une violation des droits et libertés fondamentales d'établir selon l'article L. 1154-1 du code du travail la matérialité de faits précis et concordants de nature à faire présumer un harcèlement moral à charge pour l'employeur ensuite de démontrer que ces faits ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et s'expliquent pas des éléments objectifs, et selon l'article L 1134-1 du code du travail de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte à charge pour l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'il n'est pas discuté que le salarié a repris le poste occupé avant son licenciement ; que si le salarié affirme que depuis sa reprise l'employeur a volontairement créé des tensions et adopté un comportement de harcèlement et discriminatoire dans le but de le pousser à la démission, il ne l'établit pas ; qu'en effet, les lettres qu'il produit à l'appui de ses allégations sont : une lettre du 17 mars 2008 que son avocat adresse au directeur général du CRERATP dans laquelle il indique « malgré une réintégration physique contestable faite le 7 janvier 2008, mon client a souhaité retrouver un climat apaisé et n'a pas manqué d'en référer au secrétaire général du CRE-RATP. Les suites données à ce rapport de sa réintégration sont caractérisées par d'autres atteintes des violations de libertés fondamentales (fouilles et filatures électroniques, discrimination, mise en garde suite à maladie, humiliation pour service juridique rendu) pour le contraindre à la démission par le constat d'une impossibilité de réintégration effective » ; une lettre du 17 mars 2008 adressée par Monsieur Jean-Marie X... à l'inspection du travail par laquelle il transmet un rapport d'intégration « mettant partiellement en lumière les entraves à l'exécution de la décision de la Cour de cassation » et dans laquelle il dénonce « des violations de libertés fondamentales (copie, ouverture, fouilles de fichiers et filature électronique) entrave à l'effectivité de la réintégration (décision de justice) discrimination de traitement et humiliations et provocations) ; que la cour observe que l'avocat qui se plaint d'une réintégration contestable en janvier 2008 reconnait dans ses écritures non sans contradiction que le salarié a été réintégré le 3 décembre 2007, ce qui compte tenu des délais de la signification de l'arrêt ordonnant la réintégration ne peut être considéré comme tardif et laissant présumer une réticence de l'employeur à se conformer à l'injonction judiciaire ; que surtout la cour observe que ces courriers ne contiennent que les propres affirmations du salarié ou celles de son avocat, exprimées en des termes généraux et qui ne sont corroborées par aucun élément objectif circonstancié, en particulier, le rapport d'information établi unilatéralement par le salarié n'est pas produit aux débats, pas plus que ne sont spécifiées les humiliations alléguées ; que ces seules affirmations générales contestées par l'employeur et qui n'ont donné lieu à aucune mesure de la part de l'inspection du travail sont insuffisantes à établir les agissements discriminatoires et harcelants allégués ; qu'il en est de même des reproches formulés par le salarié dans sa lettre du 23 avril 2008 adressé au secrétaire du CRE-RATP qu'il sollicite pour « mettre un terme aux provocations de Monsieur Michel Z... (directeur du CRE) et Madame A... Ghislaine chargée d'études RH (anciennement en remplacement sur mon poste de responsable d'administration du personnel). Cet incident n'est pas la première et n'est donc pas isolé. Après avoir souhaité savoir la date à laquelle je quitterai le CRE-RATP, Madame A... et Monsieur Michel Z... renouvellent leur provocation à mon égard. Cette attitude n'est plus tolérable ; il est 11h35 minutes et je me retire du CRE-RATP. Je fais constater mon retrait à un agent du CRE-RATP et un représentant du personnel. En votre absence sur le site de ce jour, j'en ai informé votre secrétaire (Annie) si la suspension de mon contrat (par un congé d'un an) face à une situation qui se détériore, ne suffit pas à contenir les provocations dont je suis l'objet, il me sera difficile de faire mieux… » ; que là encore ce courrier ne contient que les affirmations du salarié qui ne sont objectivées par aucun élément ; que le salarié exerce son droit de retrait du fait de provocations alléguées sans que soient précisées leur nature ; qu'en l'absence de précision, les affirmations générales du salarié sont insuffisantes à établir un quelconque harcèlement moral ou une quelconque discrimination de la part de l'employeur, ce dernier contestant formellement le bien fondé du droit de retrait du salarié par lettre du 30 avril 2008 ; que vainement le salarié se prévaut-il de sa propre lettre du 6 mai 2008 en considérant que l'employeur a reconnu son comportement anormal par la réception d'une lettre d'excuses, alors que cette lettre d'excuses n'est pas produite aux débats ; que les attitudes harcelantes et discriminatoires alléguées ne sont ainsi nullement établies ; qu'en revanche, il est constant que le salarié a adressé au secrétaire du CRE-RATP une lettre du 27 mars 2008 par laquelle il l'informait « de son intention de création d'entreprise. Pour prendre la direction et participer activement à la réussite de ce projet, je sollicite par la présente le bénéfice d'un congé à temps plein à compter du 27 mai 2008. Pour ce faire, je souhaite m'absenter de l'entreprise pour une durée d'un an. Je vous informe par ailleurs que l'activité que j'envisage de créer porte sur le développement agricole principalement, la culture de l'huile de palme pour l'énergie, la production d'ananas et calibre protéger et l'exportation de mes productions. (sic). Dans l'attente de votre réponse, je vous prie d'agréer, Monsieur le secrétaire, mes salutations distinguées » ; que force est de constater que cette lettre ne contient aucune réserve ni aucune explication sur cette demande, ce que le salarié toujours prompt à dénoncer les manquements de son employeur, n'aurait pas manqué de faire s'il considérait qu'il se sentait obligé vu le comportement de son employeur de quitter l'entreprise ; que l'appelant qui soutient devant la cour qu'il aurait été forcé de solliciter ce congé ne le démontre pas et n'est pas crédible en cette allégation ; qu'il est acquis aux débats que l'employeur n'a fait aucune difficulté pour satisfaire à la demande du salarié ; qu'il a simplement décalé d'un mois et demi le congé reporté à juillet 2008 pour des raisons bien compréhensibles d'organisation du service, et pour tenir compte de l'arrêt maladie du salarié du 23 mai au 1er juin 2008, de ses congés payés et RTT jusqu'au 16 juillet 2008, ainsi qu'il l'indiquait à son salarié par lettre du 3 juin 2008 ; qu'au demeurant ce report est parfaitement conforme aux articles L. 3142-83 et D. 3142-44 du code du travail qui permet à l'employeur de différer le départ en congé dans la limite de six mois à compter de la réception de la demande, en sorte que le reproche du salarié est infondé ; que par la suite, il est certes acquis aux débats que par courrier du 4 juillet 2008, le salarié a décidé de renoncer pour création d'entreprise et que par courrier du 9 juillet 2008 l'employeur lui indique « que les dates convenues ensemble pour votre congé sabbatique ne peuvent plus être modifiées elles ont pris une valeur contractuelle » ; que ce rappel de l'engagement pris par le salarié ne peut être reproché à l'employeur dans la mesure où ce congé annuel d'un an avait nécessité une organisation de l'entreprise que la décision unilatérale du salarié remettait en cause sans raison objective ; que le salarié est d'autant plus mal fondé à reprocher à son employeur de ne pas avoir tenu compte de son renoncement à ce congé qu'il a de fait pris le congé pour création d'entreprise à compter du 17 juillet 2009 dont il a même demandé le renouvellement par lettre du 8 mai 2009, ce qui manifeste son plein accord pour bénéficier de ce congé qui répondait à un projet personnel explicité dans sa lettre initiale de demande ; que dès le 14 mai 2009, l'employeur a informé son salarié qu'il lui accordait le renouvellement de son congé qui débutera le 17 juillet 2009 pour se terminer le 16 juillet 2010 ; qu'en l'état de l'ensemble de ces éléments, l'existence de tensions volontairement entretenues par le CRE-RATP pour le pousser à la démission ou pour empêcher sa réintégration effective n'est pas établie et les déductions qu'en tire le salarié, à savoir que son licenciement serait une rétorsion à son action en justice et qu'il aurait été victime de harcèlement moral et d'attitudes discriminatoires avant son licenciement ne sont pas avérées ; qu'en revanche, il convient de vérifier si le refus de réintégrer le salarié à l'expiration de son congé pour création d'entreprise est fondé ou s'il procède d'un harcèlement ou d'une discrimination ou d'une violation d'une liberté ou d'un droit fondamental invoqué par le salarié ; qu'à cet égard, la cour observe que si le salarié n'a pas respecté le délai réglementaire de trois mois prévu par l'article D. 3142-15 du code du travail pour prévenir son employeur de son intention d'être réemployé, ce seul manquement ne justifiait pas le licenciement du salarié ; qu'averti dès le 10 juin 2010 de l'intention du salarié d'être réemployé le 6 juillet 2010, date à bon droit reportée par l'employeur au 16 juillet 2010, date d'expiration du congé renouvelé, l'employeur a de fait réintégré son salarié dans l'entreprise et mis fin à la suspension du contrat de travail en lui maintenant son salaire jusqu'au licenciement effectif en date du 5 janvier 2011 tout en ne lui fournissant pas de travail pour permettre au salarié de chercher un autre emploi ; que dès lors que le salarié avait manifesté ainsi son intention d'être réemployé, il appartenait à l'employeur conformément à l'article L. 3142-84 du code du travail de fournir à son salarié son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération équivalente ; que force est de constater avec le premier juge que l'employeur a failli à son obligation légale ; que le salarié indique que son éviction du service des ressources humaines est discriminatoire en ce que loin de privilégier les candidatures internes comme la sienne, il a été fait appel à un salarié détaché en mars 2010 promu le 1er novembre 2010 aux fonctions de responsable des ressources humaines et enfin qu'il a été fait appel à un personnel extérieur M. B... en 2011 ; qu'il considère que ces nominations se sont faites au détriment de la sienne et sont discriminatoires ; mais que, d'une part, il ressort des pièces versées par l'employeur que M. Claude Y..., salarié détaché a été recruté en mars 2010 en qualité d'adjoint au directeur des ressources humaines à une époque où le salarié n'avait pas même informé son employeur de son intention de réintégrer l'entreprise ; que s'il a été promu à compter du 1er novembre 2010 responsable de la direction des ressources humaines, cela s'est fait par lettre de janvier 2011 postérieurement au licenciement du salarié alors que ce dernier n'avait pas spécifiquement postulé sur ce poste et que l'expérience de M. Y... en poste en qualité d'adjoint depuis mars 2010le qualifiait plus spécifiquement à ce poste ; que d'autre part l'embauche de M. B... le 6 juin 2011 en qualité de responsable de l'administration du personnel a été faite à l'échelon C 2, c'est-à-dire une position inférieure à celle C3 à laquelle l'appelant était placé avant son congé ; que la société intimée justifie aussi justifiant que le salarié ne se soit pas vu confier ces postes ; qu'elle justifie en outre que la réorganisation du service du personnel, loin de correspondre à une volonté préméditée d'évincer le salarié comme l'allège l'appelant, a débuté en 2009 soit à l'époque où le salarié était en congé pour création d'entreprise et qu'elle répondait à la nécessité objective de redéfinir un nouveau cadre conventionnel propre à l'entreprise ainsi que le démontre le contrat de prestation conclu pour accompagner le service DRH dans ces changements (pièce 18 de l'employeur) ; qu'en revanche, M. Y... qui occupait un poste C3 comme le salarié a, du fait de sa promotion en novembre 2010, laissé son poste d'adjoint vacant en C3 que l'employeur n'a pas proposé au salarié sans justifier de raison objective de cette absence de proposition d'un poste équivalent ; que l'employeur tenu par l'article L. 3142-86 du code du travail de faire bénéficier le salarié en tant que de besoin d'une réadaptation professionnelle ne démontre pas que le salarié n'était pas en mesure d'occuper ce poste ; que par ailleurs qu'elles que soient les discussions effectives quant à une rupture conventionnelle, l'employeur se devait entre le premier entretien préalable de licenciement qui a eu lieu le 13 juillet 2010 et le second le 24 décembre 2010 de rechercher tous les postes disponibles équivalents à celui occupé par l'appelant avant son congé ; qu'or force est de constater que le CRE-RATP ne justifie d'aucune démarche de recherche de poste au profit de l'appelant à l'intérieur de l'entreprise de plus de 650 salariés ; que pour toutes ces raisons, c'est à juste titre que le premier juge a écarté la nullité du licenciement, a rejeté la demande subséquente de réintégration à la lettre BB mais a retenu le défaut de cause réelle et sérieuse du licenciement » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur l'atteinte aux libertés fondamentales ; qu'au terme de l'article L. 1121-1 du Code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ; que le salarié soutient que l'employeur a porté atteinte à son droit au travail en refusant de le réintégrer après son congé pour création d'entreprise et que son licenciement est nul ; que l'employeur prétend que la dispense d'activité du salarié du 13 juillet au 24 décembre 2010 a été convenue d'un commun accord lors de l'entretien du 13 juillet 2010 ; qu'en tout état de cause, le salarié ne conteste pas avoir été réintégré dans l'entreprise fin novembre 2007 après les différentes décisions judiciaires en sa faveur ; qu'il ne produit aucune pièce permettant d'étayer sa demande au titre de l'atteinte à sa liberté de travail en dehors des courriers de son avocat et de la saisine de l'inspection du travail, en mars 2008, dont les suites restent inconnues ; que les parties ne produisent aucune pièce relative au poste tenu par le salarié de décembre 2007 à mai 2008 ; que du 23 avril au 6 mai 2008, le salarié s'est mis en retrait de l'entreprise et l'employeur l'a considéré en absence injustifiée ; que du 23 mai au 1er juin 2008, il s'est trouvé en arrêt maladie ; que du 3 juin au 8 juillet 2008, le salarié s'est trouvé en congés payés, puis du 9 au 16 juillet 2008, en RTT ; qu'à la demande du salarié, l'employeur lui a permis de bénéficier d'un congé pour création d'entreprise tout en soldant ses congés payés et ses jours RTT ; qu'il a ensuite renouvelé ce congé à sa demande ; qu'au terme de son congé pour création d'entreprise, le salarié a de nouveau perçu des salaires de l'employeur, du mois de juillet 2010 au mois de janvier 2011 ; qu'aucun élément n'est versé aux débats pour démontrer que l'employeur a volontairement évincé le salarié de son poste de travail ; qu'en tout état de cause, l'obligation de l'employeur de fournir un travail au salarié, quand elle n'est pas remplie, ne peut constituer un motif de rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur invoqué par le salarié lui-même, ce qu'il n'a pas fait en l'espèce ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de constater une atteinte aux libertés fondamentales, notamment à la liberté du travail ; Sur la discrimination ; qu'en vertu de l'article L. 1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte notamment en matière de rémunération, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu'en vertu de l'article L. 1134-1 du Code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions relatives à la discrimination, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, le salarié prétend avoir subi une discrimination ; qu'en tout état de cause, il n'a pas présenté des éléments de faits précis laissant supposer l'existence d'une telle discrimination ; que par conséquence le licenciement ne peut être déclaré nul tant au titre de la discrimination que de l'atteinte aux droits et libertés fondamentaux » ;

1°) ALORS QU'en matière de harcèlement moral, si le salarié établit des faits laissant présumer l'existence d'un tel harcèlement ou discrimination, c'est à l'employeur d'établir les éléments objectifs démontrant que ses agissements sont étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, pour débouter Monsieur X... de ses demandes afférentes à la nullité de son licenciement, la cour d'appel a retenu que le salarié n'avait pas établi les attitudes harcelantes (arrêt p. 5 § 3) ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1154-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en matière de discrimination, si le salarié établit des faits laissant présumer l'existence d'une telle discrimination, c'est à l'employeur d'établir les éléments objectifs démontrant que ses agissements sont étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, pour débouter Monsieur X... de ses demandes afférentes à la nullité de son licenciement, la cour d'appel a retenu que le salarié n'avait pas établi les attitudes discriminatoires (arrêt p. 5 § 3) ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et violé l'article 1315 du code civil, ensemble l'article L. 1134-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé, à peine de nullité ; qu'en l'espèce, M. X... soutenait avoir faire l'objet de pratiques discriminatoires pour solliciter la nullité de son licenciement ; qu'en s'abstenant de motiver sa décision de rejet des demandes formulées à ce titre, et en se bornant à affirmer que le salarié n'établissait pas les faits allégués concernant la discrimination, la cour d'appel, par motifs adoptés, a violé l'article 455 de Code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la preuve est libre en matière prud'homale ; que le principe « nul ne peut se constituer de preuve à soi-même » n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; que le salarié peut donc établir les faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ou d'une discrimination par tous moyens ; que cette preuve peut, notamment, résulter de documents établis par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, pour dire que le harcèlement ou la discrimination n'étaient pas établis, la cour d'appel a relevé que l'offre probatoire de M. X... reposait sur des documents établis par lui ou par son conseil ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe de la liberté de la preuve, ensemble les articles L. 1134-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;

5°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que M. X..., pour établir la présomption de harcèlement, de discrimination et d'atteinte à ses libertés fondamentales, faisait précisément valoir dans ses conclusions que les délégués du personnel avaient exercé un droit d'alerte relatif aux conditions d'exécution de son contrat de travail à la suite de sa réintégration (conclusions p. 4 in fine) ; qu'en affirmant péremptoirement, sans répondre à ce chef des conclusions de l'exposant, que la discrimination ou le harcèlement n'était pas établi, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE le fait de priver unilatéralement le salarié de ses missions et responsabilités professionnels constitue un fait de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à l'issue de son congé pour création d'entreprise, Monsieur X... ne s'était vu confier aucun travail par le CRE RATP (arrêt p. 6 § 4) ; que la cour d'appel, pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la nullité du licenciement, a néanmoins retenu que le harcèlement moral n'était pas établi ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L. 1152-3 et L. 1154-1 du Code du travail ;

7°) ALORS QUE dès lors que le salarié établit des faits laissant présumer le harcèlement moral, il appartient à l'employeur de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il appartenait de rechercher si le refus de réintégrer le salarié à l'issue de son congé pour création d'entreprise est fondé ou s'il procède d'un harcèlement, d'une discrimination ou d'une violation d'une liberté ou d'un droit fondamental (arrêt p. 6 § 3) ; qu'elle a ensuite constaté que l'employeur avait failli à son obligation légale à ce titre, n'avait pas proposé à M. X... le poste d'adjoint en C3 laissé vacant par M. Y..., sans justifier de raison objective de cette absence de proposition d'un poste équivalent, ni démontrer que le salarié n'était pas en mesure d'occuper ce poste qui aurait dû lui être proposé ; qu'elle a encore constaté que le CRE-RATP ne justifiait d'aucune démarche de recherche de poste disponible au profit de M. X... entre le premier entretien préalable et le second ; qu'en écartant pourtant la nullité du licenciement pour harcèlement moral, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur ne justifiait pas objectivement son refus de réintégrer le salarié, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail ;

8°) ALORS QUE dès lors que le salarié établit des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination, il appartient à l'employeur de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'une telle discrimination et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il appartenait de rechercher si le refus de réintégrer le salarié à l'issue de son congé pour création d'entreprise est fondé ou s'il procède d'un harcèlement, d'une discrimination ou d'une violation d'une liberté ou d'un droit fondamental (arrêt p. 6 § 3) ; qu'elle a ensuite constaté que l'employeur avait failli à son obligation légale à ce titre, n'avait pas proposé à M. X... le poste d'adjoint en C3 laissé vacant par M. Y..., sans justifier de raison objective de cette absence de proposition d'un poste équivalent, ni démontrer que le salarié n'était pas en mesure d'occuper ce poste qui aurait dû lui être proposé ; qu'elle a encore constaté que le CRE-RATP ne justifiait d'aucune démarche de recherche de poste disponible au profit de M. X... entre le premier entretien préalable et le second ; qu'en écartant pourtant la nullité du licenciement pour discrimination, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur ne justifiait pas objectivement son refus de réintégrer le salarié, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et L. 1132-2 et L. 1134-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-14835
Date de la décision : 16/11/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 nov. 2017, pourvoi n°16-14835


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.14835
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