LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2016), que M. X...a assigné le ministère public pour voir reconnaître qu'il est français par filiation paternelle, au motif que son père, Chérif X..., né en 1906, dont il a suivi la condition, avait conservé de plein droit la nationalité française en application de l'article 32-3 du code civil, aucune autre nationalité ne lui ayant été conférée, ainsi que par l'effet de la possession d'état constante de Français ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt de constater son extranéité, alors, selon le moyen, que les personnes de statut civil de droit local originaires d'Algérie et leurs enfants mineurs conservent de plein droit la nationalité française si une autre nationalité ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962 ; que le juge français, lorsqu'il est saisi d'une demande d'application de l'article 32-3 du code civil, doit rechercher le contenu de la loi algérienne prévoyant les règles d'acquisition de la nationalité algérienne après l'indépendance de l'Algérie pour déterminer si cette nationalité a été conférée au requérant postérieurement au 3 juillet 1962 ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande de M. X...tendant à lui voir délivrer un certificat de nationalité française, qu'il ne rapportait pas la preuve, dont la charge lui incombait, de ce que son père ait conservé la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie, sans rechercher d'office la teneur de la loi algérienne, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, afin de déterminer si elle avait attribué au père du requérant la nationalité algérienne, la cour d'appel a violé les articles 3 et 32-3 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que M. X...n'était pas titulaire d'un certificat de nationalité, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise, a exactement retenu qu'il incombait à celui-ci de prouver que son père n'avait pas été saisi, lors de l'accession de l'Algérie à l'indépendance, par la loi de nationalité algérienne ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué
D'AVOIR dit que M. Mohamed-Ahmed X...n'est pas de nationalité française et ordonné en conséquence la mention prévue par l'article 28 du code civil,
AUX MOTIFS QUE « en application de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve de la qualité de français incombe à l'appelant qui n'est pas titulaire d'un certificat de nationalité française ; les conséquences sur la nationalité de l'accession à l'indépendance de l'Algérie sont déterminées par l'article 32-1 du code civil qui a été substitué à l'article 154 du code de la nationalité française lequel, reprenait les termes de l'article 1er de l'ordonnance du 21 juillet 1962, selon lesquels les français de statut civil de droit commun domiciliés en Algérie à la date de l'annonce officielle des résultats du scrutin d'autodétermination conservaient la nationalité française quelle que soit leur situation au regard de la nationalité algérienne et que les personnes originaires d'Algérie de statut civil de droit local ont perdu la nationalité française le 1er janvier 1963 ; qu'en vertu de l'article 1er alinéa 3 de la loi du 20 décembre 1966, les personnes originaires d'Algérie relevant d'un statut de droit local qui n'ont pas été saisies par la loi algérienne ont conservé la nationalité française si une autre nationalité ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962 ; que si le père de l'appelant, Chérif X..., né le 25 décembre 1906 à Mateur Bizerte (Tunisie) était français en qualité d'originaire des anciens départements d'Algérie, il relevait du statut civil de droit local ainsi qu'il résulte du certificat d'immatriculation du Consulat général de France à Tunis du 19 mars 1953 ; que l'appelant soutient vainement que son père qui n'a pas souscrit de déclaration recognitive de nationalité française, était dispensé d'une telle souscription au motif que l'absence d'enregistrement à l'état civil d'enregistrement à l'état civil algérien du père de celui-ci empêchait Chérif X..., d'aspirer à la nationalité algérienne, de sorte que pour éviter l'apatridie, il a conservé de plein droit la nationalité française en vertu de l'article 1er alinéa 3 de la loi du 20 décembre 1966 alors qu'il n'établit pas que cette circonstance était de nature à lui interdire l'accès à la nationalité algérienne ; qu'il soutient encore que l'article 2 de l'ordonnance du 21 juillet 1962 ne s'appliquait pas à son père en raison de la naissance et de la résidence continue de celui-ci en Tunisie alors que ces circonstances ne l'exonéraient pas de la nécessité de souscrire une déclaration recognitive ; qu'ainsi, ne démontrant pas ainsi qu'il lui incombe que son père a conservé la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie l'appelant échoue à démontrer qu'il est français par filiation paternelle » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Monsieur Mohamed-Ahmed Y...soutient être français par filiation paternelle pour être le fis de Chérif X...né le 25 décembre 1906 à Mateur Bizerte (Tunisie), lui-même français par ses origines algériennes ; que Monsieur Mohamed-Ahmed X...justifie de son état civil par la production d'une copie de son acte de naissance dressé sous le numéro 26 le 26 mars 1953 sur déclaration du père, selon lequel il et né le 25 mars 1953 à Mateur (Tunisie), de Chérif X...et de Z... ; qu'il est de principe que la déclaration de naissance faite à l'officier de l'état civil par un homme qui indique que l'enfant est issu de lui-même et de la femme qu'il désigne constitue une reconnaissance ; que l'acte de naissance de Monsieur Mohamed-Ahmed X...suffit donc, en l'espèce, à prouver son lien de filiation à l'égard de Chérif X...; que le ministère public admet que Chérif X...était français en qualité d'originaire des anciens départements français d'Algérie, compte tenu de la production d'un certificat d'immatriculation du Consulat général de France à Tunis en date du 19 mars 1953 ; qu'il s'en déduit que Monsieur Mohamed-Ahmed X...est né français par filiation paternelle ; toutefois, qu'étant né français comme fis d'un originaire d'Algérie, il appartient à Monsieur Mohamed-Ahmed X...de prouver qu'il n'a pas perdu la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie ; qu'il convient de rappeler à cet égard que les effets sur la nationalité française de l'accession à l'indépendance des départements algériens sont régis par l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 et par la loi n° 66-945 du 20 décembre 1966 et font actuellement l'objet des dispositions des articles 32-1 et 32-2 du code civil ; qu'il résulte en substance de ces textes que les français musulmans originaires d'Algérie ont conservé la nationalité française :- de plein droit, s'ils étaient de statut civil de droit commun ce qui ne pouvait résulter que de leur admission ou de celle de l'un de leur ascendant, ce statut étant transmissible à la descendance, à la citoyenneté française en vertu exclusivement, soit d'un décret pris en application du sénatus-consulte du 14 juillet 1865n soit d'un jugement rendu sur le fondement de la loi du 4 février 1919 ou, pour les femmes, de la loi du 18 août 1929, ou encore de la renonciation à leur statut personnel suite à une procédure judiciaire sur requête ;- s'ils étaient de statut civil de droit local, par l'effet de la souscription d'une déclaration de reconnaissance au plus tard le 21 mars 1967 (les mineurs de 18 ans suivant la condition parentale dans les conditions prévues à l'article 153 du code de la nationalité française), ce, sauf si la nationalité algérienne ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962, faute de quoi ils perdaient la nationalité française au 1er janvier 1963 ; qu'en l'espèce, il est incontestable que le père du demandeur, M. Chérif X..., relevait du statut civil de droit local puisque son certificat d'immatriculation auprès de la Résidence générale de France à Tunis précise qu'il était inscrit en qualité de « français musulman d'Algérie » ; que le demandeur ne justifie ni d'ailleurs n'allègue que son père, dont il suivant la condition du fait de sa minorité au jour de l'indépendance de l'Algérie, aurait souscrit la déclaration recognitive prévue par l'article 2 de l'ordonnance 62-825 du 21 juillet 1962 ; que contrairement à ce qu'il soutient, ni le fait d'être né en Tunisie ni le fait d'y avoir toujours résidé ne le dispensaient de cette déclaration d'option s'il souhaitait conserver la nationalité française ; que Monsieur Mohamed-Ahmed X...a donc perdu la nationalité française le 1er janvier 1963 » ;
ALORS QUE les personnes de statut civil de droit local originaires d'Algérie et leurs enfants mineurs conservent de plein droit la nationalité française si une autre nationalité ne leur a pas été conférée postérieurement au 3 juillet 1962 ; que le juge français, lorsqu'il est saisi d'une demande d'application de l'article 32-3 du code civil, doit rechercher le contenu de la loi algérienne prévoyant les règles d'acquisition de la nationalité algérienne après l'indépendance de l'Algérie pour déterminer si cette nationalité a été conférée au requérant postérieurement au 3 juillet 1962 ; qu'en énonçant, pour rejeter la demande de M. X...tendant à lui voir délivrer un certificat de nationalité française, qu'il ne rapportait pas la preuve, dont la charge lui incombait, de ce que son père ait conservé la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie, sans rechercher d'office la teneur de la loi algérienne, avec le concours des parties et personnellement s'il y a lieu, afin de déterminer si elle avait attribué au père du requérant la nationalité algérienne, la cour d'appel a violé les articles 3 et 32-3 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué
D'AVOIR dit que M. Mohamed-Ahmed X...n'est pas de nationalité française et ordonné en conséquence la mention prévue par l'article 28 du code civil,
AUX MOTIFS QUE « cependant, il ne produit que des pièces le concernant délivré (es) entre 2013 et 2015 (certificat d'inscription des français établis hors de France à compter du 16 janvier 2013, copie du passeport français délivré le 25 mars 2013, copie de la carte nationale d'identité délivrée le 19 septembre 2014 et copie de la carte d'électeur du 1er mars 2015) ; que ce faisant, il ne démontre pas que lui-même et son père ont joui d'une possession d'état constante de français » ;
1°) ALORS QUE les juges ne sauraient dénaturer les éléments de preuve qui leur sont soumis ; qu'à l'appui de sa demande, M. X...produisait deux pièces tendant à démontrer l'existence de la possession d'état de son propre père, à savoir, un certificat d'immatriculation au registre des français établis hors de France et de résidence et un certificat médical d'aptitude concernant ce dernier ; qu'en énonçant cependant, pour retenir qu'il ne démontrait pas que lui-même et son père auraient joui d'une possession d'état constante de français, qu'il ne produisait que des pièces le concernant délivrées entre 2013 et 2015, la cour d'appel a dénaturé par omission le certificat d'immatriculation au registre des Français établis hors de France de M. Chérif X..., et le certificat médical d'aptitude concernant ce dernier et ainsi méconnu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE les juges ne peuvent rejeter les demandes d'une partie, au motif qu'un élément de preuve figurant sur son bordereau de pièces, et dont la communication n'a pas été contestée, n'aurait pas été produit devant eux, sans l'inviter à s'expliquer sur l'absence au dossier de cette pièce ; que le bordereau de pièces de M. X...indiquait qu'il avait communiqué un certificat d'immatriculation au registre des français établis hors de France et de résidence de son père et un certificat médical d'aptitude concernant ce dernier ; qu'en énonçant, pour retenir que M. X...ne démontrait pas que lui-même et son père auraient joui d'une possession d'état constante de français, qu'il ne produisait que des pièces le concernant délivrés entre 2013 et 2015, sans l'inviter à présenter ses observations sur cette absence de production d'éléments de preuves qui figuraient sur le bordereau de pièces annexé aux dernières conclusions de M. X..., et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a méconnu l'article 16 du code de procédure civile.