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25/10/2017 | FRANCE | N°16-14210

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 octobre 2017, 16-14210


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 1er février 2016), que M. et Mme X... ont confié le transport et l'entreposage de leurs meubles à la société de déménagement AMDT ; qu'ayant été livrés le 2 juillet 2012, ils ont, par lettre du 6 juillet 2012, informé cette dernière de l'existence de dommages et de manquants ; que la société Marsh, courtier d'assurances, à laquelle la société AMDT a transmis la réclamation, leur a proposé, par lettre du 22 avril 2013, une indemnité ; qu'estimant cette pr

oposition insuffisante, M. et Mme X... ont assigné les sociétés AMDT et Mars...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cayenne, 1er février 2016), que M. et Mme X... ont confié le transport et l'entreposage de leurs meubles à la société de déménagement AMDT ; qu'ayant été livrés le 2 juillet 2012, ils ont, par lettre du 6 juillet 2012, informé cette dernière de l'existence de dommages et de manquants ; que la société Marsh, courtier d'assurances, à laquelle la société AMDT a transmis la réclamation, leur a proposé, par lettre du 22 avril 2013, une indemnité ; qu'estimant cette proposition insuffisante, M. et Mme X... ont assigné les sociétés AMDT et Marsh les 14 et 16 octobre 2013 ; que les sociétés Bâloise Belgium, Helvetia compagnie suisse d'assurances (la société Helvetia), Allianz Global Corporate et Specialty SE (la société Allianz), Generali IARD et Tokio Marine Europe Insurance (la société Tokio marine) sont intervenues volontairement à l'instance en qualité d'assureurs de la société AMDT ; qu'elles ont, avec cette dernière, opposé la prescription de l'action ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés AMDT, Bâloise Belgium, Helvetia, Allianz, Tokio marine et Generali IARD font grief à l'arrêt de déclarer l'action de M. et Mme X... recevable alors, selon le moyen :

1°/ que la proposition amiable d'indemnisation dans le cadre de pourparlers transactionnels ne vaut pas reconnaissance de responsabilité et n'interrompt pas la prescription; que la cour d'appel qui a énoncé que la lettre du 22 avril 2013 par laquelle la société Marsh, courtier en assurance, avait indiqué à M. et Mme X... qu'il leur était proposé une indemnité de 1 264 euros à la suite des avaries constatées, constituait une reconnaissance de responsabilité interruptive de prescription, sans rechercher comme cela lui était demandé s'il ne s'agissait pas d'une proposition amiable dans le cadre de pourparlers transactionnels, n'a pas justifié sa décision au regard des articles L. 113-9 et L. 113-6 du code de commerce et de l'article 2240 du code civil ;

2°/ que toute clause d'un contrat qu'elle soit usuelle ou de style n'en produit pas moins un effet normal ; que la cour d'appel qui a énoncé que la mention selon laquelle l'offre d'indemnisation était faite sans reconnaissance du droit du réclamant était une clause de style qui ne faisant pas disparaître la reconnaissance de responsabilité a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la lettre du 22 avril 2013 mentionnait que la société Marsh, courtier en assurance, avait proposé à M. et Mme Y... une indemnité, contenait un engagement de payer, visait des avaries et employait le terme d'indemnité, l'arrêt en déduit que cette lettre a constitué une reconnaissance de responsabilité, au sens de l'article 2240 du code civil, qui a interrompu la prescription ; qu'en l'état du litige tel qu'il lui avait été soumis, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer d'autre recherche qui ne lui avait pas été demandée, a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que même si la lettre contenait une mention selon laquelle l'offre était faite sans reconnaissance du droit du réclamant, elle s'inscrivait dans un processus de réclamation auquel elle visait à mettre fin, après une expertise, et s'accompagnait d'une offre qu'elle qualifiait d'indemnitaire, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir une contradiction entre la mention litigieuse et l'offre d'indemnité, a pu en déduire qu'elle constituait une clause de style ne faisant pas disparaître la reconnaissance de responsabilité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les sociétés AMDT, Bâloise Belgium, Helvetia, Allianz, Tokio marine et Generali IARD font grief à l'arrêt de les condamner à payer solidairement à M. et Mme X... la somme de 3 709 euros au titre d'un préjudice matériel alors, selon le moyen, que lorsque le destinataire consommateur dénonce les pertes et avaries constatées sur les marchandises dans un délai de dix jours après la livraison, son action à l'égard du transporteur n'est pas éteinte, cependant en l'absence de réserve à la livraison, le réceptionnaire devra apporter la preuve que les dommages se sont produits lors du transport ; qu'en décidant qu'en raison des réserves faites dans le délai de dix jours le principe de l'indemnisation à la charge des sociétés AMDT, Bâloise Belgium, Helvetia, Allianz, Tokio Marine et Generali était acquis, la cour d'appel a violé les articles 1784 du code civil, l'article L. 133-1 du code de commerce, l'article L. 121-95 du code de la consommation et l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés, que M. et Mme X... avaient émis des réserves détaillées le jour de la livraison, la cour d'appel a exactement déduit de ce seul motif que le principe de l'indemnisation à la charge de la société de transport et de ses assureurs n'était pas contestable ; que le moyen, qui critique un motif surabondant, n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que les sociétés AMDT, Bâloise Belgium, Helvetia, Allianz, Tokio Marine et Generali IARD font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à M. et Mme X... la somme de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral alors, selon le moyen, que les juges ne peuvent statuer par simple affirmation sans viser ou analyser les documents sur lesquels ils se fondent ; qu'en énonçant, par motifs adoptés, que les requérants démontraient l'existence du préjudice moral résidant notamment dans les difficultés pour trouver un restaurateur, la cour d'appel qui n'a visé ni analysé le moindre document sur lequel elle se serait fondée a violé l'article 455 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que sous le couvert d'un grief infondé de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine, par la cour d'appel, de l'existence et de l'étendue du préjudice moral de M. et Mme X... ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés AMDT, Baloise Belgium, Helvetia compagnie Suisse d'assurances, Allianz Global Corporate et Specialty SE, Generali IARD et Tokio Marine Europe Insurance aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour les sociétés AMDT, Baloise Belgium, Helvetia compagnie suisse d'assurances, Allianz Global Corporate et Speciality SE, Generali IARD et Tokio Marine Europe Insurance.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prescription n'était pas acquise à la date de la délivrance de l'assignation et déclaré que l'action des époux X... était recevable

Aux motifs qu'il résulte de l'article L 113-9 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 8 décembre 2009, que la prescription d'un an en cas d'avaries ou des pertes subies à l'occasion d'un contrat de transport, prévue par l'article L 113-6 du même code, s'applique aux entreprises de déménagement dès lors que la prestation objet du contrat de déménagement, comprend pour partie, une opération de transport ; ici les époux X... ont conclu avec la société AMDT un contrat par lequel cette société a transporté des meubles et d'autres objets pour les entreposer, puis les transporter de nouveau dans leur maison ; il en résulte que la prestation, objet de ce contrat, comprenait, pour partie une opération de transport ; ainsi, la prescription d'un an, prévue par l'article L 113-6 du code de commerce est applicable ; la prescription a commencé à courir le 2 juillet 2012, date de la livraison du mobilier ; les époux X... ont alors formé une réclamation auprès du déménageur, indiquant que des meubles étaient abîmés ; ils ont détaillé ces griefs sur une lettre écrite le 6 juillet 2012 à la société AMDT ; celle-ci a pris contact avec son assureur, qui a chargé un expert d'évaluer les dommages ; dans ces conditions, la Cour estime que la lettre du 22 avril 2013, par laquelle la société Marsh, courtier en assurance a indiqué aux époux X... qu'il leur était proposé une indemnité de 1264€ à la suite des avaries constatées, constitue au sens de l'article 2240 du code civil, une reconnaissance de responsabilité qui a interrompu la prescription ; en effet cette lettre contient un engagement de payer, elle vise des avaries, et elle emploie le terme d'indemnité, ce qui constitue, pour la Cour, une reconnaissance du droit des époux X... ; même si cette lettre contient une mention selon laquelle l'offre est faite sans reconnaissance du droit du réclamant, il s'agit là d'une clause de style qui ne fait pas disparaître la reconnaissance de responsabilité dès lors qu'elle s'inscrit dans un processus de réclamation auquel elle vise à mettre fin, après une expertise et qu'elle s'accompagne d'une offre qu'elle qualifie d'indemnitaire ; il suit de là que la prescription d'un an qui a commencé à courir le 5 juillet 2012 a été interrompue le 22 avril 2013 et qu'elle n'était donc pas acquise à la date de la délivrance de l'assignation, en octobre 2013 ; la demande des assureurs, tendant à ce que la prescription soit déclarée acquise à la date de la délivrance ne peut être accueillie ;

Alors que la proposition amiable d'indemnisation dans le cadre de pourparlers transactionnels ne vaut pas reconnaissance de responsabilité et n'interrompt pas la prescription; que la Cour d'appel qui a énoncé que la lettre du 22 avril 2013 par laquelle la société Marsh, courtier en assurance avait indiqué aux époux X... qu'il leur était proposé une indemnité de 1264€ à la suite des avaries constatées, constituait une reconnaissance de responsabilité interruptive de prescription, sans rechercher comme cela lui était demandé s'il ne s'agissait pas d'une proposition amiable dans le cadre de pourparlers transactionnels, n'a pas justifié sa décision au regard des articles L 113-9 et L 113-6 du code de commerce et de l'article 2240 du code civil ;

Et alors que toute clause d'un contrat qu'elle soit usuelle ou de style n'en produit pas moins un effet normal ; que la cour d'appel qui a énoncé que la mention selon laquelle l'offre d'indemnisation était faite sans reconnaissance du droit du réclamant était une clause de style qui ne faisant pas disparaître la reconnaissance de responsabilité a violé l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement la SARL AMDT, les sociétés Baloise Belgium Helvetia Compagnie Suisse d'assurances, Allianz Global Corporate et Speciality France, Tokio Marine Europe Insurance LTD, Generali IARD SA à Payer à Monsieur X... Bruno et Madame X... Eliette, la somme de 3709€ au titre de leur préjudice matériel

Aux motifs propres qu'en ce qui concerne le montant de l'indemnité destinée à réparer le préjudice matériel, au vu du contrat conclu avec la société AMDT, du devis de restauration de meubles, daté du 28 octobre 2012, et des correspondances échangées entre les parties, la cour est en mesure de s'assurer que le tribunal a fait l'exacte appréciation du préjudice matériel indemnisable

Et aux motifs adoptés que vu les articles 1147, 1782 et suivants du code civil, vu le contrat de déménagement liant les parties en son article 14 ; qu'aucune cause étrangère ne saurait être valablement soulevée par les défendeurs ; que l'obligation de résultat de l'entreprise de déménagement AMDT n'a pas été respectée compte tenu des avaries et dommages dénoncés et valablement listés par les demandeurs lors de la réception des biens objets de la convention et à tout le moins dans le délai de 10 jours exigé par le code de la consommation, le principe de l'indemnisation des défendeurs n'est pas contestable ; que toutefois en l'absence de déclaration de valeur pour une somme supérieure à 500€ par meuble, il convient de dire que chaque meuble endommagé sera estimé à la valeur déclarée soit 500€ ; qu'en conséquence les sociétés défenderesses seront condamnées solidairement à payer aux époux X... la somme totale de 3709€ au titre de la réparation du préjudice matériel subi ;

Alors que lorsque le destinataire consommateur dénonce les pertes et avaries constatées sur les marchandises dans un délai de 10 jours après la livraison, son action à l'égard du transporteur n'est pas éteinte, cependant en l'absence de réserve à la livraison, le réceptionnaire devra apporter la preuve que les dommages se sont produits lors du transport ; qu'en décidant qu'en raison des réserves faites dans le délai de 10 jours le principe de l'indemnisation à la charge des exposant était acquis, la cour d'appel a violé les articles 1784 du code civil, l'article L 133-1 du code de commerce l'article L 121-95 du code de la consommation et l'article 1315 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a condamné solidairement la SARL AMDT, les sociétés Baloise Belgium Helvetia Compagnie Suisse d'assurances, Allianz Global Corporate et Speciality France, Tokio Marine Europe Insurance LTD, Generali IARD SA à Payer à Monsieur X... Bruno et Madame X... Eliette, la somme de 2000€ au titre de leur préjudice moral

Aux motifs adoptés que les requérants démontrent l'existence du préjudice allégué justifiant une condamnation au paiement de dommages intérêts notamment dans les difficultés auxquelles ils se sont confrontés afin de trouver un restaurateur ; qu'il y a donc lieu de condamner solidairement les défendeurs à payer la somme de 2000€ de ce chef

Alors que les juges ne peuvent statuer par simple affirmation sans viser ou analyser les documents sur lesquels ils se fondent ; qu'en énonçant, par motifs adoptés que les requérants démontraient l'existence du préjudice moral résidant notamment dans les difficultés pour trouver un restaurateur, la cour d'appel qui n'a visé ni analysé le moindre document sur lequel elle se serait fondée a violé l'article 455 du code de procédure civile et l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 16-14210
Date de la décision : 25/10/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Cayenne, 01 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 25 oct. 2017, pourvoi n°16-14210


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.14210
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