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19/10/2017 | FRANCE | N°16-24234

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 octobre 2017, 16-24234


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

Attendu qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel et les pièces qui lui sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la cour d'appel par la

voie électronique par le biais du "réseau privé virtuel avocat" (RPVA) dans les co...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu les articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

Attendu qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel et les pièces qui lui sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la cour d'appel par la voie électronique par le biais du "réseau privé virtuel avocat" (RPVA) dans les conditions techniques fixées par l'arrêté susvisé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Loire Atlantique développement ayant exercé son droit de préemption sur diverses parcelles appartenant à M. et Mme Y..., a saisi un juge de l'expropriation, qui a fixé la valeur de ces parcelles par un jugement du 12 mai 2015, signifié le 20 mai 2015 ; que M. et Mme Y... ont adressé au greffe de la cour d'appel une déclaration d'appel, le 16 juin 2015, par la voie électronique, réitérée le 25 juin 2015 par lettre recommandée ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel de M. et Mme Y..., l'arrêt retient que l'avocat des appelants a envoyé une déclaration d'appel au greffe par la voie de la communication électronique, le 16 juin 2015, que ce message a été refusé, le jour même, au motif qu'il n'était pas conforme aux exigences de la convention relative à la communication électronique ("sans le message structuré, votre enregistrement ne pourra aboutir"), que cette déclaration d'appel n'étant pas conforme au protocole mis en place avec le barreau de Nantes, ce refus était conforme à l'article 5 de la convention passée avec ce barreau ("Lorsqu'une déclaration d'appel est incorrecte et refusée par l'application informatique, il est envoyé à l'expéditeur un accusé de réception négatif dès l'ouverture du message par le greffe au plus tard le jour ouvrable suivant. L'acte rejeté n'est pas pris en compte, n'est pas traité et ne reçoit aucun numéro de DA - déclaration d'appel - ni de RG -répertoire général") et que l'expéditeur, immédiatement informé de ce refus, n'a adressé sa déclaration d'appel par lettre recommandée qu'après l'expiration du délai d'un mois pour former appel ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la régularité de la transmission par la voie électronique d'une déclaration d'appel formée contre un jugement rendu en matière d'expropriation s'apprécie au regard des seules dispositions des articles 748-1 et suivants du code de procédure civile et de l'arrêté pris en application de ces articles par le garde des sceaux le 5 mai 2010, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 juillet 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne la société Loire Atlantique développement aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer à M. et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'appel de M. et Mme Y... ;

AUX MOTIFS QUE, sur le moyen d'irrecevabilité de l'appel, l''article R. 311-24 du code de l'expropriation dispose que l'appel est interjeté par les parties ou par le commissaire du gouvernement dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée au greffe de la cour et que la déclaration d'appel est accompagnée d'une copie de la décision ; que l'article R. 311-26 prévoit que, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel ; qu'en l'espèce, le jugement du 12 mai 2015 a été signifié le 20 mai 2015 aux époux Y... (pièce n° 25 de la Sela) ; que ces derniers, par l'intermédiaire de leur avocat, ont envoyé au greffe de la cour d'appel de Rennes un mémoire introductif d'instance le 10 juin 201 5, reçu le 14 juin 2015, puis, l'avocat des appelants a envoyé une déclaration d'appel au greffe par la voie de la communication électronique, le 16 juin 2015 ; que ce message a été refusé, le jour même, au motif qu'il n'était pas conforme aux exigences de la convention relative à la communication électronique (« sans le message structuré, votre enregistrement ne pourra aboutir ») ; que ce refus était conforme à l'article 5 de la convention passée avec le barreau de Nantes (« Lorsqu'une déclaration d'appel est incorrecte et refusée par l'application informatique, il est envoyé à l'expéditeur un accusé de réception négatif dès l'ouverture du message par le greffe au plus tard le jour ouvrable suivant. L'acte rejeté n'est pas pris en compte, n'est pas traité et ne reçoit aucun numéro de DA - déclaration d'appel - ni de RG -répertoire général) ; que la déclaration d'appel sera finalement envoyée par lettre recommandée, le 25 juin 2015 ; qu'il découle des articles R. 311-24 et R. 311-26 que les formalités de l'appel, en matière d'expropriation, se déroulent en deux temps : d'abord, une déclaration d'appel dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, puis le dépôt d'un mémoire et des pièces dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel ; qu'il est prévu deux actes de procédure distincts (bien qu'il soit admis qu'une déclaration d'appel exposant les demandes de l'appelant peut pallier l'absence d'un mémoire ; l'inverse n'est pas admis) ; que le mémoire introductif d'instance envoyé le 10 juin 2015 avait été adressé de manière prématurée, avant la déclaration d'appel ; qu'intitulé « Mémoire introductif d'instance », contenant tous les moyens, arguments et demandes des époux Y..., il constitue le mémoire prévu dans la deuxième phase de l'appel ; qu'il ne saurait valoir déclaration d'appel ; que la déclaration d'appel par voie de la communication électronique, adressée le 16 juin 2015 au greffe, n'était pas conforme au protocole mis en place avec le barreau de Nantes ; que le message a été refusé et l'expéditeur en a été immédiatement infirmé ; qu'or, il n'a adressé sa déclaration d'appel par lettre recommandée que le 25 juin 2015, soit après l'expiration du délai d'un mois ayant commencé à courir le 21 mai 2015 ; qu'en conséquence, l'appel est irrecevable car interjeté hors délai ; qu'il s'ensuit que les appels incidents du commissaire du gouvernement et de la Sela sont également irrecevables (ils n'ont pas été formés dans le délai de l'appel principal) ; qu'il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat ; qu'en relevant d'office le moyen tiré du fait que la déclaration d'appel de M. et Mme Y... adressée le 16 juin 2015 par voie électronique avait été « refusé[e], le jour même, au motif qu' [elle] n'était pas conforme aux exigences de la convention relative à la communication électronique (« sans le message structuré, votre enregistrement ne pourra aboutir ») » (arrêt attaqué, p. 6, avant-dernier §), cependant qu'aucune des parties n'avait fait état d'un refus de la déclaration d'appel ou de ce que cette déclaration aurait enfreint la « convention relative à la communication électronique », laquelle n'était pas produite aux débats, la cour d'appel a violé l'article 7 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, subsidiairement, QU 'en relevant d'office le moyen tiré du fait que la déclaration d'appel de M. et Mme Y..., adressée le 16 juin 2015 par voie de communication électronique avait été « refusé[e], le jour même, au motif qu'elle n'était pas conforme aux exigences de la convention relative à la communication électronique (« sans le message structuré, votre enregistrement ne pourra aboutir ») » (arrêt attaqué, p. 6, avant-dernier §), sans qu'il résulte de la procédure que les parties aient été invitées à présenter leurs observations sur un refus de la déclaration d'appel et sur la conformité de celle-ci à la « convention relative à la communication électronique », laquelle n'était d'ailleurs pas produite aux débats, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'en énonçant que la déclaration d'appel adressée par voie électronique par M. et Mme Y... le 16 juin 2015 n'était pas conforme aux exigences de la « convention » passée entre la cour d'appel de Rennes et le barreau de Nantes notamment, cependant que cet accord était dépourvu de force obligatoire, à tout le moins, ne créait pas d'obligations à la charge des avocats, y compris ceux relevant du barreau de Nantes, la cour d'appel a violé l'article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010, relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

4°) ALORS QU'en énonçant que la déclaration d'appel adressée par voie électronique par M. et Mme Y... le 16 juin 2015 n'était pas conforme aux exigences de la « convention » passée entre la cour d'appel de Rennes et le barreau de Nantes, la cour d'appel cependant qu'à supposer que cet accord ait entendu créer des obligations à la charge du barreau de Nantes, il était illégal, la cour d'appel a violé l'article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010, relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

5°) ALORS QU'en énonçant que la déclaration d'appel adressée par voie électronique par M. et Mme Y... le 16 juin 2015 n'était pas conforme aux exigences de la « convention » passée entre la cour d'appel de Rennes et le barreau de Nantes, la cour d'appel cependant qu'à supposer que cette « convention » fût un acte administratif et ait entendu créer des obligations à la charge du barreau de Nantes, il était manifestement illégal au vu d'une jurisprudence établie, la cour d'appel a violé l'article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010, relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

6°) ALORS, subsidiairement, QU'en énonçant que la déclaration d'appel adressée par voie électronique par M. et Mme Y... le 16 juin 2015 avait été rejetée, cependant que l'avocat de M. et Mme Y... avait reçu, quelques minutes après l'émission de la déclaration, de l'expéditeur « [...] » un message disant « message reçu », la cour d'appel, qui n'a pas suffisamment motivé sa décision, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

7°) ALORS, plus subsidiairement, QU'en énonçant que la déclaration d'appel adressée par voie électronique par M. et Mme Y... le 16 juin 2015 n'était pas conforme aux exigences de la « convention » passée entre la cour d'appel de Rennes et le barreau de Nantes, sans exposer quelles exigences auraient été méconnues par la déclaration d'appel litigieuse, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

8°) ALORS, plus subsidiairement encore, QU'en matière de fixation de l'indemnité de préemption, comme en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la chambre d'expropriation par la voie électronique par le biais du « réseau privé virtuel avocat » (Rpva) ; qu'à supposer que la cour d'appel ait jugé qu'en matière d'indemnité de préemption, la déclaration d'appel ne pouvait être adressée au greffe par voie électronique, la cour d'appel a violé l'article R. 311-24 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble les articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et l'article 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel ;

9°) ALORS, plus subsidiairement encore, QUE s'il était jugé que la « convention » passée entre la cour d'appel de Rennes et le barreau de Nantes visée par l'arrêt attaqué constituait un acte administratif que seul le juge administratif pourrait interpréter, la Cour de cassation prononcerait le sursis à statuer, pour que le juge administratif, saisi par la partie la plus diligente, se prononce sur la portée de cette convention, notamment sur sa force obligatoire à l'égard des avocats, en application de l'article 378 du code de procédure civile ;

10°) ALORS, en tout état de cause, QUE l'appel est interjeté par les parties ou par le commissaire du gouvernement dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, par déclaration faite ou adressée par lettre recommandée au greffe de la cour d'appel et cette déclaration est accompagnée d'une copie de la décision ; qu'à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel ; que la déclaration d'appel contenant l'énonciation suffisante des prétentions peut suppléer l'absence d'un mémoire ultérieur ; qu'en énonçant que le document émis au nom de M. et Mme Y... le 10 juin 2015 et intitulé « mémoire introductif d'instance » avait été « adressé de manière prématurée » et ne saurait valoir déclaration d'appel, car il aurait dû être précédé d'une telle déclaration, cependant que la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant peuvent figurer dans un même écrit, la cour d'appel, qui a commis une erreur de droit, a violé les articles R. 311-24 et R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-24234
Date de la décision : 19/10/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Procédure sans représentation obligatoire - Expropriation - Transmission par voie électronique - Protocole entre la juridiction et le barreau - Effets - Détermination

APPEL CIVIL - Procédure sans représentation obligatoire - Acte d'appel - Acte d'appel contre un jugement d'une juridiction de l'expropriation - Forme - Conditions - Détermination PROCEDURE CIVILE - Acte de procédure - Notification - Notification par la voie électronique - Conditions - Modalités techniques définies par arrêté du garde des sceaux - Portée EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Indemnité - Appel - Forme - Déclaration - Transmission par voie électronique - Validité

Il résulte des articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile et 1er de l'arrêté du garde des sceaux du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel, qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel et les pièces qui lui sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la chambre de l'expropriation par la voie électronique par le biais du "réseau privé virtuel avocat" (RPVA) dans les conditions techniques fixées par cet arrêté. La régularité de la transmission par la voie électronique d'une telle déclaration d'appel s'apprécie au regard de ces seules dispositions. Doit en conséquence être censuré l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour déclarer irrecevable l'appel d'un jugement rendu en matière d'expropriation, retient que le message électronique envoyant au greffe la déclaration d'appel a été refusé par le greffe faute d'être conforme à un protocole mis en place avec le barreau de Nantes et que l'expéditeur, immédiatement informé de ce refus, n'a adressé sa déclaration d'appel par lettre recommandée qu'après l'expiration du délai pour former appel


Références :

articles 748-1, 748-3 et 748-6 du code de procédure civile

article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 22 juillet 2016

Sur la transmission par voie électronique, en matière d'expropriation, de la déclaration d'appel, des actes de constitution et des pièces, à rapprocher :2e Civ., 10 novembre 2016, pourvoi n° 14-25631, Bull. 2016, II, n° ??? (cassation)

arrêt citéSur le refus par le greffe d'un message électronique contenant les conclusions de l'appelant, dans une procédure avec représentation obligatoire, à rapprocher :2e Civ., 24 septembre 2015, pourvoi n° 14-20212, Bull. 2015, II, n° 208 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 oct. 2017, pourvoi n°16-24234, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.24234
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