LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° M 16-14. 104, B 16-20. 121 et G 16-14. 791 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 21 janvier 2016), que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble ...a commandé des travaux de rénovation de nature à permettre aux copropriétaires de bénéficier d'avantages fiscaux prévus par la loi dite « Malraux » ; que la maîtrise d'ouvrage déléguée a été confié à la société Foncière du Valembert ; que M. X..., architecte assuré par la société Axa France IARD (la société Axa), s'est vu confier une mission de maîtrise d'oeuvre partielle et la société MG rénovation sud, entreprise générale, assurée par la société L'Auxiliaire, la réalisation des travaux ; que le chantier, commencé en septembre 2002, n'a jamais été terminé ; qu'après expertise, le syndicat des copropriétaires, M. et Mme Y..., M. Z..., Mme A..., M. B..., M. C..., M. et Mme D..., M. E..., copropriétaires, ainsi que Mme F..., épouse B..., ont assigné les intervenants à l'opération et leurs assureurs en indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le pourvoi principal de la société L'Auxiliaire, ci-après annexé :
Attendu que la société L'Auxiliaire fait grief à l'arrêt de retenir son obligation à garantir la société MG rénovation sud et de la condamner à payer certaines sommes au syndicat et aux copropriétaires ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le syndicat des copropriétaires était le seul cocontractant de la société MG rénovation sud et relevé que le contrat d'assurance « RC travaux et chantiers » comportait une clause de reprise du passé pour tout sinistre trouvant son origine dans les dix ans précédant la prise d'effet du contrat, que cette police avait été résiliée le 16 octobre 2007 et que les copropriétaires avaient assigné la société L'Auxiliaire aux fins d'expertise le 12 janvier 2011, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire que le fait dommageable avait eu lieu en cours de validité du contrat et que la réclamation des tiers avait été présentée dans les cinq ans de la garantie subséquente à la résiliation du contrat, de sorte qu'elle a légalement justifié sa décision ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Axa, ci-après annexé :
Attendu que la société Axa fait grief à l'arrêt de juger que l'exclusion de garantie prévue à l'article 12. 7 des conditions générales de la police d'assurance ne s'applique pas et qu'elle doit garantir l'architecte pour les préjudices causés aux copropriétaires et de la condamner, in solidum, avec M. X..., la société Foncière du Valembert et la société L'Auxiliaire, à payer certaines sommes aux copropriétaires ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la clause d'exclusion devait s'interpréter strictement et relevé que M. X...ne s'était pas engagé contractuellement à respecter une date d'achèvement des travaux ou un planning, la cour d'appel a pu, sans se contredire, déclarer l'architecte responsable de manquements ayant contribué à empêcher la mise en location des logements dans les conditions imposées par le processus de défiscalisation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen du pourvoi principal du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur la recevabilité du troisième moyen du pourvoi incident de la société Axa, du pourvoi principal de M. X...et du pourvoi incident éventuel de la société L'Auxiliaire, contestée par la défense :
Vu les articles 606 et 608 du code de procédure civile ;
Attendu que ces pourvois et ce moyen font grief à l'arrêt de réserver le droit à indemnisation des copropriétaires au titre d'un éventuel préjudice fiscal ;
Mais attendu que ce chef du dispositif, qui se bornait à réserver aux copropriétaires la faculté de solliciter ultérieurement réparation d'un préjudice dont la constatation n'avait pas été demandée, ne constitue ni un excès de pouvoir, ni une décision consacrant la reconnaissance d'un droit et, partant, ayant l'autorité de la chose jugée ;
Que les pourvois et le moyen sont donc irrecevables ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi incident de la société Axa :
Vu les articles L. 112-6 et A. 243-1 du code des assurances ;
Attendu que, pour déclarer inopposables aux copropriétaires les plafonds de garantie et condamner la société Axa à leur payer certaines sommes au titre de la perte de chance pour le préjudice locatif, l'arrêt retient que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires font valoir à juste titre que les plafonds annuels de cette garantie ne leur sont pas opposables et que, en toute hypothèse, la réforme instaurée par la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 sur les plafonds de garantie ne s'est appliquée, en vertu de l'article 3 du décret n° 2008-1466 du 22 décembre 2008, qu'aux contrats d'assurance conclus ou aux ouvertures de chantier intervenues après sa publication, soit après le 31 décembre 2008 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, pour les garanties facultatives, les plafonds prévus au contrat sont opposables aux tiers lésés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi n° G 16-14. 791 ;
DECLARE IRRECEVABLES le pourvoi principal n° B 16-20. 121 de M. X...et le pourvoi incident éventuel du même pourvoi de la société L'Auxiliaire ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que les plafonds de garantie dont se prévaut la société Axa France IARD ne sont pas opposables aux tiers lésés et condamne la société Axa France IARD à payer les sommes de 50 000 euros à M. et Mme Y..., 48 000 euros à M. Z..., 20 000 euros à M. B..., 49 500 euros à M. C..., 37 000 euros à M. et Mme D..., 46 000 euros à Mme A...et 30 000 euros à M. et Mme E...au titre de leur préjudice locatif l'arrêt rendu le 21 janvier 2016 par la cour d'appel de Nîmes ;
Met M. X...hors de cause ;
Remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant
la cour d'appel de Montpellier ;
Laisse à chaque demandeur les dépens de son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit, au pourvoi principal n° M 16-14. 104, par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société L'Auxiliaire
Le moyen reproche à l'arrêt " infirmatif " attaqué d'avoir, après annulation du jugement de première instance, décidé qu'un assureur (L'Auxiliaire, l'exposante) devait sa garantie au titre de la police " responsabilité civile travaux et chantiers " pour les dommages causés à des copropriétaires par son assuré (la société MG Rénovation Sud) dans l'exercice de son activité, et de l'avoir condamné par voie de conséquence, in solidum avec d'autres locateurs et leurs assureurs, à régler diverses sommes aux copropriétaires au titre de leurs préjudices ;
AUX MOTIFS QUE L'Auxiliaire avait été l'assureur de la société MG Rénovation Sud au titre d'une police d'assurance RC décennale n° 017-040076 et d'une police RC travaux et chantiers n° 003-040057, toutes deux souscrites à effet du 1er janvier 2004 et résiliées le 16 octobre 2007 pour défaut de paiement des primes ; que la police d'assurance décennale ne pouvait être mobilisée puisque les travaux de la Société MG Rénovation Sud avaient débuté avant sa prise d'effet ; qu'en revanche, la police d'assurance RC travaux et chantiers n° 003-040057 incluait à l'article 2 des conventions spéciales n° S03B4 visées par les conditions particulières, une garantie de reprise du passé pour tout sinistre trouvant son origine dans les dix années ayant précédé la prise d'effet du contrat ; que, pour refuser sa garantie, L'Auxiliaire faisait valoir que cette police avait pour effet de garantir l'assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu'il pouvait encourir sur la base des dispositions des articles 1382 et suivants du code civil, à l'égard des tiers en cours de chantier, que les conséquences pécuniaires de la responsabilité encourue par la sociétaire en application d'obligations contractuelles étaient exclues ; que c'était cependant à juste titre que les copropriétaires soutenaient agir sur la base de l'article 1382 du code civil dès lors que le syndicat des copropriétaires avait été le seul cocontractant de la société MG Rénovation Sud ; que, sur le fondement de ce dernier texte, les copropriétaires pouvaient faire état des inexécutions contractuelles imputables à cette société, assurée de L'Auxiliaire ; que celle-ci devait donc sa garantie au titre de la police responsabilité civile travaux et chantiers n° 003-040057 pour les dommages causés aux copropriétaires par la société MG Rénovation Sud dans l'exercice de son activité (arrêt attaqué, p. 25, 5ème à 10ème al., et p. 26, 1er et 2ème al.) ;
ALORS QUE le mandant est partie aux contrats conclus en son nom et pour son compte par le mandataire avec des tiers ; qu'en l'espèce, pour retenir la garantie de l'exposante au titre de la police responsabilité civile travaux et chantiers garantissant l'assuré des seules conséquences pécuniaires de sa responsabilité quasi délictuelle, l'arrêt attaqué a énoncé que les copropriétaires agissaient contre lui sur ce fondement dès lors que le syndicat de copropriété avait été son seul cocontractant pour la réalisation des travaux litigieux, sans examiner, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si les copropriétaires étaient liés contractuellement à l'entreprise assurée par l'effet du mandat qu'ils avaient confié au syndicat pour l'engagement desdits travaux ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1984, 1998 et 1147 du code civil ;
ALORS QUE, par ailleurs, en matière d'assurance de responsabilité civile, la garantie déclenchée par la première réclamation du tiers donne lieu à garantie dans la mesure où celle-ci a été adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et sa date de résiliation ; qu'en l'espèce, pour retenir la garantie de l'exposante au titre de la police responsabilité civile litigieuse, l'arrêt attaqué s'est borné à relever l'existence d'une clause de reprise du passé, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la première réclamation avait été formalisée contre l'assurée avant la résiliation du contrat, intervenue le 16 octobre 2007 ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a conféré aucune base légale à sa décision au regard de l'article L 124-5, alinéa 3, du code des assurances ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, l'exposante soutenait expressément (v. ses conclusions d'appel, p. 6, al. 1 et 2) que sa « garantie (…) ne saurait être mobilisée » au titre de « la police RC Travaux et chantiers n° 003-040057 (…) résiliée au 16 octobre 2007 faute de règlement des cotisations », de sorte que « cette police n'était donc (pas) en cours de validité (…) à la date de la réclamation formalisée par une assignation en référé postérieure de plus de trois ans à sa date de résiliation » ; qu'en délaissant ces écritures déterminantes rappelant que la première réclamation du tiers lésé contre l'assuré était largement postérieure à la résiliation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits, au pourvoi incident n° M 16-14. 104, par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Axa France IARD
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit et jugé que l'exclusion de garantie opposée par la société AXA France IARD au visa de l'article 12. 7 des conditions générales de la police d'assurance ne s'applique pas et D'AVOIR dit et jugé que l'architecte doit bénéficier de la garantie responsabilité civile pour les préjudices causés à autrui, pour les préjudices causés aux copropriétaires et D'AVOIR, par voie de conséquence, condamné in solidum la société AXA France IARD avec M. Joël X..., la société FONCIERE DU VALEMBERT et la compagnie d'assurance L'AUXILIAIRE à payer aux copropriétaires, les sommes suivantes au titre de leur préjudice locatif qui s'analyse en une perte de chance :
-50. 000 € pour M. et Mme Y...,
-48. 000 € pour M. Z...,
-20. 000 € pour M. B...,
-49. 500 € pour M. C...,
-37. 000 € pour M. et Mme D...,
-46. 000 € pour Mme A...,
-30. 000 € pour M. et Mme E...
AUX MOTIFS dans le retard du chantier QUE les contrats produits aux débats qui sont ceux de l'architecte et du maître d'ouvrage délégué ne mentionnent pas de délai d'exécution des travaux ; que le marché de travaux confié à la société M. G. Rénovation Sud n'a pas été communiqué en dépit des demandes de l'expert judiciaire ; que dans le cadre du processus de défiscalisation de la loi Malraux qui était applicable au chantier, les travaux ne devaient pas durer plus de 3 ans après l'obtention du permis de construire (délivré le 10 décembre 2001) ; que bien qu'aucun délai n'ait été fixé, les travaux auraient dû être terminés avant le 10 décembre 2004 ; que ce délai imposé par le dispositif de défiscalisation n'était pas insurmontable au vu de la configuration du chantier qui s'il exigeait des travaux importants en terme de nettoyage, de démolitions, de ravalement de façades et murs pignons, de rénovation de la charpente et de la couverture, restait limité puisque seul l'aménagement de 7 appartements était prévu ; que bien que les comptes rendus de réunion de chantier n'aient été communiqués par l'architecte qu'à partir du 28 avril 2003, la première situation présentée par la société M. G. Rénovation Sud à l'approbation de l'architecte est datée du 18 avril 2002, ce qui permet d'en déduire que les travaux ont débuté au cours du premier trimestre 2002 ; que la réception des différents lots de travaux aurait dû intervenir avant la fin de l'année 2004 pour permettre aux copropriétaires investisseurs de mettre en location leurs appartements or les comptes rendus de chantier communiqués sur la période comprise entre le 28 avril 2003 et le 1er février 2005, mentionnent dès le mois de juillet 2003, un ralentissement de plus en plus avéré du chantier (comptes rendus du 2 octobre 2003, du 13 novembre 2003, du 24 novembre 2003) jusqu'au mois de décembre 2003 où les travaux ont repris ; qu'à la fin de l'année 2003, seule une petite partie des travaux avait été réalisée alors que le chantier avait débuté au début de l'année 20002, ce qui était une situation préoccupante que l'architecte et le maître d'ouvrage délégué n'ont pas prise en considération ; que les 3 seuls comptes rendus de chantier de l'année 2004 produits aux débats, ceux des 2 et 23 mars 2004, du 18 mai 2004, indiquent que le chantier est désert, qu'aucune entreprise n'y travaille ; que ces comptes rendus font état de la présence de M. Marc G...pour la société M. G. Rénovation Sud alors qu'il était aussi le gérant de la société Foncière du Valembert, maître d'ouvrage délégué, tenue en exécution de son contrat, d'assister aux réunions de chantier et de veiller au respect du planning, ce que cette société n'a jamais fait ; que s'il est exact que le contrat d'architecte n'incluait pas une mission d'ordonnancement, pilotage et coordination du chantier, il n'en demeure pas moins que M. Joël X..., au titre de sa mission de direction et de comptabilité des travaux (DCT), avait le devoir au cours de l'année 2003 de mettre en demeure la société M. G. Rénovation Sur d'accélérer les travaux, ce qui n'a été fait que dans le compte rendu du 24 novembre 2003 ; que la validation de montants excessifs au titre des situations de travaux a participé à l'inefficacité de la direction du chantier et au retard pris par les travaux ; que les mises en demeure non suivies d'effets contenues dans les comptes rendus de chantier des 2 et 23 mars 2004, auraient dû conduire l'architecte à prendre acte de l'incapacité de la société M. G. Rénovation Sud à achever le chantier et à inviter le maître de l'ouvrage à procéder à la résiliation du marché de travaux ; que la société M. G. Rénovation Sud, la société Foncière du Valembert et M. Joël X...dont donc responsables du préjudice locatif allégué par les copropriétaires investisseurs et cela à compter du 1er janvier 2005, date à laquelle les travaux auraient dû être achevés ;
ET AUX MOTIFS QUE le préjudice résultant de la perte de chance de ne pas avoir pu louer sur une période de 8 ans, un appartement acquis, rue de l'Hôtel de Ville à Beaucaire doit être évalué aux sommes de :
-50. 000 € pour M. et Mme Y...,
-48. 000 € pour M. Z...,
-20. 000 € pour M. B...,
-49. 500 € pour M. C...,
-37. 000 € pour M. et Mme D...,
-46. 000 € pour Mme A...,
-30. 000 € pour M. et Mme E...;
ET AUX MOTIFS QUE sur la garantie de la compagnie d'assurance AXA France, celle-ci oppose deux exclusions de garantie, l'une correspondant aux dommages immatériels résultant du non-respect d'un planning, d'une date ou d'une durée, notamment d'intervention d'achèvement, que l'assuré s'est engagé à respecter (sauf événement soudain et fortuit), l'autre pour tout préjudice résultant de vol, disparition, détournement ; que la première de ces exclusions est tirée de l'article 12. 7 des conditions générales n° 240. 059A – 06/ 91 auxquelles renvoient les conditions particulières de la police d'assurance n° 289 697704 souscrite le 1er janvier 1994 par M. Joël X...auprès de la compagnie d'assurances Axa France ; que M. Joël X...oppose à la compagnie d'assurance Axa France, les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile pour conclure à l'irrecevabilité des exclusions de garantie soulevées pour la première fois en cause d'appel par la compagnie d'assurances Axa France mais cette fin de non-recevoir doit être écartée dès lors que l'article 566 du même code autorise en cause d'appel, les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; que l'exclusion de garantie dont se prévaut la compagnie d'assurances Axa France doit s'interpréter strictement et n'a pas vocation à s'appliquer dans le cas présent puisque l'architecte ne s'était pas engagé à respecter une date d'achèvement des travaux ou un planning ; que l'architecte doit donc être garanti au titre de la responsabilité civile pour préjudices causés à autrui par la compagnie d'assurances Axa France pour les préjudices causés aux copropriétaires ;
ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en affirmant (p. 24, al. 1er) que l'architecte ne s'était pas engagé à respecter une date d'achèvement des travaux ou un planning, ce dont il résultait qu'il ne pouvait être tenu responsable d'un retard d'exécution, après avoir affirmé (p. 20, al. 4) que ledit architecte était responsable du préjudice locatif allégué par les copropriétaires investisseurs à compter du 1er janvier 2005, date à laquelle les travaux auraient dû être achevés, la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit et jugé que les plafonds de garantie dont se prévaut la société AXA France IARD ne sont pas opposables aux tiers et D'AVOIR, par voie de conséquence, condamné in solidum la société AXA France IARD avec M. Joël X..., la société FONCIERE DU VALEMBERT et la compagnie d'assurance L'AUXILIAIRE à payer aux copropriétaires, les sommes suivantes au titre de leur préjudice locatif qui s'analyse en une perte de chance :
-50. 000 € pour M. et Mme Y...,
-48. 000 € pour M. Z...,
-20. 000 € pour M. B...,
-49. 500 € pour M. C...,
-37. 000 € pour M. et Mme D...,
-46. 000 € pour Mme A...,
-30. 000 € pour M. et Mme E...
AUX MOTIFS QUE le préjudice résultant de la perte de chance de ne pas avoir pu louer sur une période de 8 ans, un appartement acquis, rue de l'Hôtel de Ville à Beaucaire doit être évalué aux sommes de :
-50. 000 € pour M. et Mme Y...,
-48. 000 € pour M. Z...,
-20. 000 € pour M. B...,
-49. 500 € pour M. C...,
-37. 000 € pour M. et Mme D...,
-46. 000 € pour Mme A...,
-30. 000 € pour M. et Mme E...;
ET AUX MOTIFS QUE la compagnie d'assurance Axa France invoque les plafonds de garantie prévus par les conditions particulières de la police souscrite par M. Joël X...et qui correspondent selon elle à la somme de 458. 049 € par an pour les dommages matériels et à la somme de 91. 610 € par an pour les dommages immatériels dans la garantie responsabilité civile pour préjudices causés à autrui ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires arguent de l'irrecevabilité au visa de l'article 564 du code de procédure civile, des conclusions de la compagnie d'assurances Axa France sur les plafonds de garantie dont elle fait état mais cette fin de non-recevoir doit être rejetée en application de l'article 56 du même code ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires soutiennent que les garanties des articles 5, 8, 9 et 11 des conditions particulières doivent s'appliquer de façon cumulative ; que l'architecte invoque l'application de la garantie de l'article 8 des conditions générales ; que la garantie de l'article 5 a pour objet la prise en charge du coût de la réparation ou du remplacement de l'ouvrage à la réalisation duquel l'assuré a contribué et dont la réception n'est pas encore intervenue ; que cette garantie n'a pas vocation à s'appliquer ; que la garantie de l'article 8 correspond à une responsabilité avant ou après réception pour dommages aux existants mais cette garantie n'a pas vocation à être mobilisée puisque la responsabilité de l'architecte n'est pas mise en cause à ce titre ; que la garantie de l'article 9 est une responsabilité avant ou après réception pour dommages immatériels consécutifs " subis soit par le maître de l'ouvrage, soit par le propriétaire ou l'occupant de l'ouvrage ou de l'existant et résultant directement d'un dommage entraînant le versement d'une indemnité d'assurance en application de l'article 1, 2, 3, 5, 6, 7 ou 8 mais aucun dommage ne justifie le paiement d'une indemnité au titre des articles mentionnés ; que c'est donc bien la garantie de l'article 11 au titre de la responsabilité civile pour les préjudices causés à autrui qui a vocation à s'appliquer ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires font valoir à juste titre que les plafonds annuels de cette garantie ne leur sont pas opposables et qu'en toute hypothèse, la réforme instaurée par la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 sur les plafonds de garantie ne s'est appliquée en vertu de l'article 3 du décret n° 2008-1466 du 22 décembre 2008, qu'aux contrats d'assurance conclus ou aux ouvertures de chantier intervenues après sa publication, soit après le 31 décembre 2008 ; que les plafonds de cette garantie doivent, en toute hypothèse, être indexés sur l'évolution de l'indice BT01 en application des articles 15. 4 et 31. 15 des conditions générales de la police d'assurance, dans les relations de la compagnie d'assurance Axa et de son assuré ; que la compagnie d'assurance Axa France doit garantir les copropriétaires des conséquences de la responsabilité de l'architecte dans les préjudices qui leur ont été causés ;
ALORS QUE, en dehors du domaine des assurances de responsabilité obligatoire relatives aux travaux du bâtiment, l'assureur peut opposer au tiers qui invoque le bénéfice de la police d'assurance de responsabilité les exceptions opposables au souscripteur originaire dont les plafonds de garantie ; qu'en décidant dès lors que le plafond de garantie opposé par la société AXA France IARD au titre des dommages immatériels dans la garantie responsabilité civile pour préjudices causés à autrui n'étaient pas opposables aux tiers lésés que sont les copropriétaires, quand la responsabilité de l'assuré (M. Joël X...) était recherchée avant réception pour l'indemnisation de préjudices immatériels relatifs à la perte de loyers, lesquels ne relèvent pas de l'obligation de garantie, la cour d'appel a violé les articles L. 112-6, L. 113-5, L. 124-1 et A 243-1 du code des assurances.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR réservé le droit à indemnisation des copropriétaires au titre d'un éventuel préjudice fiscal ;
AUX MOTIFS, au titre du préjudice fiscal, qu'il ressort des conclusions des copropriétaires, que ceux-ci ont bien bénéficié des déductions fiscales prévues mais qu'ils sont susceptibles de subir un redressement fiscal, en l'absence d'exécution des travaux et en l'absence de location des appartements ; que leurs droits à indemnisation d'un éventuel préjudice fiscal doivent être réservés ;
ALORS QU'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge, qui n'est jamais tenu de surseoir à statuer hors les cas où la loi le prévoit, de limiter l'autorité de la chose jugée que la loi attache au jugement qui tranche une contestation ; d'où il suit qu'en réservant l'indemnisation d'un préjudice fiscal dont elle constatait pourtant le caractère éventuel, partant non indemnisable, quand elle devait rejeter la demande, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 4 et 1351 du code civil, ensemble les articles 12 et 480 du code de procédure civile.
Moyen produit, au pourvoi n° G 16-14. 791, par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble ..., M. et Mme Y..., M. Z..., Mme A..., les consorts B..., M. C..., M. et Mme D..., et M. E...
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble ...ainsi que les copropriétaires exposants font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de leurs demandes au titre de la surfacturation des travaux et de l'achèvement des travaux, à défaut pour eux de justifier du montant des paiements ;
AUX MOTIFS QUE le marché de travaux qui a pu être conclu entre le syndicat des copropriétaires et la Sarl MG Rénovation Sud n'a pas été produit aux débats ni aucun devis estimatif et quantitatif, mais selon les indications figurant sur les demandes d'acomptes de la société MG Rénovation Sud, valant situations de travaux, le montant du marché s'élevait à la somme de 800 746, 08 € ce qui correspond bien au montant des travaux autorisés par l'assemblée générale du 26 décembre 2000 ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires font valoir que les travaux réalisés ont été surfacturés par la société MG Rénovation Sud dont les situations de travaux ont été approuvées par l'architecte, que M. Joël X...a ainsi entériné 8 situations de travaux pour un montant total de 632 245, 48 € TTC alors que le montant des travaux réellement effectués a été évalué par l'expert judiciaire à la somme HT de 238 348 € ; qu'en se reportant à la fois aux situations de travaux transmises par la société MG Rénovation Sud sur la période comprise entre le 18 avril 2002 et le 17 novembre 2003 et aux comptes rendus de chantier établis par l'architecte entre le 28 avril 2003 et le 23 mars 2004, l'expert judiciaire qui a procédé à deux réunions sur les lieux, a pu en déduire que la facturation à 98 % par la société MG Rénovation Sud des travaux de nettoyage et de démolitions était surestimée, que la facturation à 70 % des travaux de gros-oeuvre était exagérée, que la facturation à 95 % des travaux de charpente couverture était abusive notamment en raison du pourrissement des encrages des bois de la charpente au-dessus des lots 7 et 9, qui n'avaient pas été remplacés et alors qu'aucun plancher de mezzanine n'avait été réalisé, que la facturation à 90 % des travaux de ravalement des façades sur rue et sur cour était exagérée, que la facturation des travaux de plomberie-sanitaire, d'électricité et de chauffage électrique, des cloisonnements en plaques de plâtre était acceptable, surtout en tenant compte des actes de vandalisme qui avaient ensuite dégradés les lieux, que la facturation des menuiseries extérieures et intérieures était très surestimée ; qu'il ressort donc du rapport d'expertise que les travaux effectivement réalisés par la société MG Rénovations Sud peuvent être estimés à la somme HT de 238 348 € alors que les situations de travaux de cette société représentent un montant de 656 586, 89 € ; que les situations n° 5, 7 et 8 ont été rectifiées par l'architecte ; qu'aucune mention d'approbation ne figure sur la situation n° 6 ; que la situation n° 2 n'a pas été produite aux débats, mais sa validation ressort de la lecture de la situation n° 3 ; que les situations de la société MG Rénovation Sud ont été expressément validées par l'architecte à hauteur de la somme de 542 089, 72 € TTC ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires soutiennent avoir réglé, entre le 10 janvier 2001 et le 21 février 2005, la somme de 562 365, 91 € sur ordre de l'architecte, que le préjudice lié à la surfacturation correspond à la somme de 324 017, 91 € et provient des manquements du maître d'oeuvre, du maître d'ouvrage délégué et de la société MG rénovation Sud, que cette situation ressort des pièces communiquées sous les n° 22 à 29 ; mais c'est à juste titre que M. Joël X...et la compagnie d'assurances Axa font valoir que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires ne justifient pas, par des pièces comptables de la réalité des paiements effectués ; que la somme payée dont se prévalent le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires ne résulte que d'un document comptable interne dénommé « tableau de gestion » (pièce 22) qui vise des numéros de chèque mais sans aucune communication des relevés du compte bancaire dont était titulaire le syndicat des copropriétaires auprès de la Caisse d'Épargne de Bourgogne et ouvert sous le n° 047626311876501230, de telle sorte que la preuve des allégations du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires n'est pas rapportée ; que si l'architecte et la société MG Rénovation Sud ont incontestablement commis une faute en établissant et en validant des situations de travaux ne correspondant pas à la réalité des travaux effectués, le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires ne démontrent pas que ces fautes sont en relation directe avec un préjudice réel lié à cette surfacturation à défaut pour eux de justifier des paiements effectués à hauteur de la somme de 562 365, 91 €, la situation n° 8 du 17 novembre 2003 de la société MG Rénovation Sud faisant état d'acomptes perçus, pour un montant de 215 775, 32 €, ce qui n'excédait pas la valeur des travaux réellement exécutés ; que le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires ne peuvent davantage réclamer la condamnation in solidum de M. Joël X..., de la société MG Rénovation Sud et de la Sarl Foncière du Valembert à leur payer la somme de 638 681 € TTC au titre des travaux restant à effectuer puisqu'il ne résulte pas des documents justificatifs produits que ces travaux aient déjà été payés ;
ALORS QUE le paiement est un fait dont la preuve peut être rapportée par tout moyen et que l'adage « nul ne peut se constituer de preuve à lui-même » n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; que dès lors, en retenant, pour rejeter la demande des copropriétaires et du Syndicat des copropriétaires au titre du remboursement de la surfacturation et de l'achèvement des travaux, qu'ils ne produisaient, pour établir qu'ils avaient effectivement payé la somme totale de 562 365, 91 €, soit 324 017, 91 € de plus que l'évaluation faite par l'expert des travaux réalisés, qu'un document comptable interne dénommé tableau de gestion, qui visait les numéros de chèques des paiements, mais qu'ils ne communiquaient pas les relevés de comptes bancaires du syndicat, la cour d'appel, qui, pour apprécier la preuve d'un paiement, a fait application, mal à propos, du principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à lui-même, a violé l'article 1315 du code civil.