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27/09/2017 | FRANCE | N°16-15770

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 septembre 2017, 16-15770


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., gérant des sociétés Le Verger des muses et Le Verger des reines a cédé, en avril et mai 2010, ses parts dans ces sociétés à la société Res multimedia ; qu'il a conclu, le 2 novembre 2010, un contrat de travail avec cette dernière en qualité de responsable de l'expansion librairie, pour un salaire mensuel de 7 500 euros ; que p

ar jugement du 2 mars 2011, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation jud...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., gérant des sociétés Le Verger des muses et Le Verger des reines a cédé, en avril et mai 2010, ses parts dans ces sociétés à la société Res multimedia ; qu'il a conclu, le 2 novembre 2010, un contrat de travail avec cette dernière en qualité de responsable de l'expansion librairie, pour un salaire mensuel de 7 500 euros ; que par jugement du 2 mars 2011, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Le Verger des muses, M. Y... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur ; que par jugement du 5 avril 2011, il a prononcé la liquidation judiciaire de la société Le Verger des reines, M. Z... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur ; que le 16 mai 2011, M. Y... ès qualités a licencié M. X... pour motif économique, sous réserve de sa qualité de salarié de la société Le Verger des muses ; que, le 4 juillet 2011, M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour demander la condamnation solidaire des trois sociétés à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, faisant valoir qu'elles étaient coemployeurs ; que par jugement du 6 juin 2012, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société Res multimedia, M. A... étant désigné en qualité de mandataire liquidateur, la date de cessation des paiements étant fixée au 28 septembre 2010 ;

Attendu que pour débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient, d'une part qu'il ne peut se prévaloir de la qualité de salarié des sociétés Le Verger des muses et Le Verger des reines, la clause du contrat de cession de ses parts dans ces sociétés le prévoyant à l'origine n'ayant pas été signée par les parties, d'autre part que le contrat de travail conclu avec la société Res multimédia était nul par application des dispositions de l'article L. 632-1 du code de commerce ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, d'une part, si M. X... n'avait pas effectivement travaillé dans un lien de subordination pour le compte des sociétés Le Verger des muses et Le Verger des reines, d'autre part s'il n'existait pas entre la société Res multimédia et les deux autres sociétés, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de ces dernières caractérisant un coemploi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 février 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne MM. Y..., Z... et A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum MM. Y..., Z... et A..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. X...

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a décidé que Monsieur X... n'avait pas le statut de salarié, le déboutant par conséquent de l'ensemble de ses demandes salariales ainsi que de ses demandes indemnitaires liées à la rupture du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 121-1 devenu L 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s'engage, moyennant rémunération, à mettre son activité à la disposition d'une autre sous la subordination de laquelle elle se place, c'est à dire à se soumettre, dans l'accomplissement de son travail, aux ordres et directives du mandant, qui a le pouvoir d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements ou si la personne n'exerce pas son activité au sein d'un service organisé, à se soumettre à des conditions de travail qui sont unilatéralement déterminées par le mandant ; que l'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont données à leur convention, mais des conditions effectives dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction, se manifestant par une immixtion ou un contrôle de fait dans la gestion économique et sociale d'une autre entité à laquelle appartient le salarié, et ce, notamment dans le domaine de gestion du personnel, que celui des résultats, des stocks, du développement des produits, en particulier en donnant des instructions et injonctions précises au salarié concerné ; que, par ailleurs, en application des articles L. 6321 et L. 6322 du code de commerce, les actes accomplis au cours de la période suspecte sont nuls, quand ils traduisent l'existence d'un déséquilibre entre les prestations des parties au contrat, la méconnaissance par le co-contractant de l'état de cessation des paiements étant à cet égard indifférente ; à l'égard des sociétés LE VERGER DES MUSES et LE VERGER DES REINES : ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il est constant que M. X... qui était gérant des sociétés LE VERGER DES MUSES et LE VERGER DES REINES détenue à 90 % par la première, a cédé ses parts sociales de la SARL. LE VERGER DES MUSES à la S.A.R.L. RES MULTIMEDIA le 06 mai 2010 pour, un euro symbolique et que la clause "Accompagnement" de ce contrat de cession, selon laquelle il s'engageait à assister le cessionnaire jusqu'au 30 juin 2013 et bénéficierait d'un contrat de travail, a été rayée et que cette rature a été paraphée par les deux parties, de sorte que l'intéressé ne peut se prévaloir de la qualité de salarié de l'une quelconque de ces sociétés ; qu'en effet, ni le licenciement par Maître Y... es-qualités de mandataire liquidateur de la société LE VERGER DES MUSES, sous réserve de la reconnaissance de la qualité de salarié de l'intéressé par I'AGS, ni les feuilles de paie établies postérieurement au licenciement au nom de ces sociétés, ne peuvent avoir eu pour effet de lui conférer cette qualité ; que faute d'avoir la qualité de salarié des deux sociétés précitées, M. X... n'est pas fondé à exciper d'une situation de co-emploi par ces deux sociétés ; que, dans ces conditions, il y a lieu de le débouter des demandes dc fixation de créances au passif des liquidations de ces sociétés que ce soit en tant qu'employeur ou de co-employeur ainsi que des demandes subséquentes liées à l'existence d'un contrat de travail ; à l'égard de la société RES MULTIMEDIA : en l'espèce, même à supposer qu'il ait effectivement été signé, ce que contestent Maître A... et l'AGS s'appuyant sur le rapport de décembre 2011, de M. B... expert-comptable, le contrat de travail entre M. X... et la société RES MULTIMEDIA aurait été signé le 2 novembre 2010, soit postérieurement à la date de cessation des paiements fixée au 28 septembre 2010 et par conséquent pendant la période suspecte ; qu'au surplus, la rémunération mensuelle de 7.500 € convenue entre les parties excédait manifestement la capacité financière de la société RES MULTIMEDIA, ce que n'ignorait pas M. X... qui prétend avoir renoncé à réclamer immédiatement sa rémunération pour ne pas aggraver les difficultés de cette société ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer en tant que de besoin la nullité du contrat de travail entre la société RES MULTIMEDIA et M. X... et de débouter ce dernier de l'ensemble des demandes de fixation de créances formées à l'encontre de la liquidation de la société RES MULTIMEDIA ainsi que des demandes subséquentes liées à l'existence d'un contrat de travail ;

ALORS QUE, premièrement, le lien de subordination révélant l'existence d'un contrat de travail est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, la nature juridique de la relation entre les parties ne dépendant ni de la volonté exprimée par celles-ci ni de la dénomination qu'elles ont données à leur convention, mais des conditions effectives dans lesquelles est exercée l'activité par la personne qui revendique la qualité de salarié ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que Monsieur X... ne pouvait pas se prévaloir de la qualité de salarié de la société LE VERGER DES MUSES, ni de salarié de la société VERGER DES REINES, ni de salarié de la société RES MULTIMEDIA, en se bornant à statuer par des motifs inopérants selon lesquels - ni la clause « Accompagnement » du contrat de cession de parts du 6 mai 2010, selon laquelle il s'engageait à assister le cessionnaire jusqu'au 30 juin 2013 et bénéficierait d'un contrat de travail, et qui avait été rayée, cette rature ayant été paraphée par les deux parties, - ni le licenciement par Maître Y..., es-qualités, sous réserve de la reconnaissance de la qualité de salarié par I'AGS, - ni les feuilles de paie établies postérieurement au licenciement ne pouvaient avoir eu pour effet de lui conférer la qualité de salarié, sans rechercher si Monsieur X... n'avait pas, comme il le prétendait, accompli des prestations en exécution du contrat de travail écrit dont il se prévalait, du 2 novembre 2010 au 16 mai 2011 au sein de la société LE VERGER DES MUSES et du 2 novembre 2010 au 8 juin 2012 au sein de la société VERGER DES REINES, en étant soumis, conformément audit contrat, à l'autorité et aux directives de Mme Edith C..., gérante de la société RES MULIMEDIA, société mère des sociétés LE VERGER DES MUSES et VERGER DES REINES, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail;

ALORS QUE, deuxièmement, en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient au juge de rechercher si la preuve de son caractère fictif a été rapportée par l'employeur ; de sorte qu'en considérant, en l'espèce, que la revendication, par Monsieur X..., de sa qualité de salarié était contestable, en se bornant à faire état de ce que Maître A..., ès-qualités, et l'AGS s'appuyaient sur le rapport de décembre 2011, de M. B... expertcomptable pour contester la réalité du contrat de travail du 2 novembre 2010, sans donner aucune précision sur le contenu de ce rapport ni sur les conclusions qu'en tiraient Maître A..., ès-qualités, et l'AGS, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail;

ALORS QUE, troisièmement, le coemploi est caractérisé, indépendamment des conditions dans lesquelles le salarié a été recruté, par l'exercice d'un contrôle d'une société par une autre accompagné d'une confusion d'intérêts, d'activité et de direction; de sorte qu'en écartant, en l'espèce, l'existence d'un coemploi entre, d'une part, Monsieur X... et, d'autre part, les sociétés RES MULTIMEDIA, LE VERGER DES MUSES et VERGER DES REINES, sans s'interroger, comme elle y était expressément invitée, sur le point de savoir si la confusion entre les intérêts, les dirigeants, les activités et les moyens d'exploitation entre ces trois sociétés, caractérisée notamment par l'immixtion de Mme Edith C..., gérante de la société RES MULIMEDIA dans la gestion des deux filiales, notamment en matière de gestion du personnel, n'était pas de nature à caractériser une situation de coemploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS QUE, quatrièmement, sont nuls, lorsqu'ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements les contrats commutatifs dans lequel les obligations du débiteur excèdent notablement celles de l'autre partie ; qu'en considérant que la rémunération mensuelle de 7.500 € convenue entre les parties excédait manifestement la capacité financière de la société RES MULTIMEDIA, sans préciser en quoi cette rémunération, qui était celle que Monsieur X... percevait précédemment au titre de ses fonctions de gérant salarié au sein des sociétés LE VERGER DES MUSES et VERGER DES REINES excédait notablement les obligations de Monsieur X... à l'égard des sociétés au sein desquelles il travaillait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-1 du code de commerce ;

ALORS QUE, cinquièmement, en décidant d'annuler le contrat de travail du 2 novembre 2010 comme ayant été conclu pendant la période suspecte et ayant prévu une rémunération mensuelle qui excédait manifestement la capacité financière de la société RES MULTIMEDIA, sans rechercher si, en réalité, la charge financière de sa rémunération ne devait pas être répartie entre les sociétés LE VERGER DES MUSES et VERGER DES REINES, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-1 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-15770
Date de la décision : 27/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 sep. 2017, pourvoi n°16-15770


Composition du Tribunal
Président : Mme Aubert-Monpeyssen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.15770
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