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27/09/2017 | FRANCE | N°14-25100

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 septembre 2017, 14-25100


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X...de sa reprise d'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société AGL ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir résilié le contrat d'agence commerciale, sans convention écrite, qui la liait à la société DBT pro climatisation (la société DBT), la société AGL, qui a imputé la rupture aux manquements de la mandante à ses obligations, l'a assignée en paiement d'indemnités de cessation de contrat et de préavis ; que la société DBT a demandé reconvention

nellement réparation du préjudice résultant d'une perte de clientèle détournée par l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X...de sa reprise d'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société AGL ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après avoir résilié le contrat d'agence commerciale, sans convention écrite, qui la liait à la société DBT pro climatisation (la société DBT), la société AGL, qui a imputé la rupture aux manquements de la mandante à ses obligations, l'a assignée en paiement d'indemnités de cessation de contrat et de préavis ; que la société DBT a demandé reconventionnellement réparation du préjudice résultant d'une perte de clientèle détournée par l'agent ;

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour dire la rupture du contrat imputable à la faute grave de la société AGL et rejeter ses demandes d'indemnité de cessation de contrat et de préavis, l'arrêt retient, d'un côté, que la société DBT a traité directement avec le sous-agent, M. Y..., quatre commandes, dès le début septembre 2010, et, d'un autre côté, que la transmission par M. Y...de ces commandes a été précédée et provoquée par les fautes de l'agent qui a retenu et détourné au profit de sa filiale certaines commandes passées au nom de sa mandante de septembre à décembre 2010, la première étant du 28 septembre 2010 ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Sur le même moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 134-9, alinéa 2, du code de commerce ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient encore qu'à défaut de stipulation contractuelle plus favorable à l'agent, la société DBT pouvait s'acquitter des commissions, qui étaient acquises dès le mois de décembre 2010 jusqu'au 31 janvier 2011, de sorte que, lors de la rupture du contrat le 24 janvier 2011, le manquement invoqué à cet égard par la société AGL n'était pas constitué ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les parties n'avaient pas entendu déroger, dans un sens favorable à l'agent, à la règle légale prévue pour le paiement des commissions, selon un usage constant de règlement des commissions par la société DBT à la société AGL au fur et à mesure de l'encaissement des ventes, de sorte que, pour les ventes litigieuses, les commissions auraient dû être versées avant la fin de l'année 2010, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le même moyen, pris en ses cinquième et sixième branches :

Vu les articles L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient aussi que la société AGL a négligé la représentation des produits de la société DBT à partir du mois de septembre 2010, comme l'établit la chute anormale du volume des ventes aux particuliers qu'elle a réalisées, peu important la progression du chiffre d'affaires de la mandante en 2010 ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société AGL qui faisait valoir que, non seulement, en 2010, le chiffre d'affaires de la société DBT avait fortement progressé, mais que la marge brute partagée entre la mandante et son agent avait augmenté également, passant de 1 227 174, 88 euros en 2009 à 1 641 608, 66 euros l'année suivante, ni rechercher, comme elle y était invitée, si l'insuffisance d'activité reprochée à l'agent ne pouvait s'expliquer par l'activité des sociétés Azura et Chaud froid varois, qui commercialisaient les produits de la société DBT dans le même secteur géographique, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Sur le même moyen, pris en sa septième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient enfin que le détournement de la prospection par la société AGL au profit de sa filiale, la société AGL Technic, est illustré par le cas du chantier G...;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société AGL qui faisait valoir que son ancien sous-agent, M. Y..., avait, à son insu, fait signer le même jour deux bons de commande au client, l'un au nom de la société DBT pour trente-huit tuiles photovoltaïques, l'autre au nom de la société AGL technic, pour vingt-quatre tuiles photovoltaïques, et qu'en réalité, la vente n'avait pas été exécutée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner la société AGL à payer à la société DBT une indemnité de 352 000 euros en réparation des pertes de clientèle résultant du non-développement de la prospection, l'arrêt retient que le préjudice indemnisable de la société DBT correspond, outre à la compensation du volume d'affaires effectivement détourné, déjà arbitrée, à la perte de marge consécutive au manque de prospection de l'agent ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la société DBT demandait réparation du seul préjudice résultant du détournement de clientèle par la société AGL et qu'elle avait constaté que ce préjudice était indemnisé, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en condamnant la société AGL à payer à la société DBT la somme de 100 878 euros en remboursement des sommes détournées, sans répondre à ses conclusions qui faisaient valoir que la rémunération des parties sur chaque vente était constituée par un partage par moitié de la marge brute réalisée, laquelle était de l'ordre de 50 %, de sorte que le préjudice résultant des détournements éventuellement subis par le mandant, qui était constitué par la marge brute de 50 329 euros divisée par deux, s'évaluait à la somme de 25 219, 50 euros, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare la rupture unilatérale du mandat d'agence commerciale imputable à la faute grave de la société AGL, qui a pris l'initiative de la rupture, rejette ses demandes en paiement d'indemnités de cessation de contrat et de préavis et la condamne à payer à la société DBT pro climatisation les sommes de 100 878 euros en remboursement des sommes détournées et de 352 000 euros en réparation des pertes de clientèle en relation avec les manquements de l'agent commercial dans le non-développement de la prospection, l'arrêt rendu le 19 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société DBT pro climatisation aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société AGL la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X...en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société AGL

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la rupture unilatérale du mandat d'agence commerciale imputable à la faute grave de la SARL AGL qui a pris l'initiative de cette rupture, d'avoir en conséquence débouté la SARL AGL de ses demandes d'indemnités de cessation de mandat et d'indemnités de préavis et de l'avoir condamnée à payer à la société DBT Pro Climatisation une indemnité de préavis et une indemnité en réparation des pertes de clientèle ;

AUX MOTIFS QUE, que la rupture du contrat d'agence commerciale a été consommée le 24 janvier 2011 à la réception de la lettre de résiliation unilatérale datée du 20 janvier, aux motifs déclarés par la SARL AGL du défaut de paiement de ses commissions et de l'intervention du mandant dans la clientèle du secteur du mandataire avec la complicité de son ancien sous-agent, Jean-Marc Y...; que dans ses écritures d'appel, elle lui reproche également :

- d'une part, les ventes réalisées par la SARL Azura et par la SARL Chaud Froid Varois ENR en ce qu'elles porteraient atteinte au « monopole de représentation auprès de la clientèle du secteur pour ses gammes de produits » ;

- d'autre part, après rupture du mandat, le débauchage des salariés qui constituaient sa force de vente, alors qu'ils étaient liés par une clause de non-concurrence ;

que le grief de débauchage est inopérant, dès lors que la Cour n'est pas saisie d'une action en concurrence déloyale et qu'il concerne des faits qui auraient été commis postérieurement à la rupture, de sorte qu'ils ne pourraient la justifier, quand bien même ils seraient établis ; qu'il n'y a donc pas lieu de rechercher si les clauses de non-concurrence invoquées étaient valables, ou si la SARL DBT Pro Climatisation a pu en ignorer l'existence ; que le grief de non-paiement des commissions, qui était évoqué dans la lettre de rupture, concernait le litige relatif aux commissions afférentes aux ventes réalisées par Jean-Marc Y...qui ont été réclamées à la SARL DBT Pro Climatisation par lettre du 9 décembre 2010 et facture n° 2010/ 12/ 09 du même jour pour un montant de 22. 741 euros TTC ; que la SARL DBT Pro Climatisation lui oppose qu'elle n'a jamais refusé le paiement de cette facture, mais que d'une part, invoquant le bénéfice de l'exception d'inexécution, elle en subordonnait le règlement à la fourniture d'explications, d'autre part, que la facture du 9 décembre 2010 n'aurait pas été exigible avant le 30 avril 2011, par application des dispositions de l'article L. 134-9 du code de commerce ; que s'agissant de la prétendue exception d'inexécution, il ne ressort pas des pièces produites que la SARL DBT Pro Climatisation aurait réclamé la fourniture « d'explications », qui lui auraient été dues en exécution du mandat la liant à son agent, de sorte que le moyen ne saurait prospérer, à défaut de caractérisation suffisante d'une inexécution d'obligation contractuelle de l'agent susceptible de faire obstacle au paiement ; que selon les dispositions de l'article L. 134-9 du code de commerce :

« La commission est acquise dès que le mandant a exécuté l'opération ou devrait l'avoir exécutée en vertu de l'accord conclu avec le tiers ou bien encore dès que le tiers a exécuté l'opération.

La commission est acquise au plus tard lorsque le tiers a exécuté sa part de l'opération ou devrait l'avoir exécutée si le mandant avait exécuté sa propre part. Elle est payée au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au cours duquel elle était acquise » ;

que la SARL DBT Pro Climatisation justifie en cause d'appel que les chantiers litigieux ont été respectivement facturés au tiers le 15 décembre 2010 pour le époux Z..., le 28 décembre 2010 pour les époux A..., le 13 janvier 2011 pour les époux B...et le 18 janvier 2011 pour les époux C... ; que la SARL AGL lui répond que selon leur pratique commerciale, les commissions lui étaient payées quelques jours après l'émission de sa facture mensuelle établie au vu des dates d'encaissement des fonds versés, soit par le client en cas de vente au comptant, soit par l'organisme de crédit à la date d'installation des matériels ou à la date butoir contractuellement fixée, alors que la date butoir était fixée au 31 décembre 2010 pour le dossier B..., que le chantier Z...était terminé au 15 décembre 2010 et que les dossiers A...et C... auraient dû être terminés en décembre 2010 ; qu'à défaut de stipulation contractuelle plus favorable à l'agent commercial, quand bien même l'ensemble des commissions auraient été acquises dès le mois de décembre 2010, la SARL DBT Pro Climatisation avait, en vertu du texte précité, jusqu'au 31 janvier 2011 pour s'en acquitter ; qu'il s'ensuit qu'à la date de la rupture de la convention des parties, le motif avancé par la SARL AGL n'était pas fondé ; que la SARL AGL prétend ensuite avoir découvert, postérieurement à la rupture du contrat d'agence commerciale, que la SARL DBT Pro Climatisation aurait, par l'intermédiaire de la SARL Azura et de la SARL Chaud Froid Varois ENR, violé le droit à l'exclusivité, qui lui aurait été reconnu sur la clientèle des secteurs prospectés ; que selon la demanderesse, cette exclusivité se déduirait de ce qu'elle réalisait la quasi-totalité du chiffre d'affaires de la SARL DBT Pro Climatisation qui, au début de leur relation, n'aurait disposé d'aucune force de vente ; que d'autre part, l'étendue du secteur concédé se déduirait des indications de deux tableaux, qui auraient été versés en pièce n° 199 et qui synthétiseraient les ventes réalisées par elle en 2009 et 2010, soit le territoire des départements 04, 05, 06, 13, 26, 30, 34, 83 et 84 ; qu'en premier lieu, la pièce n° 199 est un tableau établi par la demanderesse pour donner la liste des ventes qui auraient été selon elle réalisées en fraude de ses droits, alors que les tableaux qui peuvent correspondre à la description donnée paraissent avoir été produits en pièce n° 200, pour les ventes réalisées en 2009, et en pièce n° 201, pour celles réalisées en 2010 ; et que ces tableaux, dressés par la SARL AGL pour les besoins du procès, ne donnent qu'une indication de la répartition des affaires traitées par la SARL AGL au cours de ces années, y compris sur d'autres départements que ceux énumérés ci-dessus, sans qu'il puisse s'en déduire de manière nécessaire que la clientèle dépendant des secteurs revendiqués lui aurait été concédée ; que les parties n'ayant signé aucune convention écrite qui préciserait tant l'attribution d'un secteur ou d'un groupe de clientèle, la SARL DBT Pro Climatisation n'a jamais reconnu lui avoir concédé un territoire déterminé ou l'exclusivité d'un groupe de clientèle, mais lui avoir seulement concédé l'exclusivité de la prospection par téléphonie de sa clientèle de particuliers ; que de fait, les seuls documents qui font référence à un secteur d'activité sont les différents contrats de sous-agence versés aux débats par la SARL AGL qui stipulent la clause type suivante : « Aucun secteur géographique n'est confié au sous-agent commercial, qui pourra librement prospecter le secteur géographique de l'agent, composé des départements :... » [suit une liste de n° de départements] ; que ces documents qui émanent de la SARL AGL ne sauraient suffire à faire la preuve de l'attribution à l'agent d'un secteur d'activité ni d'une quelconque exclusivité dans ses rapports avec le mandant ; qu'au contraire, le secteur déclaré est à géométrie variable suivant les indications des contrats de sous-agence, à savoir :

- contrat passé avec Jean-Marc Y...: 13, 83 et 84 ;

- contrat passé avec Claude Y...: 13, 83, 84 et 30 ;

- contrat passé avec la SARL ABC Plast (Jérôme D...) : 01, 04, 05, 06, 13, 26, 30 ; 34, 38, 73, 74, 83 et 84 ;

que la SARL DBT Pro Climatisation justifie que si la SARL AOL prospectait environ 80 % de sa clientèle de particuliers, elle concluait directement des ventes avec cette catégorie de clients avant de recourir aux services de la demanderesse principale et a continué à le faire après 2007, y compris par l'intermédiaire d'un autre agent commercial intervenant sur une partie des départements ainsi cités dans ces documents, lequel agent ne bénéficiait pas davantage d'un secteur déterminé, ni d'une clause d'exclusivité ; qu'il se déduit de l'incapacité de la SARL AGL à prouver, au-delà de l'exclusivité limitée à la prospection téléphonique reconnue par la défenderesse, l'attribution d'un secteur ou d'un groupe de clientèle déterminé, qu'elle ne peut faire grief à la SARL DBT Pro Climatisation d'avoir violé ses engagements contractuels en contractant sans son intermédiaire, soit directement, soit par le biais de la SARL Azura et de la SARL Chaud Froid Varois ENR ; que s'agissant du grief tiré de la transmission directe à la SARL DBT Pro Climatisation, par le sous-agent de la SARL AGL, des quatre dossiers visés dans la lettre du 9 décembre 2010, la mandante explique avoir été contactée au début du mois de septembre 2010 par Jean-Marc Y...afin de faire le point sur leur état d'avancement, et avoir réalisé à cette occasion que ces dossiers transmis courant août par Jean-Marc Y...à la SARL AGL n'avaient pas été retransmis par cette dernière, laquelle ensuite contactée lui aurait répondu que ce défaut de transmission aurait été motivé par le fait que la validation des dossiers dépendait de la seule mandante ; qu'elle considère ainsi n'avoir commis aucune faute, dès lors qu'elle n'a pas sollicité cette transmission directe, dont Jean-Marc Y...aurait eu l'initiative aux fins de validation des dossiers et de préservation des commissions de la SARL AGL et de son sous-agent ; que cette présentation des faits étant contestée par la SARL AGL, la SARL DBT Pro Climatisation ne l'étaye par aucune pièce et procède par voie d'affirmation ; qu'au contraire, dans sa lettre de réponse du 21 décembre 2010, elle s'abstient d'évoquer ce point et, au lieu de reprocher à la SARL AGL la rétention alléguée des dossiers litigieux, elle fait état d'autres griefs constitutifs selon elle de fautes graves ; que pour autant, il est également soutenu que le traitement direct de ces quatre affaires aurait été provoqué par les fautes graves de la SARL AGL ayant consisté, selon la SARL DBT Pro Climatisation dans :

- l'arrêt de prises de commandes par l'agent à compter de septembre 2010 ;

- le caractère disproportionné du motif de rupture invoqué par l'agent ;

- le détournement de la clientèle du mandant au profit de la SARL AGL Technic et de la SARL AGL LM, par violation de son obligation de loyauté et de non-concurrence ;

que le motif invoqué pour justifier de la rupture unilatérale ne saurait constituer une faute dans l'exécution du mandat, quand bien même ce motif serait considéré disproportionné, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'entrer dans le détail de l'argumentation de la SARL DBT Pro Climatisation sur ce point ; que par ailleurs, il ressort des débats qu'il est tenu pour constant que la SARL DBT Pro Climatisation a accepté que la SARL AGL passe un accord-cadre avec la SA Leroy-Merlin pour la fourniture et la pose de matériels concurrents de ceux commercialisés par la SARL DBT Pro Climatisation, lesdits matériels devant être posés par la SARL Chaud Froid Varois ENR ; que néanmoins, la SARL DBT Pro Climatisation reproche à la SARL AGL d'avoir créé à son insu la SARL AGL Technic, qui exerce une activité concurrente de la sienne, puis la SARL AGL LM, pour détourner sa clientèle développée dans le cadre du mandat d'agence commerciale ; que la SARL AGL conteste cette présentation en indiquant que ces sociétés ont été spécialement créées pour traiter le marché passé avec la SA Leroy-Merlin ; que la SARL DBT Pro Climatisation souligne que les contrats produits par la SARL AGL en pièces n° 110 et 111 ne sont pas probants en ce que le « contrat cadre de sous-traitance 2010 » n'est signé que de la SARL AGL Technic et est daté du 13 mai 2011 (pièce n° 110) et en ce que le contrat d'accord permanent de partenariat entre la SARL AGL Technic et la SA Leroy-Merlin n'est pas daté, ni signé des parties (pièce n° 111) ; que cependant, la SARL DBT Pro Climatisation ne saurait soutenir faire la démonstration de son ignorance de l'intervention de la SARL AGL Technic dans le traitement du marché non contesté passé avec la SA Leroy-Merlin, en prétendant ne l'avoir appris que par un échange de courriels du 15 décembre 2010 entre Gilles E...(co-gérant de la SARL DBT Pro Climatisation et de la SARL Chaud Froid Varois ENR) et Didier F...(deuxième co-gérant de la SARL Chaud Froid Varois ENR ; qu'en effet si le premier nommé semblait découvrir les factures de pose établies au nom de la SARL AGL Technic (à tout le moins à compter du mois de novembre 2010 selon les factures produites), le deuxième lui rappelait qu'il pensait qu'il était informé de ce que cette société avait été créée « pour business Leroy Merlin » ; que cette connaissance résulte par ailleurs clairement de la réponse faite par la SARL DBT Pro Climatisation à la SARL AGL dans laquelle elle précise avoir été informée dès le mois de mai 2010 de la création de la SARL AGL Technic et de l'accord-cadre passé par celle-ci avec la SA Leroy-Merlin, en lui proposant de devenir son sous-traitant, acceptant alors que la SARL AGL Technic travaille dans le cadre de cet accord, sous réserve que les moyens commerciaux mis au service du mandat ne soient pas partagés avec cette société ; que par ailleurs, si la SARL DBT Pro Climatisation prétend aujourd'hui que son accord pour le marché passé avec la SA Leroy-Merlin ne concernait que les départements du Var et des Alpes-Maritimes, l'absence de matérialisation par écrit de leur convention ne permet pas de considérer que cet accord aurait été effectivement limité ; qu'en effet, la SARL Chaud Froid Varois ENR a accepté de sous-traiter la pose des commandes passées également dans les Bouches-du-Rhône et dans le Vaucluse ; qu'il ressort des correspondances échangées en décembre 2010 par les parties, que la SARL AGL ayant proposé à la SARL DBT Pro Climatisation la commercialisation de tuiles photovoltaïques, celle-ci a refusé l'offre que l'agence commerciale a alors décidé de commercialiser par l'intermédiaire de la SARL AGL Technic à partir du mois de septembre 2010 ; que si la SARL AGL estime que cette commercialisation d'un produit directement concurrent de ceux de la gamme commercialisée par sa mandante était légitimée par ce refus, il apparaît qu'à partir du mois de septembre 2010, la SARL AGL a négligé la représentation des produits commercialisés par la SARL DBT Pro Climatisation, peu important la circonstance que le chiffre d'affaires de cette dernière ait pu progresser au cours de l'année 2010, dès lors que la chute anormale du volume des ventes aux particuliers réalisées par l'intermédiaire de la SARL AGL est avérée à partir du mois de septembre 2010 ; que ce détournement de la prospection au profit de la SARL AGL Technic est illustré par le cas du chantier G...à Berre-l'Etang pour lequel il a été contracté le 12 octobre 2010 au profit de la SARL AGL Technic au prix de 20. 163, 58 euros, après la commande passée le même jour pour le compte de la SARL DBT Pro Climatisation au prix de 24. 000 euros ; que dès lors, la SARL DBT Pro Climatisation est fondée considérer, nonobstant la tolérance de la commercialisation de ce produit, qui lui est opposée, que son agent a manqué à son obligation de loyauté en négligeant la représentation des produits de sa gamme pour développer ceux qu'elle commercialisait personnellement et qui leur faisait concurrence ; que dans la même période de temps, de septembre à décembre 2010, il est démontré que la SARL AGL a détourné au profit de la SARL AGL Technic cinq chantiers totalisant un chiffre d'affaires de 100. 878 euros ; que pour justifier ces détournements, la SARL AGL prétend :

- qu'elle avait des doutes sur la loyauté de la SARL DBT Pro Climatisation et avait commencé à enquêter sur la collaboration illicite de celle-ci avec Jean-Marc Y...;

- que la SARL DBT Pro Climatisation aurait eu par ailleurs connaissance de ces ventes, dès lors que la pose a été sous-traitée à la SARL Chaud Froid Varois ENR ;

qu'il résulte de la lettre de rupture adressée le 9 décembre 2010, que la SARL AGL indiquait à Jean-Marc Y...qu'elle venait d'apprendre la réalisation des ventes directement traitées pour le compte de la SARL DBT Pro Climatisation, alors que le premier détournement de commande démontré qui lui est imputable correspond à une commande du 28 septembre 2010, date qui correspond au développement de l'activité concurrente de la SARL AGL Technic ; qu'il se déduit donc suffisamment des pièces produites de part et d'autre que la transmission directe par Jean-Marc Y...des quatre commandes litigieuses, reprochée comme faute à la SARL DBT Pro Climatisation, a été précédée et provoquée par la faute grave de l'agent commercial qui a retenu les commandes passées au nom de sa mandante et détourné certaines d'entre elles au profit de sa filiale, la SARL AGL Technic, créée initialement pour le traitement de l'accord de partenariat négocié avec la SA Leroy-Merlin, faute rendant impossible la poursuite du mandat ; qu'il convient en conséquence de déclarer la rupture du mandat imputable à cette faute grave de la SARL AGL ;

ET AUX MOTIFS QUE, si le mandant peut prétendre à l'indemnisation du préjudice que lui a causé le non-respect du préavis par l'agent, qui a pris l'initiative de la rupture, ce préjudice, dont il doit être justifié, ne saurait correspondre à la perte des commissions de son agent commercial, mais à la perte des bénéfices que le mandant pouvait attendre de la poursuite des relations pendant la durée du préavis ; qu'en l'absence de production d'élément comptable plus précis, il convient, au vu des volumes d'affaires apportées au cours des trois derniers mois, d'allouer de ce chef à. la SARL DBT Pro Climatisation une indemnité de 150. 000 euros ;

1°) ALORS QUE commet une faute lourde le rendant responsable de la rupture de relations contractuelles et lui interdisant de se prévaloir des manquements postérieurs de son agent, le mandant qui traite directement avec les sous-agents de son agent ; qu'en l'espèce il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que dès le début du mois de septembre 2010 (arrêt attaqué p. 8, al. 5), la société DBT avait traité directement, et à plusieurs reprises, avec M. Y..., sous-agent de la SARL AGL ; qu'en décidant néanmoins que la rupture était imputable à la faute grave qu'aurait commise cette dernière ultérieurement, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;

2°) ALORS QU'en retenant d'un côté que la société DBT avait directement traité avec le sous-agent, M. Y..., quatre commandes dès le début du mois de septembre (arrêt attaqué p. 8) et d'un autre côté que la transmission directe, par Jean-Marc Y..., des quatre commandes litigieuses, avaient été précédée et provoquée par les fautes de l'agent pour avoir retenu les commandes passées au nom de son mandant et détourné certaines d'entre-elles au profit de sa filiale (arrêt attaqué p. 11), tout en relevant que ces commandes s'étaient échelonnées de septembre à décembre 2010 (arrêt attaqué p. 11, al. 2) et que « la première commande est datée du 28 septembre 2010 » (arrêt attaqué p. 11, al. 4) la Cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs sur la question de savoir si le manquement du mandant, qui avait traité directement avec le sous-agent, avait ou non précédé le détournement de commandes imputé à l'agent, en violation des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE selon l'article L. 134-9, alinéa 2, du Code de commerce, la commission doit être payée à l'agent au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au cours duquel elle est acquise, il peut être dérogé à cette règle dans un sens favorable à l'agent commercial ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir, en se référant aux pièces versées au débat, que selon un usage constant entre les parties, dérogeant à la règle précitée, la société DBT, mandante, a accepté de régler à la société AGL, agent commercial, ses commissions au fur et à mesure des encaissements des ventes, de sorte qu'en l'espèce, pour les opérations litigieuses, les commissions auraient dû être versées avant la fin de l'année 2010 (conclusions d'appel de la société AGL, p. 21) ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si les parties n'avaient pas dérogé, par leur pratique, à la règle prévue pour le paiement des commissions à l'article L. 134-9, alinéa 2 du Code de commerce, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

4°) ALORS QU'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, sauf faute grave de sa part qu'il appartient au mandant de démontrer ; qu'en affirmant que malgré la progression du chiffre d'affaires du mandant au cours de l'année 2010, l'agent avait négligé la représentation des produits commercialisés par la SARL DBT, sans caractériser aucun manquement concret de nature à porter atteinte au mandat d'intérêt commun et à rendre impossible le maintien du lien contractuel, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;

5°) ALORS QUE l'exposante faisait valoir que, non seulement le chiffre d'affaires de la société DBT avait fortement progressé en 2010, mais que la marge brute partagée entre le mandant et son agent avait augmenté également en 2010, passant de 1. 227. 174, 885 euros en 2009 à 1. 641. 608, 66 euros en 2010 (conclusions d'appel de l'exposante p. 15 in fine) ; qu'en retenant une insuffisante représentation en 2010, sans préciser sur quel élément de preuve elle se fondait et sans répondre aux conclusions de l'agent commercial, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE l'exposante avait fait valoir que deux sociétés, Azura et Chaud Froid Varois, émanations de la société DBT, commercialisaient dans le même secteur géographique les produits photovoltaïques de la société DBT (conclusions d'appel p. 16) ; que si la Cour d'appel a retenu que la société AGL ne faisait pas la preuve d'une exclusivité territoriale, elle n'a pas recherché si la prétendue insuffisance d'activité de l'agent ne pouvait pas s'expliquer essentiellement par l'activité développée par ces deux sociétés, privant ainsi sa décision de base légale, au regard des articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;

ALORS QUE la société AGL avait fait valoir (conclusions d'appel p. 13 in fine et p. 14 in limine) pour le chantier G..., que M. Y..., son ancien sous-agent, depuis lors débauché par la société DBT, avait, à son insu, fait signer le même jour deux bons de commande au client, l'un au nom de DBT Pro pour 38 tuiles photovoltaïques, l'autre au nom de DGL Technic, pour 24 tuiles photovoltaïques et qu'en réalité, la vente n'avait pas été du tout exécutée ; qu'en se fondant sur le cas du chantier G..., pour retenir l'absence de loyauté de l'agent, sans s'expliquer sur ce moyen, la Cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société AGL à payer à la société DBT une indemnité de 352. 000 euros en réparation des pertes de clientèle en relation avec les manquements de l'agent commercial dans le non développement de la prospection ;

AUX MOTIFS QUE la SARL DBT Pro Climatisation sollicite par ailleurs l'indemnisation de la perte de clientèle détournée par la SARL AGL à hauteur du chiffre d'affaires réalisé par la SARL AGL Technic au cours des 10 premiers mois de son activité ; Mais que le préjudice indemnisable de la SARL DBT Pro Climatisation correspond à la perte de marge brute en relation directe de cause à effet avec la faute commise, c'est-à-dire la compensation des volumes d'affaires effectivement détournés, laquelle a été déjà arbitrée, outre la perte de marge consécutive au non développement de la prospection du fait de l'agent ; que si la SARL DBT Pro Climatisation observe à bon droit que la progression de son chiffre d'affaires n'est pas exclusive de pertes liées à cette faute, il lui appartient néanmoins d'en justifier ; que dès lors, en l'absence de production d'élément comptable plus précis, eu égard à la seule baisse des volumes d'affaires enregistrés de septembre à décembre 2010 par l'intermédiaire de la SARL AGL, ce chef de préjudice sera arbitré à 352. 000 euros ;

1°) ALORS QUE la société réclamait la condamnation de l'agent pour perte de clientèle détournée ; qu'ayant constaté que le préjudice résultant du volume d'affaires effectivement détourné était indemnisé, la Cour d'appel ne pouvait allouer en outre au mandant une indemnité pour la perte de marge consécutive au non développement de la prospection du fait de l'agent, sans violer l'article 4 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE si la faute grave de l'agent commercial le prive de l'indemnité de cessation du contrat, et peut éventuellement justifier sa condamnation à une indemnité en cas de concurrence déloyale, le mandant ne peut prétendre en outre à une indemnité pour non prospection pendant la période précédant la rupture ; qu'en accordant une telle indemnité, la Cour d'appel a violé l'article 1992 du Code civil, ensemble les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce ;

3°) ALORS QU'en tout état de cause, ayant retenu que la société DBT avait donné son accord pour la création de la SARL AGL Technic qui devait commercialiser des tuiles photovoltaïques (arrêt attaqué p. 10), la Cour d'appel ne pouvait pas condamner la société AGL à raison de l'activité développée par la société AGL Technic sans violer les textes susvisés.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société AGL à payer à la société DBT la somme de 100. 878 euros en remboursement des sommes détournées ;

AUX MOTIFS QUE dans la mesure où la SARL DBT Pro Climatisation a été privée des chiffres d'affaires des cinq ventes détournées par la SARL AGL, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné cette dernière à payer la somme de 108. 878 euros ;

ALORS QUE l'exposante avait fait valoir (conclusions d'appel p. 13) que la rémunération des parties, sur chaque vente, était constituée par un partage par moitié de la marge brute réalisée qui était de l'ordre de 50 % et que par conséquent, le préjudice éventuellement subi par le mandant du fait des détournements était constitué par la marge brute (50. 329 euros) divisé par deux, soit 25. 219, 50 euros ; qu'en allouant à la société DBT une somme de 100. 878 euros, sans répondre à ces conclusions, la Cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-25100
Date de la décision : 27/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 19 juin 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 sep. 2017, pourvoi n°14-25100


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:14.25100
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