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21/09/2017 | FRANCE | N°16-18265;16-18266;16-18267;16-18268;16-18269;16-18270;16-18271

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2017, 16-18265 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° J 16-18. 265 à R 16-18. 271 ;

Donne acte aux salariés de leur désistement de pourvoi à l'égard des sociétés Otor et DS Smith ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 7 avril 2016), que M. X...et six autres salariés de la société DS Smith packaging premium ont été licenciés pour motif économique courant 2013 et 2014 ;

Sur le moyen unique :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de dire que leur licenciement pour motif

économique est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de les débouter de l'intégralité de leur...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° J 16-18. 265 à R 16-18. 271 ;

Donne acte aux salariés de leur désistement de pourvoi à l'égard des sociétés Otor et DS Smith ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 7 avril 2016), que M. X...et six autres salariés de la société DS Smith packaging premium ont été licenciés pour motif économique courant 2013 et 2014 ;

Sur le moyen unique :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts de dire que leur licenciement pour motif économique est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de les débouter de l'intégralité de leurs demandes alors, selon le moyen :

1°/ que la cause économique du licenciement s'apprécie dans le cadre du secteur d'activité du groupe ; que la cessation d'activité d'une entreprise ne constitue pas un motif économique autonome de licenciement mais s'analyse comme une réorganisation lorsqu'elle résulte d'une décision prise dans le cadre d'un groupe et a pour objet de transférer vers une ou plusieurs autres entités du groupe la production des produits fabriqués par cette entreprise ; que selon la lettre de licenciement, l'arrêt de l'activité de la société DSSP premium avait pour causes une indispensable réorganisation du secteur d'activité packaging de luxe pour vins et spiritueux du groupe afin de sauvegarder sa compétitivité et une nécessaire réorganisation industrielle eu égard à la surcapacité de l'outil industriel existant au sein des entités du groupe dédié à ce secteur, ces réorganisations impliquant l'arrêt des activités de DSSP premium et le regroupement de l'ensemble de la fabrication du packaging de luxe pour vins et spiritueux sur le site de Rochechouart, exploité par la société DSSP consumer ; qu'en retenant cependant que la question du motif économique était circonscrite à la réalité de la cessation d'activité totale et définitive de la société DSSP premium et que l'analyse de ses causes était inopérante, et en n'appréciant ainsi la cause du licenciement qu'au niveau de la société employeuse et non du secteur d'activité du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;

2°/ qu'en s'abstenant, en conséquence, d'examiner si la fermeture des deux sites de cette entreprise, les sites de Châteaubernard et de Merpins, était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont elle relevait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail ;

3°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que l'employeur, pour justifier le licenciement, ne se prévalait pas de la seule fermeture de l'entreprise, mais de la nécessité de cette fermeture pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité « packaging de luxe pour vins et spiritueux » du groupe ; qu'en retenant, pour justifier le licenciement, la seule fermeture de l'entreprise, indépendamment de la cause invoquée à cette fin par l'employeur, et en se fondant donc sur un autre motif que celui énoncé dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cessation totale et définitive d'activité de l'entreprise, quand elle n'est pas due à une faute de l'employeur ou à sa légèreté blâmable, constitue un motif économique autonome de licenciement ; que les arrêts, qui relèvent que le licenciement est motivé dans la lettre de licenciement par un arrêt total et définitif d'activité, n'encourent pas les griefs du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C...et D... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen commun et identique produit aux pourvois par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour MM. X..., Y..., Z..., D..., B..., C...et A....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement pour motif économique du salarié est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir débouté de l'intégralité de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement est ainsi rédigée : « (...) la société DSSP Premium est confrontée depuis plusieurs années à de graves difficultés économiques (...) Compte tenu du cumul de pertes enregistrées par la société, le groupe DS Smith Packaging a entrepris, à compter de 2009, de nombreuses actions visant à tenter d'assurer la pérennité de l'entreprise (...) ponctuées par un investissement de 6, 5 M € en septembre 2011. Malgré ces efforts significatifs, la situation économique de la société n'a cessé de se dégrader (…) DSSP Premium relève, avec la société DSSP Consumer sur son site de Rochechouart, du secteur d'activité spécifique " packaging de luxe pour vins et spiritueux " du groupe DS Smith Packaging. Le groupe a, en effet, racheté en juillet 2012 la branche packaging du groupe SCA Packaging, ce qui, grâce à l'intégration des activités " consumer " de SCA Packaging, a permis d'élargir l'offre au-delà de l'emballage dit " conventionnel " et de se positionner sur les emballages à plus forte valeur ajoutée. Le nouvel ensemble issu de l'acquisition des entités SCA Packaging et DSSP Premium devient un acteur majeur du secteur d'activité packaging de luxe pour vins et spiritueux, secteur très spécifique au sein de l'industrie de l'emballage (…). Ce secteur d'activité est néanmoins très concurrentiel (…). Or dans ce contexte, les pertes cumulées et les pertes prévisionnelles de la société DSSP Premium sont désormais telles qu'elles sont de nature à mettre sérieusement en cause la pérennité même de la société ainsi que la compétitivité du secteur d'activité " packaging de luxe pour vins et spiritueux " du groupe. En effet, le résultat opérationnel positif des activités de packaging pour vins et spiritueux de DSSP Consumer à Rochechouart est largement insuffisant pour compenser les pertes de DSSP Premium. Les prévisions pour 2013/ 2014 au niveau du secteur du packaging de luxe pour vins et spiritueux du groupe font apparaître une poursuite de la dégradation des résultats négatifs. Ces difficultés ont ainsi rendu indispensable la réorganisation du secteur d'activité packaging de luxe pour vins et spiritueux du groupe pour sauvegarder sa compétitivité. Par ailleurs, la surcapacité de l'outil industriel existant au sein des entités du groupe dédié à ce secteur au regard du volume d'activité du marché des très faibles perspectives de croissance appuie la nécessité d'une réorganisation industrielle. Ces réorganisations impliquent l'arrêt des activités de DSSP Premium et la localisation de l'ensemble des activités packaging de luxe pour vins et spiritueux sur le site de Rochechouart, qui bénéficie d'atouts multiples lui permettant d'être un acteur durable du secteur d'activité du packaging de luxe pour vins et spiritueux. Faute de viabilité économique, les projets de maintien d'une activité partielle ou totale au sein de DSSP Premium étudiés en amont et durant la procédure d'information/ consultation du comité d'entreprise sur le projet d'arrêt des activités de la société n'ont pas permis de définir de solutions alternatives. Du fait de l'arrêt total et définitif des activités de la société DSSP Premium, votre poste (…) se trouve supprimé, comme l'ensemble des autres postes de la société » ; que la cessation d'activité de l'entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement, à la condition qu'elle soit totale et complète, sans qu'il soit nécessaire de rechercher la cause de cette cessation d'activité quand elle n'est pas due à une faute ou à une légèreté blâmable de l'employeur, sauf lorsque le salarié licencié a pour coemployeurs des entités faisant partie d'un même groupe ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement énonce que le licenciement du salarié a été prononcé en raison d'un arrêt total et définitif des activités de la société DSSP Premium, lequel était indispensable pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité packaging de luxe pour vins et spiritueux du groupe ; que le salarié n'invoque plus l'existence d'un coemploi, ni ne soutient que la cessation d'activité soit consécutive à une faute ou une légèreté blâmable de son employeur ou de la société mère ; qu'il s'ensuit que la question litigieuse est circonscrite à la réalité de la cessation d'activité de la société DSSP Premium, laquelle est contestée par le salarié, sans qu'il soit besoin d'en analyser les causes, les moyens développés sur ce point étant par conséquent inopérants ; qu'il ressort de la note d'information en vue de la consultation du comité d'entreprise sur le projet d'arrêt des activités de la société DSSP Premium du 6 décembre 2012 qu'au sein du groupe DS Smith, à compter de 2012, deux entités, la société DSSP Premium et la société DSSP Consumer, assuraient la production pour le secteur d'activité du packaging de luxe vins et spiritueux, la première sur les sites de Châteaubernard et de Merpins, la deuxième sur le site de Rochechouart, chacune dotée de leurs propres outils de production et que compte tenu des résultats opérationnels négatifs récurrents de la société DSSP Premium menaçant sa pérennité, de la taille insuffisante de sa plate-forme industrielle lui interdisant d'absorber un volume supérieur de production et d'accueillir des lignes de production spécifique dont elle n'était pas équipée, les productions de packaging de luxe pour vins et spiritueux devaient être regroupées sur le site de Rochechouart qui disposait d'un outil industriel lui conférant une autonomie totale pour satisfaire aux besoins des marchés de luxe, celle de DSSP Premium étant arrêtée, et les productions assurées par la société DSSP Premium et son outil industriel devaient être répartis et transférés au sein du dispositif industriel de DSSP France, sur les sites de DSSP Rochechouart, de DSSP Neuville et de DSSP Sud-Ouest, trois machines devant faire l'objet d'une étude pour leur transfert d'unité au sein du groupe ou mises en vente, sept machines devant être mises en vente après avoir été proposées aux autres usines du groupe hors France et une devait être réformée ; que les surfaces de production, de stockage, de bureaux et locaux sociaux du site de Châteaubernard devaient être utilisées pour assurer le développement de DSSP Sud-Ouest, la plate-forme industrielle de Cognac se recentrant sur la conception et la fabrication d'emballages en carton ondulé conventionnel, et qu'après déménagement des équipements industriels, les surfaces du site de Merpins avaient vocation à être vendues et dans l'attente, à être utilisées comme surface de stockage temporaire par DSSP Sud-Ouest ; que l'arrêt des activités de la société DSSP Premium devait intervenir au plus tôt dans un délai de deux mois à l'issue de la procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel ; que l'ensemble des mesures énoncées dans cette note ont été mises en place et qu'il en résulte un démantèlement complet des lignes de production de la société DSSP Premium, une dissémination des outils industriels, une réaffectation des surfaces de production et de locaux administratifs à une autre unité du groupe, de sorte qu'il ne peut être considéré que la concentration de l'intégralité de l'activité de packaging de luxe vins et spiritueux sur un seul site de production établit l'existence d'un transfert d'une entité économique autonome au sens de l'article L. 1224-1 du code du travail ; que le maintien d'une activité résiduelle de type administratif, justifié par la liquidation des derniers actifs et la mise en oeuvre du PSE, ne caractérise pas une poursuite d'activité, toute activité de production par l'entité DSSP Premium ayant cessé ; qu'il ressort des autorisations de licenciement pour motif économique délivrées en juillet et septembre 2013 puis en avril et mai 2014 par l'inspecteur du travail que celui-ci a procédé à une enquête contradictoire le 24 septembre 2013 et a constaté l'arrêt total de l'activité de la société DSSP Premium, confirmé par le jugement du tribunal administratif du 12 juillet 2015 ; que dans ces conditions, le motif économique tiré de la cessation d'activité totale et définitive de la société DSSP Premium est établi ;

ALORS QUE la cause économique du licenciement s'apprécie dans le cadre du secteur d'activité du groupe ; que la cessation d'activité d'une entreprise ne constitue pas un motif économique autonome de licenciement mais s'analyse comme une réorganisation lorsqu'elle résulte d'une décision prise dans le cadre d'un groupe et a pour objet de transférer vers une ou plusieurs autres entités du groupe la production des produits fabriqués par cette entreprise ; que selon la lettre de licenciement, l'arrêt de l'activité de la société DSSP Premium avait pour causes une indispensable réorganisation du secteur d'activité packaging de luxe pour vins et spiritueux du groupe afin de sauvegarder sa compétitivité et une nécessaire réorganisation industrielle eu égard à la surcapacité de l'outil industriel existant au sein des entités du groupe dédié à ce secteur, ces réorganisations impliquant l'arrêt des activités de DSSP Premium et le regroupement de l'ensemble de la fabrication du packaging de luxe pour vins et spiritueux sur le site de Rochechouart, exploité par la société DSSP Consumer ; qu'en retenant cependant que la question du motif économique était circonscrite à la réalité de la cessation d'activité totale et définitive de la société DSSP Premium et que l'analyse de ses causes était inopérante, et en n'appréciant ainsi la cause du licenciement qu'au niveau de la société employeuse et non du secteur d'activité du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 1233-3 du code du travail

QU'en s'abstenant, en conséquence, d'examiner si la fermeture des deux sites de cette entreprise, les sites de Châteaubernard et de Merpins, était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont elle relevait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-3 du code du travail.

ALORS encore QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que l'employeur, pour justifier le licenciement, ne se prévalait pas de la seule fermeture de l'entreprise, mais de la nécessité de cette fermeture pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité « packaging de luxe pour vins et spiritueux » du groupe ; qu'en retenant, pour justifier le licenciement, la seule fermeture de l'entreprise, indépendamment de la cause invoquée à cette fin par l'employeur, et en se fondant donc sur un autre motif que celui énoncé dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-18265;16-18266;16-18267;16-18268;16-18269;16-18270;16-18271
Date de la décision : 21/09/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 07 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2017, pourvoi n°16-18265;16-18266;16-18267;16-18268;16-18269;16-18270;16-18271


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.18265
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