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21/09/2017 | FRANCE | N°16-12481

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 septembre 2017, 16-12481


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en première branche :

Vu les articles 7 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée, 29 et 32 du décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005, en vigueur à la date de la signature des circulaires et instructions litigieuses, ensemble l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;

Attendu qu'il résulte des deuxième et troisième de ces textes que la publication, lorsqu'elle est prévue par le premier, des directives, instructions et circulaires incombe, respectivemen

t, aux administrations centrales et aux établissements publics dont elles éman...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en première branche :

Vu les articles 7 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée, 29 et 32 du décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005, en vigueur à la date de la signature des circulaires et instructions litigieuses, ensemble l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;

Attendu qu'il résulte des deuxième et troisième de ces textes que la publication, lorsqu'elle est prévue par le premier, des directives, instructions et circulaires incombe, respectivement, aux administrations centrales et aux établissements publics dont elles émanent ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Auriplast (la société) a bénéficié d'une réduction des cotisations de sécurité sociale en application de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 ; que, soutenant que l'URSSAF du Cantal, aux droits de laquelle vient l'URSSAF d'Auvergne (l'URSSAF), avait manqué à son obligation générale d'information en ne diffusant pas les lettres ministérielles des 18 avril 2006 et 13 mars 2008 ainsi que le courrier de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale du 7 juillet 2006, favorables aux cotisants, et sur la base desquels elle aurait pu demander le remboursement de cotisations indûment perçues, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en responsabilité pour faute ;

Attendu que, pour accueillir cette demande, l'arrêt retient essentiellement qu'en ne publiant pas la lettre du ministre chargé de la sécurité sociale du 18 avril 2006 et la circulaire de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale du 7 juillet 2006, ainsi que la lettre ministérielle confirmative du 13 mars 2008, l'URSSAF a manqué de transparence et de loyauté à l'égard des cotisants et a ainsi rompu le principe d'égalité des citoyens devant l'impôt ; que ce manquement fautif a généré un préjudice pour la société qui n'a pu agir et demander le remboursement des cotisations du fait de la prescription qui lui aurait été opposée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la publication des circulaires et instructions litigieuses n'incombait pas à l'URSSAF, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société Auriplast aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Auriplast et la condamne à payer à l'URSSAF d'Auvergne la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un septembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Auvergne.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'URSSAF d'Auvergne à verser à la SAS Auriplast la somme de 112.168 € avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision et d'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du code civil ;

AUX MOTIFS QU'il convient à titre liminaire de rappeler - que la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 dite loi Fillon a instauré un dispositif de réduction des cotisations patronales de sécurité sociale, -que par décret du 11 juin 2003 il a été précisé pour la détermination du coefficient que devaient être prises en compte "la rémunération annuelle brute" et les "heures rémunérées" , - qu'une lettre ministérielle du 10 septembre 2004 et une lettre circulaire du 8 octobre 2004 émanant de l'ACOSS ont restreint le champs des heures de travail concerné et précisé qu'elles devaient correspondre à du temps de travail effectif ou assimilé au sens de l'article L 212-4 du code du travail , -que la loi 2005-1579 du 19 décembre 2005 a complété les dispositions de l'article L 241-15 du code de la sécurité sociale et a précisé que "l'assiette de calcul s'entend des heures rémunérées quelle qu'en soit la nature" , - qu'une lettre ministérielle du 18 avril 2006 et une circulaire du 7 juillet 2006 de l'ACOSS ont donné pour instruction aux Urssaf d'abandonner tous les redressements en cours ou envisagés à "l'encontre des employeurs qui ont déterminé le montant de la réduction générale sur la base de la totalité des heures rémunérées pour les cotisations versées avant le 1er janvier 2006" et de se retirer de tous les contentieux en cours ; -qu'une lettre ministérielle du 13 mars 2008 est venue confirmer ces instructions des 18 avril et 7 juillet 2006 ; qu'en l'espèce, certes s'il ne peut être fait grief à l'URSSAF de ne pas avoir assuré une information individualisée, en revanche, en vertu des dispositions de l'article 7 de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 applicable aux collectivités territoriales ainsi qu'aux autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission, doivent faire "l'objet d'une publication, les directives, les instructions, les circulaires ainsi que les notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif" ; Egalement de par les dispositions de l'article R 112-2 du code de la sécurité sociale l'URSSAF doit prendre toutes mesures utiles afin d'assurer l'information générale des assurés sociaux ; Or Il n'est pas contesté que les lettres ministérielles et circulaires ACOSS datées des 18 avril 2006 et 13 mars 2008 et 7 juillet 2006 n'ont pas fait l'objet de publication ; que l'URSSAF ne saurait s'exonérer de cette obligation au seul motif que les documents litigieux ne comportent pas une interprétation de droit positif, alors d'une part qu'elle a procédé à la publication d'autres documents (lettre ministérielle du 10 septembre 2004 et lettre circulaire du 8 octobre 2004) et d'autre part que ces documents litigieux comportaient une interprétation du droit applicable ainsi que des instructions sur l'application de la réduction Fillon et en particulier la possibilité pour les cotisants de solliciter le remboursement au titre des périodes antérieures au 1er janvier 2006 ; qu'en outre manifestement les consignes données s'analysent non en une "tolérance" appréciée à chaque cas d'espèce mais consistaient en une instruction générale d'abandon des redressements ; qu'en conséquence en ne publiant pas ces directives et instructions, l'URSSAF a manqué de transparence et de loyauté à l'égard des cotisants et a ainsi rompu le principe d'égalité des citoyens devant l'Impôt ; que ce manquement fautif a généré un préjudice pour la SAS AURIPLAST qui n'a pu agir et demander le remboursement des cotisations du fait de la prescription qui lui aurait inévitablement été opposées ; que le préjudice de la SAS AURIPLAST est équivalent au montant total des cotisations indûment versées sur la période concernée à savoir 112.168 € et elle est fondée à en obtenir le paiement ; qu'en conséquence le jugement déféré sera infirmé en ce sens ; qu'en application des dispositions de l'article 1153-1 du code civil, la société AURIPLAST est fondée à prétendre aux intérêts au taux légal à compter de la présente décision ; que la demande de capitalisation des intérêts sollicitée est fondée par application des dispositions de l'article 1154 du code civil ;

1. – ALORS QU'il résulte des articles 29 et 32 du décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005 que la publication, lorsqu'elle est prévue par le premier, des directives, instructions et circulaires incombe, respectivement, aux administrations centrales et aux établissements publics dont elles émanent ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a jugé qu'en ne publiant pas la lettre du ministre chargé de la sécurité sociale du 18 avril 2006 et la circulaire de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale du 7 juillet 2006 ainsi que la lettre ministérielle du 13 mars 2008, l'URSSAF avait manqué de transparence et de loyauté à l'égard des cotisants et rompu le principe d'égalité des citoyens devant l'impôt ; qu'en statuant ainsi quand la publication des circulaires et instructions litigieuses n'incombait pas à l'URSSAF, la Cour d'appel a violé l'article 7 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 et les articles 29 et 32 du décret n° 2005-1755 du 30 décembre 2005, ensemble l'article 1382 du code civil ;

2. – ALORS QUE les organismes de sécurité sociale ne sont redevables que d'une obligation générale d'information des assurés sociaux sur le droit applicable, sans avoir à prendre l'initiative d'aviser tous les cotisants susceptibles de remplir les conditions d'obtention d'un allègement de cotisations sociales ; qu'en l'espèce, l'URSSAF a satisfait à son obligation en informant les assurés des nouvelles modalités de prise en compte des heures rémunérées pour le calcul de la réduction Fillon issues de la loi du 19 décembre 2005, par la publication d'une lettre-circulaire du 5 avril 2007 diffusant la lettre ministérielle du 31 janvier 2007 ; qu'en retenant la faute de l'URSSAF pour n'avoir pas publié les lettres ministérielles et circulaires ACOSS des 18 avril 2006, 13 mars 2008 et 7 juillet 2006, qui ne faisaient que définir une stratégie pour la gestion interne des contentieux en cours, la Cour d'appel a violé ensemble les articles R. 112-2 du code de la sécurité sociale et 1382 du code civil ;

3. – ALORS QUE doivent être publiées les directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ; que les lettres ministérielles et circulaires ACOSS des 18 avril 2006, 13 mars 2008 et 7 juillet 2006 ne consistaient pas en une interprétation du droit positif ni un abandon général de tous les redressements mais ne faisaient qu'instituer, « en opportunité », une simple tolérance, dans certaines conditions, à l'égard des cotisants ayant calculé la réduction Fillon sur la base de la totalité des heures rémunérées avant le 1er janvier 2006, pour mettre un terme aux contentieux en cours ; qu'en considérant que les lettres ministérielles et circulaires ACOSS des 18 avril 2006, 13 mars 2008 et 7 juillet 2006 comportaient une interprétation du droit positif et un engagement d'abandonner tous les redressements, la Cour d'appel a dénaturé les lettres et circulaires litigieuses en violation du principe selon lequel il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents qui leur sont soumis ;

4. – ALORS QUE la divergence d'interprétation d'un texte ne fait pas obstacle à ce que les redevables contestent le montant de leurs cotisations devant une juridiction de sécurité sociale sans attendre que la difficulté soit tranchée ; que dès lors, l'absence de publication des lettres ministérielles et circulaires ACOSS des 18 avril 2006, 13 mars 2008 et 7 juillet 2006 n'empêchait pas la société Auriplast, comme tous les cotisants se trouvant dans la même situation, d'agir en remboursement de charges à l'encontre de l'URSSAF ; qu'en jugeant que le défaut de publication de ces textes avait rompu l'égalité des citoyens devant l'impôt et empêché la société Auriplast de demander le remboursement des cotisations du fait de la prescription, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

5. – ALORS QUE les intérêts échus des capitaux, à défaut de convention spéciale, ne peuvent produire effet que moyennant une demande en justice et à compter de cette seule demande ; qu'en ordonnant l'anatocisme sans préciser la date de la demande de capitalisation ou les conditions dans lesquelles elle produira effets, la Cour d'appel a violé l'article 1154 du code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-12481
Date de la décision : 21/09/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 15 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 sep. 2017, pourvoi n°16-12481


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12481
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