LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société Bo Paysages en qualité d'aide jardinier pour la période du 1er juillet au 16 août 2013 ; que la société a été placée en redressement judiciaire le 8 novembre 2013 puis en liquidation judiciaire le 2 octobre 2015, M. Z... étant désigné mandataire et liquidateur ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale notamment d'une demande en requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, alors, selon le moyen, que toute irrégularité de la procédure de licenciement entraîne pour le salarié un préjudice que l'employeur doit réparer et qu'il appartient au juge d'évaluer ; qu'en considérant que le salarié n'était pas fondé à solliciter le paiement d'une indemnité au titre du non-respect de la procédure de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-5 du code du travail ;
Mais attendu que l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; que la cour d'appel a estimé que le salarié ne justifiait d'aucun préjudice résultant du non-respect de la procédure de licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 468 et 946 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter les demandes en paiement d'indemnité forfaitaire pour travail clandestin et dommages-intérêts pour remise tardive de documents, l'arrêt retient que la preuve de caractère intentionnel de la soustraction de l'employeur à ses obligations n'est pas établie et que le salarié ne justifie d'aucun préjudice du fait de la remise tardive, sanctionnée par ailleurs par la liquidation de l'astreinte, dès lors qu'il était étudiant et n'allègue d'aucune difficulté rencontrée du fait d'une telle remise ;
Attendu cependant qu'en procédure orale, une demande en justice présentée dans un écrit n'est valablement formée que lorsqu'elle est oralement soutenue à l'audience des débats ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur, appelant, qui sollicitait, dans ses conclusions écrites, le rejet des demandes du salarié, n'était ni présent ni représenté à l'audience, de sorte qu'elle ne pouvait que constater qu'elle n'était saisie d'aucun moyen de recours et qu'elle ne pouvait en conséquence que confirmer le jugement, a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 1235-5 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la perte injustifiée de son emploi par le salarié lui cause un préjudice dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue ;
Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, l'arrêt retient que le salarié qui doit justifier du préjudice subi du fait du licenciement pour prétendre à une indemnité, a toujours su qu'il était embauché pour l'été, qu'il ne conteste pas que son contrat est allé au terme convenu et qu'il ne justifie d'aucun préjudice du fait d'un licenciement abusif ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes en paiement d'indemnité pour travail dissimulé, de dommages-intérêts pour remise tardive de documents et d'indemnité pour licenciement abusif présentées par M. Y..., l'arrêt rendu le 12 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. Charles Y... de sa demande tendant à voir fixer à la liquidation judiciaire de la société Bo Paysage la somme de 6 185,94 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et la somme de 150 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents sociaux ;
AUX MOTIFS QU'il est établi que les documents de fin de contrat ont été remis tardivement à M. Y... et après décision de justice ; que M. Y... ne justifie cependant d'aucun préjudice du fait de cette remise tardive, au demeurant sanctionnée par la liquidation d'astreinte, dans la mesure où il était étudiant et non demandeur d'emploi et qu'il n'allègue d'aucune difficulté rencontrée du fait de la non remise de ces documents ; il sera débouté de sa demande de ce chef (cf. arrêt attaqué p. 6 § 1er) ;
ET AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail : "Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l 'embauche (
) " ; qu'il appartient dès lors au salarié de démontrer le caractère intentionnel de la soustraction de l'employeur à ses obligations, le défaut de déclaration préalable à l'embauche ne pouvant à lui seul, caractériser le délit de travail dissimulé ; qu'en l'espèce, la preuve d'une telle intention n'est nullement rapportée par M. Y... qui se contente de procéder par affirmation et sera dès lors débouté de sa demande au titre du travail dissimulé (cf. arrêt attaqué p. 6 § 2 à 3) ;
ALORS QUE lorsque la procédure est orale, les parties, sauf si elles en sont dispensées, doivent comparaître ou se faire représenter à l'audience des débats pour formuler valablement des prétentions et les justifier ; qu'en conséquence, lorsque la procédure est orale et qu'à l'audience des débats, une partie non dispensée de comparaître ou de se faire représenter n'était ni présente, ni représentée, le juge n'est pas saisi des prétentions de cette partie, même si celle-ci les a formulées par des conclusions écrites qu'elle a déposées devant lui ; qu'il s'ensuit dans pareille hypothèse que, si c'est la partie appelante qui n'est ni comparante ni représentée, l'appel doit être considéré comme non soutenu ; qu'en l'espèce, en infirmant la décision des premiers juges en ce qu'elle avait fixé à la liquidation judiciaire de la société Bo Paysage les sommes de 6 185,94 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et la somme de 150 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents sociaux, quand il résultait de ses propres constatations que M. Jean Z..., pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société Bo Paysage, n'était pas représenté et qu'il n'avait pas comparu, la cour d'appel a violé les articles 468 et 946 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. Charles Y... de sa demande tendant à voir fixer à la liquidation judiciaire de la société Bo Paysage la somme de 6 185,94 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;
AUX MOTIFS QU'il est établi que les documents de fin de contrat ont été remis tardivement à M. Y... et après décision de justice ; que M. Y... ne justifie cependant d'aucun préjudice du fait de cette remise tardive, au demeurant sanctionnée par la liquidation d'astreinte, dans la mesure où il était étudiant et non demandeur d'emploi et qu'il n'allègue d'aucune difficulté rencontrée du fait de la non remise de ces documents ; il sera débouté de sa demande de ce chef (cf. arrêt attaqué p. 6 § 1er) ;
ET AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail : "Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l 'embauche (
) " ; qu'il appartient dès lors au salarié de démontrer le caractère intentionnel de la soustraction de l'employeur à ses obligations, le défaut de déclaration préalable à l'embauche ne pouvant à lui seul, caractériser le délit de travail dissimulé ; qu'en l'espèce, la preuve d'une telle intention n'est nullement rapportée par M. Y... qui se contente de procéder par affirmation et sera dès lors débouté de sa demande au titre du travail dissimulé » (cf. arrêt attaqué p. 6 § 2 à 3) ;
ALORS QUE la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 1° du code du travail est caractérisée s'il est établi que l'employeur s'est, de manière intentionnelle, soustrait à l'accomplissement des formalités prévues par l'article L. 1221-10 du code du travail relatif à la déclaration préalable à l'embauche ; que l'absence d'accomplissement des formalités prévues par l'article L. 1221-10 du code du travail ainsi que l'absence de délivrance de bulletins de salaire caractérisent un travail dissimulé ; qu'en déboutant M. Y... de sa demande en paiement d'une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé au motif que le défaut de déclaration préalable d'embauche ne pouvait à lui seul caractériser le délit de travail dissimulé, cependant que M. Y... rappelait, outre l'absence de déclaration préalable d'embauche, que l'employeur ne lui avait pas délivré de bulletins de salaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR par arrêt contradictoire débouté M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu de la requalification prononcée, la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement lequel, faute de respecter les dispositions légales applicables doit être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit il indemnisation du salarié ; que M. Y..., dont l'ancienneté dans l'entreprise est inférieure à deux ans, doit justifier du préjudice subi du fait du licenciement pour pouvoir prétendre à une indemnité ; que M. Y... qui a toujours su - ainsi qu'il l'a notamment écrit au parquet le 12 mai 2014 - qu'il était embauché pour l'été et ne conteste pas que son contrat est allé au terme convenu ne justifie d'aucun préjudice du fait d'un licenciement abusif ; qu'il n'allègue d'ailleurs aucun préjudice dans ses écritures ; qu'il sera débouté de sa demande à ce titre ;
ALORS QUE la constatation de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement doit entraîner la condamnation de l'employeur à réparer le préjudice du salarié dont il appartient au juge d'apprécier l'étendue ; qu'en déboutant M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif, aux motifs que le salarié, qui n'avait que quelques mois d'ancienneté, ne contestait pas que son contrat était allé au terme convenu et n'établissait pas son préjudice, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-5 du code du travail ;
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR par arrêt contradictoire débouté M. Y... de sa demande de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE qu'il en est de même s'agissant du non-respect de la procédure de licenciement, l'indemnité prévue par l'article L. 1235-2 du code du travail n'étant pas due de manière automatique et forfaitaire et le salarié ayant là encore vu son contrat se terminer dans les conditions et au terme dont il avait connaissance dès son embauche (cf. arrêt attaqué p. 5 § 3 à 6) ;
ALORS QUE toute irrégularité de la procédure de licenciement entraîne pour le salarié un préjudice que l'employeur doit réparer et qu'il appartient au juge d'évaluer ; qu'en considérant que le salarié n'était pas fondé à solliciter le paiement d'une indemnité au titre du non-respect de la procédure de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-5 du code du travail.