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21/06/2017 | FRANCE | N°15-17059

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 21 juin 2017, 15-17059


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X...et la SELARL Pharmacie X... que sur le pourvoi incident relevé par la société L'Auxiliaire pharmaceutique ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour faire l'acquisition de l'officine de pharmacie de M. Y..., M. X..., qui est pharmacien, a recouru aux services de la société L'Auxiliaire pharmaceutique, qui exerce une activité d'intermédiaire spécialisée dans les transactions concernant ces fonds de commerce ; que cette société a proposé à

M. X... un montage juridique consistant à créer deux sociétés, la première,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X...et la SELARL Pharmacie X... que sur le pourvoi incident relevé par la société L'Auxiliaire pharmaceutique ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, pour faire l'acquisition de l'officine de pharmacie de M. Y..., M. X..., qui est pharmacien, a recouru aux services de la société L'Auxiliaire pharmaceutique, qui exerce une activité d'intermédiaire spécialisée dans les transactions concernant ces fonds de commerce ; que cette société a proposé à M. X... un montage juridique consistant à créer deux sociétés, la première, la SELARL Pharmacie X..., faisant l'acquisition de l'officine de M. X... et la seconde, la SELARL Pharmacie des 4 chemins, de celle de M. Y..., chacune de ces sociétés souscrivant à cette fin un prêt bancaire ; que, reprochant à la société L'Auxiliaire pharmaceutique de ne pas l'avoir informé des conséquences juridiques, patrimoniales et fiscales résultant de ce montage, M. X... l'a assignée en réparation de son préjudice ; que la SELARL Pharmacie X... est intervenue à l'instance ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de rejeter les demandes de la SELARL Pharmacie X..., les troisième et quatrième moyens du même pourvoi et les premier et second moyens du pourvoi incident, réunis :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais, sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu l'article 566 du code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de la SELARL Pharmacie X... tendant à son indemnisation au titre des droits d'enregistrements liés à la cession du fonds de commerce et au titre des honoraires de cession payés à la société L'Auxiliaire pharmaceutique, l'arrêt constate que M. X... a réclamé en première instance l'indemnisation à titre personnel de ces préjudices tandis que la SELARL Pharmacie X... n'a formé qu'une demande d'indemnisation au titre de la charge des intérêts qu'elle devait supporter, et que cette société n'avait formé les demandes litigieuses qu'en appel ; qu'il en déduit qu'elles sont nouvelles ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces demandes de la SELARL Pharmacie X... n'étaient pas le complément de celles qu'elle avait présentées en première instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 110-4 du code de commerce ;

Attendu que pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel a retenu que les demandes de la SELARL Pharmacie X... étaient prescrites au regard des dispositions de ce texte ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité en ce qui concerne le manquement au devoir de conseil de la société L'Auxiliaire pharmaceutique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de limiter à la somme de 58 100 euros le montant de l'indemnisation accordée à M. X... :

Vu l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;

Attendu que pour condamner la société L'Auxiliaire pharmaceutique à payer à M. X... la somme de 58 100 euros, l'arrêt retient que celle-ci a commis un manquement à son devoir général de conseil en proposant à M. X... un montage juridique complexe sans l'informer de toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de M. Y... ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérents au montage proposé et en déduit qu'un préjudice de perte de chance en est résulté, qui peut être seulement réparé par le remboursement à M. X... d'une fraction des honoraires qui ont été versés ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue, laquelle résulte de la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, la cour d'appel, qui a alloué à M. X... une fraction des honoraires versés sans préciser de quelle éventualité favorable celui-ci avait été privé, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi incident ;

Et sur le pourvoi principal :

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les demandes de la SELARL Pharmacie X... en condamnation de la société L'Auxiliaire pharmaceutique à l'indemniser au titre des droits d'enregistrement et au titre des honoraires de la cession, en ce qu'il condamne la société L'Auxiliaire pharmaceutique à payer à M. X... la somme de 58 100 euros et en ce qu'il statue sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens, l'arrêt rendu le 5 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne la société L'Auxiliaire pharmaceutique aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... et la SELARL Pharmacie X... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Pharmacie X... et M. X..., demandeurs au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit irrecevables les demandes de la SELARL Pharmacie X... en condamnation à lui payer les sommes de 168. 055 euros au titre des droits d'enregistrement et de 15. 835 euros au titre des honoraires de la cession ;

AUX MOTIFS QUE l'appelante reproche à la SELARL Pharmacie X... d'avoir conclu, en appel, à sa condamnation à lui payer les sommes de 168. 955 euros au titre des droits d'enregistrement et de 15. 835 euros au titre des honoraires de la cession, demandes qui seraient nouvelles en appel ; que la lecture du jugement entrepris permet en effet de constater qu'en première instance seul Robert X... réclamait, à titre personnel, le paiement de ces sommes et que la SELARL Pharmacie X... n'a formé, pour sa part, ces demandes qu'en cause d'appel ; que l'article 564 du code de procédure civile dispose que : « à peine d'irrecevabilité d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait » ; que ces demandes, manifestement nouvelles en appel, et qui, en tout état de cause, sont prescrites au regard des dispositions de l'article L. 110-4 du code de commerce, sont irrecevables ;

ALORS, D'UNE PART, QUE sont recevables en cause d'appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes soumises au premier juge et celles qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ; qu'en jugeant que les demandes en indemnisation des droits d'enregistrement et des honoraires supportés par la SELARL Pharmacie X... étaient nouvelles en cause d'appel, seul M. X... les ayant soulevées à titre personnel devant le tribunal, quand ces demandes avaient le même fondement que la demande initiale de la SELARL Pharmacie X... en réparation du préjudice relatif au coût du prêt résultant du manquement au devoir de conseil de la société l'Auxiliaire pharmaceutique et qu'elles poursuivaient la même fin d'indemnisation des conséquences financières de cette opération, de sorte qu'elles constituaient le complément de celles formées en première instance par la société, la cour d'appel a violé l'article 566 du code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant, qu'en tout état de cause ces demandes étaient prescrites au regard des dispositions de l'article L. 110-4 du code de commerce, sans donner les circonstances dont il résultait que ce délai de prescription était applicable en l'espèce, qu'il avait bien couru à partir d'une date donnée et qu'il était expiré lorsque la SELARL Pharmacie X... avait engagé son action, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de cet article L. 110-4 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué de n'avoir condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à payer à M. Robert X... que la somme de 58. 100 euros en réparation de son préjudice et d'avoir ainsi débouté M. X... et la SELARL Pharmacie X... de leurs demandes d'indemnisation des chefs de préjudice subis à hauteur de 34. 969 euros au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, 488. 953 euros au titre de l'imposition sur les plus-values et 50. 000 euros au titre du préjudice psychologique et financier pour M. X... et à hauteur de 484. 260, 72 euros au titre des intérêts supportés, 168. 055 euros au titre des droits d'enregistrement et 15. 835 euros au titre des honoraires de la cession pour la SELARL Pharmacie X... ;

AUX MOTIFS QUE « les intimés arguent de trois fautes : un défaut d'information sur l'article 151 septies A du code général des impôts, un défaut d'information sur les incidences fiscales des opérations au regard des plus-values, un défaut de conseil général sur les conditions de financement de l'opération et leur incidence financière, fiscale et patrimoniale ; que, sur le premier point, Robert X... allègue qu'il envisageait de prendre sa retraite à bref délai et que la société l'Auxiliaire pharmaceutique aurait donc dû l'informer des dispositions de l'article 151 septies A du code général des impôts ; que cette allégation n'est cependant corroborée par aucun élément de preuve, aucun document ne démontrant qu'il avait évoqué un départ prochain à la retraite, lui qui, étant né le 4 mars 1951, n'était âgé que de 56 ans lors de l'acquisition de la pharmacie Y...et qui empruntait sur 10 ans pour acheter une deuxième pharmacie ; que, sur le deuxième point, il suffit de lire le chapitre « plus-values » des actes sous condition suspensive du 25 juillet 2007 pour constater que le vendeur « en vue d'une imposition éventuelle sur la plus-value qu'il pourra réaliser à l'occasion de la présente cession, en vertu de la législation en vigueur, dont il déclare avoir été informé, indique que … » ; que Robert X... a signé ces deux actes, l'un en qualité de vendeur, l'autre en qualité d'associé de l'acquéreur ; qu'il ne peut donc prétendre ne pas avoir reçu d'information sur les risques d'imposition sur la plus-value ; que sur le troisième point, les développements précédents ont permis d'établir le manquement de la société l'Auxiliaire pharmaceutique à son obligation générale de conseil (…) ; que sur le préjudice, les premiers juges avaient :- condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à M. X... la somme de 672. 843 euros (168. 055 euros au titre des droits d'enregistrement liés à la cession de la pharmacie X..., 15. 835 euros au titre des honoraires payés, 488. 953 euros au titre de la taxe sur la plus-value),- condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à la SELARL Pharmacie X... la somme de 243. 044 euros au titre des intérêts bancaires sur le prêt surdimensionné contracté par la SELARL auprès de la Caisse de Crédit agricole ; qu'en premier lieu, comme on vient de le voir, aucune faute de la société l'Auxiliaire pharmaceutique n'est établie quant à un défaut d'information sur les risques d'imposition sur les plus-values ; que le jugement entrepris ne peut donc qu'être infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre un préjudice de 488. 953 euros ; qu'en deuxième lieu, les intimés, auxquels incombe sur ce point la charge de la preuve, ne prouvent pas que la cession de l'officine de M. X..., dans le cadre de l'acquisition de la seconde officine, ait été inutile ; qu'au surplus, les droits d'enregistrement dus sur cette cession ont été supportés par la SELARL Pharmacie X..., acquéreur du fonds, et que, même si M. X... en possède une grande partie du capital, on ne voit pas en quoi cette somme devrait lui être remboursée personnellement ; qu'en conséquence le jugement entrepris ne peut qu'être infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre un préjudice de 168. 055 euros ; qu'en troisième lieu, les intimés ne démontrent en rien le caractère indu des honoraires de rédaction d'actes facturés par la société l'Auxiliaire pharmaceutique ; qu'il s'ensuit que le jugement entrepris ne peut qu'être infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre un préjudice de 15. 835 euros ; qu'en quatrième lieu, les intimés prétendent que le prêt contracté pour financer le rachat de la pharmacie X...serait inutile ou surdimensionné et que les intérêts en résultant diminueraient leur bénéfice ; que le préjudice évalué par les premiers juges à 243. 044 euros est, en appel, estimé par les intimés à la somme de 484. 260, 72 euros ; que cependant, il n'est pas démontré que M. X... disposait de fonds propres suffisants pour acquérir le fonds de commerce de sa pharmacie ; qu'ainsi, dès lors qu'il acceptait le montage de l'appelante, la SELARL Pharmacie X... ne pouvait faire autrement que de souscrire un emprunt pour acquérir cet actif ; qu'il n'est d'ailleurs pas démontré que le taux d'intérêt de l'emprunt souscrit ne correspondrait pas à un intérêt de marché ; que le bilan de la SELARL Pharmacie X... est équilibré puisque le financement du fonds de commerce trouve sa contrepartie au bilan par la dette d'emprunt ; qu'en outre, les intérêts de cet emprunt sont déductibles pour la détermination du résultat fiscal, la SELARL Pharmacie X... étant soumise à l'impôt sur les sociétés ; qu'ainsi les intimées ne rapportent pas la preuve d'une faute (celle qui constituerait à la souscription d'un emprunt inutile ou surdimensionné) et pas davantage celle d'un préjudice ; que le jugement entrepris ne peut donc qu'être infirmé en ce qu'il a condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à la SELARL Pharmacie X... la somme de 243. 044 euros au titre des intérêts bancaires sur le prêt ; que la demande formulée en appel à cet égard (484. 260, 72 €) sera également rejetée ; qu'en réalité, comme cela a déjà été exposé, la société l'Auxiliaire pharmaceutique, en proposant à M. X... un montage juridique complexe sans l'informer de toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de Claude Y... ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérents au montage proposé et sans prendre la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client qui soit établie, a commis pour seule faute un défaut de conseil ; que le seul préjudice qui résulte directement d'une telle faute est une perte de chance, laquelle ne peut être indemnisée que par le remboursement de la partie des honoraires qui a été versée et qui correspond à cette obligation de conseil ; que cette obligation de conseil, de la part d'un intermédiaire qui se targuait d'apporter « tous les appuis juridiques et fiscaux » et de « donner le meilleur conseil » à son client du fait de sa connaissance de « toutes les subtilités liées à la constitution de société et à la rédaction des actes et les rouages administratifs » afin que celui-ci puisse prendre « sa décision d'acheter ou de vendre en connaissance de cause et en toute sérénité », est particulièrement importante et constitue 70 % de ses obligations générales, frais d'acte de prêt non compris ; que les honoraires liés à la transaction de la pharmacie Claude Y... s'élevaient à la somme de 83. 000 euros, de sorte que l'obligation de conseil doit se chiffrer à la somme de 58. 100 euros ; que, statuant à nouveau, la cour condamne donc la société l'Auxiliaire pharmaceutique à payer à M. X..., la somme de 58. 100 euros (…) ; que M. X... allègue d'un préjudice psychologique et financier qui justifierait la condamnation de la société l'Auxiliaire pharmaceutique à lui payer 50. 000 euros de dommages et intérêts ; mais qu'en premier lieu M. X... ne démontre pas que l'attitude de la société l'Auxiliaire pharmaceutique ait abouti à un déséquilibre successoral de sa fille, au détriment de la fratrie ; qu'en effet, le prêt de 275. 000 euros et le don de 150. 000 euros qu'il a faits à sa fille ont été passés devant notaire, de sorte qu'il ne peut prétendre ne pas avoir été informé sur les conséquences de ces actes, information qui, en tout état de cause, était de la responsabilité du seul notaire ; qu'en outre cette information est incluse à l'acte de don qui mentionne expressément : « la somme d'argent présentement donnée sera rapportable à la succession du donateur pour son montant nominal quel que soit l'usage qui en sera fait par le donataire. La présente donation s'imputera sur la quotité disponible » ; que M. X... objecte dans ses écritures que cette donation « même stipulée rapportable en valeur nominale, peut avoir des répercussions sur la consistance de la quotité disponible », argument peu pertinent puisque faisant état de répercussions hypothétiques ; qu'en second lieu, M. X... ne prouve pas avoir dû reporter son âge de départ à la retraite et continuer à travailler pour rembourser les charges d'emprunts et les dettes fiscales ; que d'abord rien ne permet de dire qu'il aurait pris sa retraite ; qu'au contraire il n'avait que 56 ans lors de l'acquisition de la pharmacie Y...et empruntant sur 10 ans pour acheter une deuxième pharmacie, il ne pouvait envisager une retraite rapide ; qu'ensuite s'il démontre avoir dû diminuer sa rémunération et s'il établit que la pharmacie X...a dû négocier des accords de report d'échéance avec la CERP, il ne prouve en rien que cette baisse ou que ces négociations soient directement la conséquence d'un comportement fautif de la société l'Auxiliaire pharmaceutique ; qu'enfin, bien que n'en faisant plus mention dans ses dernières écritures, il ne conteste pas avoir réalisé une plus-value de 714. 566, 25 euros sur la cession des titres de la seule SELARL Pharmacie X... » (arrêt p. 10 à 12, p. 13) ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit ; que la cour d'appel a constaté le défaut de conseil de la société l'Auxiliaire pharmaceutique, qui n'avait pas informé son client de « toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérents au montage proposé » et qui n'avait pas pris « la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client » ; qu'en réduisant le préjudice résultant du manquement ainsi constaté à la perte d'une chance de ne pas payer les honoraires à cette société, quand le préjudice subi du fait de ce manquement contractuel ne pouvait être restreint à une part du prix de ce contrat, mais devait réparer l'ensemble des conséquences préjudiciables de l'inexécution, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la réparation de la perte d'une chance doit être mesurée à la chance perdue ; qu'elle suppose l'évaluation de la perte éprouvée ou du gain manqué, puis la détermination de la probabilité selon laquelle ce préjudice aurait eu une chance de ne pas survenir en l'absence de fait fautif ; qu'en fixant le préjudice de perte de chance subi par M. X..., faute de conseil sur les effets et l'opportunité du montage proposé et sur l'existence d'autres montages possibles, au pourcentage des honoraires payés à la société l'Auxiliaire pharmaceutique qui correspondrait à la part de l'obligation de conseil inexécutée dans l'ensemble des obligations de cette société, quand la chance perdue devait être mesurée à l'aune de la perte éprouvée et du gain manqué du fait de cette inexécution, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;

ALORS, ENFIN, QU'en refusant d'indemniser les conséquences financières de la cession de l'officine de pharmacie de M. X... à la SELARL Pharmacie X..., dont M. X... était associé à 95 %, au motif qu'il n'était pas démontré que cette cession était inutile pour l'acquisition de l'officine Y..., sans rechercher, comme elle y était invitée (concl. p. 5, § 8 et s.), si, dès lors qu'une somme totale de 3. 800. 000 euros avait pu être empruntée pour acquérir les deux officines (2. 000. 000 pour l'officine X..., 1. 800. 000 euros pour l'officine Y...), un seul emprunt pour la seule acquisition de l'officine Y...vendue au prix de 2. 131. 000 euros aurait pu être contracté, sans modification de la propriété de l'officine X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à la SELARL Pharmacie X... la somme de 243. 044 euros au titre des intérêts bancaires sur le prêt surdimensionné contracté par SELARL Pharmacie X... auprès de la Caisse de Crédit agricole et d'avoir ainsi débouté la SELARL Pharmacie X... de sa demande d'indemnisation de ce chef ;

AUX MOTIFS QUE « les intimés prétendent que le prêt contracté pour financer le rachat de la pharmacie X...serait inutile ou surdimensionné et que les intérêts en résultant diminueraient leur bénéfice ; que le préjudice évalué par les premiers juges à 243. 044 euros est, en appel, estimé par les intimés à la somme de 484. 260, 72 euros ; que cependant, il n'est pas démontré que M. X... disposait de fonds propres suffisants pour acquérir le fonds de commerce de sa pharmacie ; qu'ainsi, dès lors qu'il acceptait le montage de l'appelante, la SELARL Pharmacie X... ne pouvait faire autrement que de souscrire un emprunt pour acquérir cet actif ; qu'il n'est d'ailleurs pas démontré que le taux d'intérêt de l'emprunt souscrit ne correspondrait pas à un intérêt de marché ; que le bilan de la SELARL Pharmacie X... est équilibré puisque le financement du fonds de commerce trouve sa contrepartie au bilan par la dette d'emprunt ; qu'en outre, les intérêts de cet emprunt sont déductibles pour la détermination du résultat fiscal, la SELARL Pharmacie X... étant soumise à l'impôt sur les sociétés ; qu'ainsi les intimées ne rapportent pas la preuve d'une faute (celle qui constituerait à la souscription d'un emprunt inutile ou surdimensionné) et pas davantage celle d'un préjudice ; que le jugement entrepris ne peut donc qu'être infirmé en ce qu'il a condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à la SELARL Pharmacie X... la somme de 243. 044 euros au titre des intérêts bancaires sur le prêt ; que la demande formulée en appel à cet égard (484. 260, 72 €) sera également rejetée » (arrêt p. 11) ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la cour d'appel a retenu le défaut de conseil de la société l'Auxiliaire pharmaceutique qui n'avait pas informé de « toutes les possibilités qui s'offraient (…) pour acquérir l'officine ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérent au montage proposé » et qui n'avait pas pris « la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client » ; qu'en jugeant néanmoins qu'aucune faute ni aucun préjudice causés par le fait d'avoir contracté un prêt inutile ou surdimensionné pour acquérir l'officine de pharmacie X...ne pouvait être retenu, M. X... ne démontrant pas disposer de fonds propres suffisants pour acquérir sa propre officine par l'intermédiaire de la SELARL Pharmacie X..., tandis qu'il résultait de ses constatations que, exactement informés de toutes les possibilités qui s'offraient pour acquérir l'officine Y...et des répercussions fiscales, financières et patrimoniales du seul montage proposé, M. X... et la SELARL Pharmacie X... auraient eu, à tout le moins, la possibilité de renoncer à ce montage emportant un tel emprunt, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en écartant l'existence d'un préjudice résultant du coût de l'emprunt de 2. 000. 000 d'euros contracté pour l'acquisition de l'officine de pharmacie X...par la SELARL Pharmacie X..., par la considération qu'il n'était pas justifié que le taux d'intérêt de l'emprunt souscrit ne correspondait pas aux taux du marché, que le bilan de la société emprunteuse était équilibré, car ce financement avait une contrepartie au bilan mentionnant la dette d'emprunt, et que ces emprunts étaient déductibles pour la détermination du résultat fiscal, quand, peu important ces circonstances, cet emprunt demeurait une charge financière qui pesait sur le résultat comptable de la société, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à écarter l'existence d'un préjudice causé par le défaut de délivrance d'un conseil qui aurait permis de renoncer à cet emprunt ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce que celui-ci avait condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à M. X... la somme de 672. 843, de n'avoir condamné cette société à payer à M. X... que la somme de 58. 100 euros et d'avoir ainsi débouté M. X... de ses demandes d'indemnisation des chefs de préjudices subis à hauteur de 488. 953 euros au titre de l'imposition sur les plus-values et 50. 000 euros au titre du préjudice psychologique et financier ;

AUX MOTIFS QUE « les intimés arguent de trois fautes : un défaut d'information sur l'article 151 septies A du code général des impôts, un défaut d'information sur les incidences fiscales des opérations au regard des plus-values, un défaut de conseil général sur les conditions de financement de l'opération et leur incidence financière, fiscale et patrimoniale ; que, sur le premier point, Robert X... allègue qu'il envisageait de prendre sa retraite à bref délai et que la société l'Auxiliaire pharmaceutique aurait donc dû l'informer des dispositions de l'article 151 septies A du code général des impôts ; que cette allégation n'est cependant corroborée par aucun élément de preuve, aucun document ne démontrant qu'il avait évoqué un départ prochain à la retraite, lui qui, étant né le 4 mars 1951, n'était âgé que de 56 ans lors de l'acquisition de la pharmacie Y...et qui empruntait sur 10 ans pour acheter une deuxième pharmacie ; que, sur le deuxième point, il suffit de lire le chapitre « plus-values » des actes sous condition suspensive du 25 juillet 2007 pour constater que le vendeur « en vue d'une imposition éventuelle sur la plus-value qu'il pourra réaliser à l'occasion de la présente cession, en vertu de la législation en vigueur, dont il déclare avoir été informé, indique que … » ; que Robert X... a signé ces deux actes, l'un en qualité de vendeur, l'autre en qualité d'associé de l'acquéreur ; qu'il ne peut donc prétendre ne pas avoir reçu d'information sur les risques d'imposition sur la plus-value ; que sur le troisième point, les développements précédents ont permis d'établir le manquement de la société l'Auxiliaire pharmaceutique à son obligation générale de conseil (…) ; que sur le préjudice, les premiers juges avaient :- condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à M. X... la somme de 672. 843 euros (168. 055 euros au titre des droits d'enregistrement liés à la cession de la pharmacie X..., 15. 835 euros au titre des honoraires payés, 488. 953 euros au titre de la taxe sur la plus-value),- condamné la société l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à la SELARL Pharmacie X... la somme de 243. 044 euros au titre des intérêts bancaires sur le prêt surdimensionné contracté par la SELARL auprès de la Caisse de Crédit agricole ; qu'en premier lieu, comme on vient de le voir, aucune faute de la société l'Auxiliaire pharmaceutique n'est établie quant à un défaut d'information sur les risques d'imposition sur les plus-values ; que le jugement entrepris ne peut donc qu'être infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre un préjudice de 488. 953 euros ; qu'en deuxième lieu, les intimés, auxquels incombe sur ce point la charge de la preuve, ne prouvent pas que la cession de l'officine de M. X..., dans le cadre de l'acquisition de la seconde officine, ait été inutile ; qu'au surplus, les droits d'enregistrement dus sur cette cession ont été supportés par la SELARL Pharmacie X..., acquéreur du fonds, et que, même si M. X... en possède une grande partie du capital, on ne voit pas en quoi cette somme devrait lui être remboursée personnellement ; qu'en conséquence le jugement entrepris ne peut qu'être infirmé en ce qu'il a retenu à ce titre un préjudice de 168. 055 euros (…) ; qu'en réalité, comme cela a déjà été exposé, la société l'Auxiliaire pharmaceutique, en proposant à M. X... un montage juridique complexe sans l'informer de toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de Claude Y... ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérents au montage proposé et sans prendre la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client qui soit établie, a commis pour seule faute un défaut de conseil ; que le seul préjudice qui résulte directement d'une telle faute est une perte de chance, laquelle ne peut être indemnisée que par le remboursement de la partie des honoraires qui a été versée et qui correspond à cette obligation de conseil ; que cette obligation de conseil, de la part d'un intermédiaire qui se targuait d'apporter « tous les appuis juridiques et fiscaux » et de « donner le meilleur conseil » à son client du fait de sa connaissance de « toutes les subtilités liées à la constitution de société et à la rédaction des actes et les rouages administratifs » afin que celui-ci puisse prendre « sa décision d'acheter ou de vendre en connaissance de cause et en toute sérénité », est particulièrement importante et constitue 70 % de ses obligations générales, frais d'acte de prêt non compris ; que les honoraires liés à la transaction de la pharmacie Claude Y... s'élevaient à la somme de 83. 000 euros, de sorte que l'obligation de conseil doit se chiffrer à la somme de 58. 100 euros ; que, statuant à nouveau, la cour condamne donc la société l'Auxiliaire pharmaceutique à payer à M. X..., la somme de 58. 100 euros (…) ; que M. X... allègue d'un préjudice psychologique et financier qui justifierait la condamnation de la société l'Auxiliaire pharmaceutique à lui payer 50. 000 euros de dommages et intérêts ; mais qu'en premier lieu M. X... ne démontre pas que l'attitude de la société l'Auxiliaire pharmaceutique ait abouti à un déséquilibre successoral de sa fille, au détriment de la fratrie ; qu'en effet, le prêt de 275. 000 euros et le don de 150. 000 euros qu'il a faits à sa fille ont été passés devant notaire, de sorte qu'il ne peut prétendre ne pas avoir été informé sur les conséquences de ces actes, information qui, en tout état de cause, était de la responsabilité du seul notaire ; qu'en outre cette information est incluse à l'acte de don qui mentionne expressément : « la somme d'argent présentement donnée sera rapportable à la succession du donateur pour son montant nominal quel que soit l'usage qui en sera fait par le donataire. La présente donation s'imputera sur la quotité disponible » ; que M. X... objecte dans ses écritures que cette donation « même stipulée rapportable en valeur nominale, peut avoir des répercussions sur la consistance de la quotité disponible », argument peu pertinent puisque faisant état de répercussions hypothétiques ; qu'en second lieu, M. X... ne prouve pas avoir dû reporter son âge de départ à la retraite et continuer à travailler pour rembourser les charges d'emprunts et les dettes fiscales ; que d'abord rien ne permet de dire qu'il aurait pris sa retraite ; qu'au contraire il n'avait que 56 ans lors de l'acquisition de la pharmacie Y...et empruntant sur 10 ans pour acheter une deuxième pharmacie, il ne pouvait envisager une retraite rapide ; qu'ensuite s'il démontre avoir dû diminuer sa rémunération et s'il établit que la pharmacie X...a dû négocier des accords de report d'échéance avec la CERP, il ne prouve en rien que cette baisse ou que ces négociations soient directement la conséquence d'un comportement fautif de la société l'Auxiliaire pharmaceutique ; qu'enfin, bien que n'en faisant plus mention dans ses dernières écritures, il ne conteste pas avoir réalisé une plus-value de 714. 566, 25 euros sur la cession des titres de la seule SELARL Pharmacie X... » (arrêt p. 10, 11, 12 et 13) ;

ALORS, D'UNE PART, QU'en écartant toute indemnisation au titre de l'imposition des plus-values supportée par M. X..., par la considération que celui-ci n'établissait pas avoir sollicité d'information à ce sujet en cas de départ prochain à la retraite et que les actes signés faisaient mention d'une information sur la législation relative aux plus-values, tandis que, indépendamment de l'information sur le principe d'imposition des plus-values, le défaut de conseil sur l'opportunité du montage proposé et sur l'existence d'autres possibilités avait privé M. X... de la possibilité d'éviter cette imposition sur la cession de son officine à une société dont il était associé majoritaire, en optant pour un autre montage qui aurait exclu cette cession, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE la cour d'appel a constaté que M. X... avait cédé son officine à la SELARL Pharmacie X..., dont il était associé à 95 % ; qu'elle a constaté que M. X... avait dû diminuer sa rémunération et que la SELARL Pharmacie X... avait dû négocier des reports d'échéance ; qu'elle a retenu que le défaut de conseil avait empêché M. X... de connaitre les autres possibilité d'acquisition de l'officine Y...et de connaitre les répercussions fiscales et financières du montage proposé ; qu'en jugeant néanmoins qu'il n'était pas justifié que la diminution de rémunération de M. X..., qui avait enregistré une plus-value de cession, et les difficultés de remboursement de la SELARL Pharmacie X... résultaient de ce défaut de conseil, tandis que le seul montage proposé avait eu pour conséquence de grever les résultats de l'officine X...du coût de son acquisition par la SELARL Pharmacie X..., diminuant ainsi le bénéfice distribuable à M. X..., lequel ne tirait aucun partie de la plus-value de cession qui avait été payée par la société dont il était associé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article 1147 du code civil.
Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société L'Auxiliaire pharmaceutique, demanderesse au pourvoi incident

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait jugé que l'Auxiliaire pharmaceutique avait failli à son devoir de conseil et de l'AVOIR condamnée à payer la somme de 58. 100 euros au titre de son préjudice ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'«'il résulte des dispositions de l'article 1147 du code civil que les intermédiaires en vente de fonds de commerce ont, en tant que professionnel, un devoir de conseil vis à vis de leur mandant ; que l''Auxiliaire pharmaceutique, sur son site internet (Pièce 38 des intimés), se présente en ces termes : « Par les moyens que nous mettons en oeuvre depuis 50 ans et grâce à une éthique sans concession, nous fidélisons nos clients pour renforcer chaque jour notre statut de N° 1 incontesté de la cession de pharmacie » ; qu'ainsi il se présente lui-même comme un intermédiaire en cession de fonds de commerce, professionnel spécialisé dans la cession de fonds de pharmacie, numéro un dans ce secteur d'activité et doté de surcroit de 50 années d'expérience, c'est à dire ayant acquis une particulière efficience et compétence ; que Robert X..., pour sa part, s'il lui arrivait, en sa qualité de pharmacien, de pratiquer des actes de commerce, en vendant des médicaments, n'avait pas de connaissances juridiques ou fiscales et ne pouvait donc rivaliser avec cette structure, tant en termes de connaissances que de compétences dans le domaine de la cession de pharmacie ou de montages juridiques et fiscaux ; que ces éléments sont à prendre en compte au regard de l'obligation de conseil, obligation de moyens qui, de façon constante, doit s'apprécier en fonction des circonstances de la cause et, tout particulièrement, de la situation et des connaissances des parties ; Attendu, par ailleurs, que les obligations pesant sur l'intermédiaire professionnel sont également à mesurer à l'aune de leur contrepartie onéreuse ; qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'en l'espèce les honoraires de la seule transaction de la pharmacie de Claude Y... s'élevaient à la somme de 83 000 €, frais d'acte de prêt non compris ; qu'en outre, il est également intéressant de noter que l'Auxiliaire pharmaceutique, ajoute sur son site internet (Pièce 38 des intimés), qu'il apporte : « tous les appuis juridiques et fiscaux dont vous avez besoin lors de l'achat d'une officine. Une équipe de juristes, connaissant parfaitement toutes les subtilités liées à la constitution de société et à la rédaction des actes et les rouages administratifs souvent lents et complexes, met en oeuvre la performance de ses structures pour faire aboutir votre projet dans les délais et en toute sécurité » et continue sa présentation en disant que ses personnels, « formés en permanence » doivent « pouvoir donner le meilleur conseil, en toute indépendance et permettre à nos clients d'optimiser chacune de leurs opérations » avant d'ajouter « tout montage juridique et fiscal contient des avantages et des inconvénients. L'Auxiliaire pharmaceutique n'est satisfaite que lorsque notre client pharmacien prend sa décision d'acheter ou de vendre en connaissance de cause et en toute sérénité, que ce soit pendant l'exploitation de sa pharmacie ou au moment d'en sortir » ; qu'ainsi, même si la comptabilité de la pharmacie de Robert X... était tenue par le cabinet d'expertise-comptable Ansemble Durance, et si celui-ci a transmis, pour répondre aux exigences de l'article L141-1 du code de commerce, à l'Auxiliaire pharmaceutique une attestation mentionnant le chiffre d'affaires et les bénéfices des trois exercices précédents, c'est à cette dernière structure qu'il appartenait d'attirer l'attention de Robert X... sur les conséquences juridiques et fiscales du montage envisagé ; que c'est vainement que la cour a recherché, parmi les pièces versées aux débats, la preuve de ce que l'Auxiliaire pharmaceutique ait informé ou conseillé Robert X... en lui exposant toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de Claude Y... ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers inhérents à une telle opération, ce alors qu'aux termes de l'article 1315 du code civil, c'est à celui qui se prétend libéré d'une obligation de prouver qu'il l'a exécutée ; que l''Auxiliaire pharmaceutique, n'a pas davantage pris la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client ainsi que leurs conséquences fiscales (et notamment sur l'incidence d'une importante trésorerie sur l'assujettissement à l'ISF) et patrimoniales ; que les attestations et études produites en appel par l'Auxiliaire pharmaceutique (Pièces 14, 15 et 18 de l'appelante) sont sans apport sur ce point,
2013 et du 7 novembre 2013 alors que le compromis de vente et le projet d'acte de cession Y.../ X...datent du 18 avril 2007 et le projet d'acte de cession X.../ Pharmacie X...date du 25 juillet 2007 ; que l'Auxiliaire pharmaceutique ne justifie avoir délivré une information que sur les risques de plus-value (Pièce 3 de l'appelant, page 17) ; qu'enfin l'Auxiliaire pharmaceutique a rédigé les actes juridiques de cession de fonds de commerce, les statuts de sociétés, les règlements intérieurs et pactes d'associé, dépassant ainsi largement les pouvoirs d'un simple agent immobilier ; que, sur la volonté des parties, l'Auxiliaire pharmaceutique allègue que « le souhait de M. X... était de pouvoir réaliser une acquisition en optimisant immédiatement sa situation fiscale et en offrant une solution de trésorerie pérenne à sa pharmacie exploitée à Manosque ainsi qu'à celle de Volx qu'il envisageait d'acquérir par emprunt bancaire » ; que cette assertion est démentie par Robert X... et qu'aucun élément objectif de preuve ne permet de corroborer cette version de l'appelante ; Que, sur les connaissances des parties, l'Auxiliaire pharmaceutique prétend qu'elle n'avait qu'un rôle d'intermédiation et n'était « ni conseiller en patrimoine, ni conseiller juridique et fiscal » et présente Robert X... comme un « professionnel et commerçant aguerri », « assisté de ses propres conseils » ; que ces arguments ne sont pas pertinents au regard des développements antérieurs ; qu'enfin, il importe peu de savoir si les avantages des montages juridiques l'emportent largement sur leurs inconvénients, la preuve n'étant pas rapportée que Robert X... ait eu la possibilité de s'en assurer par un conseil avisé et complet ; ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'Auxiliaire pharmaceutique est une société intermédiaire spécialisée dans les transactions de pharmacie ; qu'étant spécialiste de la transaction d'officines pharmaceutiques l'Auxiliaire pharmaceutique a manifestement un devoir de conseil ; que la jurisprudence constante impose à un professionnel de rapporter la preuve qu'il a exécuté ses obligations de conseil en application de l'article 1315 du Code Civil ; que Monsieur Robert X..., pharmacien de son état, n'est pas un professionnel dans la transaction d'officines pharmaceutiques, ni un spécialiste en montage juridique et fiscal ; que l'Auxiliaire pharmaceutique, dans les pièces versées aux débats, ne justifie pas d'avoir proposé différentes solutions à Monsieur Robert X... pour répondre à son attente ; que l'Auxiliaire pharmaceutique n'a jamais exposé les conséquences fiscales et juridiques de la solution préconisée et mise en place et ne justifie pas de sa pertinence ; que l'Auxiliaire pharmaceutique ne justifie pas d'avoir procédé à un audit juridique et fiscal de la situation professionnelle et personnelle de Monsieur Robert X... ; que le seul argument produit par l'Auxiliaire pharmaceutique est de dire que statistiquement le nombre de pharmacies qui se constituent en SELARL est en nette évolution depuis l'année 2000, moyen à l'évidence particulièrement insuffisant pour justifier du respect de l'obligation de conseil qui pesait sur elle ».

1°) ALORS QUE le professionnel chargé de concevoir un montage juridique doit orienter le choix de client et n'a pas à lui transmettre des informations inutiles ; qu'en jugeant que l'Auxiliaire pharmaceutique aurait manqué à son obligation générale de conseil en n'exposant pas à M. X... « toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de Claude Y... » (arrêt p. 9, alinéa 7), sans préciser les modalités de cession qui auraient pu convenir aux projets et à la situation de son client dont elle a, elle-même relevé qu'il n'avait pas de fonds propres, dont le professionnel aurait dû faire état, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;

2°) ALORS QUE le devoir de conseil du rédacteur d'actes est limité aux seuls faits ignorés par ses clients ; qu'en jugeant que l'Auxiliaire pharmaceutique aurait manqué à son obligation générale de conseil en n'exposant pas à M. X... « les répercussions fiscales (…) inhérente à une telle opération » (arrêt p. 9, alinéa 7) quand elle relevait que M. X... « ne [pouvait] prétendre ne pas avoir reçu d'information sur les risques d'imposition sur la plus-value » (arrêt p. 10 alinéa 10) ce dont il résulte qu'aucune information supplémentaire n'était due à ce titre, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du Code civil ;

3°) ALORS QUE le devoir de conseil du rédacteur d'actes est limité aux seuls faits ignorés par ses clients ; qu'en jugeant que l'Auxiliaire pharmaceutique aurait manqué à son obligation générale de conseil en n'exposant pas à Robert X... « les répercussions fiscales (…) inhérente à une telle opération » (arrêt p. 9, alinéa 7) sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions de l'Auxiliaire pharmaceutique, p. 36, alinéas 1 à 6), si M. X... ne savait pas que le prix de vente de son officine qu'il devait percevoir entrerait dans l'assiette de l'impôt sur la fortune comme l'avaient retenu les premiers juges pour le débouter de sa demande d'indemnisation de ce chef de préjudice, la Cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions opérantes de l'Auxiliaire pharmaceutique en méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE le rédacteur d'actes n'a pas à informer ses clients de risques inexistants ; qu'en jugeant que l'Auxiliaire pharmaceutique aurait manqué à son obligation générale de conseil en n'exposant pas à Robert X... « les risques financiers inhérents [à l'opération réalisée] » sans préciser les risques ainsi courus bien qu'elle ait relevé que les charges d'emprunts-inhérente à tout contrat de prêt-étaient normales et que l'opération était rentable, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné l'Auxiliaire pharmaceutique à verser à M. X... la somme de 58. 100 euros au titre de son préjudice.

AUX MOTIFS QU'« en réalité, comme cela a déjà été exposé, l'Auxiliaire pharmaceutique, en proposant à Robert X... un montage juridique complexe sans l'informer de toutes les possibilités qui s'offraient à lui pour acquérir l'officine de Claude Y... ainsi que des répercussions fiscales et des risques financiers et patrimoniaux inhérents au montage proposé et sans prendre la précaution de rédiger un document reprenant les différentes possibilités qui s'offraient à son client qui soit établie, a commis pour seule faute un défaut de conseil ; que le seul préjudice qui résulte directement d'une telle faute est une perte de chance, laquelle ne peut être indemnisée que par le remboursement de la partie des honoraires qui a été versée et qui correspond à cette obligation de conseil ; que cette obligation de conseil, de la part d'un intermédiaire qui se targuait d'apporter « tous les appuis juridiques et fiscaux » et de « donner le meilleur conseil » à son client du fait de sa connaissance de « toutes les subtilités liées à la constitution de société et à la rédaction des actes et les rouages administratifs » afin que celui-ci puisse prendre « sa décision d'acheter ou de vendre en connaissance de cause et en toute sérénité », est particulièrement importante et constitue 70 % de ses obligations générales, frais d'acte de prêt non compris ; que les honoraires liés à la transaction de la pharmacie de Claude Y... s'élevaient à la somme de 83 000 €, de sorte que l'obligation de conseil doit se chiffrer à la somme de 58 100 € ; ».

ALORS QUE la perte de chance résulte de la disparition d'une éventualité favorable ; qu'en retenant que M. X... avait subi un préjudice consistant en une perte de chance sans préciser la nature de l'événement favorable qui aurait pu se produire et dont il aurait été privé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 15-17059
Date de la décision : 21/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 05 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 21 jui. 2017, pourvoi n°15-17059


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.17059
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