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15/06/2017 | FRANCE | N°16-20446

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 juin 2017, 16-20446


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Michel X...a souscrit quatre contrats d'assurance sur la vie en 1995 et 1999 ; qu'il a été placé sous tutelle le 4 juin 2002, M. Y..., notaire, étant nommé en qualité de tuteur ; que celui-ci a fait modifier la clause désignant les bénéficiaires de trois des contrats précités au profit de légataires institués par testament ; que Michel X...est décédé le 12 janvier 2008 en laissant pour lui succéder des héritiers non réservataires, Mme Z..., MM. Marcel et E

ugène Z..., MM. Louis et Michel A..., Mme B...(les consorts Z...-A...) et M....

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Michel X...a souscrit quatre contrats d'assurance sur la vie en 1995 et 1999 ; qu'il a été placé sous tutelle le 4 juin 2002, M. Y..., notaire, étant nommé en qualité de tuteur ; que celui-ci a fait modifier la clause désignant les bénéficiaires de trois des contrats précités au profit de légataires institués par testament ; que Michel X...est décédé le 12 janvier 2008 en laissant pour lui succéder des héritiers non réservataires, Mme Z..., MM. Marcel et Eugène Z..., MM. Louis et Michel A..., Mme B...(les consorts Z...-A...) et M. C...; qu'après ce décès, M. Y...a produit un testament olographe daté du 25 décembre 1998 et un codicille du 24 décembre 2000, instituant ses enfants, Christophe et Sandrine, légataires universels ; que les consorts Z...-A...ont assigné M. Y...en nullité du testament, du codicille, des modifications des clauses bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie, et en responsabilité ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur la première branche du moyen :

Vu les articles 30, 32 et 122 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes indemnitaires des consorts Z...-A..., l'arrêt retient que M. Y...ne pourra pas être condamné solidairement avec ses enfants au paiement des sommes investies sur les contrats d'assurance sur la vie, tant qu'il n'est pas établi que Christophe et Sandrine Y...sont tenus de la même obligation, ce qui suppose, au préalable, l'annulation du testament, du codicille et des modifications des clauses désignant les bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'annulation du testament, du codicille et des modifications des clauses désignant les bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie n'était pas un préalable nécessaire à la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre M. Y..., tuteur et notaire en charge de la succession de Michel X..., la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne M. Y...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme Z..., MM. Marcel et Eugène Z..., MM. Louis et Michel A...et Mme B...la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme Z..., MM. Marcel et Eugène Z..., MM. Louis et Michel A...et Mme B...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes formées par Mme Madeleine Z...veuve D..., M. Marcel Z..., M. Eugène Z..., Mme Marcelle B..., épouse Perrin, M. Louis A...et M. Michel A...contre M. Pierre Y...;

AUX MOTIFS QUE, Sur la recevabilité des prétentions des consorts Z...-A..., le tribunal a considéré que les consorts Z...-A...étaient recevables à agir contre M. Pierre Y...sur le fondement de sa responsabilité délictuelle, nonobstant le fait que les enfants de ce dernier, légataires, n'étaient pas à la cause ; mais qu'il résulte des articles 31 et 32 du code de procédure civile qu'est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue d'intérêt légitime au rejet de celle-ci ; que l'action exercée contre M. Pierre Y...visait, selon les prétentions soumises au premier juge, à voir dire nuls et privés d'effet le testament olographe du 25 décembre 1998 et le codicille du 24 décembre 2000, ainsi que les modifications des clauses bénéficiaires des contrats d'assurance-vie, ordonner en conséquence, la restitution par les « consorts Y...» de toutes les sommes dont ils ont pu être bénéficiaires au titre du testament et du codicille ainsi que des assurances-vie, et à ce que soit ordonnée l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Michel X...; que le jugement a fait droit aux demandes en nullité et dit que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie étaient les cousins de Michel X..., à l'exclusion ainsi des légataires désignés par voie testamentaire, M. Christophe Y...et Mme Sandrine Y...; qu'il a rejeté en revanche la demande en partage judiciaire ; que les intimés sollicitent devant la cour la confirmation de ces dispositions, sauf quant à la demande en partage judiciaire, qu'ils maintiennent, et sollicitent la condamnation de M. Pierre Y..., « solidairement avec ses enfants », à leur verser le montant des sommes portées aux contrats d'assurance-vie, outre une indemnité pour préjudice moral ; que force est de constater que M. Pierre Y..., qui n'est ni héritier au sens de l'article 734 du code civil, ni légataire de Michel X...et n'est investi d'aucun droit dans la succession de celui-ci, non plus que dans le bénéfice des contrats d'assurance-vie souscrits par lui, n'a aucun intérêt à se défendre dans l'action en nullité et pas davantage dans celle qui vise à la détermination des bénéficiaires des contrats d'assurance-vie, laquelle ne peut être utilement dirigée que contre ses enfants, désignés comme légataires et comme bénéficiaires aux termes des actes contestés, mais qui n'ont jamais été appelés à la cause ; que, de même, M. Pierre Y...ne pourrait être condamné « solidairement », comme il est demandé, avec ses enfants, au titre de la réparation d'un préjudice que les consorts Z...-A...réclament devant la cour pour un montant équivalent aux sommes portées aux contrats d'assurance-vie dont ils demandaient, devant le premier juge, la restitution, que pour autant qu'il soit établi que M. Christophe Y...et Mme Sandrine Y...sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, ce qui suppose que soient au préalable anéantis les effets des testament, codicille et modifications des clauses bénéficiaires, ce sur quoi il ne peut être jugé, ainsi qu'il a été dit, hors la présence à la cause de ces derniers ; que les demandes des consorts Z...-A...se heurtent ainsi, non à une exception de procédure comme ils le prétendent à tort, mais à ce que l'article 32 du code de procédure civile qualifie de fin de non-recevoir, qui est celle du défaut d'intérêt prévu par l'article 122 du code de procédure civile et qui peut donc être proposée en tout état de cause ; que le jugement sera en conséquence, infirmé en son entier, et les demandes des consorts Z...-A...seront déclarées irrecevables

ET AUX MOTIFS QUE, Sur la demande reconventionnelle de M. Pierre Y..., il est constant néanmoins, que M. Pierre Y...a manqué de prudence en procédant de lui-même, en qualité de tuteur, et d'autant plus en connaissance de cause qu'il était notaire, à des actes faits au nom de la personne sous sa tutelle dont il ne pouvait méconnaître qu'ils étaient à l'avantage de ses propres enfants, et qu'il ne peut se plaindre des reproches qui lui sont faits, dans le cadre procédural, par ceux qui se sont estimés lésés par ces actes ;

1) ALORS QU'est recevable la prétention émise contre une personne ayant le droit de discuter le bienfondé de cette prétention ; que, dans leurs conclusions d'appel (pp. 18-21), les consorts D...-Z...-A...soutenaient que Pierre Y...avait engagé sa responsabilité en raison des manquements commis dans ses fonctions de tuteur de M. X...et de notaire chargé de la succession de ce dernier et que le préjudice qu'il leur avait causé correspondait à leur préjudice moral et au montant des contrats d'assurance-vie détournés, sollicitant par conséquent sa condamnation in solidum avec les consorts Y..., bénéficiaires de la fraude ; que, pour déclarer cette demande irrecevable, la cour d'appel a retenu que « M. Pierre Y...ne pourrait être condamné " solidairement ", comme il est demandé, avec ses enfants, au titre de la réparation d'un préjudice … que pour autant qu'il soit établi que M. Christophe Y...et Mme Sandrine Y...sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, ce qui suppose que soient au préalable anéantis les effets des testament, codicille et modifications des clauses bénéficiaires, ce sur quoi il ne peut être jugé, ainsi qu'il a été dit, hors la présence à la cause de ces derniers » ; qu'en statuant ainsi, quand l'annulation des testaments, codicilles et modifications des clauses bénéficiaires n'était pas un préalable nécessaire à la demande en responsabilité dirigée contre Pierre Y...à raison de ses fonctions de tuteur et de notaire liquidateur, lequel était par conséquent seul à pouvoir en discuter le bien-fondé, la cour d'appel a violé les articles 30, 32 et 122 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bienfondé de l'action ; qu'en retenant, pour juger irrecevable, faute d'intérêt, la demande des consorts D...-Z...-A...contre Pierre Y..., que ce dernier « ne pourrait être condamné " solidairement ", comme il est demandé, avec ses enfants, au titre de la réparation d'un préjudice … que pour autant qu'il soit établi que M. Christophe Y...et Mme Sandrine Y...sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, ce qui suppose que soient au préalable anéantis les effets des testament, codicille et modifications des clauses bénéficiaires, ce sur quoi il ne peut être jugé, ainsi qu'il a été dit, hors la présence à la cause de ces derniers », la cour d'appel qui a subordonné la recevabilité de l'action en responsabilité dirigée contre Pierre Y...à son bienfondé, a violé les articles 31 et 122 du code de procédure civile, ensemble l'article 1382 du code civil ;

3) ALORS QUE la recevabilité d'une demande en condamnation in solidum contre un défendeur n'est pas subordonnée à la présence en la cause des co-débiteurs ; qu'en retenant, pour juger irrecevable la demande des consorts D...-Z...-A...contre M. Y..., que ce dernier « ne pourrait être condamné " solidairement ", comme il est demandé, avec ses enfants, au titre de la réparation d'un préjudice … que pour autant qu'il soit établi que M. Christophe Y...et Mme Sandrine Y...sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité, ce qui suppose que soient au préalable anéantis les effets des testament, codicille et modifications des clauses bénéficiaires, ce sur quoi il ne peut être jugé, ainsi qu'il a été dit, hors la présence à la cause de ces derniers », la cour d'appel a subordonné la recevabilité de l'action contre Pierre Y...à la présence en la cause de Christophe et Sandrine Y...et a violé les articles 30 et 32 du code de procédure civile, ensemble l'article 1382 du code civil ;

4) ALORS QU'est recevable la prétention émise contre une personne ayant le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention ; que les consorts D...-Z...-A...soutenaient que les manquements commis par Pierre Y...dans ses fonctions de tuteur de M. X...et de notaire chargé de la succession de ce dernier leur avait causé préjudice moral, indépendant du préjudice financier ; qu'en se bornant à prendre en considération le préjudice patrimonial et financier des consorts D...-Z...-A...pour les juger irrecevables en leurs demandes contre Pierre Y..., sans s'expliquer sur le préjudice moral dont ils demandaient également la réparation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 30 et 122 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 16-20446
Date de la décision : 15/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 26 avril 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 jui. 2017, pourvoi n°16-20446


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.20446
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