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15/06/2017 | FRANCE | N°16-16830

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 juin 2017, 16-16830


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable, pris en ses troisième et quatrième branches ;

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2008 à 2010, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Rhône-Alpes venant aux droits de l'URSSAF du Rhône (l'URSSAF) a notifié à la société Rexel France (la société) un

redressement portant notamment sur des sommes versées à l'occasion d'un plan de départ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable, pris en ses troisième et quatrième branches ;

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 2008 à 2010, l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Rhône-Alpes venant aux droits de l'URSSAF du Rhône (l'URSSAF) a notifié à la société Rexel France (la société) un redressement portant notamment sur des sommes versées à l'occasion d'un plan de départ volontaire ; que cette dernière a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour dire le redressement régulier, l'arrêt relève que s'il résulte des correspondances versées aux débats que la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire versées en exécution de l'avenant à l'accord de GPEC du 7 octobre 2009 a été abordée à l'occasion de la réunion d'information du 30 juin 2010 et des échanges ultérieurs, il n'est pas démontré que le texte de cet accord a été remis aux services de l'URSSAF antérieurement aux opérations de contrôle ; que ni le mail de l'entreprise du 7 juillet 2010, ni la réponse de l'URSSAF du 12 juillet ne dressent en effet la liste des pièces transmises, tandis que dans son attestation du 11 avril 2012 Mme De colle, salariée de la société, ne détaille pas davantage les éléments communiqués et fait état des précisions demandées et de ses réponses, qui établissent que l'URSSAF n'était pas en possession de l'accord ; qu'il résulte d'ailleurs explicitement du courrier de cette dernière du 28 février 2011 que c'est seulement au cours des opérations de contrôle qu'elle a obtenu communication de l'avenant du 7 octobre 2009 et a pu en analyser le contenu pour en conclure que les indemnités de départ volontaire devaient être soumises en totalité aux cotisations et contributions de sécurité sociale ;

Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le courrier électronique du 7 juillet 2010 de transmission des documents relatifs au plan de départ de volontaire faisait mention de documents adressés en pièces jointes comprenant les fichiers « avenant GPEC départs volontaires.doc, convention PDVO.pdf, bulletin PDVO.pdf », d'autre part, que le courrier de l'URSSAF du 18 février 2001 faisait mention au titre des documents transmis par la société à l'appui de sa demande d'informations, de l'accord relatif à la mise en place du plan, de la convention signée entre l'employeur et une salariée ayant bénéficié de ce plan ainsi que du bulletin de paie de cette dernière salariée, la cour d'appel a dénaturé ces documents en violation du principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois principal et incident :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare régulier le redressement opéré sur les indemnités de départ volontaire et annule, au fond, le redressement opéré sur les indemnités de départ volontaire payées à divers salariés en exécution de l'avenant du 7 octobre 2009 pour un montant en principal de 5 721 432 euros, l'arrêt rendu le 8 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;

Condamne l'URSSAF Rhône-Alpes aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Rhône-Alpes, demanderesse au pourvoi principal,

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé au fond le redressement opéré par l'Urssaf Rhône-Alpes sur les indemnités de départ volontaire payées par la société Rexel à divers salariés en exécution de l'avenant du 7 octobre 2009 pour un montant en principal de 5.721.432 € ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable en l'espèce « sont aussi prises en compte les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur ou à l'occasion de la cessation forcée des fonctions des mandataires sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80 ter du code général des impôts, ainsi que les indemnités versées à l'occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail, au sens de l'article L. 1237-13 du code du travail, et les indemnités de départ volontaire versées aux salariés dans le cadre d'un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du même code » ; en application de ce dernier texte « ne constituent pas une rémunération imposable .- 1 ° Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-1, L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-11 à L. 1235-13 du code du travail; 2° Les indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L. 1233-32 et L. 1233-61 à L. 1233-64 du code du travail; 3° La fraction des indemnités de licenciement versées en dehors du cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L. 1233-32 et L. 1233-61 à L. 1233-64 du code du travail, qui n'excède pas - a) Soit deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, ou 50 % du montant de l'indemnité si ce seuil est supérieur, dans la limite de six fois le plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date du versement des indemnités; b) Soit le montant de l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective de branche, par l'accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut, par la loi » ; l'URSSAF du Rhône affirme que le plan de départs volontaires ne s'inscrivant ni dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ni dans celui du plan de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) conclu le 14 mai 2008, les indemnités litigieuses versées aux salariés ne relèvent pas de l'exonération prévue par l'article 80 duodecies du code général des impôts auquel renvoie l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ; à l'appui de sa décision de redressement elle fait notamment valoir : que l'examen des conditions de la rupture des contrats n'a pas fait ressortir une quelconque initiative de l'employeur faute de conflit, que toutes les ruptures ont été demandées par les salariés dans le cadre de l'avenant au plan GPEC en dehors de toute difficulté économique et en l'absence de réorganisation d'effectif, que le plan de départs volontaires s'adressait aux salariés volontaires disposant d'un projet professionnel dont les emplois n'étaient pas menacés, que les départs incriminés ne relevaient nullement d'une décision discrétionnaire ou disciplinaire de l'employeur ; il résulte cependant de l'examen des pièces du dossier : que selon le préambule du plan de départs volontaires objet de l'accord collectif du 7 octobre 2009, qualifié « d'avenant à l'accord de GPEC », c'est en raison de « la conjoncture difficile que traverse actuellement la société REXEL France » et de la nécessité « d'anticiper les évolutions du secteur économique » qu'un accord portant sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences a été conclu le 14 mai 2008 afin d'éviter « les ruptures et les reconversions dans l'urgence », que selon ce même préambule la négociation avec les organisations syndicales représentatives a porté sur un projet de réorganisation de l'entreprise intégrant « un plan de sauvegarde de l'emploi ... et un dispositif de départs de substitution » venant en complément des mesures permanentes de GPEC déjà mises en place avec l'accord du 14 mai 2008, que s'il ne s'adresse qu'à des salariés volontaires ayant un projet professionnel et/ou personnel, le plan prévoit que le départ du salarié candidat est subordonné à l'accord exprès de l'employeur, après examen du dossier et entretien avec la direction des ressources humaines, et que la société pourra s'opposer à la demande pour des impératifs tenant à son fonctionnement, ce qui a été opposé à plusieurs salariés qui ont vu leur demande rejetée, que les licenciements ont précédé la conclusion des conventions de départ volontaire, que les lettres de licenciement font référence à l'accord de GPEC ; dès lors, si la société REXEL FRANCE ne revendique pas le bénéfice des dispositions de l'article L. 2242-17 du code de la sécurité sociale et admet que les départs litigieux ne s'inscrivent pas directement dans le cadre du PSE ni dans celui de l'accord initial de GPEC, il ressort de ces éléments que l'avenant du 7 octobre 2009, qui a été conclu dans un contexte économique difficile, était destiné à anticiper sur les effets de la nécessaire réorganisation de l'entreprise et de son incidence inévitable sur l'emploi ; ainsi, s'il n'est pas établi que les emplois supprimés par voie de départs volontaires étaient effectivement menacés à court terme, il ne peut être sérieusement soutenu que l'accord a été conclu avec les organisations syndicales représentatives en dehors de toutes difficultés économiques, dont la réalité est au contraire suffisamment établie par la mise en place d'un PSE et par la conclusion dès le 14 mai 2008 d'un accord sur la GPEC prévoyant des mesures permanentes de réduction des effectifs ; alors que l'URSSAF du Rhône n'offre pas d'établir que la société REXEL FRANCE était en bonne santé économique, la cour estime par conséquent, contrairement à l'opinion du tribunal, que bien que basés sur le volontariat, les départs ne peuvent être assimilés à des démissions de pure convenance personnelle comme ayant été provoqués par l'employeur, qui a souhaité, en accord avec les organisations syndicales, anticiper sur des difficultés futures qui n'auraient pas manqué d'entraîner des conséquences plus dures sur l'emploi ; au sens de l'article L.242-1 susvisé doivent donc être exclues de l'assiette des cotisations sociales les indemnités destinées à réparer le préjudice causé par la perte des emplois, qui ont été versées par la société REXEL FRANCE en exécution de l'avenant du 7 octobre 2009, ce qui conduit par voie d'infirmation du jugement, à l'annulation de ce chef de redressement, portant sur la somme de 5.721.432 € en principal ;
1. – ALORS QUE les indemnités de rupture du contrat de travail perçues lors du départ volontaire du salarié et en dehors d'un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ou d'un plan de sauvegarde de l'emploi sont incluses dans l'assiette des cotisations sociales, à moins qu'il ne soit établi que la rupture a été provoquée par l'employeur ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que les départs résultant de l'accord collectif du 7 octobre 2009 ne s'inscrivent ni dans le cadre d'un PSE ni dans celui de l'accord de GPEC du 14 mai 2008, que les emplois concernés par ces départs volontaires n'étaient pas menacés à court terme et qu'ils étaient bien basés sur le volontariat ; qu'en jugeant néanmoins qu'ils avaient été provoqués par l'employeur pour la seule raison que la société connaissait des difficultés économiques, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale ;
2. – ALORS QUE l'avenant à l'accord de GPEC de Rexel France relatif à la mise en place d'un plan de départs volontaires précisait qu'il « réponda[i]t à l'objectif principal suivant : En complément des mesures « permanentes » mises en place pendant la durée de l'accord conclu sur la GPEC dans la société Rexel France en date du 14 mai 2008, la mise en place d'un dispositif de départs volontaires, de manière séparée et totalement indépendante des éventuelles réorganisations pouvant être menées dans la société. Ainsi l'objectif de ce plan de départs volontaires est d'accompagner les salariés qui souhaitent quitter volontairement l'entreprise pour leur permettre de retrouver un emploi auprès d'un nouvel employeur ou de mettre en avant un projet, professionnel ou non » et que « le présent avenant à l'accord de GPEC est conclu à la demande initiale des représentants du personnel de la société Rexel France » ; qu'en affirmant que les départs intervenus dans le cadre de cet accord avaient été provoqués par l'employeur, en occultant les dispositions de celui-ci dont il résultait au contraire clairement qu'il avait été conclu à la demande des représentants du personnel et de manière totalement indépendante de la GPEC, la Cour d'appel a violé l'accord du 7 octobre 2009 ;
3. – ALORS QU'en principe les indemnités de rupture du contrat de travail sont imposées et soumises à charges sociales ; qu'il incombe à l'employeur d'établir qu'il peut bénéficier de mesures d'exonération en démontrant qu'il est à l'origine de la rupture des contrats de travail intervenue en dehors d'un PSE ou d'un GPEC, et non pas à l'URSSAF de démontrer que l'employeur n'est pas responsable de ces ruptures ; qu'en reprochant à l'URSSAF de ne pas établir que la société Rexel France était en bonne santé économique, et donc qu'elle n'avait pas provoqué la rupture des contrats de travail, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 du code civil ;
4. – ALORS en tout état de cause QUE les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur sont soumises à cotisations sociales à hauteur de la fraction de ces indemnités qui est assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; qu'en excluant de l'assiette des cotisations sociales la totalité des indemnités versées aux salariés ayant adhéré au dispositif de départ volontaire, sans rechercher si la totalité de ces sommes étaient fiscalement exonérées au regard de l'article 80 duodecies, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.242-1 du code de la sécurité sociale et 80 duodecies du code général des impôts ;

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Rexel France, demanderesse au pourvoi incident,

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré régulier le redressement notifié à la société Rexel France par mise en demeure du 16 décembre 2011 ;

Aux motifs propres que sur la régularité du redressement, par courriel du 27 mai 2010, l'URSSAF du Rhône a invité la société Rexel France à une journée d'information et d'échanges ; que l'invitation jointe à ce message fait état de ce que la matinée du mercredi 30 juin 2010 sera consacrée à la présentation de thèmes généraux, dont une liste est fournie à titre indicatif (actualité législative et réglementaire, principaux motifs de régularisation sur le segment des grandes entreprises, les offres de services, l'accompagnement des entreprises en difficulté par exemple), et informe les entreprises de ce que l'après-midi, sur demande, des rendez-vous individualisés et personnalisés seront organisés sur des sujets plus spécifiques ; que par courriel du 7 juillet 2010 la société Rexel France, faisant suite à l'entretien du 30 juin, a adressé à l'URSSAF « les documents relatifs à notre plan de départ volontaire » ; que par message électronique du 12 juillet 2010 les services de l'URSSAF ont adressé à l'entreprise des éléments de réponse aux deux questions évoquées lors de la réunion du 30 juin concernant les modalités de calcul de la base plafonnée applicable en cas de versement d'une indemnité de non-concurrence et les frais de transport domicile/lieu de travail ; qu'aux termes de ce message, l'URSSAF a également accusé réception des documents transmis et a avisé la société Rexel France qu'elle serait informée de sa position sur le problème posé ; que par courriel du 16 décembre 2010, les services de l'URSSAF ont informé la société Rexel France qu'elle ferait prochainement l'objet d'un contrôle au titre des années 2008,2009 et 2010 ; qu'enfin, par lettre recommandée du 19 janvier 2011, l'entreprise a été informée que les opérations de contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance-chômage et de la garantie des salaires débuteraient le lundi 14 février 2011, et a été invitée à tenir à disposition des contrôleurs les documents nécessaires à la vérification, dont l'ensemble des documents sociaux comprenant notamment les accords d'entreprise en vigueur sur la période contrôlée ; que s'il résulte de ces correspondances que la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire versées en exécution de l'avenant à l'accord de GEPC du 7 octobre 2009 a été abordée à l'occasion de la réunion d'information du 30 juin 2010 et des échanges ultérieurs, il n'est pas démontré que le texte de cet accord a été remis aux services de l'URSSAF antérieurement aux opérations de contrôle ; que ni le courriel de l'entreprise du 7 juillet 2010, ni la réponse de l'URSSAF du 12 juillet, ne dressent en effet la liste des pièces transmises, tandis que, dans son attestation du 11 avril 2012, Mme X..., salariée de la société Rexel France, ne détaille pas davantage les éléments communiqués et fait état des précisions demandées et de ses réponses, qui établissent que l'URSSAF n'était pas en possession de l'accord ; qu'il résulte d'ailleurs explicitement du courrier de cette dernière du 28 février 2011 que c'est seulement au cours des opérations de contrôle qu'elle a obtenu communication de l'avenant du 7 octobre 2009 et a pu en analyser le contenu pour en conclure que les indemnités de départ volontaire devaient être soumises en totalité aux cotisations et contributions de sécurité sociale ; que c'est par conséquent à tort que la société Rexel France prétend que ce chef de redressement a été décidé sur la base d'informations et de documents recueillis antérieurement à la mise en oeuvre de la procédure de contrôle en violation des règles protectrices des droits de la défense édictées par l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, peu important qu'à sa demande, la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire ait été évoquée à l'occasion de la réunion facultative, purement informative, du 30 juin 2010, à laquelle elle a librement participé, puisqu'elle ne démontre nullement que le contrôle a été déclenché après que le principe de la régularisation ait été arrêté au vu de pièces obtenues irrégulièrement avant la mise en oeuvre des opérations de vérification ; que le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a décidé qu'il n'avait pas été porté atteinte au principe du contradictoire à l'occasion des opérations de contrôle portant sur les indemnités de départ ;

Et aux motifs éventuellement adoptés que se fondant sur les échanges informels entre un salarié de la société et un agent de l'URSSAF Rhône Alpes à l'occasion d'une journée d'information des entreprises organisée par l'URSSAF, puis sur les échanges qui se sont poursuivis entre ces deux personnes préalablement au contrôle, la société Rexel France soutient que le contrôle serait irrégulier en ce que ces échanges constitueraient un préalable aux opérations de contrôle de l'entreprise, alors qu'elle n'a pas été avisée lors des discussions avec un agent de l'URSSAF que les éléments échangés seraient ensuite vérifiés par les inspecteurs du recouvrement ; que comme l'a indiqué l'URSSAF dans un courrier du 11 mai 2011 en réponse au courrier de la société du 14 mars 2011, les informations échangées avant la mise en oeuvre du contrôle à la suite de la journée du 30 juin 2010 sont totalement indépendantes du contrôle d'assiette effectué par les inspecteurs du recouvrement à l'occasion du contrôle litigieux ; que la société Rexel France ne démontre pas que la journée d'information, puis les renseignements sollicités par la société et les informations données par l'URSSAF, auraient eu pour objet de cibler les entreprises à contrôler et de préparer le contrôle, ne prouve pas davantage par les pièces produites et notamment les courriers échangés entre les parties, que les informations échangées seraient à l'origine de la décision de l'URSSAF Rhône-Alpes de contrôler cette entreprise ; que la société Rexel France ne saurait, sous couvert d'une contestation de la régularité de la procédure de contrôle, contester le principe du contrôle et la décision de l'URSSAF de procéder à celui-ci, ce qui relève des prérogatives et devoirs et l'organisme social ; que d'une part, les informations données par la société Rexel France à l'URSSAF l'ont été librement, dans le cadre du conseil aux entreprises proposés par l'URSSAF ; que par ailleurs, le contrôle effectué par des inspecteurs du recouvrement ne repose pas sur les échanges intervenus antérieurement au contrôle, mais bien sur les documents fournis par l'entreprise à l'occasion du contrôle ; que la société n'énonce pas de grief sur la régularité de la procédure de contrôle, puisqu'elle ne conteste pas avoir été destinataire de l'avis de contrôle, puis avoir reçu une lettre d'observations à laquelle elle a été en mesure de répondre ; qu'elle ne soulève aucune difficulté quant au déroulement des opérations de contrôle dans l'entreprise, aux conditions dans lesquelles les inspecteurs du recouvrement ont eu accès aux documents de l'entreprise ;

Alors 1°) que les auditions de salariés ne sont possibles qu'au sein de l'entreprise contrôlée ou sur les lieux du travail et dans le cadre d'un contrôle ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations des juges du fond et des faits acquis aux débats qu'un courriel du 27 mai 2010 émanant de l'URSSAF a invité une salariée de la société Rexel France à une journée d'information et d'échanges avec rendez-vous individualisés et personnalisés et qu'après s'est entretenue avec Mme Y..., responsable d'inspection de l'URSSAF, Mme X..., salariée de la société Rexel France, lui a transmis, par courriel du 7 juillet 2010, « les documents relatifs à notre plan de départ volontaire » demandés par cette dernière, dont l'URSSAF a accusé réception le 12 juillet 2010 en réservant sa réponse ; que la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire versées en exécution de l'avenant à l'accord du 7 octobre 2009 a été abordée à l'occasion de la réunion d'information du 30 juin 2010 et des échanges ultérieurs ; que le 16 décembre 2010, la société Rexel France a été informée d'un prochain contrôle ; que le 19 janvier 2011, la société a été informée du début des opérations de contrôle le 14 février suivant ; qu'en ne tirant pas les conséquences de ses propres constatations, dont il résultait que Mme X... avait été auditionnée avant et en dehors de toute procédure de contrôle, en contradiction avec les dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, de sorte que le redressement opéré précisément sur les indemnités de départ volontaire devait être annulé, la cour d'appel a violé le texte précité ;

Alors 2°) que le recueil d'informations effectué en violation de l'article R. 243-59 est sanctionné par la nullité du redressement, sans qu'il y ait lieu de rechercher si l'exploitation des documents ou informations irrégulièrement obtenus a contribué, ou non, de manière directe à la proposition de redressement ; que la cour d'appel a constaté qu'après entretien avec Mme Y..., responsable d'inspection de l'URSSAF, Mme X..., salariée de la société Rexel France, lui a transmis, par courriel du 7 juillet 2010, « les documents relatifs à notre plan de départ volontaire » dont l'URSSAF a accusé réception le 12 juillet 2010 en réservant sa réponse ; que la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire versées en exécution de l'avenant à l'accord du 7 octobre 2009 a été abordée à l'occasion de la réunion d'information du 30 juin 2010 et des échanges ultérieurs ; que le 16 décembre 2010, la société Rexel France a été informée d'un prochain contrôle ; que le 19 janvier 2011, la société a été informée du début des opérations de contrôle le 14 février suivant ; qu'en ne tirant pas les conséquences de ses propres constatations, dont il résultait qu'avant et en dehors de toute procédure de contrôle, l'URSSAF avait recueilli des informations et des documents sur la question de l'assujettissement des indemnités de départ volontaire versées en exécution de l'avenant à l'accord du 7 octobre 2009, en violation de l'article R. 243-59, de sorte que le redressement sur les indemnités de départ volontaire payées par la société Rexel devait être annulé, sans avoir à rechercher si l'exploitation des documents ou informations irrégulièrement obtenus avait contribué, ou non, de manière directe à la proposition de redressement, la cour d'appel a violé ce texte ;

Alors 3°) que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que par lettre du 28 février 2011 en « réponse à la question du sort social des sommes versées en application du plan de départ de volontaire », Mme Y..., responsable d'inspection de l'URSSAF, a rappelé à la société Rexel que « vous nous avez interrogés au sujet du traitement social des indemnités versées à des salariés partis dans le cadre d'un plan de départs de volontaires conclu fin 2009 (…) ; vous avez transmis à l'appui de votre demande l'accord relatif à la mise en place du plan, la convention signée entre l'employeur et une salariée ayant bénéficié du dispositif » ; qu'il ressort sans ambiguïté de ce courrier que l'accord a été transmis par la société à l'appui de sa question sur l'assujettissement des indemnités de départ volontaire, déjà évoquée à l'occasion de la réunion du 30 juin 2010, avec son courriel du 7 juillet 2010, transmettant « les documents relatifs à notre plan de départ volontaire » dont l'URSSAF a accusé réception en réservant sa réponse sur la question, qu'elle a donnée par lettre du 28 février 2011 ; qu'en énonçant qu'il résulte explicitement du courrier de l'URSSAF du 28 février 2011 que c'est seulement au cours des opérations de contrôle qu'elle a obtenu communication de l'avenant du 7 octobre 2009 et a pu en analyser le contenu pour en conclure que les indemnités de départ volontaire devaient être soumises en totalité aux cotisations et contributions de sécurité sociale, la cour d'appel a dénaturé la lettre de l'URSSAF du 28 février 2011 et a ainsi méconnu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

Alors 4°) que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que ni le courriel de l'entreprise du 7 juillet 2010, ni la réponse de l'URSSAF du 12 juillet, ne « dressent la liste des pièces transmises », la cour d'appel a dénaturé le courriel du 7 juillet 2010 ayant pour objet « traitement social de l'indemnité PDVO Rexel » envoyé à l'URSSAF, qui mentionne qu'il comporte en pièces jointes « avenant GPEC départs volontaires.doc ; Convention PDVO.pdf ; bulletin PDVO.pdf », l'URSSAF ayant, dans sa réponse du 12 juillet 2010, accusé réception de la transmission de ces pièces ; que la cour d'appel a ainsi méconnu le principe de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

Alors 5°) qu'en s'étant fondée, pour déclarer régulier le redressement notifié, sur les circonstances inopérantes selon lesquelles la société Rexel France ne démontrait pas que la journée d'information, puis les renseignements sollicités de la société et les informations données par l'URSSAF auraient eu « pour objet » de cibler les entreprises à contrôler et de préparer le contrôle, que le principe du contrôle et la décision de l'URSSAF de procéder à celui-ci relevaient des « prérogatives et devoirs et l'organisme social », que les informations données par la société Rexel France à l'URSSAF l'avaient été « librement », dans le cadre du conseil aux entreprises proposés par l'URSSAF, que la société n'énonçait pas « de grief sur la régularité de la procédure de contrôle » puisqu'elle ne contestait pas avoir été destinataire de l'avis de contrôle, avoir reçu une lettre d'observations à laquelle elle avait été en mesure de répondre, qu'elle ne soulevait aucune difficulté quant au déroulement des opérations de contrôle dans l'entreprise, aux conditions dans lesquelles les inspecteurs du recouvrement ont eu accès aux documents de l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-16830
Date de la décision : 15/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 08 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 jui. 2017, pourvoi n°16-16830


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.16830
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