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31/05/2017 | FRANCE | N°15-29123

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 mai 2017, 15-29123


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant sur renvoi après cassation (Soc. 9 avril 2014, n° 13-12.079), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 2000, en qualité de secrétaire, par le Comité de gestion des locaux collectifs résidentiels (Cogelore), association ayant pour objet la gestion, la coordination et l'animation de locaux résidentiels dans la ville de Rilleux-la-Pape, avec lequel elle avait conclu des conventions de location de locaux ; que l'association a signé, en 1998, avec la commune une conventio

n prévoyant un financement de ses activités ; que Mme X... exerçait...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué statuant sur renvoi après cassation (Soc. 9 avril 2014, n° 13-12.079), que Mme X... a été engagée le 1er juillet 2000, en qualité de secrétaire, par le Comité de gestion des locaux collectifs résidentiels (Cogelore), association ayant pour objet la gestion, la coordination et l'animation de locaux résidentiels dans la ville de Rilleux-la-Pape, avec lequel elle avait conclu des conventions de location de locaux ; que l'association a signé, en 1998, avec la commune une convention prévoyant un financement de ses activités ; que Mme X... exerçait en dernier lieu les fonctions de coordinatrice de projets ; que le 10 septembre 2008, la commune a dénoncé la convention et a cessé de subventionner l'association à compter du 1er avril 2009 ; que l'association a licencié Mme X..., le 29 juillet 2009, pour motif économique ; que celle-ci a saisi la juridiction prud'homale pour que soit jugé que son contrat de travail avait été transféré à la commune, constater sa résiliation aux torts de cette dernière, et obtenir sa condamnation à lui payer diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de la commune qui est préalable :

Vu l'article L. 1224-3 du code du travail ;

Attendu que ce texte ne s'applique qu'en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et poursuit son activité ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement par un autre exploitant ;

Attendu que pour dire que le contrat de travail avait été transféré auprès de la commune, l'arrêt retient que l'objet de l'association était uniquement en lien avec le développement de l'activité sociale, avec pour ce faire une mise à disposition gratuite de locaux par des organismes locatifs, dans l'optique de développer, dans ces locaux collectifs résidentiels, toutes actions visant à favoriser le développement de la vie sociale dans la commune, que la mairie n'établit pas que cette association aurait exercé une réelle fonction de gestion des appartements mis à sa disposition, que la commune ne se limitait pas à subventionner le fonctionnement de l'association mais lui confiait, au travers du financement, la mission d'animation sociale des quartiers, mission également exercée par la commune, que celle-ci dans ses différentes lettres et notamment dans le courrier du 2 mars 2009, a expressément fait référence à la continuation de ces activités sociales de proximité jusqu'alors exercées par l'association et qu'elle a également expressément mentionné, sur les courriers adressés aux salariés dont le contrat de travail était transféré, que ce transfert intervenait dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail, visant la reprise d'activités d'une association par une personne publique ; qu'ainsi la preuve de l'existence d'une entité économique caractérisée par la seule poursuite d'activité à caractère purement social, résulte non seulement de la lecture de l'objet des conventions passées entre l'association et les organismes locatifs, mais également du fait que, dès lors que la mairie a cessé de subventionner les activités sociales menées par l'association, les deux organismes locatifs ont dénoncé eux mêmes les conventions lesquelles se trouvaient vidées d'objet en se référant expressément au désengagement de la commune ;

Qu'en statuant ainsi, sans qu'il résulte de ses constatations que des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité avaient été repris, directement ou indirectement par la commune, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen du pourvoi incident de l'employeur et sur le pourvoi principal de la salariée :

Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur rend sans objet le second moyen du pourvoi incident de l'employeur et le pourvoi principal de la salariée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR "Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a : - dit le licenciement nul, - prononcé la résiliation judiciaire du contrat, - condamné la Commune de Rillieux La Pape à verser à Madame X... un rappel de salaires outre congés payés y afférents (…)" et, statuant à nouveau, d'AVOIR "- dit que le licenciement notifié par l'Association Cogelore à Madame X... est privé d'effet, - dit n'y avoir lieu à prononcé de la résiliation du contrat, - débouté Madame X... de ses demandes en rappel de salaires et congés payés afférents, - condamné la Commune de Rillieux La Pape à verser à Madame X... la somme de 4 158,84 € à titre d'indemnité de préavis, outre congés payés afférents pour 415,88 €" ;

AUX MOTIFS QUE "…c'est à bon droit … que les premiers juges ont retenu que le transfert des activités de l'Association à la Commune caractérisait le transfert d'une entité économique et entraînait en conséquence le transfert du contrat de travail de Madame X..., laquelle avait pour mission, depuis le 1er mars 2007, de coordonner les projets de l'Association ;

QUE du fait du transfert du contrat de travail à la Ville de Rillieux La Pape le 2 avril 2009, l'Association Cogelore a cessé d'être l'employeur de Madame X..., de sorte qu'il convient de dire que le licenciement notifié le 29 juillet 2009 n'est pas nul, mais est privé d'effet ;

QU'il apparaît que Madame X..., au regard de cette situation, pouvait soit exiger la poursuite de son contrat de travail avec la Commune de Rillieux La Pape, et dans cette hypothèse solliciter un rappel de salaires, soit faire prévaloir sa demande d'indemnisation au titre du licenciement privé d'effet ;

QU'il convient de relever en l'espèce qu'elle ne demande plus la poursuite de son contrat de travail, de sorte qu'elle ne peut exiger le paiement de rappel de salaires ;

QUE Madame X... est fondée, alors que le licenciement est privé d'effet, à solliciter, en cause d'appel, le paiement de deux mois de préavis, soit la somme de 4158, 84 euros, outre congés payés afférents pour 415, 88 euros ; que par ailleurs … c'est à bon droit, au visa des dispositions des articles L.1234-9 et R.1234-1 du Code du travail, que les premiers juges ont retenu, concernant l'indemnité de licenciement, qu'il convenait de faire application des dispositions conventionnelles, plus favorables à Madame X..., alors que le transfert de ce contrat ne saurait avoir pour effet de minorer ses droits ; qu'en application des dispositions de la convention collective nationale de l'animation en son article 4.4.3.2, elle est en droit de demander, pour la période du 1er juillet 1999, son ancienneté ayant été reprise dans son contrat de travail, jusqu'au 17 juin 2011, date de la résiliation à retenir, une indemnité équivalente à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les dix premières années, puis à un tiers de mois à compter de la onzième année, soit la somme de 6559, 66 euros ; qu'ayant perçu de l'association, dans le cadre de la rupture, la somme de 5251,30 euros, c'est à bon droit que les premières juges ont retenu qu'elle pouvait prétendre au versement du solde de cette indemnité, soit la somme de 1308, 36 euros ;

QU'au titre des dommages intérêts, et au regard de l'ancienneté de Madame X..., et des circonstances de la rupture du contrat, la somme allouée par les premiers juges apparaît justement réparer le préjudice (…)" (arrêt p.11) ;

1°) ALORS QUE d'une part, à moins que le cessionnaire lui ait proposé, avant la fin de son préavis, de poursuivre sans modification son contrat de travail, le salarié licencié à l'occasion du transfert de l'entité économique autonome dont il relève et dont le licenciement est ainsi dépourvu d'effet, peut, à son choix, demander au cédant qui l'a licencié réparation du préjudice résultant de la rupture ou demander au repreneur la poursuite de son contrat de travail ; que, d'autre part, tout salarié victime de manquements de son employeur à ses obligations suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite de son contrat de travail est en droit d'en solliciter la résiliation judiciaire, qui produira, à la date de son prononcé, les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en ce cas, le contrat de travail se poursuit jusqu'à la date de la décision prononçant cette résiliation ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que Madame X..., victime le 29 juillet 2009 d'un licenciement "sans effet" pour avoir été prononcé par l'Association Cogelore à l'occasion du transfert d'une entité économique autonome, avait choisi de solliciter de la Commune de Rillieux La Pape, cessionnaire, la poursuite de son contrat de travail et le paiement de ses salaires à compter du transfert et, en conséquence du manquement de la collectivité territoriale cessionnaire aux obligations issues du contrat ainsi poursuivi, la résiliation judiciaire de ce contrat prenant effet au jour de la décision judiciaire la prononçant ; qu'en retenant, pour la débouter de sa demande en paiement des salaires de la période comprise entre le transfert et le jugement de résiliation judiciaire, "… qu'elle ne demande plus la poursuite de son contrat de travail, de sorte qu'elle ne peut exiger le paiement de rappels de salaires" (arrêt p.11 alinéa 3) la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a méconnu l'objet de la demande de la salariée et, partant, violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS en outre QUE le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit applicables ; que le salarié licencié à l'occasion du transfert de l'entité économique autonome dont il relève et dont le licenciement est ainsi dépourvu d'effet, peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts du cessionnaire en cas de manquements graves de ce dernier à ses obligations ; que cette résiliation, qui n'intervient pas de plein droit, doit être prononcée par le juge, et produit ses effets à la date de la décision la prononçant dès lors que le salarié est resté, jusqu'à cette date, à la disposition de son employeur ; que ce salarié qui s'est ainsi tenu à la disposition de son employeur peut prétendre au paiement des salaires dus en exécution du contrat en cours jusqu'à la date de la résiliation ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que Madame X..., victime le 29 juillet 2009 d'un licenciement "sans effet" pour avoir été prononcé par l'Association Cogelore à l'occasion du transfert d'une entité économique autonome, a demandé à la Commune de Rillieux La Pape, cessionnaire, la poursuite de son contrat de travail et le paiement de ses salaires à compter du transfert et, en conséquence du manquement de ce cessionnaire aux obligations issues du contrat ainsi poursuivi, a sollicité la résiliation judiciaire de ce contrat à effet du 17 juin 2011, date de la décision judiciaire la prononçant ; qu'en déclarant cependant, dans son dispositif, "n'y avoir lieu à prononcé de la résiliation du contrat" et en déboutant Madame X... de sa demande de rappel de salaires et congés payés après avoir infirmé le jugement "en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat", "dit que le licenciement notifié par l'Association Cogelore à Madame X... est privé d'effet" et fixé au "17 juin 2011 [la] date de la résiliation à retenir" la Cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 12 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS en toute hypothèse QUE le salarié, qui s'est tenu à la disposition de son employeur jusqu'à la rupture de son contrat de travail, est en droit d'exiger de lui le paiement des salaires de son activité ; qu'en déboutant la salariée de sa demande en rappel de salaires après avoir d'une part, dit que le licenciement du 29 juillet 2009 était "sans effet", d'autre part, fixé au 17 juin 2011 la date de résiliation de son contrat de travail, sans rechercher si, pendant cette période, Madame X... s'était tenue à la disposition de la Commune de Rillieux La Pape à qui son contrat avait été transféré, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1224-1 du Code du travail, 1134 du Code civil.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la commune de Rillieux-la-Pape

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé qu'il y avait eu transfert du contrat de travail de Mme X... à la commune de Rillieux-la-Pape en date du 1er avril 2009 par application de l'article L. 1224-3 du Code du travail, dit sans effet le licenciement notifié par l'association Cogelore, mis hors de cause cette association, condamné la commune de Rillieux-la-Pape à verser à la salariée diverses sommes à titre d'indemnité de préavis, rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement, dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L 1224-3 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi du 3 août 2009, précise que lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique, dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à ladite personne publique de proposer aux salariés concernés un contrat de droit public, dont les clauses substantielles reprennent celles initialement prévues dans le contrat conclu avec l'entreprise privée ; que le transfert des contrats de travail suppose en conséquence, au regard de ce texte, que le transfert porte sur une entité économique autonome, et que celle-ci soit poursuivie, ou reprise par la personne publique ; que l'entité économique doit s'entendre d'un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels, permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; qu'il appartient au juge d'apprécier ' in concreto ' l'existence d'une entité économique poursuivant un objectif propre ; qu'en l'espèce il ressort de l'examen des pièces produites, et notamment de ses statuts, que l'association Cogelore avait pour but :

- de gérer les locaux collectifs résidentiels existants, à aménager, à édifier sur le territoire de la commune de Rillieux-la-Pape,
- de favoriser et de coordonner leur utilisation par les usagers, familles, associations groupements sans distinction, dès lors que l'activité recherchée n'a pas de caractère lucratif,
- de développer, à l'appui de ces locaux collectifs résidentiels, toutes actions visant à favoriser le développement de la vie sociale dans la commune ;

Que cette association, pour les besoins de son activité, a régularisé diverses conventions dont notamment :

- le 5 juin 1975 avec Dynacité, pour mise à disposition à titre gratuit de locaux ayant pour destination de répondre aux besoins sociaux et culturels des habitants de la ville de Rillieux-la-Pape,
- le même jour avec l'office départemental HLM de l'Ain, avec également une mise à disposition gratuite de locaux pour répondre aux besoins sociaux et culturels des habitants,
- le 10 décembre 1998 avec la commune de Rillieux-la-Pape, cette convention en son article 1, rappelant que les orientations définies par les statuts de l'association rejoignaient les objectifs de la ville en matière de développement de la participation des habitants à la vie de la cité et de démocratie locale, et prévoyant par ailleurs l'engagement de la commune de contribuer financièrement au fonctionnement de l'association, ce financement donnant lieu à la signature d'une seconde convention le 4 août 2008, en application des dispositions de la loi n°2000 du 12 avril 2000,
- le 2 janvier 2007 avec la société d'économie mixte de construction du département de l'Ain, pour mise à disposition gratuite de locaux communs, avec pour destination de répondre aux besoins sociaux et culturels des habitants ;

que Mme X... a été engagée par l'association Cogelore le 1er juillet 2000, en qualité de secrétaire, et est devenue coordinatrice de projet par avenant signé le 1er mars 2007 ; que par courrier du 10 septembre 2008, la ville de Rillieux-la-Pape a dénoncé la convention la liant à l'association Cogelore, ce qui a conduit la société Semcoda et la société Dynacité à dénoncer à leur tour les conventions de mise à disposition gratuite des locaux, par courriers des 29 septembre 2008 et 6 octobre 2008 ; que les salariés de l'association Cogelore, faisant référence aux comptes rendus de conseils municipaux, ont interpellé la maire de la commune pour connaître leurs conditions de reclassement, par différents courriers des 6 octobre 2008, 16 décembre 2008 et 27 janvier 2009 ; que par réponse du 2 mars 2009, le maire a fait connaître l'importance pour la commune, d'une part de la continuation et du renforcement des actions d'animation sociale de proximité, et d'autre part de la préservation des emplois qui concourent à une activité au service des habitants, indiquant à l'équipe des salariés qu'il les rencontrerait dès lors "que les modalités techniques, juridiques et financières des reprises et transferts auraient été validées" ; que par courrier du 10 mars 2009, le président de l'association Cogelore a avisé la mairie de ce que l'association, du fait de la dénonciation des différentes conventions, allait cesser toute activité le 31 mars suivant ; qu'il rappelait par ailleurs que la mairie s'était engagée à reprendre ou faire reprendre les contrats de travail de chaque salarié, en excluant cependant Mme X..., et qu'elle avait par ailleurs indiqué pouvoir octroyer une quote part de subvention pour permettre de maintenir le règlement des salaires jusqu'à l'aboutissement des négociations, précisant qu'à défaut d'information sur ce dernier point avant le 16 mars, elle n'aurait d'autre choix que d'engager une procédure de licenciement ; que par un second courrier du 16 mars 2009, la commune de Rillieux-la-Pape a confirmé ses précédentes intentions quant à la situation des salariés, lesquels seraient soit affectés sur des services municipaux correspondant à leur mission actuelle, soit transférés ultérieurement auprès d'une autre structure gestionnaire, seule la situation de Mme X... étant tenue à l'écart de ce dispositif ; que par un troisième courrier du 2 avril 2009, la mairie, suite à réunion tenue le 30 mars 2009, a confirmé la volonté de la ville de maintenir et développer l'ensemble des actions de Cogelore, et les modalités de transfert de quatre des salariés, visant expressément les dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail, la mairie prorogeant par ailleurs le versement de subventions à l'association jusqu'au 30 juin 2009, pour permettre le maintien de l'activité, dans l'attente des opérations de transfert de salariés ; que la commune de Rillieux-la-Pape ne saurait soutenir qu'elle n'a pas entendu faire application des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail, et que le visa de cet article dans une délibération du conseil municipal et dans les courriers était purement indicatif, ce en invoquant l'absence de transfert de l'entité économique de l'association ; qu'il apparaît en effet :

- que l'objet de l'association Cogelore était uniquement en lien avec le développement de l'activité sociale, avec pour ce faire une mise à disposition gratuite de locaux par des organismes locatifs, dans l'optique de développer, dans ces locaux collectifs résidentiels, toutes actions visant à favoriser le développement de la vie sociale dans la commune,
- que la commune n'établit nullement que cette association aurait exercé une réelle fonction de gestion des appartements mis à sa disposition,
- que la mairie, par la convention signée le 10 décembre [1998], ne se limitait pas à subventionner le fonctionnement de l'association mais lui confiait, au travers du financement, la mission d'animation sociale des quartiers,
- que l'association exerçait dans ces locaux une activité de médiation et d'animation de quartier, deux des salariés ayant d'ailleurs la qualité d'animateurs, missions d'animation sociale également exercées par la commune,
- que la commune, dans ses différents courriers, et notamment dans le courrier du 2 mars 2009, a expressément fait référence à la continuation de ces activités sociales de proximité jusqu'alors exercées par l'association,
- qu'elle a également expressément mentionné, sur les courriers adressés aux salariés dont le contrat de travail était transféré, que ce transfert intervenait dans le cadre des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail, visant la reprise d'activités d'une association par une personne publique ;

Que la preuve de l'existence d'une entité économique caractérisée par la seule poursuite d'activité à caractère purement social, et non d'une activité de gestion de biens comme tente de le soutenir la commune, résulte non seulement de la lecture de l'objet des conventions passées entre l'association et les organismes locatifs, mais également du fait que, dès lors que la mairie a cessé de subventionner les activités sociales menées par l'association, les deux organismes locatifs ont dénoncé eux-mêmes les conventions lesquelles se trouvaient vidées d'objet en se référant expressément au désengagement de la commune ; que c'est à bon droit en conséquence que les premiers juges ont retenu que le transfert des activités de l'association à la commune caractérisait le transfert d'une entité économique, et entraînait en conséquence le transfert du contrat de travail de Mme X..., laquelle avait pour mission, depuis le 1er mars 2007, de coordonner les projets de l'association ;

ET AUX MOTIFS à les supposer ADOPTES QUE l'article L. 1224-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au moment des faits, dispose notamment que lorsqu'une activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, il appartient à cette personne publique de proposer à ces salariés un contrat de droit public ; qu'en cas de refus des salariés d'accepter les modifications de leur contrat, la personne publique procède à leur licenciement ; que la personne publique reprenant une entité économique, fut-elle à but non lucratif, poursuivant un objectif propre, doit appliquer les dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail (Cass. Soc. 25.06.2002, Bull. civ. V, n° 209, 14 janvier 2003, n° 01-43676, 23 novembre 2005, n0 03-45439, 3 mai 2007, n° 05-45722, 16 décembre 2008, n° 07-43419) ; que le caractère social et non lucratif d'activités développées par une association ne s'oppose pas à la qualification d'une activité économique autonome (Cass. Soc., 23 octobre 2007, n° 06-45289, 10 janvier 2010, n° 08-45002) ; que de l'analyse des pièces versées aux débats, l'association Cogelore assurait la gestion des locaux collectifs de la commune de Rillieux-la-Pape, la coordination de leur utilisation par les usagers et le développement de toutes actions visant à favoriser le développement de la vie sociale dans la commune ; que ces objectifs étaient financés par la commune de Rillieux-la-Pape par le biais de subventions ; que l'association Cogelore ne fonctionnait que par le biais des subventions ; qu'il en résulte que ces activités étaient réalisées pour le compte de la mairie de Rillieux-la-Pape ; que la commune de Rillieux-la-Pape a, sans contestation possible, décidé de récupérer ces activités avec comme objectif non seulement de les maintenir mais également de les développer concourant à une dynamique d'animation sociale de proximité comme en attestent les termes des courriers adressés aux salariées ; qu'il ne fait aucun doute que pour récupérer ces activités, la commune a supprimé les subventions ; que le transfert de ces activités impose à la mairie de Rillieux-la-Pape de mettre en oeuvre les dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail ; que c'est d'ailleurs pour cela que la mairie de Rillieux-la-Pape a adressé des courriers aux salariées faisant état de cette règlementation ; qu'il en résulte que le contrat de travail de Mme Raouda X... a été transféré de manière automatique à compter du 1er avril 2009 à la commune de Rillieux-la-Pape ; qu'à compter de cette date, Mme Raouda X... est salariée de droit privé de la ville de Rillieux-la-Pape ;

1. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier les termes du litige ; qu'en l'espèce, la salariée admettait elle-même que l'association Cogelore avait notamment pour activité, outre l'animation sociale des quartiers, la gestion de locaux collectifs résidentiels (conclusions d'appel de Mme X..., p. 2, § 1 et p. 18 ; arrêt, p. 7, § 7) ; qu'en affirmant que l'objet de l'association Cogelore était uniquement en lien avec le développement de l'activité sociale, que la commune n'établit nullement que cette association aurait exercé une réelle fonction de gestion des appartements mis à sa disposition, et en retenant l'existence d'une « entité économique caractérisée par la seule poursuite d'activité à caractère purement social, et non d'une activité de gestion de biens comme tente de le soutenir la commune », la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2. ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'il ne ressort d'aucune stipulation de la convention conclue le 10 décembre 1998 par la commune de Rillieux-la-Pape et l'association Cogelore que la première aurait confié à la seconde la mission d'animation sociale des quartiers, la convention ne faisant que rappeler les missions déjà existantes de l'association, créée en 1971 ; qu'en affirmant que la mairie, par cette convention, ne se limitait pas à subventionner le fonctionnement de l'association mais lui confiait, au travers du financement, la mission d'animation sociale des quartiers, la cour d'appel a dénaturé la convention litigieuse et violé l'article 1134 du code civil ;

3. ALORS en tout état de cause QUE l'article L. 1224-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que la cour d'appel s'est bornée à relever, par motifs propres et adoptés, que l'association Cogelore exerçait une activité de médiation et d'animation de quartier, missions d'animation sociale également exercées par la commune, que la mairie, par la convention signée le 10 décembre 1998, ne se limitait pas à subventionner le fonctionnement de l'association mais lui confiait, au travers du financement, la mission d'animation sociale des quartiers, que ces activités étaient réalisées pour le compte de la mairie de Rillieux-la-Pape et que la commune avait décidé de récupérer ces activités et fait référence à la continuation et au développement de ces activités sociales dans ses différents courriers ; qu'en statuant par de tels motifs, qui ne caractérisent pas la poursuite ou la reprise effective, par la commune, de l'activité antérieurement exercée par l'association, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1224-1 et L. 1224-3 du code du travail ;

4. ALORS en outre QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, dans ses courriers du 2 avril 2009 adressés aux salariés, la commune de Rillieux-la-Pape fait état de sa volonté de « maintenir et développer l'ensemble des actions de Cogelore concourant à une dynamique d'animation sociale de proximité », sans mentionner qu'elle entend récupérer elle-même ces activités ; qu'en affirmant, par motifs adoptés, que la commune avait « sans contestation possible, décidé de récupérer ces activités (...) comme en attestent les termes des courriers adressés aux salariées », la cour d'appel a dénaturé lesdits courriers (et prod. n°12.13.14) en méconnaissance du principe susvisé ;

5. ALORS subsidiairement QUE le transfert d'une entité économique autonome ne se réalise que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par le nouvel exploitant ; qu'en l'espèce, la commune exposante soulignait qu'elle n'avait pas repris les moyens corporels attachées aux activités de l'association Cogelore, à savoir son local, ses moyens de fonctionnement tels que les fournitures de bureau et surtout les locaux loués par les bailleurs sociaux (conclusions d'appel, p. 10) ; qu'en retenant l'existence d'un transfert d'entité économique autonome, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité avaient été repris par la commune, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1224-1 et L. 1224-3 du code du travail ;

6. ALORS enfin QU' en se fondant sur la mention, dans les courriers adressés aux salariés dont le contrat de travail avait été transféré, de ce que ce transfert intervenait dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail, sans rechercher si cette mention ne révélait pas seulement une application volontaire de ce texte, ainsi qu'il en avait été définitivement jugé s'agissant des deux salariés ayant refusé ledit transfert, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1224-1 et L. 1224-3 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la commune de Rillieux-la-Pape à verser à la salariée une somme à titre de rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement,

AUX MOTIFS PROPRES QUE c'est à bon droit, au visa des dispositions des articles L 1234-9 et R 1234-1 du code du travail, que les premiers juges ont retenu, concernant l'indemnité de licenciement, qu'il convenait de faire application des dispositions conventionnelles, plus favorables à Mme X..., alors que le transfert de ce contrat ne saurait avoir pour effet de minorer ses droits ; qu'en application des dispositions de la convention collective nationale de l'animation en son article 4.4.3.2, elle est en droit de demander, pour la période du 1er juillet 1999, son ancienneté ayant été reprise dans son contrat de travail, jusqu'au 17 juin 2011, date de la résiliation à retenir, une indemnité équivalente à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les dix premières années, puis à un tiers de mois à compter de la onzième année, soit la somme de 6559,66 euros ; qu'ayant perçue de l'association, dans le cadre de la rupture, la somme de 5251,30 euros, c'est à bon droit que les premières juges ont retenu qu'elle pouvait prétendre au versement du solde de cette indemnité, soit la somme de 1308, 36 euros ;

ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE les articles L. 1234-9 et R. 1234-1 et 2 du code du travail rappellent les conditions d'attribution de l'indemnité légale de licenciement à défaut de dispositions conventionnelles plus favorables ; qu'il y a lieu de prendre en compte pour le calcul de l'indemnité conventionnelle, la date du prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail ; que selon le mode de calcul fourni par Mme Raouda X..., elle peut prétendre à la somme de 6559,66 € ; qu'à la lecture de l'attestation Pôle emploi, elle a déjà perçu 5 251,30 € ; qu'il y a lieu de condamner la ville de Rillieux-la-Pape à lui verser un rappel de 1308,36 euros ;

1. ALORS QU'il résulte de l'article L. 1224-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2009-972 du 3 août 2009, que lorsque l'activité d'une entité économique employant des salariés de droit privé est, par transfert de cette entité, reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, la rupture du contrat de travail par la personne publique est régie par les conditions prévues par le code du travail et par leur contrat ; que l'indemnité de licenciement est l'indemnité légale, et non celle résultant de la convention collective applicable au sein de l'entreprise ayant exploité l'entité litigieuse ; qu'en accordant à la salariée un rappel d'indemnité de licenciement sur la base de celle prévue par la convention collective nationale de l'animation, radicalement inapplicable à la commune de Rillieux-la-Pape, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 4.4.3.2 de la convention collective nationale de l'animation ;

2. ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en affirmant qu'il y avait lieu de calculer l'indemnité de licenciement sur la base d'une période allant « jusqu'au 17 juin 2011, date de la résiliation à retenir », quand elle a jugé dans son dispositif qu'il n'y avait pas lieu à résiliation du contrat de travail, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-29123
Date de la décision : 31/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 30 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 mai. 2017, pourvoi n°15-29123


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.29123
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