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30/05/2017 | FRANCE | N°16-85483

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 mai 2017, 16-85483


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Thibaut X...,
- M. Alexandre Y...,
- M. Jean A...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 17 juin 2016, qui, dans la procédure suivie contre eux du chef de violences aggravées, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 avril 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président,

M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chamb...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Thibaut X...,
- M. Alexandre Y...,
- M. Jean A...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 17 juin 2016, qui, dans la procédure suivie contre eux du chef de violences aggravées, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 avril 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de la société civile professionnelle ORTSCHEIDT, de la société civile professionnelle ODENT et POULET, de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
I-Sur le pourvoi formé par M. A... :
Attendu qu'aucun mémoire n'est produit ;
II-Sur les pourvois formés par MM. X... et Y... :
Vu les mémoires, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que MM. Walid B...et Anthony C... ont été frappés à coups de barre de fer lors d'une rixe survenue le 25 septembre 2010 dans un bar-restaurant de Moineville (54) ; que MM. Thibaut X..., Alexandre Y... et Jean A... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel du chef de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) supérieure à huit jours avec arme et en réunion ; que les premiers juges ont relaxé les prévenus et déclaré irrecevables les constitutions de parties civile et l'intervention de la Caisse primaire d'assurance-maladie ; que MM. B... et C..., parties civiles, ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code pénal, 2, 497 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré MM. X... et Y... entièrement et solidairement, avec M. A..., responsables du préjudice subi par M. B..., partie civile, condamné solidairement MM. X..., Y... et A... à payer à cette partie civile la somme de 3 000 euros à titre de provision sur son préjudice corporel et a déclaré MM. X... et Y... entièrement et solidairement responsables du préjudice subi par M. C..., partie civile et a ordonné une expertise médicale des parties civiles ;
" aux motifs que tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; que M. Jean A..., M. Thibaut X... et M. Alexandre Y... n'ont pas contesté leur présence sur les lieux des violences et à l'heure à laquelle elles ont été commises ; qu'ils sont mis en cause comme étant les auteurs de ces violences par les deux victimes et par trois témoins : 1°/ Les déclarations de M. B... : que le 23 novembre 2010, sur présentation d'un tapissage regroupant cinq personnes (dont M. A..., M. X... et M. Y...), M. B... a déclaré reconnaître le n° 1 (M. X...) comme celui qui a ouvert les hostilités en l'insultant puis en lui donnant un coup de poing au visage ; qu'il a ensuite déclaré reconnaître le n° 3 (M. A...) comme étant une des personnes qui l'ont frappé alors qu'il était au sol (D119) ; 2°/ Les déclarations de M. Anthony C... : que le 23 novembre 2010, lors de la présentation à M. C... d'un tapissage du même type (les personnes étant néanmoins présentées dans un ordre différent), celui-ci a déclaré reconnaître comme étant ses agresseurs les n° 2 et 3, soit M. Y... et M. X... ; qu'il a précisé être certain que le n° 3 (M. X...) l'avait frappé à coups de pied et de poing, tandis qu'il était certain à 80-90 % que le n° 2 (M. Y...) était celui qui lui avait porté des coups de barre de fer ; qu'il a ajouté que le n° 1 (M. A...) ne l'avait pas touché, même s'il faisait partie du groupe des agresseurs, précisant même qu'il avait évité à un tiers, M. E...de prendre un coup de barre de fer (D 126) ; 3°/ Les déclarations du témoin M. Sébastien F...: que ce témoin, à qui le tapissage de cinq personnes a été présenté, a déclaré reconnaître formellement MM. X... et A... comme faisant partie du groupe des agresseurs, ajoutant qu'il était possible que M. Y... en fasse également partie ; qu'il n'a toutefois pas pu préciser le rôle de ces protagonistes (D 122) ; 4°/ Les déclarations du témoin M. Loïc E...: que sur présentation d'un tapissage photographique, ce témoin a déclaré reconnaître MM. A... et Y... ; qu'il n'a pas vu M. A... porter de coups, mais déclare être " sûr à 90 % " (sic) que M. Y... (qu'il sait être un copain de M. A...) était celui qui avait la barre de fer lors de la bagarre (D142) ; que par la suite, M. E...a précisé : " Jean (A...) était présent, mais il n'a porté aucun coup ou du moins je ne l'ai pas vu faire ; que concernant la barre, c'était un de ses copains qui la tenait qui s'en est servi ; que j'ai su que cet individu était Y...; que c'est bien ce dernier qui a également tenté de nie frapper avec la barre et c'est Jean qui l'a empêché de le faire (...). Anthony m'a montré une photo de X...et je lui ai confirmé qu'il était bien dans le groupe et que c'était lui qui s'était battu avec Walid " (D434) ; 5°) Les déclarations du témoin M. Billy G...: que sur présentation du tapissage photographique, ce témoin a également identifié M. Y... comme celui qui avait donné des coups de barre de fer : " je reconnais l'individu n° 2 (Alexandre Y...) comme étant celui qui a donné le coup de barre. Je suis quasiment sûr de moi concernant cet individu " (D323) ; qu'il a précisé que cet homme avait donné deux coups avec cette barre (D324) ; qu'il ressort de ces déclarations convergentes que M. Y... est celui qui a porté les coups de barre de fer aux deux victimes ; que M. X... est celui qui leur a porté des coups de pied et de poing et que M. A..., qui faisait partie du groupe des agresseurs, a porté des coups de pied à M. B... ; que par conséquent, il convient d'infirmer le jugement déféré : MM. A..., M. X... et M. Y... seront déclarés entièrement et solidairement responsables du préjudice de M. B..., tandis que seuls MM. X... et Y... seront déclarés solidairement responsables de l'entier préjudice de M. C... ;
" 1°) alors que la partie civile qui forme un appel d'un jugement de relaxe doit démontrer l'existence d'une faute à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; que MM. X... et Y... étaient poursuivis pour violences volontaires en réunion, ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à huit jours, avec menace ou usage d'une arme ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans relever aucun élément établissant que les coups portés par M. Y... et M. X... avaient entrainé, pour les parties civiles, une incapacité totale de travail de plus de huit jours, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;
" 2°) alors que le juge pénal saisi après une décision de relaxe de l'action civile ne peut allouer des réparations sans constater l'existence d'une faute à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand il résultait de ses constatations que M. X..., poursuivi pour violences volontaires en réunion, ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à huit jours, avec menace ou usage d'une arme, n'avait pas porté des coups à l'aide d'une barre de fer aux deux victimes, de sorte que l'existence d'une faute à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite n'était pas établie à son encontre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Attendu que, pour caractériser la faute civile des prévenus, l'arrêt énonce qu'il résulte des dépositions convergentes des témoins que M. Y... a porté des coups de barre de fer aux deux victimes, que M. X... est celui qui leur a porté des coups de pied et de poing et que M. A..., qui faisait partie du groupe des agresseurs, a porté des coups de pied à M. B... ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a caractérisé, dans le cadre d'une scène unique de violences, la faute civile des prévenus à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 376-1 et 455-2 du code de la sécurité sociale et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a ordonné, avant dire droit, une expertise corporelle de M. C... et M. B... et a accordé à M. B... civile une provision de 3 000 euros à valoir sur son préjudice corporel ;
" aux motifs que sur les provisions et expertises sollicitées ; que M. C... a déjà bénéficié d'une expertise médicale au cours de l'instance qu'il a engagée devant la CIVI ; que, toutefois, cette expertise médicale a été confiée à un chirurgien dentiste et la victime fait valoir que l'expertise ne prend donc pas en compte la totalité de son préjudice, notamment en ce qui concerne ses séquelles psychologiques et professionnelles qu'il convient donc de faire droit à cette demande de nouvelle expertise ; qu'en revanche, la demande de provision n'apparaît pas fondée dans la mesure où il s'est déjà vu allouer par le Fonds de garantie une indemnité de 21 880, 23 euros suite au constat d'accord qui a été conclu avec cet organisme les 13 et 26 juin 2013 ; qu'il sera donc débouté de sa demande de provision ; que M. B... est bien fondé à solliciter la désignation d'un expert médical pour voir évaluer son préjudice corporel ; qu'au vu de la gravité des blessures occasionnées par les violences subies, sa demande de provision est bien fondée ; que, par conséquent, MM. A..., X... et Y... seront solidairement condamnés à lui payer une indemnité provisionnelle de 3 000 euros ;
" alors que selon l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, qui est d'ordre public, la mise en cause de l'organisme de sécurité sociale s'impose à peine d'irrecevabilité de la demande en réparation de la partie civile ; que ce texte s'applique en première instance, mais également devant les juges du second degré, de sorte qu'en cause d'appel, la victime doit appeler la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée en déclaration de jugement commun ; que la caisse primaire d'assurance maladie qui, devant le tribunal correctionnel avait été appelée en déclaration de jugement commun par les parties civiles, ne l'a pas été en cause d'appel ; qu'en ordonnant, avant dire droit sur la demande d'indemnisation du préjudice corporel formulée par les parties civiles, une expertise médicale et en condamnant solidairement MM. X... et Y..., avec M. A..., à verser à M. B... une indemnité provisionnelle de 3. 000 euros à valoir sur son préjudice corporel, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la mise en cause de l'organisme de sécurité sociale s'impose à peine d'irrecevabilité de la demande en réparation de la partie civile ;
Attendu que la cour d'appel, avant-dire droit sur la demande de réparation du préjudice corporel subi par MM. B... et C..., parties civiles, qui a déclaré MM. Y..., X... et A... entièrement et solidairement responsables du préjudice subi par M. B... et MM. X... et Y... entièrement et solidairement responsables du préjudice subi par M. C..., a ordonné une expertise médicale des deux victimes et a condamné les prévenus à verser une indemnité provisionnelle à M. B... sans que les caisses de sécurité sociale auxquelles étaient affiliées les victimes aient été appelées en déclaration d'arrêt commun ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Et sur le troisième moyen pris de la violation des articles 475-1 et 480-1 du code de procédure, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné solidairement MM. X... et Y..., avec M. A..., à payer à M. B... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale et solidairement MM. X... et Y... à payer à M. C... la somme de 2 000 euros sur le fondement du même texte ;
" aux motifs qu'il est équitable que les parties civiles soient indemnisées de leurs frais de justice ; que, par conséquent, MM. A..., X... et Y... seront solidairement condamnés à payer à M. B... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que MM. X... et Y... seront condamnés à payer à M. C... la même indemnité sur le même fondement ;
" alors que la solidarité édictée par l'article 480-1 du code de procédure pénale ne s'applique pas aux sommes allouées à la partie civile au titre de l'article 475-1 du même code ; qu'en condamnant solidairement MM. X... et Y..., avec M. A..., à payer à M. B..., partie civile, une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale et solidairement MM. X... et Y... à payer à M. C... une même somme sur le même fondement, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen " ;
Vu les article 475-1 et 480-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que la solidarité édictée par le second de ces textes pour les restitutions et dommages-intérêts n'est pas applicable au paiement des frais non recouvrables ;
Attendu que l'arrêt condamne solidairement les prévenus à payer la somme allouée aux différentes parties civiles au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est à nouveau encourue et qu'en raison de l'indivisibilité des faits elle doit s'étendre à l'ensemble des demandeurs aux pourvois ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 17 juin 2016, mais en ses seules dispositions relatives à la responsabilité du préjudice, aux expertises, au versement d'une provision et de sommes sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
DIT que la cassation sera étendue à M. Jean A...;
Et, pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Metz, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente mai deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-85483
Date de la décision : 30/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 17 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 mai. 2017, pourvoi n°16-85483


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : SCP Odent et Poulet, SCP Ortscheidt, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.85483
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