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23/05/2017 | FRANCE | N°15-29194

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 mai 2017, 15-29194


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 décembre 2014), que Mme X...a été engagée le 28 janvier 2002 en qualité de vendeuse par M. Y..., exploitant une boulangerie à Lormont, qui a cédé son fonds de commerce à la société Mada 2 en février 2003, laquelle exploitait déjà deux autres boulangeries ; que cette dernière a elle-même cédé le 27 novembre 2009 la boulangerie de Lormont à la société la Boulange ; qu'interrompant son congé parental d'éducation, Mme X... a informé cette dernière de son

intention de reprendre son activité ; qu'estimant que la cession du fonds de com...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 décembre 2014), que Mme X...a été engagée le 28 janvier 2002 en qualité de vendeuse par M. Y..., exploitant une boulangerie à Lormont, qui a cédé son fonds de commerce à la société Mada 2 en février 2003, laquelle exploitait déjà deux autres boulangeries ; que cette dernière a elle-même cédé le 27 novembre 2009 la boulangerie de Lormont à la société la Boulange ; qu'interrompant son congé parental d'éducation, Mme X... a informé cette dernière de son intention de reprendre son activité ; qu'estimant que la cession du fonds de commerce de la boulangerie de Lormont n'avait pas entraîné le transfert de son contrat de travail, celle-ci ne lui a pas répondu ; que la société Mada 2 lui a indiqué qu'elle pouvait reprendre son activité dans la boulangerie de Cadaujac et qu'elle était restée dans ses effectifs ; que par lettre du 4 mars 2011, la salariée a notifié à la société la Boulange qu'elle prenait acte de la rupture de son contrat de travail ; que le 28 septembre 2011, elle a saisi la juridiction prud'homale en demande de reconnaissance du transfert de son contrat de travail, en requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en demandes indemnitaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de juger que son contrat de travail n'avait pas été transféré à la société La Boulange et de la débouter de toutes ses demandes dirigées contre celle-ci et la société Mada 2, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsqu'un salarié est affecté fût-ce partiellement à l'activité d'une entité économique autonome, son contrat de travail est transféré au cessionnaire de cette activité pour la partie correspondante ; que l'arrêt constate que Mme X... était affectée au sein des trois boulangeries de la société Mada 2, en ce compris celle de Lormont cédée à la société La Boulange ; qu'en excluant néanmoins tout transfert de son contrat de travail à cette société, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2°/ que l'ensemble du contrat de travail est transféré au cessionnaire d'une entité économique autonome, lorsque le salarié est affecté à titre principal à cette entité, peu important que cette affectation ne soit pas exclusive ou que le lieu de travail ne soit pas contractualisé ; que devant la cour d'appel, Mme X... a fait valoir qu'elle travaillait à titre principal au sein de la boulangerie de Lormont, reprise par la société La Boulange, et que ses affectations au sein des autres boulangeries de la société Mada 2 situées à Cadaujac et à Latresne avaient un caractère occasionnel, ce dont il résulte que l'ensemble de son contrat de travail avait été transféré à la société La Boulange ; qu'en se bornant à constater, pour écarter le transfert du contrat de travail de Mme X... à la société La Boulange, que le rattachement de la salariée à la boulangerie reprise par cette société n'était pas exclusif, qu'elle travaillait également au sein des autres boulangeries de la société Mada 2, et que son lieu de travail n'était pas contractualisé, sans vérifier, comme elle y était invitée, si le contrat de travail de Mme X... ne s'exécutait pas pour l'essentiel au sein de la boulangerie reprise par la société la Boulange, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'ayant fait ressortir, qu'à la suite de la première cession du fonds de commerce de la boulangerie de Lormont à la société Mada 2, cette dernière avait pu, sans modifier le contrat de travail de la salariée qui ne comportait pas de clause d'affectation exclusive, modifier le lieu d'exécution du contrat de celle-ci au sein d'un même secteur géographique sans que l'essentiel de l'activité de la salariée ne soit fixé sur le site de Lormont, la cour d'appel a pu en déduire que le contrat de travail de la salariée n'avait pas été transféré à la société La Boulange qui avait acquis auprès de la société Mada 2 le seul fonds de commerce de la boulangerie de Lormont ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de juger que son contrat de travail n'avait pas été transféré à la société La Boulange et de la débouter de toutes ses demandes dirigées contre les sociétés La Boulange et Mada 2 alors, selon le moyen, que, comme le relevait le jugement infirmé dont Mme X... demandait expressément confirmation sur ce point, la société Mada 2 avait omis de signaler à son successeur dans le fonds de Lormont que Mme X... avait un contrat de travail en cours s'exerçant au sein de cet établissement, et que cette omission fautive avait causé un préjudice à Mme X..., obligée de se faire connaître et de revendiquer ses droits ; qu'en affirmant qu'aucune faute n'avait été commise par la société Mada 2, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Mada 2 estimait que la salariée faisait toujours partie de ses effectifs, la cour d'appel a pu retenir qu'aucune faute ne lui était imputable lors de la cession du fonds de commerce de la boulangerie de Lormont ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Geerssen, conseiller le plus ancien en ayant délibéré conformément à l'article 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-trois mai deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que le contrat de travail de Mme X... n'avait pas été transféré à la société La Boulange et d'avoir débouté Mme X... de toutes ses demandes dirigées contre la société La Boulange et la société Mada 2 ;

AUX MOTIFS QUE l'employeur peut, dans le cadre de son pouvoir de direction et dans l'intérêt de l'entreprise, modifier le lieu d'exécution du contrat de travail, sauf s'il est contractualisé et à condition que le nouveau lieu de travail se trouve dans un même secteur géographique ; que dans ce cas, la modification ne touche que les conditions de travail du salarié et peut lui être imposée par l'employeur sans son accord ; qu'en l'espèce, Mme X... a été embauchée en 2002 par M. Y... qui alors n'exploitait qu'un unique fonds, la Boulangerie de Lormont et sans qu'aucune disposition contractuelle ne lie les parties sur le lieu d'exécution de la prestation de travail ; que suite au rachat du fonds de commerce de M. Y... par la SARL Mada 2, le contrat de travail de Mme X... a été transféré à son nouvel employeur qui était également propriétaire de deux autres boulangeries situées à Latresne et à Cadaujac ; que Mme X... ne conteste pas avoir été amenée à travailler auprès des autres boulangeries pour remplacer par exemple un salarié absent mais elle soutient que son activité principale s'exerçait sur Lormont et qu'en conséquence son contrat de travail a été transféré à la SARL La Boulange ; que l'attestation de sa mère démontre que dès le rachat (2003/ 2004), son nouvel employeur a affecté Mme X... sur le site de Cadaujac de façon occasionnelle ; que la SARL Mada 2 verse aux débats deux attestations de collègues de Mme X... ; que Mme Z...déclare avoir travaillé au magasin de Latresne avec Mme X... et M. A...déclare avoir travaillé avec Mme X... à Lormont, Cadaujac et Latresne ; que par courrier du 23 mars 2011, la SARL Mada 2 a informé Mme X... de son affectation sur le site de Cadaujac lors de la reprise de son activité ; que les pièces produites aux débats permettent de constater que Cadaujac est à 17 km de Lormont ce qui représente environ 24 minutes de voiture ; qu'au jour de la reprise, Mme X... avait déménagé à Saint-Loubès ; que la distance Saint-Loubès/ Lormont est de 13 km soit environ 20 minutes de voiture ; que la distance Saint-Loubès/ Cadaujac est de 28 km soit environ 34 mn de voiture ; que la cour observe que la différence de distance entre le domicile de Mme X... et Lormont d'une part, et de Cadaujac d'autre part est faible et considère en conséquence que Lormont et Cadaujac sont deux communes situées dans un même secteur géographique ; que dès lors, la SARL Mada 2 pouvait imposer à Mme X... cette modification de son lieu de travail ; qu'en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel transféré ; qu'ainsi, en cas de transfert partiel d'activité, le salarié doit passer au service du cessionnaire pour la partie de l'activité qu'il consacrait au secteur cédé ; que cependant, dès lors que le contrat de travail s'exécute pour l'essentiel dans le secteur d'activité cédé, et même si le salarié a continué à exercer des tâches dans un secteur non encore exploité par la société cédante, son contrat de travail est intégralement transféré avec le secteur d'activité cédé où il exécute l'essentiel de son activité ; qu'a contrario, le contrat de travail n'est pas transféré dès lors que le salarié n'exécute pas l'essentiel de son activité dans le secteur transféré et si, sans modifier son contrat de travail, le cédant recentre son activité dans le secteur d'activité qu'il conserve ; que la suspension du contrat de travail du fait du congé parental d'éducation est sans effet sur le transfert de plein droit résultant de la modification de la situation de l'employeur ; que les contrats de travail cédés sont les contrats des salariés affectés à l'unité cédée ; que si l'employeur ne peut, par convention, faire obstacle à l'application de plein droit de l'article L. 1224-1 du code du travail, le salarié ne peut à cette occasion faire le choix de son lieu au mépris du pouvoir de direction de l'employeur ; qu'en l'espèce, Mme X... a été embauchée en 2002 par M. Y..., n'a alors travaillé que sur le site de Lormont et ce jusqu'au rachat de la boulangerie par la SARL Mada 2 ; qu'à compter du rachat de la boulangerie par la SARL Mada 2, les attestations respectives des parties démontrent que Mme X... n'était pas exclusivement rattachée à la boulangerie de Lormont, mais, comme ses collègues, amenée à travailler sur les trois sites de l'employeur ; que par courrier du 18 mars 2011, Mme X... a demandé à la SARL Mada 2 de la reprendre au sein de ses effectifs ; que par courrier du 23 mars 2011, cette dernière lui a répondu qu'elle faisait toujours partie de ses effectifs, qu'elle était invitée à reprendre son activité professionnelle dès le terme de son congé parental d'éducation et lui a précisé que cette reprise s'effectuerait sur le site de Cadaujac ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... n'était pas affectée spécialement à la boulangerie de Lormont, qu'il n'y a pas eu de contractualisation du lieu de travail, que dans le cadre de son pouvoir de direction, la SARL Mada 2 a affecté Mme X... sur le site de Cadaujac et qu'en conséquence, la cession du fonds de Lormont de la SARL Mada 2 à la SARL La Boulange ne pouvait entraîner le transfert de plein droit de son contrat de travail ; (…) qu'en l'absence de toute faute imputable à la Sarl Mada 2, la Cour réforme la décision du Conseil en ce qu'elle a condamné cette dernière à payer à Mme X... des dommages-intérêts ;

1. ALORS QUE lorsqu'un salarié est affecté fût-ce partiellement à l'activité d'une entité économique autonome, son contrat de travail est transféré au cessionnaire de cette activité pour la partie correspondante ; que l'arrêt constate que Mme X... était affectée au sein des trois boulangeries de la société Mada 2, en ce compris celle de Lormont cédée à la société La Boulange ; qu'en excluant néanmoins tout transfert de son contrat de travail à cette société, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;

2. ALORS QUE l'ensemble du contrat de travail est transféré au cessionnaire d'une entité économique autonome, lorsque le salarié est affecté à titre principal à cette entité, peu important que cette affectation ne soit pas exclusive ou que le lieu de travail ne soit pas contractualisé ; que devant la cour d'appel, Mme X... a fait valoir qu'elle travaillait à titre principal au sein de la boulangerie de Lormont, reprise par la société La Boulange, et que ses affectations au sein des autres boulangeries de la société Mada 2 situées à Cadaujac et à Latresne avaient un caractère occasionnel, ce dont il résulte que l'ensemble de son contrat de travail avait été transféré à la société La Boulange (conclusions d'appel, p. 9 et 10) ; qu'en se bornant à constater, pour écarter le transfert du contrat de travail de Mme X... à la société La Boulange, que le rattachement de la salariée à la boulangerie reprise par cette société n'était pas exclusif, qu'elle travaillait également au sein des autres boulangeries de la société Mada 2, et que son lieu de travail n'était pas contractualisé, sans vérifier, comme elle y était invitée, si le contrat de travail de Mme X... ne s'exécutait pas pour l'essentiel au sein de la boulangerie reprise par la société la Boulange, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir jugé que le contrat de travail de Mme X... n'avait pas été transféré à la société La Boulange et d'avoir débouté Mme X... de toutes ses demandes dirigées contre la société La Boulange et la société Mada 2 ;

AUX MOTIFS QU'il résulte de ce qui précède que Mme X... n'était pas affectée spécialement à la boulangerie de Lormont, qu'il n'y a pas eu de contractualisation du lieu de travail, que dans le cadre de son pouvoir de direction, la SARL Mada 2 a affecté Mme X... sur le site de Cadaujac et qu'en conséquence, la cession du fonds de Lormont de la SARL Mada 2 à la SARL La Boulange ne pouvait entraîner le transfert de plein droit de son contrat de travail ; (…) qu'en l'absence de toute faute imputable à la Sarl Mada 2, la Cour réforme la décision du Conseil en ce qu'elle a condamné cette dernière à payer à Mme X... des dommages-intérêts ;

ALORS QUE, comme le relevait le jugement infirmé dont Mme X... demandait expressément confirmation sur ce point, la société Mada 2 avait omis de signaler à son successeur dans le fonds de Lormont que Mme X... avait un contrat de travail en cours s'exerçant au sein de cet établissement, et que cette omission fautive avait causé un préjudice à Mme X..., obligée de se faire connaître et de revendiquer ses droits ; qu'en affirmant qu'aucune faute n'avait été commise par la société Mada 2, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 17 décembre 2014


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 23 mai. 2017, pourvoi n°15-29194

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Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Le Bret-Desaché, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 23/05/2017
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15-29194
Numéro NOR : JURITEXT000034814341 ?
Numéro d'affaire : 15-29194
Numéro de décision : 51700859
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2017-05-23;15.29194 ?
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