LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 23 avril 2015), que la société Davigel a confié à la société Hanjin Shipping Co Ltd (la société Hanjin Shipping) le transport maritime, depuis la Thaïlande jusqu'en France, de marchandises surgelées ; qu'à l'arrivée, un expert mandaté par la société Davigel a conclu à une rupture de la chaîne du froid ; qu'après la vente en sauvetage des marchandises, la société Davigel et son assureur, la société Zurich Insurance, ont assigné la société Hanjin Shipping en réparation de leurs préjudices ;
Attendu que la société Hanjin Shipping fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; que les dernières conclusions d'appel de la société Hanjin Shipping, comprenant notamment réplique aux écritures de la société Davigel et de la compagnie Zurich Insurance en particulier sur l'interprétation à donner à l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 14 octobre 2014, ont été déposées et notifiées le 4 février 2015 ; qu'en se prononçant dès lors au visa des conclusions de la société Hanjin Shipping du 29 août 2014, sans aucunement mentionner les moyens et réfutations formulés dans les dernières conclusions de la société Hanjin Shipping, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en l'absence de constat contradictoire de l'état de la marchandise ou d'un avis écrit des dommages, le transporteur maritime bénéficie de la présomption de livraison conforme de la marchandise ; que pour renverser cette présomption, il appartient au destinataire ou à l'assureur de celui-ci de démontrer que les dommages allégués sont survenus « pendant le temps du transport » ; qu'en considérant que la société Davigel et son assureur avaient « détruit » la présomption de livraison conforme bénéficiant à la société Hanjin Shipping en l'absence de réserve émise à la réception des marchandises, dans la mesure où il était établi que « les dommages existaient à la livraison et qu'ils sont antérieurs à celle-ci », cependant qu'il ne suffisait pas au destinataire d'établir que l'avarie alléguée était antérieure à la livraison pour que soit écartée la présomption de livraison conforme, puisqu'il devait de surcroît démontrer que le dommage s'était effectivement réalisé « pendant le temps du transport », la cour d'appel a violé l'article 3 § 6 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée ;
3°/ que le droit à réparation du destinataire des marchandises est en toute hypothèse égal au montant du préjudice effectivement subi ; que si la rupture de la chaîne du froid constitue une faute imputable au transporteur, lorsqu'il en est à l'origine, aucune indemnité n'est due au propriétaire lorsque cette faute n'a généré aucun préjudice ; qu'en condamnant la société Hanjin Shipping à indemniser la société Davigel et la société Zurich Insurance au titre d'une rupture de la chaîne du froid, tout en constatant que cette faute, à la supposer avérée, n'avait causé aucun préjudice à la société Davigel, puisque « les analyses réalisées ont montré que les marchandises avaient une qualité micro-biologique satisfaisante au regard de la réglementation », de sorte que les marchandises en cause auraient pu être commercialisées dans des conditions normales, la cour d'appel, qui a ainsi indemnisé un dommage inexistant, a violé l'article 4 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en dépit de la référence erronée à des conclusions de la société Hanjin Shipping du 29 août 2014, quand ses dernières conclusions étaient du 4 février 2015, la cour d'appel s'est prononcée sur tous les moyens exposés dans ces dernières conclusions ;
Et attendu, en second lieu, qu'en l'absence d'un constat contradictoire de l'état des marchandises à leur arrivée ou de réserves écrites, il appartient au demandeur à l'action en responsabilité contre le transporteur maritime, lequel bénéficie dans ce cas de la présomption de livraison conforme, de rapporter la preuve que la marchandise n'a pas été délivrée telle que décrite au connaissement ; qu'ayant rappelé que le connaissement mentionnait que les marchandises surgelées devaient voyager à une température de -18° C, l'arrêt relève que l'expert a constaté du givre à l'intérieur des sacs, des boîtes ou des films plastiques renfermant les produits, un écoulement de liquide recongelé et une adhérence de certains des produits aux parois du contenant et qu'il en a conclu que les produits avaient été exposés à une hausse de température pendant la phase de transport ; que l'arrêt relève encore que, pendant le trajet, la société Hanjin Shipping est intervenue de sa propre initiative sur la marchandise en la transférant du conteneur initial dans deux autres conteneurs, compte tenu d'un incident de température qu'elle avait constaté au cours du trajet ; que l'arrêt retient que cette circonstance correspond à une situation dans laquelle, au moins temporairement, la température constante de -18° C, n'a pas été maintenue ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que les marchandises n'avaient pas été délivrées telles qu'elles étaient décrites dans le connaissement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Hanjin Shipping Co Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Davigel et à la société Zurich Insurance Plc la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix-sept.
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 23 avril 2015), que la société Davigel a confié à la société Hanjin Shipping Co Ltd (la société Hanjin Shipping) le transport maritime, depuis la Thaïlande jusqu'en France, de marchandises surgelées ; qu'à l'arrivée, un expert mandaté par la société Davigel a conclu à une rupture de la chaîne du froid ; qu'après la vente en sauvetage des marchandises, la société Davigel et son assureur, la société Zurich Insurance, ont assigné la société Hanjin Shipping en réparation de leurs préjudices ;
Attendu que la société Hanjin Shipping fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; que les dernières conclusions d'appel de la société Hanjin Shipping, comprenant notamment réplique aux écritures de la société Davigel et de la compagnie Zurich Insurance en particulier sur l'interprétation à donner à l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 14 octobre 2014, ont été déposées et notifiées le 4 février 2015 ; qu'en se prononçant dès lors au visa des conclusions de la société Hanjin Shipping du 29 août 2014, sans aucunement mentionner les moyens et réfutations formulés dans les dernières conclusions de la société Hanjin Shipping, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en l'absence de constat contradictoire de l'état de la marchandise ou d'un avis écrit des dommages, le transporteur maritime bénéficie de la présomption de livraison conforme de la marchandise ; que pour renverser cette présomption, il appartient au destinataire ou à l'assureur de celui-ci de démontrer que les dommages allégués sont survenus « pendant le temps du transport » ; qu'en considérant que la société Davigel et son assureur avaient « détruit » la présomption de livraison conforme bénéficiant à la société Hanjin Shipping en l'absence de réserve émise à la réception des marchandises, dans la mesure où il était établi que « les dommages existaient à la livraison et qu'ils sont antérieurs à celle-ci », cependant qu'il ne suffisait pas au destinataire d'établir que l'avarie alléguée était antérieure à la livraison pour que soit écartée la présomption de livraison conforme, puisqu'il devait de surcroît démontrer que le dommage s'était effectivement réalisé « pendant le temps du transport », la cour d'appel a violé l'article 3 § 6 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée ;
3°/ que le droit à réparation du destinataire des marchandises est en toute hypothèse égal au montant du préjudice effectivement subi ; que si la rupture de la chaîne du froid constitue une faute imputable au transporteur, lorsqu'il en est à l'origine, aucune indemnité n'est due au propriétaire lorsque cette faute n'a généré aucun préjudice ; qu'en condamnant la société Hanjin Shipping à indemniser la société Davigel et la société Zurich Insurance au titre d'une rupture de la chaîne du froid, tout en constatant que cette faute, à la supposer avérée, n'avait causé aucun préjudice à la société Davigel, puisque « les analyses réalisées ont montré que les marchandises avaient une qualité micro-biologique satisfaisante au regard de la réglementation », de sorte que les marchandises en cause auraient pu être commercialisées dans des conditions normales, la cour d'appel, qui a ainsi indemnisé un dommage inexistant, a violé l'article 4 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en dépit de la référence erronée à des conclusions de la société Hanjin Shipping du 29 août 2014, quand ses dernières conclusions étaient du 4 février 2015, la cour d'appel s'est prononcée sur tous les moyens exposés dans ces dernières conclusions ;
Et attendu, en second lieu, qu'en l'absence d'un constat contradictoire de l'état des marchandises à leur arrivée ou de réserves écrites, il appartient au demandeur à l'action en responsabilité contre le transporteur maritime, lequel bénéficie dans ce cas de la présomption de livraison conforme, de rapporter la preuve que la marchandise n'a pas été délivrée telle que décrite au connaissement ; qu'ayant rappelé que le connaissement mentionnait que les marchandises surgelées devaient voyager à une température de -18° C, l'arrêt relève que l'expert a constaté du givre à l'intérieur des sacs, des boîtes ou des films plastiques renfermant les produits, un écoulement de liquide recongelé et une adhérence de certains des produits aux parois du contenant et qu'il en a conclu que les produits avaient été exposés à une hausse de température pendant la phase de transport ; que l'arrêt relève encore que, pendant le trajet, la société Hanjin Shipping est intervenue de sa propre initiative sur la marchandise en la transférant du conteneur initial dans deux autres conteneurs, compte tenu d'un incident de température qu'elle avait constaté au cours du trajet ; que l'arrêt retient que cette circonstance correspond à une situation dans laquelle, au moins temporairement, la température constante de - 18° C, n'a pas été maintenue ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que les marchandises n'avaient pas été délivrées telles qu'elles étaient décrites dans le connaissement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le pourvoi ;
Condamne la société Hanjin Shipping Co Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Davigel et à la société Zurich Insurance Plc la somme globale de 3 000 euros ;
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Hanjin Shipping Co Ltd
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Hanjin Shipping à payer à la société Zurich Insurance la somme de 94.553,06 € et celle de 2.097,20 € avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2012 et capitalisation des intérêts, et à la société Davigel la somme de 16.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2012 et capitalisation des intérêts, outre diverses sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE sur les dispositions applicables au contrat de transport conclu entre la société Davigel et la société Hanjin Shipping, en vertu des dispositions des articles 3, 4, et 6 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée, dont l'application en l'espèce n'est pas contestée : - concernant le chargement de la marchandise : le connaissement sans réserves de la part du transporteur « vaut présomption, sauf preuve contraire, de la réception par le transporteur des marchandises telles qu'elles y sont décrites » (article 3-4) ; - concernant la livraison de la marchandise : « à moins qu'un avis de perte ou dommages ne soit donné par écrit au transporteur au moment de l'enlèvement des marchandises ou de leur remise sous la garde de la personne ayant droit à la délivrance sous l'empire du contrat de transport, cet enlèvement constituera, jusqu'à la preuve du contraire, une présomption que les marchandises ont été délivrées par le transporteur telles qu'elles sont décrites dans le connaissement » (article 6 alinéa 1) ; - si les pertes ou dommages ne sont pas apparents, l'avis doit être donné dans les trois jours de la délivrance (article 6 alinéa 2) ; qu'il en résulte que : a) en cas de réserves valides, émises dans le délai légal, la présomption de livraison conforme ne joue pas, - il appartient alors au transporteur maritime de prouver l'existence d'un cas excepté de responsabilité ; b) en l'absence, au contraire, de réserves sur l'état de la marchandise, émises dans le délai légal, le transporteur maritime bénéficie d'une présomption de livraison conforme, - il appartient en ce cas au destinataire d'apporter la preuve contraire, - celle- ci n'a pas pour objet l'existence d'une faute du transporteur mais par référence aux termes employés par l'article 4-2 susvisé : le fait que les marchandises n'ont pas été délivrées par le transporteur telles qu'elles ont été décrites au connaissement, étant précisé que le destinataire doit établir à ce titre que les dommages sont antérieurs à la livraison (Cass. com. 5 mars 2014) ; c) dans l'hypothèse où cette preuve est rapportée, le transporteur maritime ne peut s'exonérer qu'en prouvant l'existence d'un cas excepté de responsabilité ; - la faute prouvée du chargeur en lien direct et certain avec les dommages à la marchandise constitue à cet égard un cas excepté de responsabilité ;
AUX MOTIFS ENCORE QUE, sur la présomption de réception conforme au moment du chargement, il n'est pas contesté que la société Hanjin Shipping a reçu la marchandise sans émettre de réserves lors du chargement ; qu'en conséquence en l'absence de réserves de sa part lors du chargement de la marchandise, la société Hanjin Shipping, conformément à l'article 3-4 susvisé, est présumée avoir reçu celle-ci en bon état ;
AUX MOTIFS EN OUTRE QUE, sur la présomption de livraison conforme, la présomption de responsabilité qui pèse de plein droit sur le transporteur est subordonnée à la formulation de réserves dans le délai légal de trois jours à compter de la date de la livraison de la marchandise ; que la livraison se définit comme la mise à disposition juridique et matérielle de la cargaison ; qu'elle a lieu dès la remise des conteneurs au destinataire et non à la date du dépotage des conteneurs, le destinataire disposant alors d'un délai de trois jours pour formuler, le cas échéant, des réserves ; que les réserves formulées ne peuvent être retenues que si elles sont précises et motivées et qu'elle mentionnent la nature des dommages que le destinataire de la marchandise entend invoquer à l'encontre du transporteur maritime ; qu'en l'espèce, il résulte des bons de sortie du Terminal en date du 27 septembre 2011 que les conteneurs 56 / 6 et 62 / 2 ont été livrés le 30 septembre 2011 au représentant du destinataire ; que dans le délai légal, le destinataire de la marchandise a formulé des réserves portant sur des cartons manquants ; que celles-ci ne peuvent être retenues dès lors qu'elles ne portent pas sur des dommages subis par la marchandise, et que la disparition de cartons initialement alléguée ne s'est pas confirmée ; qu'au soutien de leurs prétentions les intimées invoquent à la fois « l'avis à expertise » du 3 octobre 2011, informant le transporteur maritime de la réunion d'expertise prévue le 6 octobre, et le constat des désordres effectué à l'occasion de cette réunion ; que « l'avis à expertise » est une convocation établie par l'expert ; qu'il ne peut en lui-même valoir réserves expresses et précises sur l'état de la marchandise ; que le constat contradictoire de l'état de la marchandise est intervenu au-delà du délai légal ; qu'il ne prouve donc pas l'existence de réserves de nature à engager la responsabilité de transporteur maritime ; que compte tenu de ce qui précède, les marchandises sont présumées avoir été livrées en bon état au destinataire ;
AUX MOTIFS AUSSI QUE, sur la destruction de la présomption de livraison conforme, s'agissant d'une présomption simple, la présomption de livraison conforme cède devant la preuve contraire ; que pour détruire la présomption, le demandeur à l'action en responsabilité doit prouver que les dommages sont survenus avant la livraison ; qu'en effet, sauf preuve d'un cas excepté, les causes de l'avarie et le moment précis auquel elle s'est produite sont indifférents dès lors qu'il est établi qu'elle est intervenue avant la livraison ; que la société Davigel et la société Zurich Insurance soutiennent que les dommages sont dus à un dysfonctionnement du conteneur d'origine survenu au cours du transport maritime ; que la société Hanjin Shipping explique le transbordement de la cargaison par un incident de température au sein du conteneur d'origine ; qu'elle expose que lors des opérations d'empotement le conteneur a été surchargé, ce qui a provoqué une mauvaise ventilation et donc des problèmes de température ; que la société Davigel et la société Zurich Insurance produisent aux débats le rapport d'expertise établi le 3 janvier 2012 par la société AM Groupe, expert mandaté par la société Davigel ; que les opérations d'expertise ont eu lieu en présence de la société Hanjin Shipping ; que l'expert rappelle que, selon les énonciations figurant dans le connaissement, le transporteur maritime devait maintenir une température constante de -18° C ; qu'il constate la présence de givre à l'intérieur des sacs, des boites, ou des films plastiques renfermant les produits, l'écoulement de liquide recongelé et une adhérence de certains des produits aux parois du contenant ; qu'il en conclut que les produits ont été exposés à une hausse de température pendant la phase de transport ; qu'il résulte des constatations et conclusions de l'expert qu'à l'arrivée au Havre les marchandises étaient affectées de défauts se manifestant par des signes de décongélation ; que de ces éléments il résulte que les produits présentaient, à l'arrivée, des défauts montrant qu'ils avaient été exposés à une hausse de température ; que sur l'antériorité des dommages par rapport à la livraison, alors qu'en l'absence de réserves de sa part à la réception, la société Hanjin Shipping est présumée avoir reçu les produits en bon état, il est établi qu'à leur arrivée au Havre les produits étaient endommagés ; qu'il est constant par ailleurs, que pendant le trajet, la société Hanjin Shipping est intervenue de sa propre initiative sur la marchandise en la transférant du conteneur initial dans deux autres conteneurs ; que sur ce point la société Hanjin Shipping indique avoir constaté au cours du trajet, un incident de température dans le conteneur ; que cette circonstance correspond à une situation dans laquelle, au moins temporairement, la température constante mentionnée dans le connaissement n'a pas été maintenue à -18° C ; qu'elle doit être rapprochée des conclusions de l'expert qui relève une rupture de la chaîne du froid ; qu'au surplus la marchandise transportée était constituée de produits congelés ; que pour leur transfert, les cartons qui les contenaient ont dû faire l'objet d'opérations de manutention à l'escale de Jeddah ; que les développements qui précédent établissent que les marchandises n'ont pas été délivrées telles que décrites au connaissement, que les dommages existaient à la livraison et qu'ils sont antérieurs à celle-ci ;
AUX MOTIFS PAR AILLEURS QUE, sur l'existence d'un cas excepté de responsabilité, la société Hanjin Shipping soutient que les défauts constatés proviennent d'une faute commise par le chargeur lors de l'empotement de la marchandise ; qu'il lui appartient de rapporter la preuve du cas excepté de responsabilité ainsi invoqué ; qu'au soutien de ses affirmations elle fait valoir que : - les « intérêts marchandises » ont reconnu l'existence d'une surcharge puisque la convocation à la réunion d'expertise du 3 octobre 2011 fait état d'un conteneur « surchargé » ; - les photographies du conteneur initial prises au moment du transbordement établissent que la déclaration du chargeur relative au volume de la cargaison chargée dans le conteneur initial ne correspond pas à la réalité ; elles permettent de constater que le conteneur de remplacement 056/6 ne pouvait pas contenir toute la cargaison (composée au total de 5.688 cartons) dès lors que dans ce conteneur, les cartons (au nombre de 5.494) atteignaient la limite supérieure de chargement imprimée sur les panneaux intérieurs, le restant (soit 194 cartons) ayant dû être placé dans un autre conteneur (969/2) ; - les conclusions de l'expert sur la cause première des dommages sont hypothétiques et incertaines ; que cependant la convocation à expertise, document établi par l'expert, ne vaut pas reconnaissance de responsabilité par la société Davigel et son assureur ; que, concernant l'origine des dommages, les conclusions de l'expert sont les suivantes : - le sinistre peut résulter d'un dysfonctionnement du conteneur, - la société Hanjin Shipping soulève l'hypothèse d'une faute commise par le chargeur ; cependant aucun élément ne nous a été rapporté par cette société concernant une possible surcharge du conteneur de nature à entraîner la responsabilité du chargeur ; - selon les informations mentionnées sur le connaissement établi par la société Hanjin Shipping le 17 août 2011 le volume de l'envoi représentait 62 m3 ; - d'après les informations générales concernant les particularités des conteneurs frigorifiques Hanjin qui figurent sur le site de la société Hanjin Shipping, le volume maximum du conteneur 40 high cube reefer d'origine peut être de 67 mètres cubes, - le volume utile de ce conteneur était donc adapté au volume de l'envoi ; que l'expert précise ne pas avoir vu les conteneurs ; qu'il indique que malgré ses demandes auprès de la société Hanjin Shipping il n'a pas obtenu les éléments demandés, à savoir les conditions des opérations de transfert des produits du conteneur d'origine dans les conteneurs de remplacement, ainsi que le lieu de transfert des produits, l'enregistreur des données et une explication du délai entre la date de transfert des produits (5 septembre 2011) et la date de communication des informations aux parties (14 septembre 2011) ; qu'en l'état des constatations faites par l'expert, les photographies des conteneurs de remplacement, non datées et prises de façon non contradictoire par la société Hanjin Shipping ne peuvent établir à elle seules que l'incident de température constaté au cours du transport est dû à une surcharge du conteneur d'origine ; qu'il convient d'observer que la société Hanjin Shipping ne produit pas de photographie montrant le chargement du conteneur d'origine ; qu'elle n'explique pas pourquoi celui-ci n'a pas lui-même continué à être utilisé pour la suite du transport ; que concernant le nombre de cartons, leur disposition dans le conteneur, l'espace occupé par chacun d'eux, les photographies produites ne permettent pas, à elles seules de contredire : - les indications mentionnées par le connaissement : - HJCU 603 550 / 0 s / HB5 689 2 : 5693 20 079, 100 kg 62.000 mètres cubes - et la modification suivante portée sur le connaissement au cours du transport : - « 5693 cartons au total, poids brut total de 20 079 kg » HJCU - 610056 / 6 / s/ HB0531 76 : 184 et 552 kg HJCU -610969 / 2 s / HB0 53 259 : 5509 et 19.527 kg ; que le nombre de cartons constitue en lui-même une donnée insuffisante pour déterminer l'espace qu'ils occupent dans le conteneur, dès lors que, comme le relève la société Hanjin Shipping, les cartons étaient de trois dimensions différentes, nécessairement disparates, en présence de huit lots différents ; qu'il appartenait à la société Hanjin Shipping d'évoquer au cours des opérations, la question du volume réel de la cargaison de façon à permettre une discussion contradictoire sur ce point devant l'expert ; que la société Hanjin Shipping n'établit donc pas les affirmations selon lesquelles des déclarations inexactes quant au volume empoté auraient été faites ; qu'elle ne rapporte pas la preuve du cas excepté qu'elle invoque ; qu'elle fait valoir que les conclusions de l'expert sur la cause précise des dommages sont exprimées de manière hypothétique et incertaine ; que l'expert n'évoque que comme une hypothèse seulement, un dysfonctionnement du conteneur d'origine ; qu'invoquant un cas excepté de responsabilité, il appartient à la société Hanjin Shipping d'établir la cause du dommage et de prouver que celui-ci entre dans l'un des cas exceptés ; qu'il a été retenu ci-dessus que les dommages constatés étaient survenus pendant le transport maritime ; qu'en conséquence le seul fait que la raison précise de l'incident de température reste indéterminée est sans incidence sur la responsabilité du transporteur ; qu'au vu de ce qui précède, la société Hanjin Shipping doit donc être déclarée responsable des dommages ;
ET AUX MOTIFS ENFIN QUE, sur le préjudice, les intimées font valoir que la marchandise a subi une rupture de la chaîne du froid identifiée par l'expert à partir notamment de la présence de givre et de l'écoulement de liquide de congélation ; qu'elles exposent qu'en application du principe de précaution, qui exige de ne pas prendre de risque s'agissant de l'alimentation humaine, la société Davigel était autorisée à ne pas remettre en vente les marchandises ; qu'elles indiquent que, pour limiter le préjudice, la société Davigel a préféré ne pas détruire la marchandise et confier celle-ci à un expert en vue de la vente en sauvetage ; qu'en réponse, la société Hanjin Shipping fait valoir que : - les analyses réalisées sur la marchandise ont montré que celle-ci ne présentait pas d'altération bactériologique ou micro-biologique ; - les marchandises n'ont pas été refoulées par les autorités sanitaires qui, au contraire, les ont considérées comme saines et commercialisables, - la seule présence de givre ne justifiait pas la décision prise par la société Davigel de ne pas vendre la marchandise dans le circuit normal de commercialisation ; - le transporteur maritime ne peut être comptable des conséquences de cette décision qui résulte de la seule appréciation du destinataire de la marchandise ; qu'il est constant en l'espèce que les analyses réalisées ont montré que les marchandises avaient une qualité micro-biologique satisfaisante au regard de la réglementation ; que l'expert a décrit les phénomènes qui l'ont amené à conclure à une rupture de la chaîne du froid ; qu'en l'état de ses constatations (qui révèlent en particulier des altérations touchant l'aspect physique des produits) et même si les analyses techniques n'ont pas révélé d'altération micro biologique de la marchandise, il ne peut être reproché à la société Davigel d'avoir recouru à une vente en sauvetage ; que cette circonstance n'est donc pas de nature à exclure ou à diminuer son droit à réparation ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; que les dernières conclusions d'appel de la société Hanjin Shipping, comprenant notamment réplique aux écritures de la société Davigel et de la compagnie Zurich Insurance en particulier sur l'interprétation à donner à l'arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 14 octobre 2014 (p. 18, alinéa 2), ont été déposées et notifiées le 4 février 2015 ; qu'en se prononçant dès lors au visa des conclusions de la société Hanjin Shipping du 29 août 2014 (arrêt attaqué, p. 3 in fine), sans aucunement mentionner les moyens et réfutations formulés dans les dernières conclusions de la société Hanjin Shipping, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' en l'absence de constat contradictoire de l'état de la marchandise ou d'un avis écrit des dommages, le transporteur maritime bénéficie de la présomption de livraison conforme de la marchandise ; que pour renverser cette présomption, il appartient au destinataire ou à l'assureur de celui-ci de démontrer que les dommages allégués sont survenus « pendant le temps du transport » ; qu'en considérant que la société Davigel et son assureur avaient « détruit » la présomption de livraison conforme bénéficiant à la société Hanjin Shipping en l'absence de réserve émise à la réception des marchandises, dans la mesure où il était établi que « les dommages existaient à la livraison et qu'ils sont antérieurs à celle-ci » (arrêt attaqué, p. 9, avant dernier alinéa), cependant qu'il ne suffisait pas au destinataire d'établir que l'avarie alléguée était antérieure à la livraison pour que soit écartée la présomption de livraison conforme, puisqu'il devait de surcroît démontrer que le dommage s'était effectivement réalisé « pendant le temps du transport », la cour d'appel a violé l'article 3 §6 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée ;
ALORS, ENFIN, QUE le droit à réparation du destinataire des marchandises est en toute hypothèse égal au montant du préjudice effectivement subi ; que si la rupture de la chaîne du froid constitue une faute imputable au transporteur, lorsqu'il en est à l'origine, aucune indemnité n'est due au propriétaire lorsque cette faute n'a généré aucun préjudice ; qu'en condamnant la société Hanjin Shipping à indemniser la société Davigel et la société Zurich Insurance au titre d'une rupture de la chaîne du froid, tout en constatant que cette faute, à la supposer avérée, n'avait causé aucun préjudice à la société Davigel, puisque « les analyses réalisées ont montré que les marchandises avaient une qualité micro-biologique satisfaisante au regard de la réglementation » (arrêt attaqué, p. 12, alinéa 5), de sorte que les marchandises en cause auraient pu être commercialisées dans des conditions normales, la cour d'appel, qui a ainsi indemnisé un dommage inexistant, a violé l'article 4 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924, amendée, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.