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17/05/2017 | FRANCE | N°15-28767

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 17 mai 2017, 15-28767


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 3 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par contrat du 5 juillet 1991, la société de droit autrichien Isoplus Fernwarmetechnik (la société Isoplus) a conclu avec M. X... un accord de représentation commerciale exclusive sur le territoire italien, par lequel elle l'a chargé de vendre "en son nom tous ses produits sur le territoire italien" ; que des difficultés étant nées de l'exécution du contrat, M. X...

a assigné la société Isoplus devant les juridictions italiennes en réparation d...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu l'article 3 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par contrat du 5 juillet 1991, la société de droit autrichien Isoplus Fernwarmetechnik (la société Isoplus) a conclu avec M. X... un accord de représentation commerciale exclusive sur le territoire italien, par lequel elle l'a chargé de vendre "en son nom tous ses produits sur le territoire italien" ; que des difficultés étant nées de l'exécution du contrat, M. X... a assigné la société Isoplus devant les juridictions italiennes en réparation de son préjudice ; que celles-ci se sont déclarées incompétentes, par référence à la clause stipulée à l'article 8 de l'additif au contrat, attribuant compétence au tribunal de Strasbourg ; que M. X... a alors saisi le tribunal de grande instance de cette ville ;

Attendu que, pour constater la prescription de l'action et déclarer les demandes de M. X... irrecevables, l'arrêt retient que les parties ont entendu soumettre leur contrat au droit international ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la référence au droit international ne pouvait valoir choix d'une loi pour régir les relations contractuelles, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'appel de M. X..., l'arrêt rendu le 12 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Isoplus Fernwarmetechnik aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables les demandes de M. X... ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'il appartient à la Cour d'appel de qualifier la relation d'affaires existant entre M. X... et la société Isoplus, pour ensuite déterminer la loi applicable. M. X... a critiqué le raisonnement retenu dans la décision critiquée, alors que depuis la directive 86/653/CEE du Conseil du 18 Décembre 1986, la définition de l'agent commercial est identique dans tous les pays européens qui I 'ont transposé dans leur droit interne et notamment en France. En conséquence, l'application des dispositions de l'article LI 34-1 alinéa I er du code de commerce par les premiers juges, pour définir l'agent commercial, était pertinente et conforme au droit communautaire. Le jugement déféré a jugé que M. X... était lié à la société Isoplus par un contrat de concession de vente et non par un contrat d'agent commercial, en a déduit que le droit applicable était le droit international et notamment les articles 8 et 17 de la convention de New-York sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises modifiée par le protocole de Vienne du 11 avril 1980, et que l'action de M. X... était prescrite, par des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte, à défaut d'autres moyens nouveaux et de nouvelles preuves

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE même si le droit français n'a pas vocation à s'appliquer dans le cas présent, il est intéressant de rappeler que l'agent commercial* selon la définition française (article L 134-1 al. 1 Code de commerce), est un mandataire qui traite avec la clientèle au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels ou de commerçants, pour négocier ou conclure des contrats de vente, d'achats, de location, de prestations de services cette prospection se traduisant soit par des prises d'ordre ou par des prises de commandes au nom et pour le compte du mandant par la conclusion de contrats, notamment de vente au nom et pour le compte du mandant. Le commissionnaire, pour sa part, est celui qui agit en son nom propre ou sous un nom social pour le compte d'un commettant (art. L 134-1 du code de commerce). Le commissionnaire, comme l'agent commercial représente les intérêts d'une autre personne, ; Ainsi, le commissionnaire agit en son propre nom pour le compte du commettant alors que le mandataire agit au nom et pour le compte du mandant. Agissant en son propre nom, le commissionnaire est partie au contrat conclu pour le compte du commettant alors que l'agent commercial lorsqu'il conclut pour te compte de son mandant, engage ce dernier mais ne s'engage pas lui-même, même s'il négocie les conditions de l'opération. « Le contrat de représentation également pour l'Italie » signé entre les parties le 05.07.1991 est un contrat par lequel la société Isoplus autorise M. X... à vendre en son nom et pour son compte tous les produits sur le territoire italien insulaire et péninsulaire mais qui ne détermine pas le statut de M. X... entre ces deux statuts. Compte tenu des enjeux procéduraux qui en découlent, les parties s'opposent sur la qualification de ce contrat la société Isoplus faisant valoir qu'il s'agit non d'un contrat d'agent commercial mais d'un contrat de concession et plus précisément d'un contrat de concession de vente pour lequel elle produit un certificat de coutume qui en donne la définition et en décrit les principaux traits en droit italien, M. X... estimant pour sa part qu'il s'agit d'un contrat d'agent commercial ; En droit italien ainsi qu'il ressort des pièces versées au dossier, ( art. 1742 du Code civil italien, « par le contrat d'agence , une partie accepte le mandat de promouvoir de manière permanent, pour le compte de l'autre , moyennant une rémunération, la conclusion de contrats dans un secteur géographique déterminé. Aux termes du contrat dans sa version allemande, les termes « im eigenen Namen » traduits comme « en son nom propre » doivent s'analyser comme se référant à M. X... et non, comme le prétend ce dernier, à ta société Isoplus. En effet et ainsi que la société Isoplus le fait valoir, à juste titre, si la commune intention des parties avait été de conférer à M. X... un mandat de vendre les produits au nom de la société Isoplus, les termes auraient été « in ihrem Namen l'adjectif possessif féminin allemand se rapportant à la société Isoplus traduisant cette volonté, la langue allemande permettant cette distinction. Il en ressort très clairement que M. X... n'agit pas pour le compte du mandant, pour la conclusion de contrats mais bien en son nom propre pour le compte du commettant qu'est Isoplus et non au nom et pour le compte d'Isoplus, M. X... facturant directement ses clients en Italie, la société Isoplus lui adressant à lui ses propres factures. La lecture du contrat signé par les parties sous le terme de "contrat de représentation légale "permet d'établir que la vente des produits Isoplus se fait au nom et pour le compte de la société Isoplus , que M. X... étant en droit de vendre en son propre nom les produits Isoplus, que les conditions les de vente à celui-ci sont déterminées par la société Isoplus , que le mode de rémunération de M. X... ne correspond pas à un pourcentage sur les ventes , que des objectifs de chiffres d'affaires ont été fixés par les parties, tous éléments qui trouvent leur place dans un contrat de distribution que la société Isoplus entend voir nommer, sous l'éclairage d'un certificat de coutume produit par ses soins comme un "contrat de concession de vente. Parmi les éléments substantiels de ce contrat sur lesquels il convient de se pencher figure la rémunération de M. X... qui ne correspond pas à un pourcentage sur le chiffre d'affaire réalisé par la société en Italie par son intermédiaire mais à fa différence entre le prix d'achat des produits auprès de la société Isoplus selon les prix de celle-ci et le prix de revente pratiqué auprès de ses clients, déduction faite des frais de livraison. L'utilisation impropre du terme contractuel "commission" ne permet pas de concevoir ce mode de rémunération comme une marge de distribution selon un pourcentage déterminé alors que, M. X... d'une part facture directement ses clients, lui-même étant facturé franco par Isoplus depuis le siège de celle-ci à Hohenberg, d'autre part fixe sa propre rémunération en fonction des prix de revente arrêtés par ses soins. De même, dans te cadre d'un contrat d'agence commerciale, le risque commercial pèse sur le mandant ce qui en l'espèce n'est pas le cas, le distributeur, en l'espèce M. X..., étant conduit à ne percevoir aucune rémunération voire à subir une perte financière s'il n'arrive pas à vendre les produits achetés auprès d'Isoplus avec une marge suffisante ou sans marge du tout. S'agissant de son activité , il convient de constater que M. X... ne produit aucune pièce pouvant justifier de celle-ci en sa qualité annoncée d'agent commercial et notamment aucune pièce établissant son activité de démarchage des clients, de collecte des commandes, de transmission de celles-ci à la société Isoplus , aucune des pièces produites par lui ne pouvant établir l'existence d'une commande ferme de produits Isoplus qui aurait été négocié par M. X... au nom et pour le compte de la société Isoplus et qui lui aurait été adressée pour acceptation dans le cadre d'un contrat d i agence revendiqué par lui, la simple collecte d*informations sur les appels d'offres ainsi que cela ressort des pièces produites par te demandeur ne justifiant pas d'une telle activité sous cette qualification. Pas plus ne produit-il des factures qu'il aurait adressées à Isoplus pour des commissions sur des affaires qu'il aurait négociées et ne justifie-t-il avoir versé sa propre part de cotisation à I'Enasarco auprès de laquelle il a été inscrit par Isoplus deux ans et non pas 3 mois, comme c'est ta règle non contestée dans le cadre d'un contrat d'agence après le début de son activité. En conséquence de quoi, il y a lieu de considérer que le contrat liant ta société Isoplus et M. X... comme un contrat de concession - et de manière plus spécifique est un contrat de concession de vente - et non un contrat d'agent commercial. La version allemande du contrat prévoit que le droit applicable est le droit international alors que l'annexe italienne fait référence à l}application du Code de droit international, code qui n'a pas vocation à s'appliquer faute d'existence C'est donc à la version allemande du contrat} version linguistique qui prévaut ainsi que l'a rappelé l'ordonnance du Juge de la mise en état du 30.112009 qu'il convient de se référer. En faisant appel au droit international, il paraît évident que les parties ont entendu soustraire l'application du contrat et les litiges pouvant en découler au droit national d'une des parties, que ce soit le droit autrichien ou le droit italien, au profit du droit international. En l'espèce, dans la mesure où il est considéré que le contrat liant les parties est un contrat de concession de ventes il convient de se référer aux règles internationales régissant la matière dans le cadre de la vente de marchandises et de se référer aux dispositions internationales applicables en la matière et de manière spécifique la Convention de New-York et le protocole de Vienne visés par la société Isoplus, peu important que ces conventions n'aient pas été ratifiées par les pays concernés en l'espèce (Autriche et Italie) les parties ayant été libres de choisir ce droit pour régir leur contrat. Aux termes de Particle 8 de la Convention de New-York, sur la prescription en matière de vente internationale de marchandises modifiée par le Protocole de Vienne de 1980, "le délai de prescription est de quatre ans L'article 17 de "cette convention prévoir que lorsqu'une procédure a été introduite conformément aux articles 13, 14, 15, ou 16 avant l'expiration du délai de prescription, celui-ci est réputé avoir continué de courir si la procédure s'est terminée sans qu'une décision ait été rendue sur le fond de l'affaire Lorsqu'à la fin de cette procédure, le délai de prescription était expiré, ou doit expirer dans moins d'un an, le créancier bénéfice d'un délai d'un an à partir de la fin de la procédure La procédure engagée par M. X... devant les juridictions italiennes a pris fin le 02.10.2003 ouvrait à M. X... un délai d'un an soit jusqu'au 02.10.2004 pour introduire une demande devant les tribunaux français ce qu'il n'a fait que quatre ans plus tard en octobre 2008. Il y a dès lors lieu de constater la prescription de son action en application des dispositions de ta convention sus visée ;

1°) - ALORS QU'il incombe au juge français, saisi d'une demande d'application d'un droit étranger, de rechercher la loi compétente, selon la règle de conflit, puis de déterminer son contenu, au besoin avec l'aide des parties, et de l'appliquer ; qu'en commençant par qualifier le contrat liant les parties, en se référant au droit français, au droit italien et au droit communautaire, pour en déduire le droit applicable, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil ;

2°) – ALORS QUE si les parties peuvent choisir la loi applicable à leur convention, ce choix doit être clair ; qu'en déterminant la convention internationale applicable en fonction de la qualification qu'elle avait préalablement donnée au contrat, après avoir constaté que les parties avaient simplement stipulé que le droit international, sans plus de précision, s'appliquait, ce qui ne constituait pas le choix d'une loi, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-28767
Date de la décision : 17/05/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 12 novembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 17 mai. 2017, pourvoi n°15-28767


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.28767
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