LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme [I] [I] de son désistement ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu après cassation, (Soc., 3 juillet 2013, n° Q 12-19.473 et K 12-20.619) que les époux [U] [I] et leur fille [R] ont constitué en 1987 la société Relais de l'aviation, en vue de l'exploitation d'une station-service appartenant à la Société de distribution de produits pétroliers TD Distribution (la société Thévenin et Ducrot) ; que cette exploitation leur a été concédée suivant contrat de location-gérance de fonds de commerce assorti d'une convention de mandat-vente ducroire, relatif à la distribution de carburants et d'engagements d'exclusivité pour la fourniture de graisses, lubrifiants et autres produits de la marque Avia, ces actes ayant été régularisés le 4 juillet 1987 entre la société Thévenin et Ducrot et la société Relais de l'aviation, en cours de constitution, représentée par son gérant, [U] [I] ; que cette exploitation s'est poursuivie jusqu'au 31 mars 2007, [W] [I] ayant repris la gérance de la société à compter du 1er janvier 2004 à la suite du départ en retraite de son mari ; que celui-ci est décédé le [Date décès 1] 2007 ; que le 31 juillet 2007, [W] [I] et Mme [R] [I], agissant en leur nom propre et en qualité d'ayants droit de [U] [I], ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de se voir reconnaître le bénéfice du statut issu des articles L. 7321-1 et suivants du code du travail et d'obtenir paiement par la société Thévenin et Ducrot de diverses sommes à titre de rappels de rémunération et de dommages-intérêts ; que [W] [I] est décédée le [Date décès 2] 2012 ; que, suite à ce décès, l'action a été reprise par les ayants droit ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts [I] font grief à l'arrêt de dire que la relation de travail entre la société Thévenin et Ducrot et [U] [I] avait été rompue le 30 décembre 2003 par le départ à la retraite de ce dernier et de les débouter de leurs demandes de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1°/ que l'imputabilité de la rupture de la relation de travail ayant existé entre un gérant de succursale et l'entreprise lui fournissant les marchandises s'apprécie exclusivement en considération des conditions de fait de l'exercice de son activité, indépendamment des relations ayant existé avec la personne morale interposée ; qu'en déduisant la rupture de la relation de travail statutaire de gérant de succursale ayant lié en fait [U] [I] à la société Thévenin et Ducrot de motifs inopérants dont résulte exclusivement la cessation à l'initiative de [U] [I], de son activité de gérant de la SARL Relais de l'aviation et de sa « relation contractuelle » avec l'entreprise fournissant les marchandises, mais non celle de l'activité qu'il déployait personnellement pour son compte en qualité de gérant de succursale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 7321-1, L. 7321-2 et L. 7321-3 du code du travail ;
2°/ qu'il ressort de ses propres constatations de l'arrêt attaqué que, par une disposition devenue définitive de l'arrêt du 20 mars 2012, la cour d'appel de Besançon a « dit que [W] [T] veuve [I] et les ayants droit de feu [U] [I] sont en droit de prétendre à des rappels de salaire, prime d'ancienneté, congés payés (…) sur la base d'une durée hebdomadaire moyenne de travail de 56 heures effectuée par chacun des époux [I] sur la période non couverte par la prescription du 1er août 2002 au 30 mars 2007 (…) » ; qu'il résultait de cette disposition définitive d'une décision rendue dans le même litige opposant les mêmes parties à propos de la même relation de travail que [U] [I] avait poursuivi, en fait, son activité de gérant de succursale pour le compte de la société Thévenin et Ducrot jusqu'à la fermeture de la station service, en mars 2007, de sorte que son départ à la retraite notifié à effet du 1er janvier 2004 n'avait pas interrompu la relation de travail ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé derechef textes susvisés ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel après avoir constaté que [U] [I] avait cessé son activité au 30 décembre 2003 à la suite de son départ à la retraite, a retenu que les relations contractuelles entre la société Thévenin et Ducrot et [U] [I] étaient rompues depuis le 1er janvier 2004, en raison de la volonté non équivoque exprimée par celui-ci de faire valoir ses droits à la retraite, que cette décision s'appliquait aussi bien à son mandat social qu'à ses relations avec la société Thévenin Ducrot ; que le moyen qui manque en fait en sa seconde branche, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que les consorts [I], font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse de [W] [I] alors, selon le moyen :
1°/ que les clauses du contrat liant le fournisseur à la société chargée de la distribution des produits ne peuvent être opposées au gérant agissant sur le fondement de l'article L. 7321-2 du code du travail ; qu'en retenant, pour conclure que l'initiative de la rupture de la relation de travail de gérant de succursale ayant personnellement lié [W] [I] à la société Thévenin et Ducrot incombait à la première, qu' « …il résulte de l'avis de fin de location-gérance, publié à l'initiative de [W] [I] dans le journal d'annonces légales Les Affiches de la Haute-Saône le 29 juin 2007, qu'à la date du 30 mars 2007, celle-ci a cessé son activité », la cour d'appel a violé les articles L. 7321-1, L. 7321-2 et L. 7321-3 du code du travail, ensemble l'article 1165 du code civil ;
2°/ que l'aveu ne fait foi que dans la mesure où il porte sur des points de fait et non sur des points de droit ; qu'en retenant, pour juger la rupture de la relation de travail de gérant de succursale résultait « … d'un départ à la retraite non équivoque à l'initiative de la salariée » que « … dans ses écritures devant la cour, [W] [I] sollicite le paiement d'une indemnité de départ à la retraite au 30 mars 2007 », la cour d'appel, qui a retenu à son encontre un aveu portant sur un point de droit a violé les articles 1354 et 1356 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté qu'il ne résultait d'aucun élément ni pièce de la procédure que l'initiative de la rupture des relations contractuelles serait imputable à la société Thévenin et Ducrot mais qu'elle résultait au contraire d'un départ à la retraite non équivoque à l'initiative de la salariée a pu décider que la rupture incombait à [W] [I] ; que le moyen inopérant en sa seconde branche comme s'attaquant à un motif surabondant n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme [R] [I] et M. [B] [I] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six avril deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour les consorts [I].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la relation de travail entre la Société Thevenin-Ducrot et Monsieur [U] [I] avait été rompue le 30 décembre 2003 par le départ à la retraite de ce dernier et d'avoir débouté les consorts [I] de leurs demandes de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE "… Sur la rupture des relations contractuelles : …il résulte des pièces versées aux débats que Monsieur [I] a cessé son activité au 30 décembre 2003 à la suite de son départ à la retraite ;
QUE par lettre du 14 août 2004, la SARL Relais de l'aviation a porté à la connaissance de la Société Thevenin-Ducrot les informations suivantes : ''nous avons pris la décision de demander la retraite de Monsieur [I] puisqu'il avait tous ses trimestres et nous ne voyons pas pourquoi nous aurions continué de cotiser pour ce dernier" ; que, selon l'avenant n° 2 au bail de location-gérance signé entre Monsieur [U] [I], Madame [W] [I] et la Société Thevenin-Ducrot le 21 mai 2004, il a été stipulé qu'à compter rétroactivement du 1er janvier 2004, la SARL Relais de l'aviation est gérée par Madame [W] [I] aux lieu et place de Monsieur [U] [I] qui a fait valoir ses droits à la retraite ; que cette mention est reprise dans les mêmes termes dans l'avenant n° 4 à la convention de mandat-vente Ducroire du 22 mai 2004 ; qu'il a en outre été publié dans le journal d'annonces légales Les Affiches de la Haute-Saône du 2 janvier 2004 l'avis de modification de gérance suite à une délibération du 23 décembre 2003 de l'assemblée générale de la SARL Relais de l'aviation lors de laquelle Madame [W] [I] a été nommée seule gérante de la société à compter du 1er janvier 2004 suite à la démission de son mandat de Monsieur [U] [I] « pour retraite » ;
QUE contrairement à ce que soutiennent les appelants, à la date du 30 mars 2007, les relations contractuelles entre la Société Thevenin-Ducrot et Monsieur [I] étaient rompues depuis le 1er janvier 2004, suite à la volonté non équivoque exprimée par celui-ci de faire valoir ses droits à la retraite, cette décision s'appliquant aussi bien à son mandat social qu'à ses relations avec la Société Thevenin-Ducrot ; qu'il s'ensuit que les demandes de Monsieur [I] résultant d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont rejetées" ;
1°) ALORS QUE l'imputabilité de la rupture de la relation de travail ayant existé entre un gérant de succursale et l'entreprise lui fournissant les marchandises s'apprécie exclusivement en considération des conditions de fait de l'exercice de son activité, indépendamment des relations ayant existé avec la personne morale interposée ; qu'en déduisant la rupture de la relation de travail statutaire de gérant de succursale ayant lié en fait Monsieur [I] à la Société Thevenin-Ducrot de motifs inopérants dont résulte exclusivement la cessation à l'initiative de Monsieur [I], de son activité de gérant de la SARL Relais de l'aviation et de sa "relation contractuelle" avec l'entreprise fournissant les marchandises, mais non celle de l'activité qu'il déployait personnellement pour son compte en qualité de gérant de succursale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.7321-1, L.7321-2 et L.7321-3 du code du travail ;
2°) ALORS QU'il ressort de ses propres constatations de l'arrêt attaqué que, par une disposition devenue définitive de l'arrêt du 20 mars 2012, la Cour d'appel de Besançon a " dit que Madame [W] [T] veuve [I] et les ayants droit de feu [U] [I] sont en droit de prétendre à des rappels de salaire, prime d'ancienneté, congés payés (…) sur la base d'une durée hebdomadaire moyenne de travail de 56 heures effectuée par chacun des époux [I] sur la période non couverte par la prescription du 1er août 2002 au 30 mars 2007 (…)" ; qu'il résultait de cette disposition définitive d'une décision rendue dans le même litige opposant les mêmes parties à propos de la même relation de travail que Monsieur [I] avait poursuivi, en fait, son activité de gérant de succursale pour le compte de la Société Thevenin-Ducrot jusqu'à la fermeture de la station service, en mars 2007, de sorte que son départ à la retraite notifié à effet du 1er janvier 2004 n'avait pas interrompu la relation de travail ; qu'en décidant le contraire la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé derechef textes susvisés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les consorts [I], venant aux droits de Madame [W] [F], de leurs demandes de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE "il résulte de l'avis de fin de location-gérance, publié à l'initiative de Madame [I] dans le journal d'annonces légales Les Affiches de la Haute-Saône le 29 juin 2007, qu'à la date du 30 mars 2007, celle-ci a cessé son activité ;
QUE d'ailleurs, dans ses écritures devant la cour, Madame [I] sollicite le paiement d'une indemnité de départ à la retraite au 30 mars 2007 ;
QUE la cour considère qu'il ne résulte d'aucun élément ni pièce de la procédure que l'initiative de la rupture des relations contractuelles serait imputable à la Société Thevenin-Ducrot et produirait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais qu'elle résulte au contraire d'un départ à la retraite non équivoque à l'initiative de la salariée ;
QUE Madame [I] sera déboutée de ses demandes en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (…)" ;
1°) ALORS QUE les clauses du contrat liant le fournisseur à la société chargée de la distribution des produits ne peuvent être opposées au gérant agissant sur le fondement de l'article L. 7321-2 du code du travail ; qu'en retenant, pour conclure que l'initiative de la rupture de la relation de travail de gérant de succursale ayant personnellement lié Madame [W] [I] à la Société Thevenin-Ducrot incombait à la première, qu'"…il résulte de l'avis de fin de location-gérance, publié à l'initiative de Madame [I] dans le journal d'annonces légales Les Affiches de la Haute-Saône le 29 juin 2007, qu'à la date du 30 mars 2007, celle-ci a cessé son activité", la Cour d'appel a violé les articles L.7321-1, L.7321-2 et L.7321-3 du code du travail, ensemble l'article 1165 du Code civil ;
2°) ALORS en outre QUE l'aveu ne fait foi que dans la mesure où il porte sur des points de fait et non sur des points de droit ; qu'en retenant, pour juger la rupture de la relation de travail de gérant de succursale résultait "… d'un départ à la retraite non équivoque à l'initiative de la salariée" que "… dans ses écritures devant la cour, Madame [I] sollicite le paiement d'une indemnité de départ à la retraite au 30 mars 2007", la Cour d'appel, qui a retenu à son encontre un aveu portant sur un point de droit a violé les articles 1354 et 1356 du Code civil.