La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2017 | FRANCE | N°16-11715

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 02 mars 2017, 16-11715


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 3 décembre 2015), que le 13 avril 2003, M. [X] a été blessé à la suite d'un incendie survenu dans un logement appartenant à la SCI Colbert, loué à M. [C] ; qu'il a assigné la SCI Colbert en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing, en indemnisation de ses préjudices ; que la société Allianz IARD, venant aux droits de la société Gan Eurocourtage, est intervenue volontairement à l'instance en sa qualité d'assureur de la SCI Co

lbert ; que cette dernière a fait assigner en garantie l'administrateur de...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 3 décembre 2015), que le 13 avril 2003, M. [X] a été blessé à la suite d'un incendie survenu dans un logement appartenant à la SCI Colbert, loué à M. [C] ; qu'il a assigné la SCI Colbert en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing, en indemnisation de ses préjudices ; que la société Allianz IARD, venant aux droits de la société Gan Eurocourtage, est intervenue volontairement à l'instance en sa qualité d'assureur de la SCI Colbert ; que cette dernière a fait assigner en garantie l'administrateur de la société Arras architecture, M. [O], son liquidateur, M. [G] et son assureur, la société Mutuelle des architectes français, ainsi que M. [C] et son assureur, la société Mutuelle assurances des travailleurs mutualistes (la société Matmut) ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et le premier moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche, qui sont similaires, réunis :

Attendu que la société Allianz IARD et la SCI Colbert font grief à l'arrêt de déclarer cette dernière entièrement responsable des dommages subis par M. [X], et de dire que la société Allianz IARD devait la garantir, alors, selon le moyen, que la responsabilité de celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, n'est engagée vis-à-vis des tiers victimes des dommages causés par l'incendie qu'à la condition qu'il soit prouvé que soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension, doivent être attribuées à sa faute ; que le propriétaire d'un immeuble qui a fait rénover celui-ci ne peut se voir reprocher une faute tenant à l'absence d'exécution de travaux de sécurité prescrits par arrêté, dès lors qu'il a interrogé les services administratifs sur les travaux de mise en conformité nécessaires et a obtenu un visa de conformité de la commission de sécurité, chargée de l'application de la réglementation en vigueur ; qu'en l'espèce, comme cela avait été exposé, la SCI Colbert avait sollicité des services de l'urbanisme ses prescriptions pour la mise en conformité de l'immeuble au regard des normes de sécurité, puis obtenu de l'adjoint délégué à l'urbanisme un courrier du 9 novembre 1990 selon lequel les mesures de sécurité prises dans le cadre de la rénovation étaient conformes aux observations émises par la direction départementale des services d'incendie et de secours dans un rapport du 6 mars 1989 ; qu'à la suite du sinistre, le responsable de l'urbanisme avait déclaré au parquet que « les lieux étaient conformes à la législation en matière de sécurité incendie » ; qu'il en résultait qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la SCI Colbert en tant que propriétaire ; qu'en décidant le contraire, au motif que l'encloisonnement de la cage d'escalier et la pose d'extincteurs devaient être effectués en vertu de deux arrêtés préfectoraux du 31 janvier 1986 et du 8 juillet 1987 et que les courriers adressés par l'administration « ne pouvaient pas dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur », tandis qu'au contraire il en résultait que la SCI Colbert avait respecté les mesures de sécurité imposées par l'administration, qu'elle avait elle-même sollicitées, la cour d'appel a violé l'article 1384, alinéa 2, du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que selon l'article 19 de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation, les parois des cages d'escalier non situées en façade doivent être coupe-feu, et que les habitations dont le plancher bas du logement le plus haut est à plus de huit mètres du sol doivent être équipées de portes séparant l'escalier des circulations horizontales, et, d'autre part, que l'article 2 de l'arrêté préfectoral du 8 juillet 1987, pris au visa de l'arrêté interministériel susvisé, prévoit que dans les immeubles collectifs d'habitation, tel celui en cause, devront être posés soit des extincteurs à eau pulvérisée de six litres tous les niveaux, soit de neuf litres tous les deux niveaux, et constaté que l'immeuble en cause, assujetti à ces obligations, ne les respectait pas, c'est à bon droit que, pour caractériser la faute de la SCI Colbert, la cour d'appel a retenu que les lettres de l'administration attestant du respect des mesures préconisées par la direction départementale des services d'incendie et de secours consistant en la mise en place d'un dispositif d'évacuation des fumées, ne pouvaient dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche, et le troisième moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche, qui sont similaires, réunis :

Attendu que la société Allianz IARD ainsi que la SCI Colbert font grief à l'arrêt de les débouter de leur appel en garantie contre M. [C] et la société Matmut, alors, selon le moyen, que le preneur répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou vice de construction ; que le propriétaire bailleur, tenu d'indemniser un tiers victime d'un incendie né au sein des locaux loués, peut exercer un recours à l'encontre du preneur au titre des pertes occasionnées par cette obligation d'indemnisation ; qu'en l'espèce, la société Allianz IARD et la SCI Colbert faisaient valoir que le recours de la SCI Colbert à l'encontre de M. [C], preneur à bail, ne pouvait s'exercer que dans le cadre de l'article 1733 du code civil et que, dès lors, M. [C] et son assureur de responsabilité, la société Matmut, devaient répondre de plein droit de l'incendie ; qu'en écartant l'application de ce texte au motif qu'il ne s'appliquait pas vis-à-vis des tiers, tandis qu'il demeure applicable dans les rapports entre bailleur et preneur à bail pour le recours du premier contre le second au titre de l'indemnisation mise à sa charge en raison d'un incendie né dans les locaux loués, la cour d'appel a violé les articles 1733 et 1384, alinéa 3, du code civil ;

Mais attendu qu'ayant, à bon droit, retenu que M. [X] étant un tiers au contrat de location, les dispositions de l'article 1733 du code civil présumant le locataire responsable n'étaient pas applicables, la garantie de M. [C] et de son assureur ne pouvant être recherchée que sur le fondement de l'article 1384, alinéa 2, du code civil, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence de faute ou de négligence du locataire, celui-ci et son assureur n'étaient pas tenus de garantir la SCI Colbert ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en sa seconde branche et le quatrième moyen, annexés, du pourvoi principal ainsi que sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en sa seconde branche et le quatrième moyen, annexés, du pourvoi incident, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Condamne la société Allianz IARD et la SCI Colbert aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes, les condamne à payer à M. [C] et à la caisse primaire d'assurance maladie de Roubaix-Tourcoing la somme globale de 2 000 euros chacun, et condamne la société Allianz IARD à payer à la société Matmut, à M. [G], ès qualités, à la Mutuelle des architectes français et à M. [X] la somme de 2 000 euros chacun ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la SCI Colbert entièrement responsable des conséquences dommageables subies par M. [X], à la suite de l'incendie dont il a été victime le 13 avril 2003, d'avoir dit que la société Allianz devait garantir la SCI Colbert au titre des conséquences dommageables subies par M. [X] dans la limite du plafond contractuel fixé à 7.642.450 €, d'avoir condamné in solidum la SCI Colbert et la société Allianz à payer à M. [X] la somme de 1.000.000 € à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, sauf à déduire la somme de 500.000 € déjà payée au titre de l'exécution provisoire du jugement, et d'avoir condamné in solidum la SCI Colbert et la société Allianz à payer à la CPAM de Roubaix-Tourcoing la somme de 500.000 € à titre de provision à valoir sur sa créance et la somme de 1.037 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

AUX MOTIFS QUE, sur les circonstances de l'incendie, il résulte de l'enquête de police produite aux débats que le 13 avril 2003, M. [C] est rentré chez lui accompagné de deux amis, M. [X] et M. [U], que le locataire s'est couché dans sa chambre et ses deux amis se sont endormis dans le canapé-lit du séjour, que vers 8h, M. [U] a été réveillé par les flammes se situant à peu de distance du bout du canapé-lit, qu'après avoir donné l'alerte en criant, M. [U] s'est dirigé vers la porte de sortie de l'appartement dont il est sorti avec M. [C], que M. [X] n'est pas parvenu à sortir de l'appartement en raison d'un « mur de flammes » le séparant de la porte de sortie de l'appartement malgré l'assistance que ses amis ont tenté de lui apporter, qu'il a ouvert une fenêtre et s'est suspendu à la rambarde métallique jusqu'à sa chute au sol deux étages en contrebas ; qu'il résulte ensuite de l'expertise diligentée par M. [P] que deux causes du sinistre peuvent être retenues, l'une ou l'autre : soit un feu occasionné par les conditions d'utilisation de l'installation électrique de l'appartement, soit un feu consécutif à une cause accidentelle imprévisible ; que, sur la responsabilité de la SCI Colbert, il résulte de l'article 1384 alinéa 2 du code civil que la responsabilité de celui qui détient à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble dans lequel un incendie a pris naissance est engagée vis à vis des tiers victimes des dommages causés par cet incendie, dès lors qu'il est prouvé que soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension doivent être attribuées à sa faute ; que, sur la faute de la SCI Colbert, il résulte de l'article 19 de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation, pris en application du code de la construction et de l'habitation, que les parois des cages d'escalier non situées en façade doivent être coupe-feu, et que les habitations dont le plancher bas du logement le plus haut est à plus de huit mètres du sol doivent être équipées de portes séparant l'escalier des circulations horizontales ; qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise réalisé par M. [P] que l'immeuble appartenant à la SCI Colbert dans lequel se trouvait l'appartement incendié est de la 'deuxième famille' et que le plancher bas du logement le plus haut est à plus de huit mètres du sol ; que ce sont ces éléments qui conduisent l'expert à écrire dans son rapport en page 62 : 'Comme l'immeuble incendié a son plancher bas du logement le plus haut à plus de huit mètres (exactement 11,17 m selon mesure contradictoire le 7 novembre 2003), il aurait dû être prescrit un encloisonnement de l'escalier, comme cela a été fait après l'incendie, lors de la reconstruction' ; qu'il résulte de l'article 2 de l'arrêté préfectoral (Préfet du Nord) du 8 juillet 1987, pris au visa du code de la construction et de l'habitation et de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986 susvisé que 'dans les immeubles collectifs d'habitation, devront être posés soit des extincteurs à eau pulvérisée de 6 litres tous les niveaux, soit de 9 litres tous les deux niveaux' ; qu'il est ensuite produit aux débats un courrier adressé le 23 février 1989 par le Colonel commandant le corps des sapeurs-pompiers de Lille au Directeur départemental des services d'incendie et de secours de Lille concernant la réhabilitation de l'immeuble ; ce courrier mentionne bien l'article 2 de l'arrêté préfectoral susvisé comme étant applicable et prescrit la mise en place d'un dispositif d'évacuation des fumées en haut de la cage d'escalier ; que la SCI Colbert produit aux débats un courrier, daté du 8 novembre 1990 et adressé par le directeur du SDIS au maire de Lille, faisant état d'une visite de l'immeuble le 26 octobre 1990 et mentionnant que les prescriptions émises par le colonel des sapeurs-pompiers ont été suivies d'effet ; qu'elle produit également un courrier du service de l'urbanisme de Lille mentionnant que les mesures de sécurité prises sont conformes aux observations émises par le SDIS ; que compte tenu de l'ampleur des travaux de réhabilitation (réhabilitation d'un immeuble en vue de créer une surface commerciale et 22 logements), et des termes de l'arrêté du 31 janvier 1986, ces courriers ne pouvaient pas dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur, et notamment de l'obligation d'encloisonnement de la cage d'escalier prescrite par l'arrêté interministériel de 1986 ; que la SCI Colbert produit enfin une réponse ministérielle du 29 février 1988 selon laquelle l'arrêté du 31 janvier 1986 modifié le 18 août 1986 n'exige pas la présence d'extincteur dans les bâtiments d'habitation ; que cette réponse ne fait pas échec à l'obligation de respecter l'arrêté préfectoral du 8 juillet 1987 applicable au département du Nord, et pris en application de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986, imposant la présence d'extincteurs dans les immeubles d'habitation dans le département du Nord ; qu'il résulte de ces éléments que, sans qu'il y ait lieu de rechercher si une faute a été commise dans les conditions d'obtention du permis de construire, l'expert a pu retenir à juste titre dans la conclusion de son rapport que l'absence d'encloisonnement de la cage d'escalier et l'absence d'extincteur caractérisaient des non-conformités de l'immeuble ; que la cour retient en conséquence que la SCI Colbert a commis une faute en ne respectant pas l'obligation d'encloisonnement de la cage d'escalier et l'obligation de pose d'extincteurs dans l'immeuble litigieux ; que, sur le lien de causalité entre l'absence d'encloisonnement de l'escalier et l'aggravation de l'incendie, il résulte du rapport d'expertise réalisé par M. [P], reprenant à son compte les observations de M. [Z], que lorsque M. [C] et M. [U] ont ouvert la porte de l'appartement donnant sur le palier pour en sortir, il y a eu un apport d'air neuf accentué par le fait que l'escalier n'était pas cloisonné, car cet air est venu de l'ensemble de la cage d'escalier, que l'expert précise que si l'escalier avait été encloisonné, l'appartement dont le volume est d'environ 85 mètres cube n'aurait été mis en contact qu'avec les 32 mètres cube du palier du 2ème étage, alors qu'en l'absence d'encloisonnement, il a été mis en contact avec environ 200 mètres cube d'air représentant le palier et la cage d'escalier ; que le CNPP, consulté par l'expert M. [P], conclut d'ailleurs que 'la conception même d'un escalier encloisonné permet d'envisager sans ambiguïté' une influence en réduisant l'alimentation en air du foyer ; que l'expert retient donc à juste titre que l'encloisonnement aurait diminué la puissance de feu ; qu'il résulte de ces éléments, sans qu'il y ait lieu de s'appuyer sur le rapport réalisé par le CNPP à la demande de M. [X], que l'absence d'encloisonnement a causé une aggravation de la puissance de feu ; que, sur le lien de causalité entre l'absence d'extincteur et l'aggravation de l'incendie, il résulte d'abord de l'audition de M. [C] par les services de police qu'après être sorti de l'appartement sur le palier, il a cherché un extincteur pour venir en aide à son ami ; que M. [X] verse d'ailleurs aux débats une attestation de l'employeur de M. [C] démontrant que ce dernier avait suivi une formation relative au maniement d'un extincteur sur feu réel en octobre 2002, soit quelques mois avant l'accident ; que l'expert M. [P] note dans son rapport qu'un extincteur envoyant pendant environ 30 secondes (s'il a une capacité de 6 litres) ou environ 45 secondes (s'il a une capacité de 9 litres), jusqu'à une distance de 3 à 4 mètres, de l'eau pulvérisée sous forme facilement orientable par lance avec poignée, aurait permis de dégager très provisoirement M. [X] des fumées et des flammes, rendant ainsi possible le franchissement en quelques secondes du 'rideau de flammes' qui le séparait de ses camarades ; que, pour répondre aux dires de la SCI Colbert et de la société GAN, et notamment au rapport du commandant [H] consulté par la SCI et son assureur, l'expert M. [P] a consulté le Centre national de prévention et de protection (CNPP) ; que le rapport du CNPP, particulièrement technique sur l'alimentation du feu et sa puissance, et d'ailleurs non sérieusement contesté par les parties, conclut dans les termes suivants : 'Les arguments développés dans le rapport (de [H]) ne permettent pas de démontrer qu'un extincteur de 6 litres aurait été inefficace' ; qu'après avoir répondu de manière objective et argumentée aux dires des parties, et après avoir consulté le CNPP, l'expert conclut clairement que la présence d'extincteurs, comme exigée par l'arrêté préfectoral du Nord, aurait permis à M. [X] de traverser en quelques secondes le rideau de flammes le séparant de ses camarades ; qu'il résulte de ces éléments qu'en ne réalisant pas l'encloisonnement de la cage d'escalier et en ne respectant pas l'obligation d'installer des extincteurs dans l'immeuble, la SCI a commis des fautes ayant concouru, de manière certaine et directe, à l'aggravation de l'incendie à l'origine du dommage subi par M. [X] ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré et de déclarer la SCI Colbert entièrement responsable des conséquences dommageables subies par M. [X], à la suite de l'incendie dont il a été victime le 13 avril 2003 (cf. arrêt, p. 8 à 11) ;

1°) ALORS QUE la responsabilité de celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, n'est engagée vis-à-vis des tiers victimes des dommages causés par l'incendie qu'à la condition qu'il soit prouvé que soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension, doivent être attribuées à sa faute ; que le propriétaire d'un immeuble qui a fait rénover celui-ci ne peut se voir reprocher une faute tenant à l'absence d'exécution de travaux de sécurité prescrits par arrêté, dès lors qu'il a interrogé les services administratifs sur les travaux de mise en conformité nécessaires et a obtenu un visa de conformité de la commission de sécurité, chargée de l'application de la réglementation en vigueur ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que la SCI Colbert avait sollicité des services de l'urbanisme ses prescriptions pour la mise en conformité de l'immeuble au regard des normes de sécurité, puis obtenu de l'adjoint délégué à l'urbanisme un courrier du 9 novembre 1990 selon lequel les mesures de sécurité prises dans le cadre de la rénovation étaient conformes aux observations émises par la direction départementale des services d'incendie et de secours dans un rapport du 6 mars 1989 (concl., p. 6 in fine) ; qu'elle ajoutait qu'à la suite du sinistre, le responsable de l'urbanisme avait déclaré au Parquet que « les lieux étaient conformes à la législation en matière de sécurité incendie » (concl., p. 7 § 6) ; qu'il en résultait qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la SCI Colbert en tant que propriétaire ; qu'en décidant le contraire, au motif que l'encloisonnement de la cage d'escalier et la pose d'extincteurs devaient être effectués en vertu de deux arrêtés préfectoraux du 31 janvier 1986 et 8 juillet 1987 (arrêt, p. 9) et que les courriers adressés par l'administration « ne pouvaient pas dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur », tandis qu'au contraire il en résultait que la SCI avait respecté les mesures de sécurité imposées par l'administration, qu'elle avait elle-même sollicitées, la cour d'appel a violé l'article 1384 alinéa 2 du code civil ;

2°) ALORS QUE la société Allianz faisait valoir que si l'absence d'encloisonnement de l'escalier avait été qualifiée de facteur aggravant de l'incendie par l'expert, cette aggravation n'avait pu être quantifiée et ne concernait pas la possibilité pour M. [X] de s'échapper, le feu s'étant déjà largement propagé, de sorte qu'il n'existait pas de lien causal entre cette aggravation supposée et le dommage subi par M. [X] (concl., p. 8 § 12 et 13) ; qu'en se bornant à énoncer que l'expert avait retenu que l'encloisonnement aurait diminué la puissance du feu, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'encloisonnement avait contribué à empêcher M. [X] d'échapper au feu, compte tenu de sa propagation au moment où il a été réveillé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil ;

3°) ALORS QUE la cour d'appel a considéré que la SCI Colbert avait commis une faute en ne respectant l'obligation d'installer des extincteurs dans l'immeuble, et que cette faute engageait sa responsabilité sur le fondement de l'article 1384 alinéa 2 du code civil ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'extincteur avait contribué à la naissance ou à l'aggravation de l'incendie, ce qui n'était pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la SCI Colbert entièrement responsable des conséquences dommageables subies par M. [X], à la suite de l'incendie dont il a été victime le 13 avril 2003, d'avoir condamné in solidum la SCI Colbert et la société Allianz à payer à M. [X] la somme de 1.000.000 € à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, sauf à déduire la somme de 500.000 € déjà payée au titre de l'exécution provisoire du jugement, et d'avoir condamné in solidum la SCI Colbert et la société Allianz à payer à la CPAM de Roubaix-Tourcoing la somme de 500.000 € à titre de provision à valoir sur sa créance et la somme de 1.037 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

AUX MOTIFS QUE le tribunal note qu'il y a lieu de fixer la part de préjudice devant être indemnisée par la SCI Colbert en tenant compte du fait que, alors que l'incendie couvrait une zone de plusieurs mètres carrés en dégageant une chaleur de plusieurs centaines de degrés, il n'a pas été possible à MM. [C] et [U] d'actionner un extincteur en direction de M. [X] afin de pulvériser un jet d'eau à une distance de plusieurs mètres pendant une quarantaine de secondes de nature à créer une zone refroidie au travers de laquelle ce dernier aurait pu tenter de passer ; que le tribunal en déduit qu'il convient de considérer que M. [X] a perdu une chance de pouvoir s'extraire de l'appartement en feu équivalente à un taux de 33 % ; qu'en introduisant une perte de chance, non pas dans la consistance du préjudice, mais dans la réalisation du fait dommageable en faisant un partage de responsabilité, le tribunal fait une confusion entre la cause exclusive et la cause non exclusive en lien avec le préjudice ; qu'en effet, peu importe que la faute retenue par la cour ne soit pas la cause exclusive du dommage ; la faute du détenteur de tout ou partie de l'immeuble susceptible d'engager sa responsabilité peut consister dans toute négligence ou imprudence ayant seulement concouru à l'aggravation du sinistre, ce qu'a retenu la cour à la charge de la SCI Colbert ; que le préjudice de M. [X] ne saurait donc s'analyser en une perte de chance ; dès lors que la cour a constaté une faute et un lien de causalité certain et direct entre la faute et le préjudice, le préjudice doit être intégralement réparé par l'auteur de la faute ; que son préjudice consiste dans l'ensemble des conséquences dommageables de l'incendie dont il a été victime en lien direct et certain avec la faute de la SCI Colbert comme il a été expliqué ci-dessus (arrêt, p. 13 et 14) ;

1°) ALORS QUE la perte de chance correspond à la disparition actuelle et certaine d'une perspective favorable ; que sa réparation ne saurait être équivalente à l'avantage perdu ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que le préjudice allégué par M. [X] ne pouvait s'analyser, au mieux, qu'en une perte de chance (concl., p. 9 et 10) ; qu'elle exposait ainsi qu'à supposer que l'absence d'encloisonnement ait aggravé l'incendie, elle n'avait eu aucun impact sur la possibilité pour M. [X] de s'échapper (concl., p. 8 § 12 et 13) et que l'expert judiciaire avait reconnu que l'hypothèse selon laquelle l'usage d'un extincteur aurait permis à M. [X] de s'échapper méritait une démonstration technique (concl., p. 9) ; qu'elle en déduisait qu'il n'était pas certain que M. [X] aurait pu éviter les blessures qu'il a subies (concl., p. 12) ; qu'en se bornant à énoncer que la faute du détenteur de l'immeuble l'obligeait à réparer l'intégralité du dommage puisqu'elle y avait contribué, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'encloisonnement de la cage d'escalier était indifférente à la possibilité pour M. [X] de s'échapper, et si l'utilisation d'un extincteur aurait permis de façon certaine un tel sauvetage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil et du principe de la réparation intégrale ;

2°) ALORS QUE l'expert judiciaire avait conclu qu'il croyait que la présence d'un extincteur aurait pu permettre à M. [X] d'avoir une chance de traverser le rideau de flammes, sans pouvoir toutefois le démontrer à défaut de reconstitution ; que pour retenir un lien de causalité entre l'absence d'extincteur et le préjudice subi par M. [X], la cour d'appel a énoncé que l'expert judiciaire [P] avait « conclu clairement que la présence d'extincteurs […] aurait permis à M. [X] de traverser en quelques secondes le rideau de flammes le séparant de ses camarades » (arrêt, p. 11 § 5) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que l'expert avait conclu qu'il n'était pas en mesure de démontrer ce qui relevait d'une simple conviction, et que la présence d'un extincteur aurait seulement offert une chance à M. [X] de traverser le rideau de flammes, sans certitude, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis du rapport d'expertise, violant ainsi le principe suivant lequel le juge ne peut dénaturer les documents de la cause.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Allianz de son appel en garantie contre M. [C] et la Matmut ;

AUX MOTIFS QUE, sur le fondement légal, en cas d'incendie, les relations entre le propriétaire et le locataire sont régies par les articles 1733 du code civil ; mais que l'article 1733 du code civil ne s'applique que dans les rapports entre bailleur et locataire ; que vis à vis des tiers, le preneur n'est responsable des dommages causés par l'incendie ayant pris naissance dans l'immeuble que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable ; que dès lors, c'est seulement sur le fondement de l'article 1384 al. 2 que la garantie de M. [C] et de son assureur pourrait être recherchée ; que contrairement à ce qu'écrit la SCI Colbert, aucune faute ni négligence n'a été mis en évidence ni établie par le rapport d'expertise de M. [P] ; qu'au contraire, il résulte du rapport d'expertise que la cause de l'incendie est indéterminée puisqu'il peut s'agir des conditions d'utilisation de l'installation électrique de l'appartement ou d'une cause accidentelle imprévisible ; que les hypothèses de 'cigarette mal éteinte' ou de 'plaque de cuisson restée allumée' proposées par la SCI Colbert dans ses conclusions ne sont aucunement établies ni étayées ; que dès lors, aucune faute en lien avec la naissance, l'aggravation ou la propagation de l'incendie ne peut être mise à la charge de M. [C] ; que l'action en garantie de la SCI Colbert et de son assureur pour les dommages subis par M. [X], tiers non partie au contrat de bail, ne peut donc être fondée sur l'article 1733 du code civil ou sur l'article 1384 al.2 du code civil (arrêt, p. 12) ;

1°) ALORS QUE le preneur répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou vice de construction ; que le propriétaire bailleur, tenu d'indemniser un tiers victime d'un incendie né au sein des locaux loués, peut exercer un recours à l'encontre du preneur au titre des pertes occasionnées par cette obligation d'indemnisation ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que le recours de la SCI Colbert à l'encontre de M. [C], preneur à bail, ne pouvait s'exercer que dans le cadre de l'article 1733 du code civil et que, dès lors, M. [C] et son assureur de responsabilité, la Matmut, devaient répondre de plein droit de l'incendie (concl., p. 16 § 1) ; qu'en écartant l'application de ce texte au motif qu'il ne s'appliquait pas vis-à-vis des tiers, tandis qu'il demeure applicable dans les rapports entre bailleur et preneur à bail pour le recours du premier contre le second au titre de l'indemnisation mise à sa charge en raison d'un incendie né dans les locaux loués, la cour d'appel a violé les articles 1733 et 1384 alinéa 3 du code civil ;

2°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, la responsabilité de celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, n'est engagée vis-à-vis des tiers victimes des dommages causés par l'incendie qu'à la condition qu'il soit prouvé que, soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension doivent être attribuées à sa faute ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que, si l'expert judiciaire n'avait pu déterminer la cause de l'incendie, il avait néanmoins émis deux hypothèses, toutes deux relatives aux conditions d'utilisation de l'appartement loué par M. [C] (concl., p. 16) ; que, pour considérer que M. [C] n'avait commis aucune faute à l'origine de l'incendie, la cour d'appel a considéré qu'« aucune faute ni négligence n'a été mise en évidence ni établie par le rapport d'expertise de M. [P] » et que « les hypothèses de cigarette mal éteinte ou de plaque de cuisson restée allumée proposées par la SCI Colbert dans ses conclusions ne sont aucunement établies ni étayées » (arrêt, p. 12 § 7 et 9) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les hypothèses envisagées par l'expert étaient seulement relatives aux conditions d'utilisation de l'appartement par M. [C] et si, dès lors, elles impliquaient nécessairement que la cause de l'incendie procède d'une faute de M. [C] liée à un manquement de ce dernier à son obligation d'user de la chose en bon père de famille, peu important que cette cause elle-même soit inconnue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Allianz de son appel en garantie contre M. [G], ès qualités de liquidateur amiable de la société Arras Architecture, et M. [O], aux droits duquel vient la société [O], ès qualités d'administrateur ad hoc de la société Arras Architecture, et contre la MAF ;

AUX MOTIFS QUE, sur l'appel en garantie de la SCI Colbert et de la société Allianz contre M. [G] ès qualités de liquidateur amiable de la société Arras Architecture, M. [O] es qualité d'administrateur ad'hoc de la société Arras Architecture et la MAF ; qu'à titre liminaire, il convient de rappeler que M. [G] n'est partie à l'instance qu'en sa qualité de liquidateur amiable de la société Arras Architecture ; que, comme le note M. [G] ès qualités, il sera également rappelé que la société Arras Architecture a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés d'Arras le 2 février 1996, après avoir été liquidée amiablement par son gérant, M. [G] ; que la SCI Colbert et la société Allianz ne produisent aux débats aucune mission de maîtrise d'oeuvre confiée à la société Arras Architecture ; qu'ils produisent un document daté du 30 novembre 1990 démontrant que la société Arras Architecture est intervenue pour adresser les procès-verbaux de conformité concernant l'aménagement du dispositif d'évacuation des fumées et de l'installation de portes coupe-feu ; que cette pièce est totalement insuffisante à démontrer l'existence d'une prétendue mission de conseil de la société Arras Architecture dans la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble ; que surabondamment, la SCI Colbert et la société Allianz ne démontrent aucun manquement à un éventuel devoir de conseil en lien avec le dommage ; qu'il convient en conséquence de débouter la SCI Colbert et la société Allianz de leurs appels en garantie dirigés contre M. [G] ès qualités de liquidateur amiable de la société Arras Architecture, Maître [O] es qualité d'administrateur ad hoc de la société Arras Architecture et la MAF (arrêt, p. 13) ;

1°) ALORS QUE le professionnel chargé d'une mission de mise en conformité d'un immeuble en rénovation aux prescriptions de sécurité engage sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage, au titre des dommages causés à des tiers, à la suite d'un incendie dont la naissance ou l'aggravation sont consécutives à des manquements à ces prescriptions ; qu'en l'espèce, la société Allianz faisait valoir que la société Arras Architecture avait été chargée d'une mission liée à la mise en conformité de l'immeuble aux normes de sécurité, ainsi qu'il résultait notamment d'une lettre adressée par son gérant à l'interlocuteur du service de l'urbanisme pour le compte de la SCI Colbert au mois de novembre 2009, par lequel il avait transmis divers justificatifs de conformité de l'installation (concl., p. 15) ; que cette lettre avait été prise en considération par l'expert judiciaire, lequel s'était également appuyé sur une lettre adressée par la SCI Colbert à la ville de Lille le 1er octobre, selon laquelle la société Arras Architecture avait été chargée de mettre l'immeuble en conformité, pour conclure que cette société devait répondre de l'absence d'encloisonnement de la cage d'escalier et de l'absence de pose d'extincteurs (rapport, p. 77) ; qu'en se bornant à énoncer que n'était pas établie, à l'examen de la lettre du 30 novembre 1990, « l'existence d'une prétendue mission de conseil de la société Arras Architecture dans la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble » (arrêt, p. 13 § 9), sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette lettre, prise en considération par l'expert judiciaire, établissait à tout le moins que la société Arras Architecture avait été chargée d'une mission de mise en conformité de l'immeuble, ce qui lui imposait un devoir de conseil et de mise en garde au profit du maître de l'ouvrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;

2°) ALORS QUE tout professionnel est tenu d'une obligation de conseil accessoire à la mission qui lui a été confiée ; que la cour d'appel, envisageant l'hypothèse dans laquelle une mission aurait été confiée à la société Arras Architecture dans le cadre de la mise en conformité de l'immeuble à la réglementation relative à la sécurité, a jugé que « surabondamment, la SCI Colbert et la société Allianz ne démontrent aucun manquement à un éventuel devoir de conseil en lien avec le dommage » (arrêt, p. 13 § 10) ; qu'en se prononçant ainsi, tout en ayant retenu la responsabilité de la SCI Colbert au titre de manquements aux prescriptions réglementaires de sécurité, ce dont il s'évinçait que le professionnel chargé d'une mission relative à la mise en conformité de l'immeuble avait nécessairement l'obligation d'informer le maître de l'ouvrage sur l'ensemble des travaux de sécurité nécessaire et, le cas échéant, de l'alerter sur les omissions de la commission de sécurité sollicitée sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1147 du code civil.Moyens produits AU POURVOI INCIDENT par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la SCI Colbert.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la SCI entièrement responsable des conséquences dommageables subies par M. [X], à la suite de l'incendie dont il a été victime le 13 avril 2003, de l'avoir condamnée in solidum avec la société Allianz à payer à M. [X] la somme de 1.000.000 € à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, sauf à déduire la somme de 500.000 € déjà payée au titre de l'exécution provisoire du jugement, et de l'avoir condamnée in solidum avec la société Allianz à payer à la CPAM de Roubaix-Tourcoing la somme de 500.000 € à titre de provision à valoir sur sa créance et la somme de 1.037 € au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion,

Aux motifs que, sur les circonstances de l'incendie, il résulte de l'enquête de police produite aux débats que le 13 avril 2003, M. [C] est rentré chez lui accompagné de deux amis, M. [X] et M. [U], que le locataire s'est couché dans sa chambre et ses deux amis se sont endormis dans le canapé-lit du séjour, que vers 8h, M. [U] a été réveillé par les flammes se situant à peu de distance du bout du canapé-lit, qu'après avoir donné l'alerte en criant, M. [U] s'est dirigé vers la porte de sortie de l'appartement dont il est sorti avec M. [C], que M. [X] n'est pas parvenu à sortir de l'appartement en raison d'un « mur de flammes » le séparant de la porte de sortie de l'appartement malgré l'assistance que ses amis ont tenté de lui apporter, qu'il a ouvert une fenêtre et s'est suspendu à la rambarde métallique jusqu'à sa chute au sol deux étages en contrebas ; qu'il résulte ensuite de l'expertise diligentée par M. [P] que deux causes du sinistre peuvent être retenues, l'une ou l'autre : soit un feu occasionné par les conditions d'utilisation de l'installation électrique de l'appartement, soit un feu consécutif à une cause accidentelle imprévisible ; que, sur la responsabilité de la SCI Colbert, il résulte de l'article 1384 alinéa 2 du code civil que la responsabilité de celui qui détient à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble dans lequel un incendie a pris naissance est engagée vis à vis des tiers victimes des dommages causés par cet incendie, dès lors qu'il est prouvé que soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension doivent être attribuées à sa faute ; que, sur la faute de la SCI Colbert, il résulte de l'article 19 de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986 relatif à la protection contre l'incendie des bâtiments d'habitation, pris en application du code de la construction et de l'habitation, que les parois des cages d'escalier non situées en façade doivent être coupe-feu, et que les habitations dont le plancher bas du logement le plus haut est à plus de huit mètres du sol doivent être équipées de portes séparant l'escalier des circulations horizontales ; qu'en l'espèce, il résulte du rapport d'expertise réalisé par M. [P] que l'immeuble appartenant à la SCI Colbert dans lequel se trouvait l'appartement incendié est de la « deuxième famille » et que le plancher bas du logement le plus haut est à plus de huit mètres du sol ; que ce sont ces éléments qui conduisent l'expert à écrire dans son rapport en page 62 : « Comme l'immeuble incendié a son plancher bas du logement le plus haut à plus de huit mètres (exactement 11,17 m selon mesure contradictoire le 7 novembre 2003), il aurait dû être prescrit un encloisonnement de l'escalier, comme cela a été fait après l'incendie, lors de la reconstruction » ; qu'il résulte de l'article 2 de l'arrêté préfectoral (Préfet du Nord) du 8 juillet 1987, pris au visa du code de la construction et de l'habitation et de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986 susvisé que « dans les immeubles collectifs d'habitation, devront être posés soit des extincteurs à eau pulvérisée de 6 litres tous les niveaux, soit de 9 litres tous les deux niveaux » ; qu'il est ensuite produit aux débats un courrier adressé le 23 février 1989 par le Colonel commandant le corps des sapeurs-pompiers de Lille au Directeur départemental des services d'incendie et de secours de Lille concernant la réhabilitation de l'immeuble ; que ce courrier mentionne bien l'article 2 de l'arrêté préfectoral susvisé comme étant applicable et prescrit la mise en place d'un dispositif d'évacuation des fumées en haut de la cage d'escalier ; que la SCI Colbert produit aux débats un courrier, daté du 8 novembre 1990 et adressé par le directeur du SDIS au maire de Lille, faisant état d'une visite de l'immeuble le 26 octobre 1990 et mentionnant que les prescriptions émises par le colonel des sapeurs-pompiers ont été suivies d'effet ; qu'elle produit également un courrier du service de l'urbanisme de Lille mentionnant que les mesures de sécurité prises sont conformes aux observations émises par le SDIS ; que compte tenu de l'ampleur des travaux de réhabilitation (réhabilitation d'un immeuble en vue de créer une surface commerciale et 22 logements), et des termes de l'arrêté du 31 janvier 1986, ces courriers ne pouvaient pas dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur, et notamment de l'obligation d'encloisonnement de la cage d'escalier prescrite par l'arrêté interministériel de 1986 ; que la SCI Colbert produit enfin une réponse ministérielle du 29 février 1988 selon laquelle l'arrêté du 31 janvier 1986 modifié le 18 août 1986 n'exige pas la présence d'extincteur dans les bâtiments d'habitation ; que cette réponse ne fait pas échec à l'obligation de respecter l'arrêté préfectoral du 8 juillet 1987 applicable au département du Nord, et pris en application de l'arrêté interministériel du 31 janvier 1986, imposant la présence d'extincteurs dans les immeubles d'habitation dans le département du Nord ; qu'il résulte de ces éléments que, sans qu'il y ait lieu de rechercher si une faute a été commise dans les conditions d'obtention du permis de construire, l'expert a pu retenir à juste titre dans la conclusion de son rapport que l'absence d'encloisonnement de la cage d'escalier et l'absence d'extincteur caractérisaient des non-conformités de l'immeuble ; que la cour retient en conséquence que la SCI Colbert a commis une faute en ne respectant pas l'obligation d'encloisonnement de la cage d'escalier et l'obligation de pose d'extincteurs dans l'immeuble litigieux ; que, sur le lien de causalité entre l'absence d'encloisonnement de l'escalier et l'aggravation de l'incendie, il résulte du rapport d'expertise réalisé par M. [P], reprenant à son compte les observations de M. [Z], que lorsque M. [C] et M. [U] ont ouvert la porte de l'appartement donnant sur le palier pour en sortir, il y a eu un apport d'air neuf accentué par le fait que l'escalier n'était pas cloisonné, car cet air est venu de l'ensemble de la cage d'escalier, que l'expert précise que si l'escalier avait été encloisonné, l'appartement dont le volume est d'environ 85 mètres cube n'aurait été mis en contact qu'avec les 32 mètres cube du palier du 2ème étage, alors qu'en l'absence d'encloisonnement, il a été mis en contact avec environ 200 mètres cube d'air représentant le palier et la cage d'escalier ; que le CNPP, consulté par l'expert M. [P], conclut d'ailleurs que « la conception même d'un escalier encloisonné permet d'envisager sans ambiguïté » une influence en réduisant l'alimentation en air du foyer ; que l'expert retient donc à juste titre que l'encloisonnement aurait diminué la puissance de feu ; qu'il résulte de ces éléments, sans qu'il y ait lieu de s'appuyer sur le rapport réalisé par le CNPP à la demande de M. [X], que l'absence d'encloisonnement a causé une aggravation de la puissance de feu ; que, sur le lien de causalité entre l'absence d'extincteur et l'aggravation de l'incendie, il résulte d'abord de l'audition de M. [C] par les services de police qu'après être sorti de l'appartement sur le palier, il a cherché un extincteur pour venir en aide à son ami ; que M. [X] verse d'ailleurs aux débats une attestation de l'employeur de M. [C] démontrant que ce dernier avait suivi une formation relative au maniement d'un extincteur sur feu réel en octobre 2002, soit quelques mois avant l'accident ; que l'expert M. [P] note dans son rapport qu'un extincteur envoyant pendant environ 30 secondes (s'il a une capacité de 6 litres) ou environ 45 secondes (s'il a une capacité de 9 litres), jusqu'à une distance de 3 à 4 mètres, de l'eau pulvérisée sous forme facilement orientable par lance avec poignée, aurait permis de dégager très provisoirement M. [X] des fumées et des flammes, rendant ainsi possible le franchissement en quelques secondes du « rideau de flammes » qui le séparait de ses camarades ; que, pour répondre aux dires de la SCI Colbert et de la société GAN, et notamment au rapport du commandant [H] consulté par la SCI et son assureur, l'expert M. [P] a consulté le Centre national de prévention et de protection (CNPP) ; que le rapport du CNPP, particulièrement technique sur l'alimentation du feu et sa puissance, et d'ailleurs non sérieusement contesté par les parties, conclut dans les termes suivants : « Les arguments développés dans le rapport (de [H]) ne permettent pas de démontrer qu'un extincteur de 6 litres aurait été inefficace » ; qu'après avoir répondu de manière objective et argumentée aux dires des parties, et après avoir consulté le CNPP, l'expert conclut clairement que la présence d'extincteurs, comme exigée par l'arrêté préfectoral du Nord, aurait permis à M. [X] de traverser en quelques secondes le rideau de flammes le séparant de ses camarades ; qu'il résulte de ces éléments qu'en ne réalisant pas l'encloisonnement de la cage d'escalier et en ne respectant pas l'obligation d'installer des extincteurs dans l'immeuble, la SCI a commis des fautes ayant concouru, de manière certaine et directe, à l'aggravation de l'incendie à l'origine du dommage subi par M. [X] ; qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré et de déclarer la SCI Colbert entièrement responsable des conséquences dommageables subies par M. [X], à la suite de l'incendie dont il a été victime le 13 avril 2003,

Alors d'une part que la responsabilité de celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, n'est engagée vis-à-vis des tiers victimes des dommages causés par l'incendie qu'à la condition qu'il soit prouvé que soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension, doivent être attribuées à sa faute ; que le propriétaire d'un immeuble qui a fait rénover celui-ci ne peut se voir reprocher une faute tenant à l'absence d'exécution de travaux de sécurité prescrits par arrêté, dès lors qu'il a interrogé les services administratifs sur les travaux de mise en conformité nécessaires et a obtenu un visa de conformité de la commission de sécurité, chargée de l'application de la réglementation en vigueur ; qu'en l'espèce, comme cela avait été exposé, la SCI avait sollicité des services de l'urbanisme ses prescriptions pour la mise en conformité de l'immeuble au regard des normes de sécurité, puis obtenu de l'adjoint délégué à l'urbanisme un courrier du 9 novembre 1990 selon lequel les mesures de sécurité prises dans le cadre de la rénovation étaient conformes aux observations émises par la direction départementale des services d'incendie et de secours dans un rapport du 6 mars 1989 (concl. p. 7) ; qu'à la suite du sinistre, les services de l'urbanisme avait confirmé la parfaite conformité de l'immeuble aux règles de sécurité incendie (ibid.) ; qu'il en résultait qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la SCI en tant que propriétaire ; qu'en décidant le contraire, pour la raison que l'encloisonnement de la cage d'escalier et la pose d'extincteurs devaient être effectués en vertu de deux arrêtés préfectoraux du 31 janvier 1986 et 8 juillet 1987 et que les courriers adressés par l'administration « ne pouvaient pas dispenser la SCI Colbert du respect de la réglementation en vigueur », tandis qu'au contraire il en résultait que la SCI avait respecté les mesures de sécurité imposées par l'administration, qu'elle avait elle-même sollicitées, la cour d'appel a violé l'article 1384 alinéa 2 du code civil,

Alors d'autre part que, si l'absence d'encloisonnement de l'escalier avait été qualifiée de facteur aggravant de l'incendie par l'expert, cette aggravation n'avait pu être quantifiée et ne concernait pas la possibilité pour M. [X] de s'échapper, le feu s'étant déjà largement propagé, de sorte qu'il n'existait pas de lien causal entre cette aggravation supposée et le dommage subi par M. [X] ; qu'en se bornant à énoncer que l'expert avait retenu que l'encloisonnement aurait diminué la puissance du feu, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'encloisonnement avait contribué à empêcher M. [X] d'échapper au feu, compte tenu de sa propagation au moment où il a été réveillé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte,

Alors enfin qu'en reprochant à faute à la SCI de n'avoir pas respecté l'obligation d'installer des extincteurs dans l'immeuble, qui engageait sa responsabilité sur le fondement de l'article 1384 alinéa 2 du code civil, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'extincteur avait contribué à la naissance ou à l'aggravation de l'incendie, ce qui n'était pas le cas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

Il est fait le même grief à l'arrêt attaqué,

Aux motifs que le tribunal note qu'il y a lieu de fixer la part de préjudice devant être indemnisée par la SCI Colbert en tenant compte du fait que, alors que l'incendie couvrait une zone de plusieurs mètres carrés en dégageant une chaleur de plusieurs centaines de degrés, il n'a pas été possible à MM. [C] et [U] d'actionner un extincteur en direction de M. [X] afin de pulvériser un jet d'eau à une distance de plusieurs mètres pendant une quarantaine de secondes de nature à créer une zone refroidie au travers de laquelle ce dernier aurait pu tenter de passer ; que le tribunal en déduit qu'il convient de considérer que M. [X] a perdu une chance de pouvoir s'extraire de l'appartement en feu équivalente à un taux de 33% ; qu'en introduisant une perte de chance, non pas dans la consistance du préjudice, mais dans la réalisation du fait dommageable en faisant un partage de responsabilité, le tribunal fait une confusion entre la cause exclusive et la cause non exclusive en lien avec le préjudice ; qu'en effet, peu importe que la faute retenue par la cour ne soit pas la cause exclusive du dommage ; la faute du détenteur de tout ou partie de l'immeuble susceptible d'engager sa responsabilité peut consister dans toute négligence ou imprudence ayant seulement concouru à l'aggravation du sinistre, ce qu'a retenu la cour à la charge de la SCI Colbert ; que le préjudice de M. [X] ne saurait donc s'analyser en une perte de chance ; dès lors que la cour a constaté une faute et un lien de causalité certain et direct entre la faute et le préjudice, le préjudice doit être intégralement réparé par l'auteur de la faute ; que son préjudice consiste dans l'ensemble des conséquences dommageables de l'incendie dont il a été victime en lien direct et certain avec la faute de la SCI Colbert comme il a été expliqué ci-dessus,

Alors d'une part que la perte de chance correspond à la disparition actuelle et certaine d'une perspective favorable ; que sa réparation ne saurait être équivalente à l'avantage perdu ; qu'en l'espèce, comme la SCI l'avait exposé, la réparation du préjudice allégué par M. [X] ne pouvait intervenir qu'au titre d'une perte de chance (concl. p. 16) ; qu'aucune certitude ne permettait d'affirmer que M. [X] aurait disposé d'une chance certaine de s'extraire dans de meilleures conditions (ibid.) ; qu'en se bornant à énoncer que la faute du détenteur de l'immeuble l'obligeait à réparer l'intégralité du dommage puisqu'elle y avait contribué, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence d'encloisonnement de la cage d'escalier était indifférente à la possibilité pour M. [X] de s'échapper, et si l'utilisation d'un extincteur aurait permis de façon certaine un tel sauvetage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du même texte et du principe de la réparation intégrale,

Alors d'autre part que l'expert judiciaire avait conclu qu'il croyait que la présence d'un extincteur aurait pu permettre à M. [X] d'avoir une chance de traverser le rideau de flammes, sans pouvoir toutefois le démontrer à défaut de reconstitution ; que pour retenir un lien de causalité entre l'absence d'extincteur et le préjudice subi par M. [X], la cour d'appel a énoncé que l'expert judiciaire [P] avait « conclu clairement que la présence d'extincteurs […] aurait permis à M. [X] de traverser en quelques secondes le rideau de flammes le séparant de ses camarades » (arrêt, p. 11 § 5) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que l'expert avait conclu qu'il n'était pas en mesure de démontrer ce qui relevait d'une simple conviction, et que la présence d'un extincteur aurait seulement offert une chance à M. [X] de traverser le rideau de flammes, sans certitude, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis du rapport d'expertise, violant ainsi le principe suivant lequel le juge ne peut dénaturer les documents de la cause.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI de son appel en garantie contre M. [C] et la Matmut,

Aux motifs que, sur le fondement légal, en cas d'incendie, les relations entre le propriétaire et le locataire sont régies par les articles 1733 du code civil ; mais que l'article 1733 du code civil ne s'applique que dans les rapports entre bailleur et locataire ; que vis à vis des tiers, le preneur n'est responsable des dommages causés par l'incendie ayant pris naissance dans l'immeuble que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable ; que dès lors, c'est seulement sur le fondement de l'article 1384 al. 2 que la garantie de M. [C] et de son assureur pourrait être recherchée ; que contrairement à ce qu'écrit la SCI Colbert, aucune faute ni négligence n'a été mis en évidence ni établie par le rapport d'expertise de M. [P] ; qu'au contraire, il résulte du rapport d'expertise que la cause de l'incendie est indéterminée puisqu'il peut s'agir des conditions d'utilisation de l'installation électrique de l'appartement ou d'une cause accidentelle imprévisible ; que les hypothèses de « cigarette mal éteinte » ou de « plaque de cuisson restée allumée » proposées par la SCI Colbert dans ses conclusions ne sont aucunement établies ni étayées ; que dès lors, aucune faute en lien avec la naissance, l'aggravation ou la propagation de l'incendie ne peut être mise à la charge de M. [C] ; que l'action en garantie de la SCI Colbert et de son assureur pour les dommages subis par M. [X], tiers non partie au contrat de bail, ne peut donc être fondée sur l'article 1733 du code civil ou sur l'article 1384 al.2 du code civil,

Alors d'une part que le preneur répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou vice de construction ; que le propriétaire bailleur, tenu d'indemniser un tiers victime d'un incendie né au sein des locaux loués, peut exercer un recours à l'encontre du preneur au titre des pertes occasionnées par cette obligation d'indemnisation ; qu'en l'espèce, comme la SCI l'avait exposé (concl. p. 27 et s.), son recours à l'encontre de M. [C], preneur à bail, s'exerçait dans le cadre de l'article 1733 du code civil ; que, dès lors, M. [C] et son assureur de responsabilité, la Matmut, devaient répondre de plein droit de l'incendie ; qu'en écartant l'application de ce texte au motif qu'il ne s'appliquait pas vis-à-vis des tiers, tandis qu'il demeure applicable dans les rapports entre bailleur et preneur à bail pour le recours du premier contre le second au titre de l'indemnisation mise à sa charge en raison d'un incendie né dans les locaux loués, la cour d'appel a violé les articles 1733 et 1384 alinéa 3 du code civil,

Alors d'autre part que, subsidiairement, la responsabilité de celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance, n'est engagée vis-à-vis des tiers victimes des dommages causés par l'incendie qu'à la condition qu'il soit prouvé que, soit la naissance de l'incendie, soit son aggravation ou son extension doivent être attribuées à sa faute ; qu'en l'espèce, comme la SCI l'avait exposé (concl. p. 29), si l'expert judiciaire n'avait pu déterminer la cause de l'incendie, il avait néanmoins émis des hypothèses, toutes relatives aux conditions d'utilisation de l'appartement loué par M. [C] ; que, pour considérer que M. [C] n'avait commis aucune faute à l'origine de l'incendie, la cour d'appel a considéré qu'« aucune faute ni négligence n'a été mise en évidence ni établie par le rapport d'expertise de M. [P] » et que « les hypothèses de cigarette mal éteinte ou de plaque de cuisson restée allumée proposées par la SCI Colbert dans ses conclusions ne sont aucunement établies ni étayées » ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les hypothèses envisagées par l'expert étaient seulement relatives aux conditions d'utilisation de l'appartement par M. [C] et si, dès lors, elles impliquaient nécessairement que la cause de l'incendie procède d'une faute de M. [C] liée à un manquement de ce dernier à son obligation d'user de la chose en bon père de famille, peu important que cette cause elle-même soit inconnue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :
, SUBSIDIAIRE

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI de son appel en garantie contre la société Arras Architecture, M. [G], ès-qualités de liquidateur amiable de la société Arras Architecture, et la MAF,

Aux motifs que, sur l'appel en garantie de la SCI Colbert et de la société Allianz contre M. [G] ès qualités de liquidateur amiable de la société Arras Architecture, M. [O] ès qualité d'administrateur ad'hoc de la société Arras Architecture et la MAF ; qu'à titre liminaire, il convient de rappeler que M. [G] n'est partie à l'instance qu'en sa qualité de liquidateur amiable de la société Arras Architecture ; que, comme le note M. [G] ès qualités, il sera également rappelé que la société Arras Architecture a fait l'objet d'une radiation du registre du commerce et des sociétés d'Arras le 2 février 1996, après avoir été liquidée amiablement par son gérant, M. [G] ; que la SCI Colbert et la société Allianz ne produisent aux débats aucune mission de maîtrise d'oeuvre confiée à la société Arras Architecture ; qu'ils produisent un document daté du 30 novembre 1990 démontrant que la société Arras Architecture est intervenue pour adresser les procès-verbaux de conformité concernant l'aménagement du dispositif d'évacuation des fumées et de l'installation de portes coupe-feu ; que cette pièce est totalement insuffisante à démontrer l'existence d'une prétendue mission de conseil de la société Arras Architecture dans la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble ; que surabondamment, la SCI Cobert et la société Allianz ne démontrent aucun manquement à un éventuel devoir de conseil en lien avec le dommage,

Alors d'une part que le professionnel chargé d'une mission de mise en conformité d'un immeuble en rénovation aux prescriptions de sécurité engage sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage, au titre des dommages causés à des tiers, à la suite d'un incendie dont la naissance ou l'aggravation sont consécutives à des manquements à ces prescriptions ; qu'en l'espèce, comme la SCI l'avait exposé (concl. p. 23 et s.), la société Arras Architecture avait été chargée d'une mission de vérification de l'aspect réglementaire, ainsi qu'il résultait notamment d'une lettre adressée le 30 novembre 1990 à l'interlocuteur du service de l'urbanisme pour le compte de la SCI Colbert au mois de novembre 2009, par lequel il avait transmis les procès-verbaux de conformité du dispositif d'évacuation des fumées et d'installations des portes coupe-feu ; qu'en se bornant à énoncer que n'était pas établie, à l'examen de la lettre du 30 novembre 1990, « l'existence d'une prétendue mission de conseil de la société Arras Architecture dans la réalisation des travaux de réhabilitation de l'immeuble », sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette lettre, prise en considération par l'expert judiciaire, établissait à tout le moins que la société Arras Architecture avait été chargée d'une mission de mise en conformité de l'immeuble, ce qui lui imposait un devoir de conseil et de mise en garde au profit du maître de l'ouvrage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil,

Alors d'autre part que tout professionnel est tenu d'une obligation de conseil accessoire à la mission qui lui a été confiée ; que la cour d'appel, envisageant l'hypothèse dans laquelle une mission aurait été confiée à la société Arras Architecture dans le cadre de la mise en conformité de l'immeuble à la réglementation relative à la sécurité, a jugé que « surabondamment, la SCI Colbert et la société Allianz ne démontrent aucun manquement à un éventuel devoir de conseil en lien avec le dommage » (arrêt, p. 13 § 10) ; qu'en se prononçant ainsi, tout en ayant retenu la réglementaires de sécurité, ce dont il s'évinçait que le professionnel chargé d'une mission relative à la mise en conformité de l'immeuble avait nécessairement l'obligation d'informer le maître de l'ouvrage sur l'ensemble des travaux de sécurité nécessaire et, le cas échéant, de l'alerter sur les omissions de la commission de sécurité sollicitée sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le même texte.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-11715
Date de la décision : 02/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Cour d'appel de Douai, 3 décembre 2015, 13/03848

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 03 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 02 mar. 2017, pourvoi n°16-11715


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Delvolvé et Trichet, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.11715
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award