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02/03/2017 | FRANCE | N°15-24876

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 02 mars 2017, 15-24876


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1721 du code civil ;

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Toulouse, 30 juin 2015), rendu en dernier ressort, que, selon bail commercial consenti le 29 septembre 2010 par M. Y..., la société Privilège Hôtels et Resorts est locataire de locaux à destination de résidence de tourisme qu'elle a sous-loués le 30 avril 2012 à la société Privilège Appart-Hôtels Toulouse ; que le bail commercial contenait une clause aux termes de laquell

e, en cas d'événement exceptionnel affectant la résidence et ne permettant pas u...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1721 du code civil ;

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Toulouse, 30 juin 2015), rendu en dernier ressort, que, selon bail commercial consenti le 29 septembre 2010 par M. Y..., la société Privilège Hôtels et Resorts est locataire de locaux à destination de résidence de tourisme qu'elle a sous-loués le 30 avril 2012 à la société Privilège Appart-Hôtels Toulouse ; que le bail commercial contenait une clause aux termes de laquelle, en cas d'événement exceptionnel affectant la résidence et ne permettant pas une occupation effective et normale des biens objets des présentes, le loyer serait suspendu et une clause subrogeant irrévocablement le preneur au bailleur dans ses droits et obligations relativement à la mise en jeu, contre le vendeur, de toutes les garanties de vente et de construction, telles que les garanties d'achèvement, biennales et décennales ; qu'un désordre de nature décennale a été dénoncé à l'assureur dommages-ouvrage qui a refusé, en arguant que l'exploitation n'avait pas été rendue impossible par les désordres, d'indemniser la société Privilège Hôtels et Resorts de la perte de sous-loyers ; que, sur opposition à une injonction de payer, le bailleur a sollicité la condamnation du preneur principal au paiement de loyers et charges que ce dernier avait suspendu et le preneur, la condamnation du bailleur à lui garantir la perte des sous-loyers ;

Attendu que, pour rejeter la demande en indemnisation de la société locataire d'une perte d'exploitation, le jugement retient que les désordres affectant l'appartement objet du litige relèvent de la garantie dommages-ouvrage pour laquelle, en application de la clause 4-2 du bail, la société locataire a été formellement subrogée dans les actions et droits du propriétaire, ainsi que pour percevoir les indemnités relatives aux différentes garanties de vente et de construction, et qu'il ne ressort pas du bail que le propriétaire substitue sa garantie à celle de l'assureur, en cas d'analyse différente de l'indemnité due entre l'assureur et le locataire ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l'assureur dommages-ouvrage n'était pas de nature à exonérer le bailleur de la garantie légale instituée par l'article 1721 du code civil, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa première branche, qui n'est pas manifestement de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande reconventionnelle de la société Privilège Hôtels et Resorts, le jugement rendu le 30 juin 2015, entre les parties, par le tribunal d'instance de Toulouse ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Saint-Gaudens ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer aux sociétés Privilège Hôtels et Resorts et Privilège Apart-Hôtels Toulouse la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour les sociétés Privilège Hôtels et Resorts et Privilège Apart-Hôtels Toulouse

Il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné la société SAS Privilège Hôtel et Resorts à payer à M. Y... la somme de 1650 euros et d'avoir rejeté sa demande reconventionnelle en indemnisation de son trouble de jouissance ;

AUX MOTIFS QUE l'article 4-1-F du contrat de bail commercial liant les parties prévoit que le preneur devra s'assurer de tous les risques spéciaux inhérents à son activité professionnelle et à son occupation des lieux et notamment: l'immeuble loué ... Le bailleur autorisant le preneur, mandaté à cet effet par le bail, et en tant que de besoin le subrogeant dans ses droits et obligations relativement à la mise en jeu de toute assurance, à encaisser les indemnités versées ; que l'article 4-2-A prévoit que le bailleur autorise le preneur dûment mandaté à cet effet par le bail et en tant que de besoin subroge dans ses droits et obligations relativement à la mise en jeu, contre le vendeur de toutes les garanties de vente et de construction, tels que les garanties d'achèvement, biennale et décennale auxquelles ce dernier est tenu et à mettre en jeu également l'assurance dommages ouvrage auprès du syndic. Il était prévu que les indemnités soient encaissées par le preneur ; que l'article 5.3 du bail intitulé "stipulation particulière "prévoit que le preneur pourra remettre en question le loyer numéraire en cas de force majeure interrompant l'activité touristique (tels que tremblement de terre, pollution de toute nature, catastrophe naturelle, entraves administratives ou autres libres accès ou à la circulation des personnes ou des biens ...) ou d'événements exceptionnels affectant la résidence et ne permettant pas une activité effective et normale du bien ; que cette disposition évoque d'une part des situations de force majeure, d'autre part des événements exceptionnels. Le titre de l'article et les situations envisagées induisent qu'il ne peut s'agir d'hypothèses prévues ailleurs dans le bail ; qu'en l'espèce, les articles 4-1 et 4-2 prévoient l'hypothèse des désordres affectant l'immeuble et résultant des garanties ; En l'espèce, les désordres affectant l'appartement objet du litige relèvent bien de la garantie dommage ouvrage. Ils ne peuvent être en conséquence considérés comme relevant des situations exceptionnelles entraînant l'application de l'article 5.3 du bail ; que cette analyse est confirmée par la lettre en date du 16 février 2015, par laquelle l'assureur dommages ouvrage, la SA SMA refusait à la SAS Privilège Hôtels etamp; Resorts sa garantie au titre des loyers en ces termes : "Nous vous rappelons qu'en vertu de l'article 4.2A des baux commerciaux contractés avec les différents propriétaires, vous êtes formellement subrogés pour percevoir les indemnités relatives aux différentes garanties de vente et de construction et c'est bien à ce titre que vous avez accepté notre offre provisionnelle du 23/06/2014 ..... Enfin, s'agissant des préjudices immatériels réclamés, nous vous rappelons notre courrier du 17/09/2014 et vous confirmons que nous ne partageons pas l'appréciation qui vous aurait mis dans l'impossibilité totale d'exploiter les appartements." ; qu'il ne ressort pas du bail que le propriétaire substitue sa garantie à celle de l'assureur, en cas d'analyse différente de l'indemnité due entre l'assureur et le locataire ; qu'au vu de ces éléments, la SAS Privilège Hôtels etamp; Resorts sera condamnée à verser à M. Philippe Y... 1 650 euros ; que pour les mêmes motifs, la demande reconventionnelle de la SAS Privilège Hôtels etamp; Resorts sera rejetée (jugement attaqué p. 3 al. 8 à 13, p. 4 al. 1 à 6) ;

1°) ALORS QUE le bail entre les parties stipule à son article 5.3 que « le preneur pourra remettre en question le loyer numéraire en cas
d'événement exceptionnel affectant la résidence et ne permettant pas une occupation effective et normale des biens objets des présentes. Le loyer sera suspendu jusqu'à la disparition du trouble de jouissance » ; que le Tribunal a constaté que les désordres affectant l'appartement loué relevaient bien de la garantie dommages ouvrage et que l'assureur dommages ouvrage refusait sa garantie au titre de la perte de loyers ; qu'en estimant néanmoins que la perte de jouissance qui en était résulté n'entrait pas dans le cadre des situations exceptionnelles visées à l'article 5.3 dès lors que le bail prévoyait par ailleurs la subrogation du preneur dans les droits du bailleur envers l'assureur dommages ouvrage, le Tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis de la clause de suspension des loyers en violation de l'article 1134 du Code civil ;

2°) ALORS QU'aux termes de l'article 1721 du Code civil, le bailleur doit garantie pour tous les vices ou défaut de la chose louée et qu'il doit indemniser le preneur lorsqu'il en résulte une perte ; que la clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l'assureur dommages ouvrage ne saurait exonérer le bailleur de sa garantie légale ; que le Tribunal qui constate que les désordres affectant l'appartement relèvent bien de la garantie dommages ouvrage mais qu'en l'espèce l'assureur dommages ouvrage a refusé sa garantie ne pouvait pas rejeter la demande d'indemnisation de la société Privilège Hôtels et Resorts sans violer l'article 1721 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-24876
Date de la décision : 02/03/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL (règles générales) - Bailleur - Obligations - Garantie - Vice de la chose louée - Exonération - Défaut - Cas - Clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l'assureur dommages-ouvrage

Une clause subrogeant le preneur dans les droits du bailleur envers l'assureur dommages-ouvrage n'est pas de nature à exonérer le bailleur de la garantie légale instituée par l'article 1721 du code civil


Références :

article 1721 du code civil

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Toulouse, 30 juin 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 02 mar. 2017, pourvoi n°15-24876, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Ghestin, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.24876
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