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02/03/2017 | FRANCE | N°15-15058

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 mars 2017, 15-15058


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain des juges du fond qui, après avoir examiné l'ensemble des éléments de fait et de preuve produits par les parties, ont décidé, par motifs propres et adoptés, que celles-ci n'étaient pas liées par un contrat d'engagement maritime ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [A] aux dépens ;

Vu l'ar

ticle 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause le pouvoir souverain des juges du fond qui, après avoir examiné l'ensemble des éléments de fait et de preuve produits par les parties, ont décidé, par motifs propres et adoptés, que celles-ci n'étaient pas liées par un contrat d'engagement maritime ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [A] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. [A].

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. [E] [A] de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat aux torts de l'employeur pour non-paiement des salaires, à la condamnation de Mme [H] [U] en personne et ès qualités à lui payer diverses sommes au titre des salaires de la période ayant couru du 19 avril 2010 à la date de la rupture du contrat, outre les congés payés y afférents, à ce qu'il soit dit que les indemnités journalières et la pension d'invalidité versées par l'ENIM devront être déduites des sommes dues au titre des salaires et à la condamnation de Mme [H] [U] en personne et ès qualités à lui payer la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice consécutif au non-paiement de ses salaires,

AUX MOTIFS PROPRES QU
« Sauf situation du marin dit stabilisé, laquelle n'est ni revendiquée ni justifiée par M. [E] [A], en cas de contrats successifs d'embarquement maritime, le lien contractuel entre le marin et l'entreprise maritime tiré d'un contrat d'embarquement maritime se trouve interrompu entre les périodes d'embarquement.

M. [E] [A] se prévaut des effets d'un contrat d'engagement maritime l'ayant lié à [K] [U] au cours des 27 et 28 octobre 2006, alors que les ayants droits de ce dernier soutiennent que, ayant été débarqué depuis le 14 octobre 2006, M. [E] [A] ne peut prétendre au paiement d'un sa1aie au titre de la période postérieure à cette date.

Il appartient à celui qui invoque la reprise d'un contrat d'engagement à la suite d'un débarquement d'en rapporter la preuve.

La charge de la preuve de l'existence d'un nouvel embarquement lui incombant, M. [E] [A] soutient que [K] [U] savait parfaitement qu'au cours de la période de référence il travaillait pour son compte, cela se déduisant du fait que [K] [U] a signé tous ses chèques de paie sans contestation et a établi le 24 novembre 2006 un bulletin de paie avant de lui régler ses congés payés. M. [E] [A] ajoute à cette même lin qu'il a adressé à [K] [U] sa déclaration d'accident ainsi que ses avis de prolongation d'arrêt de travail, et qu'en outre [K] [U] a été destinataire de son avis d'inaptitude du 19 mars 2010 envoyé par le service de santé des gens de mer, faisant observer que les intimés ne démontrent pas le contraire. M. [E] [A] expose encore qu'il a adressé à [K] [U], le 9 décembre 2010, une lettre recommandée aux termes de laquelle il lui demandait de régulariser sa situation au regard de ses salaires et de son licenciement. Encore il fait valoir que l'absence de vente de poisson à la criée à la suite de la période de pêche des 27 et 28 octobre 2006 ne permet pas de déduire l'absence de travail et d'un contrat d'engagement. Il produit enfin le détail de ses services de marin établi à partir du logiciel Asterie.

Or il est constant que, tant en ce qui concerne la période ayant couru du 3 août au 4 octobre2006 que celle couvrant les 27 et 28 octobre 2006, c'est sur la base de la seule initiative de son frère, [G] [A] auquel [K] [U] avait confié le patronage de son navire le "Carabas" que M. [E] [A] a été enregistré par l'Administration des Territoires et de la Mer (logiciel Asterie) comme engagé cri qualité de matelot sur ce navire.

Par ailleurs il ne petit être tiré aucune conclusion de l'envoi à [K] [U] par le service de santé des gens de mer de la lettre datée du 19 mars 2010 relative à l'inaptitude de M. [E] [A] et de l'envoi par ce dernier du courrier daté du 9 décembre 2010 (sa pièce n 14), quant à la connaissance que [K] [U] aurait eu de l'emploi de l'appelant au cours de la période litigieuse, rien ne permettant de considérer que cette lettre a touché son destinataire, l'adresse y figurant n'étant plus celle de la famille [U] à cette date, ainsi qu'en justifient les appelants (pièce intimés n° 19 notamment).

De même M. [E] [A] ne justifie ni avoir adressé à [K] [U] ni a fortiori que ce celui-ci ait reçu sa déclaration d'accident ainsi que ses avis de prolongation d'arrêt de travail.

En outre, à supposer ces différents courriers reçus par [K] [U], leur réception ne ferait pas la démonstration d'un nouvel embarquement par M. [E] [A] à compter du 27 octobre 2006.

S'agissant des bulletins de paie dont se prévaut M. [E] [A], ceux qui constituent sa pièce n° 8 sont tous relatifs à la période antérieure au 27 octobre, 2006. Le bulletin de paie établi le 24 novembre 2006 (pièce de M. [E] [A] n° 17) porte exclusivement sur des congés payés, sans faire aucune référence à une journée de travail quelconque et donc aux 27 et 28 octobre 2006. Il est en outre à relever que ce dernier bulletin de paie mentionne 41 « jours de mer du marin », ce nombre de jours correspondant précisément à celui figurant au « détail du service » de M. [E] [A] produit par les parties pour la période ayant couru entre le 3 août et le 14 octobre 2006.

S'il ne peut être tiré aucune conclusion définitive du fait établi qu'il n'a été enregistré aucune vente de poisson à la criée au cours ou au terme de la période des 27 et 28 octobre 2006, cet élément constitue néanmoins un indice, étant cependant précisé que la charge de la preuve de son embarquement incombant à M. [E] [A], il n'appartient pas aux appelants de rapporter la preuve contraire.

En conséquence M. [E] [A] échouant dans l'administration de la preuve de son embarquement sur le navire dont était alors propriétaire [K] [U], pour la période des 27 et 28 octobre 2006, il doit être débouté de ses demandes en paiement d'arriéré de salaires, des congés payés y afférents et de dommages et intérêts pour non-paiement de salaire, et consécutivement en résiliation de son contrat de travail.

Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions. »

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES
« qu'il n'est plus contesté par Madame [U], que Monsieur [A] a été employé en qualité de matelot catégorie 5 à compter du 03 août 2006 sur le navire de pêche Carabas IO 703717 patronné à compter de cette date par son frère Monsieur [G] [A].

Monsieur [G] [A] avait été lui-même appelé à remplacer Monsieur [U] [K] patron de pêche et propriétaire du navire Carabas, dont l'activité avait été suspendue du fait d'un congé maladie.

Il résulte des mouvements établis par l'Administration des Territoires et de la Mer (logiciel Asterie) que l'un et l'autre ont été débarqués le 14 octobre 2006 après une collaboration ininterrompue depuis le 03 août 2006.

L'emploi occupé par Monsieur [A] [E] a donné lieu à l'établissement de bulletins de salaires jusqu'au 16 octobre 2006.

Monsieur [A] soutient qu'à compter du 27 octobre 2006, il a été de nouveau employé par Monsieur [U] et que le 28 octobre 2006 à l'issue de deux journées de travail, il a été victime d'un accident du travail qui entraînera un arrêt de travail prolongé jusqu'à l'avis d'inaptitude du 26 mars 2010 rendu par la Direction Départementale des Territoires et de la Mer.

Il reproche à ce dernier de n'avoir pas tiré toutes les conséquences juridiques de cet avis sur l'existence de son contrat d'engagement et de n'avoir pas réglé les salaires dus depuis le 19 avril 2010 date à laquelle l'avis d'inaptitude est devenu définitif.

Le demandeur se fonde sur les mouvements enregistrés sur le logiciel Asterie avec un embarquement le 27 octobre 2006 pour Monsieur [A] [E] et son frère [G] [A] et leur débarquement le 28 octobre 2006 à l'issue de deux journées de travail.

Cependant les modifications du rôle d'embarquement sont réalisées sur simple déclarations auprès des autorités maritimes par le frère du demandeur et sont donc des éléments de preuve insuffisants pour caractériser l'existence du contrat d'engagement maritime allégué.

Cette période prétendument travaillée n'a donné lieu à l'établissement d'aucun bulletin de salaire pour l'un ou pour l'autre.

Aucun chèque n'a été produit pour la période litigieuse confirmant a posteriori la volonté de Monsieur [U] de collaborer avec Monsieur [A] alors qu'il est soutenu dans les conclusions que Monsieur [U] a signé tous les chèques de paie sans jamais aucune contestation.

Il n'est pas non plus démontré que les deux journées de travail sur le Carabas alléguées par le demandeur correspondent à l'exécution de prestations effectives pour le compte de Monsieur [U]. Il résulte en effet de l'attestation du CEGOS du 15 mars 2012 qu'aucune vente à la criée n'a été réalisée.

Monsieur [A] qui conteste la neutralité du cabinet d'expertise n'a pourtant produit aucune attestation ou documents émanant de professionnels de la mer rapportant la réalité d'une sortie en mer les 27 et 28 octobre 2012.

Aucune action n'a été engagée amiablement ou judiciairement pour le règlement des salaires de ces deux jours de travail alors que l'accident du travail se serait déroulé sur le port de la COTINIERE en fin de campagne de pêche.

Des doutes entourent également les conditions dans lesquelles l'accident est intervenu sans autre témoin que le frère du demandeur rédacteur du rapport d'accident de travail, alors que celui-ci se serait déroulé lors des opérations d'amarrage du Carabas sur le quai du Port [Établissement 1], accident qui ne sera déclaré que deux jours plus tard le 30 octobre 2006 aux autorités maritimes empêchant toute mesure d'investigation sur la réalité même de l'accident et l'origine de celui-ci.

Le demandeur ne justifie pas non plus avoir transmis en temps utile à Monsieur [U] le certificat médical d'accident du travail initial établi le 28 octobre 2006 par le Docteur [N] ou les arrêts de travail de prolongation à Monsieur [U].

Enfin il n'est pas établi par Monsieur [A] que la lettre du médecin du Service de Santé des Gens de la Mer en date du 19 mars 2010 ait été effectivement portée à la connaissance de Monsieur [U] en temps utile. Si elle qualifie Monsieur [U] comme employeur de Monsieur [A], cette mention repose uniquement sur les déclarations de Monsieur [A]. Quant à la décision du 26 mars 2010 de la Direction Départementale des Territoires et de la Mer prenant acte des conclusions de la Commission Régionale d'aptitude physique à la navigation maritime, il n'est pas prouvé que Monsieur [U] en ait eu effectivement connaissance.

Les arrêts de travail établis à compter du 28 octobre 2006 (seul deux d'entre eux sont communiqués celui du 28/10/2006 et celui du 19 janvier 2012) et les décisions ayant abouti à la décision d'inaptitude sont donc insuffisantes pour rapporter la preuve d'un lien de subordination entre Monsieur [A] et Monsieur [U] et partant l'existence du contrat d'engagement allégué par le demandeur.

Monsieur [A] sera donc débouté de toutes ses demandes. »,

ALORS QUE si la charge de la preuve de l'existence d'un contrat d'engagement maritime incombe au demandeur, il revient à celui qui conteste un contrat de travail apparent de rapporter la preuve de son caractère fictif ; qu'en écartant l'existence d'un contrat d'engagement pour la période du 27 au 28 octobre 2006 aux motifs que, tant en ce qui concerne la période du 3 août au 4 octobre 2006 que celle couvrant les 27 et 28 octobre 2006, c'est sur la base de la seule initiative de M. [G] [A] frère de [E] [A], que ce dernier avait été enregistré par l'administration des territoires et de mer comme engagé sur ce navire tout en relevant que M. [G] [A] s'était vu confier par M. [U] le patronnage du Carabas, ce dont il résultait, qu'indépendamment de son lien de parenté avec la personne chargée de diriger le navire, M. [E] [A] avait été déclaré comme étant embarqué pour la période litigieuse par la personne assurant la direction du navire pour le compte de M. [U] et qu'il appartenait donc à ce dernier de rapporter la preuve du caractère fictif de cet embarquement, la cour d'appel qui a fait peser la charge de la preuve du contrat d'engagement sur M. [A] a violé les articles 1 à 3 du code du travail maritime, L.1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil,

ALORS QUE à supposer pour les besoins du raisonnement que la charge de la preuve du contrat d'engagement maritime pour la période du 27 au 28 octobre 20006 incombait à M. [A], que le juge est tenu d'examiner les éléments de preuve qui lui sont soumis ; qu'en énonçant qu'il ne pouvait être tiré aucune conclusion de l'envoi à M. [U] par le service de santé des gens de mer de la lettre du 19 mars 2010 relative à son inaptitude suite à son accident du travail et de l'envoi par ce dernier à son employeur de ce même document quant à la connaissance par M. [U] de l'emploi de M. [A] les 27 et 28 octobre 2006 dans la mesure où rien ne permettait de considérer que le destinataire avait été touché puisque l'adresse figurant n'aurait plus été celle de la famille [U], cependant que selon la pièce n° 14 produite par M. [A], M. [U] avait été avisé le 10 décembre 2010 de son courrier et avait refusé de le retirer, ce dont il résultait que l'adresse n'était pas erronée et qu'il avait été joint, la cour d'appel qui n'a pas examiné cet élément de preuve dans son intégralité, a violé l'article 1353 du code civil,

ALORS ENCORE QUE, à supposer pour les besoins du raisonnement que la charge de la preuve du contrat d'engagement maritime pour la période du 27 au 28 octobre 20006 incombait à M. [A], celle-ci peut résulter d'une déclaration d'accident du travail établie par le marin et dont l'employeur a nécessairement eu connaissance dans la mesure où l'accident a été pris en charge et qu'il n'a pas contesté cette décision ; qu'en énonçant que M. [A] ne justifiait pas avoir transmis en temps utile à M. [U] le certificat médical d'accident du travail initial établi le 28 octobre 2006 par le Docteur [N] ou les arrêts de travail de prolongation à M. [U], cependant que cet accident ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle et que les documents adressés à la caisse mentionnaient le nom de l'employeur, M. [U] avait nécessairement été informé de cette décision de prise en charge dès 2006 ou 2007 qu'il n'avait pas contestée, ce dont il résultait sa connaissance de la qualité de salarié de M. [A] pour la période litigieuse, la cour d'appel a violé les articles 1 à 3 du code du travail maritime, L.1221 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-15058
Date de la décision : 02/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 16 avril 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 mar. 2017, pourvoi n°15-15058


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Delamarre, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.15058
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