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01/03/2017 | FRANCE | N°15-28447

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 01 mars 2017, 15-28447


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 15 octobre 2015), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 5 mars 2015, pourvoi n° 13-27.882), que Mme [S] a obtenu, le 28 décembre 2000, auprès de la Société générale (la banque) la renégociation des modalités de remboursement d'un prêt immobilier contracté en 1991 ; que l'emprunteur n'ayant pas acquitté les dernières échéances du prêt renégocié, la banque lui a délivré des sommations de payer les montants restant dus,

selon elle, au titre du prêt et du solde débiteur du compte courant ; que, soutenan...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 15 octobre 2015), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 5 mars 2015, pourvoi n° 13-27.882), que Mme [S] a obtenu, le 28 décembre 2000, auprès de la Société générale (la banque) la renégociation des modalités de remboursement d'un prêt immobilier contracté en 1991 ; que l'emprunteur n'ayant pas acquitté les dernières échéances du prêt renégocié, la banque lui a délivré des sommations de payer les montants restant dus, selon elle, au titre du prêt et du solde débiteur du compte courant ; que, soutenant que ces sommations avaient été délivrées à tort et que la banque n'avait pas respecté les conditions de renégociation du prêt, Mme [S] l'a assignée en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que Mme [S] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes et de la condamner à payer diverses sommes à la banque, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge ne peut, sous couvert de rechercher la commune intention des parties, dénaturer les termes clairs et précis des documents contractuels soumis à son examen ; qu'en ayant énoncé, pour condamner Mme [S], que le tableau d'amortissement du 28 décembre 2000 n'avait de sens que s'il prévoyait les nouvelles échéances à compter de mars 2001, ce qui correspondait nécessairement à la commune intention des parties, quand l'offre modificative de prêt du 28 décembre 2000 prévoyait la renégociation du prêt au taux de 7,50 % pour une durée de neuf ans à compter du 5 mars 2000 et que le tableau d'amortissement faisant partie intégrante de l'offre modificative de prêt présentait l'échelonnement des nouvelles mensualités du 5 mars 2000 au 5 février 2009, la cour d'appel a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

2°/ que, dans ses conclusions d'appel, Mme [S] avait indiqué avoir scrupuleusement respecté les échéances du prêt résultant de l'offre modificative du 28 décembre 2000, aucun incident de paiement n'ayant été relevé ; qu'en énonçant que Mme [S] ne prétendait nullement avoir effectivement remboursé le prêt résultant de l'offre modificative pour les échéances fixées, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel après cassation de Mme [S] et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en ayant condamné Mme [S] à payer à la banque les sommes qu'elle réclamait en remboursement du prêt sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas, en tout état de cause, omis de tenir compte des échéances versées avant mars 1992, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, rendue nécessaire par les différentes stipulations du contrat pris dans l'ensemble de ses éléments, qui faisaient apparaître une incompatibilité entre, d'une part, la date de point de départ des échéances renégociées, d'autre part, le mode de détermination du capital restant dû et l'objet de l'offre de prêt modificative, que la cour d'appel a estimé que le prêt renégocié, établi suivant une offre du 28 décembre 2000 acceptée le 15 janvier 2001, prévoyait nécessairement des échéances à compter du 5 mars 2001 et non pas du 5 mars 2000 ;

Attendu, ensuite, que c'est sans dénaturer les conclusions de Mme [S] que la cour d'appel a énoncé que celle-ci ne prétendait nullement avoir remboursé le prêt, sur une durée de neuf ans et pour toutes les échéances fixées ;

Et attendu, enfin, qu'en retenant que les échéances réglées à compter d'octobre 1991, dont les montants étaient de 2 021,23 francs pour les deux premières et de 2 071,88 francs pour les trois dernières, n'étaient pas contestées mais qu'elles correspondaient à des échéances sur la période d'anticipation, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [S] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société générale la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme [S]

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame [S] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la Société générale et de l'avoir en conséquence condamnée à verser à la Banque les sommes de 1 772,90 € augmentée des intérêts au taux contractuel de 7,5 % à compter du 28 décembre 2010 au titre du solde du prêt immobilier et de 2 252,44 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2010 au titre du solde débiteur du compte ;

Aux motifs adoptés du tribunal que selon l'article 1156 du Code civil, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ; qu'en l'espèce, Madame [S] reproche à la Société Générale de lui avoir délivré deux sommations de payer le 28 décembre 2010 alors qu'à cette date, elle n'aurait plus été redevable d'aucune somme ni au titre du solde débiteur du compte ni au titre du solde du prêt ; or d'une part, les relevés de compte versés aux débats démontraient que, malgré la demande de clôture de son compte par Madame [S] formée par courrier recommandé daté du 28 avril 2009, la clôture n'avait pas été effective en raison du maintien de certains prélèvements mensuels, notamment des échéances du prêt immobilier ; que d'autre part, l'offre de prêt modificative établie le 28 décembre 2000 prévoyait la renégociation du prêt consenti le 22 juin 1991 à compter de la mensualité 109, qui correspondait, en application du tableau d'amortissement du 19 février 1992, à celle du mois de mars 2001 et non à la mensualité de mars 2000, comme indiqué manifestement par erreur dans le contrat ; que le montant du capital renégocié à hauteurs de 182 267,70 euros (lire francs) correspondait d'ailleurs au montant du capital restant dû au mois de février 2001 et non au mois de février 2000 ; que Madame [S] ne saurait valablement se prévaloir de l'erreur matérielle commise dans le contrat du 28 décembre 2000 pour prétendre être libérée du paiement du solde du prêt immobilier au mois de février 2009 alors qu'elle n'ignorait pas que ses règlements devaient se poursuivre jusqu'au mois de février 2010 pour solde le prêt ; que dès lors, en délivrant les deux sommations de payer litigieuses, la Société Générale n'avait commis aucun manquement à ses obligations contractuelles et qu'il convenait de débouter Madame [S] de sa demande de dommages et intérêts ;

Et aux motifs propres que Mme [S] ne pouvait prétendre s'en tenir à l'application exclusive du tableau d'amortissement intégré à l'offre de prêt qui, faisant partir la première échéance au 5 mars 2000, fixait le terme du remboursement en février 2009 au motif qu'il faisait partie intégrante de l'offre de prêt, en faisant une lecture isolée de cette stipulation sans considération des autres indications faisant aussi partie de l'offre ; que le prêt sur le fondement duquel la banque réclamait paiement de la somme de 1 772,90 euros avait été consenti suivant offre du 28 décembre 2000 à laquelle était joint un tableau d'amortissement ; que cette offre était qualifiée d'offre modificative d'un prêt conventionné avec baisse de taux et comportait une annexe I « modalités financières de la renégociation » et une annexe II « tableau d'amortissement après renégociation » et stipulait clairement que l'ensemble formait une convention unique et indivisible ; qu'elle précisait qu'il s'agissait d'une offre modificative au prêt consenti le 6 juin 1991 pour un montant de 250 000 francs, faite à la demande de l'emprunteur pour modifier le taux du prêt et fixait de nouvelles modalités, toutes les conditions générales et particulières de l'offre de prêt initiale autres que celles figurant dans l'offre modificative demeurant inchangées et continuant à s'appliquer sans novation ; que le contrat examiné en toutes ses stipulations ne se bornait pas à prévoir le remboursement d'un capital de 182 267,70 francs sur neuf ans à partir du 5 mars 2000 ; que le tableau d'amortissement lui-même (annexe 2) était présenté sous l'intitulé « prêt conventionné renégociation » et l'indication de ce qu'il était établi après paiement de la mensualité n° 108, soit celle du 5 février 2000 et d'un capital restant dû de 182 267,70 francs ; que les données concernant la renégociation précisaient que la durée du prêt d'origine consenti suivant offre du 6 juin 1991 était de 18 ans et que la renégociation était demandée à partir de l'échéance de la mensualité n° 109, soit celle du 5 mars 2000 pour neuf ans, la somme de 182 267,70 francs correspondant au capital dû avant paiement de cette mensualité ; que la 108ème mensualité était celle payée au bout d'un remboursement de neuf ans ; que sans même qu'il soit utile de se référer au tableau d'amortissement du prêt d'origine dont Mme [S] contestait la valeur contractuelle, l'offre de prêt du 28 décembre 2000 telle qu'acceptée contenait une anomalie en ce qu'elle prévoyait un nouveau tableau d'amortissement à effet au 5 mars 2000, bien que toutes les échéances du prêt initial eussent été réglées jusqu'à la 108ème, laquelle, même en se référant à la seule date de présentation de l'offre, sans tenir compte de sa date d'acceptation et de libération des fonds, ne pourrait se situer au plus tôt qu'en juin 2000 et imposerait donc l'obligation pour Mme [S] de reprendre rétroactivement neuf mois en arrière à partir de mars 2000, le remboursement de nouvelles échéances venant se cumuler sur plusieurs mois avec des échéances du prêt initial déjà réglées et le remboursement à partir du 5 mars 2000 d'un capital dont le montant était déterminé après paiement d'échéances du prêt initial échues jusqu'en juin 2000 au plus tôt ; que l'offre de prêt du 28 décembre 2000, présentée après renégociation du prêt initial à la demande de Mme [S] et acceptée par elle le 15 janvier 2001, avait pour seul objet de réduire pour l'avenir le montant des échéances mensuelles en conséquence de la réduction négociée du taux d'intérêt, sans modification de durée ; que l'incompatibilité apparente de la date de point de départ retenue par le tableau d'amortissement avec les indications concernant le mode de détermination du capital restant dû et l'objet de l'offre de prêt modificative nécessitait une interprétation de l'ensemble des stipulations contractuelles par la recherche de la commune intention des parties ; que l'offre de prêt initiale portait sur un prêt habitat au taux de 11,05 % hors assurance ; qu'étant destiné au financement de la construction d'une maison individuelle, il devait donner lieu à mise à disposition des fonds en plusieurs versements ; qu'il était stipulé une période d'anticipation d'une durée prévisionnelle de 24 mois, pendant laquelle les échéances s'élevaient à un maximum de 2 302,08 francs, variables en fonction des utilisations et une période d'amortissement de 216 mois pendant laquelle les échéances mensuelles fixes s'élevaient à 2 670,90 francs ; que Mme [S] reprochait à la Société Générale de produire un tableau d'amortissement fixant la première échéance en mars 1992 bien qu'elle eût réglé des échéances à compter d'octobre 1991 ; que ces versements n'étaient pas contestés pour des échéances dont les montants étaient de 2 021,23 francs pour les deux premières et de 2 071,88 francs pour les trois suivantes, mais correspondant à des échéances sur la période d'anticipation ; que le tableau d'amortissement produit par la banque avait été édité en février 1992 pour la seule phase d'amortissement du prêt à l'expiration de la phase d'anticipation et établi conformément aux stipulations de l'article 3B, 5B et 6B des conditions générales de l'offre initiale de prêt paraphée en toutes ses pages par Mme [S] ; que l'exemplaire produit n'était pas signé ; qu'il n'en demeurait pas moins que le montant du capital restant à rembourser au titre du prêt, suivant l'offre du 28 décembre 2000 acceptée par Mme [S] le 15 janvier 2001, avait été déterminé, sans contestation de sa part, par référence à ce tableau arrêtant la somme de 182 267,70 francs après paiement de l'échéance n° 108 datée de février 2001 ; que dès lors, l'offre de prêt modificative présentée en décembre 2000 sur demande de renégociation de Mme [S] qui l'avait acceptée en janvier 2001 et n'ayant vocation à s'appliquer que pour l'avenir alors que toutes les échéances du prêt initial avaient été réglées jusqu'à celle de février 2001, le tableau d'amortissement n'avait de sens que s'il prévoyait les nouvelles échéances à compter de mars 2001, ce qui correspondait nécessairement à la commune intention des parties, Mme [S] ne prétendant nullement avoir eu la volonté d'assumer un double paiement rétroactif sur la totalité de l'année 2000 ; qu'au-delà de la seule date d'expiration de la période de remboursement, il convenait de se référer également à sa durée de neuf ans et au montant à rembourser en capital et intérêts ; que Mme [S] ne prétendait pas avoir effectivement remboursé le prêt résultant de l'offre modificative sur une durée de neuf ans et pour toutes les échéances fixées ; qu'elle n'avait pas produit les relevés de son compte bancaire pour 2000 et 2001 ; qu'elle rapportait elle-même la preuve de ce qu'elle n'avait effectué aucun remboursement à partir de mars 2000 au titre de l'offre modificative en produisant aux débats les relevés de son compte pour la période du 7 février au 7 avril 2009, desquels il ressortait que l'échéance prélevée le 5 mars 2009 d'un montant de 354,58 euros portait le numéro 97, ce qui correspondait à l'échéance du 5 mars 2008 et déterminait la date de la première échéance effectivement prélevée au 5 mars 2001 et non 2000 ; que Mme [S] ne pouvait donc pas prétendre de bonne foi être libérée de toutes ses obligations nées du prêt résultant de l'offre modificative acceptée le 15 janvier 2001 ;

Alors 1°) que le juge ne peut, sous couvert de rechercher la commune intention des parties, dénaturer les termes clairs et précis des documents contractuels soumis à son examen ; qu'en ayant énoncé, pour condamner Mme [S], que le tableau d'amortissement du 28 décembre 2000 n'avait de sens que s'il prévoyait les nouvelles échéances à compter de mars 2001, ce qui correspondait nécessairement à la commune intention des parties, quand l'offre modificative de prêt du 28 décembre 2000 prévoyait la renégociation du prêt au taux de 7,50 % pour une durée de neuf ans à compter du 5 mars 2000 et que le tableau d'amortissement faisant partie intégrante de l'offre modificative de prêt présentait l'échelonnement des nouvelles mensualités du 5 mars 2000 au 5 février 2009, la cour d'appel a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ;

Alors 2°) que dans ses conclusions d'appel (p. 1), Mme [S] avait indiqué avoir scrupuleusement respecté les échéances du prêt résultant de l'offre modificative du 28 décembre 2000, aucun incident de paiement n'ayant été relevé ; qu'en énonçant que Mme [S] ne prétendait nullement avoir effectivement remboursé le prêt résultant de l'offre modificative pour les échéances fixées, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel après cassation de Mme [S] et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

Alors 3°) qu'en ayant condamné Mme [S] à payer à la Société Générale les sommes qu'elle réclamait en remboursement du prêt sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas, en tout état de cause, omis de tenir compte des échéances versées avant mars 1992, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-28447
Date de la décision : 01/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 15 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 01 mar. 2017, pourvoi n°15-28447


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.28447
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