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21/02/2017 | FRANCE | N°16-81189

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 février 2017, 16-81189


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 16-81.189 F-P+B

N° 9

FAR
21 FÉVRIER 2017

REJET

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

*DEBAT REJET du pourvoi formé par M. Laurent Y..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, chambre correction

nelle, en date du 14 janvier 2016, qui, pour détention de denrée alimentaire, boisson ou produit agricole falsifié ou corro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 16-81.189 F-P+B

N° 9

FAR
21 FÉVRIER 2017

REJET

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

*DEBAT REJET du pourvoi formé par M. Laurent Y..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, chambre correctionnelle, en date du 14 janvier 2016, qui, pour détention de denrée alimentaire, boisson ou produit agricole falsifié ou corrompu et nuisible à la santé, inexécution de mesure corrective ordonnée dans un établissement en raison du risque pour la santé publique et la santé des consommateurs, mise sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées alimentaires en contenant consignés ou retirés du marché, distribution de denrées alimentaires sans en assurer la traçabilité, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis, 2 000 euros d'amende et 350 euros d'amende contraventionnelle ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 janvier 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. GUÉRIN , président, Mme Farrenq-Nési   , conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Guichard ;

Sur le rapport de Mme le conseiller Farrenq-Nési , les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE  ;

*DEBDAT Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 214-3, R. 214-2, 3°, L. 213-4 du code de la consommation, L. 237-2 du code rural et de la pêche maritime, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale :

"en ce que la cour d'appel a déclaré le prévenu coupable des faits reprochés ;

"aux motifs que distribution de denrées alimentaires sans en assurer la traçabilité (contravention) ; que M. Y... soutient que la traçabilité était assurée par un cahier rempli manuellement, les tickets générés par l'autoclave pour chaque série produite, et un rangement organisé ; qu'en réalité, lors du contrôle effectué le 29 août 2012, plusieurs centaines de bocaux de verre contenant des conserves ont été retrouvées dans diverses parties de l'établissement, sans aucun marquage ni identification, sur des palettes ou des rayonnages ne comportant pas non plus d'étiquetage ; que, par conséquent, il était impossible d'individualiser les lots, et de déterminer les séries dont les bocaux étaient issus ; que les moyens que rappelant prétend avoir mis en oeuvre étaient donc largement insuffisants pour assurer une traçabilité des produits, détention de denrées corrompues nuisibles à l'homme ; qu'il n'est pas contesté que des bocaux non étanches et ne permettant pas d'assurer la stabilité des conserves ont été retrouvés en salle d'expédition ; que le caractère corrompu de ces denrées ne faisait d'ailleurs aucun doute, en raison de leur odeur et de leur aspect, M. Y... soutient que les bocaux concernés avaient été déclassés, et que les problèmes étaient liés à l'expérimentation du nouvel autoclave ; que force est pourtant de constater, d'une part, que des bulletins d'analyse largement antérieurs au changement d'autoclave montraient déjà la présence de conserves non stables, d'autre part, que lors du contrôle les bocaux corrompus n'étaient en aucune manière identifiés comme tels ni séparés des autres conserves ; qu'en outre ils se trouvaient dans une pièce présentée aux contrôleurs comme la salle d'expédition, ce qui rend encore moins vraisemblable le "déclassement" allégué ; que mise sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation humaine, l'appelant ne conteste pas qu'il ne disposait pas d'un agrément à la date du contrôle, les démarches visant à l'obtenir étant à l'époque en cours ; qu'il se prévaut d'une dérogation, ou plus précisément d'un récépissé du 4 avril 2011 sur une fiche de déclaration établie par lui le 21 mars 2011 ; que la commercialisation de conserves très au-delà de la distance maximale de 80 km prévue par l'article 12 de l'arrêté du 8 juin 2006 a débuté dès la fin de l'année 2010, ainsi que cela résulte du communiqué de presse rappelant les produits puisque celui-ci mentionne notamment la région parisienne, l'Ile-et-Vilaine, l'Espagne ; qu'il n'est pas justifié d'une dérogation pour la période antérieure à avril 2011 ; qu'en outre, la dérogation est subordonnée au respect de certaines conditions, tenant par exemple aux quantités produites ; que l'imprimé de déclaration rappelle d'ailleurs qu'une nouvelle déclaration doit être effectuée en cas de modification importante des produits ou quantités livrés ; que la déclaration produite mentionne des quantités très faibles, qui ne correspondent manifestement pas au rappel effectué ; qu'inexécution de mesure corrective ordonnée dans un établissement en raison du risque pour la santé publique et la sécurité des consommateurs, et mise sur le marché de produits d'origine animale ou de denrées alimentaires en contenant consignés ou retirés du marché ; que M. Y... invoque sur ce point l'acte de vengeance d'un salarié, et soutient que les contrôleurs ont confondu conserves et plats sous vide ; que, selon lui, la preuve que les produite retrouvés dans le restaurant [...] étaient les conserves de  [...], interdites de commercialisation, n'est pas rapportée ; que le procès-verbal indique que des conserves en bocaux ont été retrouvées dans la cuisine du restaurant [...], à l'office, ainsi que dans un local servant de réserve ; qu'en particulier plus de cinq cents bocaux se trouvaient dans le local utilisé comme réserve, à même le sol ou sur des étagères ; que M. Y... a insisté sur le fait que les plats sous vide devaient être stockés à 5°, les bocaux découverts dans le véhicule étant d'ailleurs placés dans une caisse isotherme ; qu'en revanche les centaines de bocaux situés dans le restaurant étaient à température ambiante, ce qui démontre qu'il s'agissait bien de conserves ; que les deux salariés entendus, à savoir le responsable de cuisine et un employé, ont tous deux confirmé ; que les conserves provenaient du laboratoire Y... de [...], que M. Y... leur avait demandé de les utiliser au restaurant, qu'avant la semaine précédente il n'y avait pas d'utilisation de conserves en bocaux pour le restaurant ; que M. Y... faisait le choix des verrines à utiliser, que la plupart des bocaux était dépourvue de traçabilité ; que l'un des deux employés a précisé qu'il savait que les bocaux faisaient l'objet d'un retrait par arrêté préfectoral, mais qu'il agissait sur ordre de sa hiérarchie ; que, bien que dans les conclusions de son avocate, il soit écrit que M. Y... conteste avoir procédé au moindre déplacement des bocaux consignés, dans son audition du 10 septembre 2012 le même M. Y... a reconnu avoir stocké les produits retirés de la vente dans les locaux du restaurant ; qu'il existe enfin une importante distorsion entre le nombre de bocaux consignés, et le nombre de bocaux inventoriés le 10 septembre 2012 ; que cet écart ne peut être expliqué par les destructions opérées, puisqu'il n'est pas justifié de destructions faites à la demande du laboratoire Y... sur le stock détenu par lui avant cette date du 10 septembre 2012 ; qu'au vu de l'ensemble des éléments développés ci-dessus, toutes les infractions reprochées à M. Y... sont établies. Il convient en conséquence :
- de confirmer la déclaration de culpabilité pour les deux délits et la contravention retenus par le tribunal correctionnel de Dijon ;
- d'infirmer ce jugement sur la relaxe, et de déclarer M. Y... coupable des délits d'inexécution de mesure corrective ordonnée dans un établissement en raison du risque pour la santé publique et la sécurité des consommateurs, et de mise sur le marché de produits d'origine animale ou de denrées alimentaires en contenant consignés ou retirés du marché ;

"1°) alors que l'article L. 213-4 du code de la consommation réprime la détention, sans motifs légitimes, de denrées corrompues ou toxiques ; que la cour d'appel ne pouvait ainsi, pour déclarer M. Y... coupable de ce chef, s'abstenir de répondre au moyen de défense qui faisait valoir que, n'ayant été informé des défauts des produits qu'après analyse du laboratoire départemental, le prévenu ne peut pas être considéré comme ayant détenu des denrées corrompues en connaissance de cause pour la période du 1er août 2011 au 26 juillet 2012, l'élément intentionnel de l'infraction faisant ainsi défaut ;

"2°) alors que, pour entrer en voie de condamnation sur le fondement de l'article L. 213-4 du code de la consommation, la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de répondre au moyen péremptoire de défense faisant valoir que les produits non conformes retrouvés lors du contrôle étaient uniquement des conserves non destinées à être commercialisées mais sur lesquelles était expérimenté un nouvel autoclave, cette circonstance étant de nature à établir un motif légitime de détention au sens de ce texte ;

"3°) alors qu'en outre, en relevant, pour déclarer le demandeur coupable de mise sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation humaine, qu'il n'est pas justifié d'une dérogation pour la période antérieure à avril 2011, lorsque le prévenu était poursuivi pour des faits commis entre le 1er août 2011 et le 11 septembre 2012, la cour d'appel, qui est entrée en voie de condamnation pour des faits non visés à la prévention, a méconnu les termes de saisine ;

"4°) alors qu'en affirmant péremptoirement, pour déclarer l'exposant coupable de mise sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation humaine, que la déclaration qu'il a produite pour obtenir la dérogation à l'obligation d'agrément sanitaire ne mentionne que des quantités très faibles qui ne correspondent manifestement pas au rappel effectué, sans s'en expliquer davantage, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'un contrôle effectué le 29 août 2012 au laboratoire Y..., ayant amené la découverte de conserves en bocaux de denrées alimentaires stockées à plusieurs endroits dans l'établissement sans marquage ni identification et dont le couvercle, pour certaines, s'est détaché au cours de la manipulation, le gérant, M. Y..., a été poursuivi notamment pour détention de denrées corrompues nuisibles à la santé et mises sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation humaine ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces infractions ; que M. Y... a relevé appel du jugement, le ministère public formant appel incident ;

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que, pour confirmer le jugement du chef de détention de denrées corrompues, l'arrêt relève que des bocaux non étanches et ne permettant pas d'assurer la stabilité des conserves ont été retrouvés dans la salle d'expédition, qu'il a été constaté une odeur âcre et nauséabonde dans le local, un exsudat grisâtre dans les conserves et la présence de mouches, et que le caractère corrompu de ces denrées ne faisait aucun doute en raison de leur odeur et de leur aspect ; que les juges ajoutent, pour écarter l'argumentation de M. Y... selon laquelle les bocaux concernés auraient été déclassés et les problèmes seraient liés à l'expérimentation d'un nouvel autoclave, que des bulletins d'analyse largement antérieurs au changement d'autoclave montraient déjà la présence de conserves non stables, et que, lors du contrôle, les bocaux corrompus n'étaient en aucune manière identifiés comme tels ni séparés des autres conserves ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que M. Y... détenait sans motif légitime des denrées dont il ne pouvait ignorer qu'elles étaient corrompues, la cour d'appel, répondant aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, a, par des motifs dépourvus d'insuffisance comme de contradiction, caractérisé le délit dans ses éléments matériel et intentionnel, et justifié sa décision ;

D'où il suit que les griefs allégués ne sont pas encourus ;

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :

Attendu que, pour confirmer le jugement du chef de mise sur le marché par un établissement non agréé de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation humaine, l'arrêt, après avoir relevé que le prévenu se prévalait d'une dérogation à l'obligation réglementaire d'agrément résultant d'un récépissé du 4 avril 2011 sur une fiche de déclaration établie par lui le 21 mars 2011, retient qu'une telle dérogation est subordonnée au respect de certaines conditions tenant notamment aux quantités produites, que l'imprimé de déclaration rappelle qu'une nouvelle déclaration doit être effectuée en cas de modification importante des produits ou quantités livrés, et que la déclaration produite mentionne des quantités très faibles, qui ne correspondent manifestement pas au rappel des produits effectué en exécution des arrêtés préfectoraux du 5 septembre 2012 intervenus à la suite de l'infraction de détention de denrées corrompues ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a fait l'exacte application des articles 12 et 13 de l'arrêté du 8 juin 2006 relatif à l'agrément sanitaire des établissement mettant sur le marché des produits d'origine animale ou des denrées contenant des produits d'origine animale, a justifié sa décision ;

Que dès lors le grief, qui, en sa troisième branche, porte sur un motif surabondant et qui, pour le surplus, revient à remettre en cause l'appréciation souveraine, par les juges du fond, de l'importance de la modification intervenue dans les quantités produites, n'est pas fondé ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi DAR ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un février deux mille dix-sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-81189
Date de la décision : 21/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

SANTE PUBLIQUE - Denrées alimentaires - Denrées animales ou d'origine animale - Mise sur le marché - Etablissements de commerce de détail - Agrément sanitaire des établissements - Obligation - Dérogation - Possibilité - Modification importante des produits ou quantités livrés - Exclusion

L'arrêté du 8 juin 2006 subordonne la mise sur le marché de produits d'origine animale ou de denrées en contenant destinés à la consommation à un agrément préalable de l'établissement, auquel il peut être dérogé, pour les commerces de détail, dans certaines conditions notamment de quantité ou de distance fixées aux articles 12 et 13 dudit règlement, toute modification importante des produits ou quantités livrés devant faire l'objet d'une nouvelle déclaration actualisée adressée au préfet


Références :

articles 12 et 13 de l'arrêté du 8 juin 2006 relatif à l'agrément sanitaire des établissements mettant sur le marché des produits d'origine animale ou des denrées contenant des produits d'origine animale

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 14 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 fév. 2017, pourvoi n°16-81189, Bull. crim.Bull. crim. 2017, n° 45
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle Bull. crim. 2017, n° 45

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.81189
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