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08/02/2017 | FRANCE | N°16-10687

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 février 2017, 16-10687


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... de son désistement du pourvoi dirigé à l'encontre de l'arrêt du 22 septembre 2015 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 novembre 2015) rendu sur renvoi après cassation (Soc. 18 septembre 2013, pourvoi n° 12-17.200), que Mme X... a été engagée à compter du 7 octobre 2003 par la société Adrexo en qualité de distributeur de journaux et documents publicitaires ; que déclarée inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue de deux examens médicaux des 1er mars e

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à Mme X... de son désistement du pourvoi dirigé à l'encontre de l'arrêt du 22 septembre 2015 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 novembre 2015) rendu sur renvoi après cassation (Soc. 18 septembre 2013, pourvoi n° 12-17.200), que Mme X... a été engagée à compter du 7 octobre 2003 par la société Adrexo en qualité de distributeur de journaux et documents publicitaires ; que déclarée inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue de deux examens médicaux des 1er mars et 3 mai 2011, cet avis ayant été confirmé par décision de l'inspecteur du travail du 2 août 2011, elle a été licenciée le 9 janvier 2012 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre d'un harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge de vérifier concrètement si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de vérifier effectivement si, pris dans leur ensemble, ces éléments étaient de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°/ que le retard dans le paiement du salaire aux motifs d'une absence injustifiée d'un salarié qui se trouve dans l'attente du second examen médical de reprise, la méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat, de l‘étendue de l'avis d'inaptitude et de son obligation de ré-entraînement à l'égard d'un salarié reconnu travailleur handicapé, enfin la convocation à un entretien préalable au licenciement le jour même d'une audience sont des éléments de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a, à nouveau, violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Mais attendu que sans méconnaître les règles d'administration de la preuve applicables en la matière, la cour d'appel a, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, constaté que la salariée n'établissait pas la matérialité de faits pouvant laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que le moyen, qui en sa seconde branche manque par le fait qui lui sert de base, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral subi ;
AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. En l'espèce, la salariée invoque les faits suivants : défaut d'organisation des examens médicaux devant le médecin du travail, défaut de proposition de poste à l'issue du premier examen, indication sur le bulletin de paie du mois d'avril 2011 d'une absence injustifiée, défaut de recherche de reclassement, inobservation des dispositions de l'article R. 5213-22 du code du travail sur le réentraînement au travail, convocation à un entretien préalable à une date la privant de la possibilité d'ajouter une demande au titre de la nullité de son licenciement en cause d'appel. Pour étayer ses affirmations, elle produit notamment : un document faisant état de la décision de la commission des droits et de l'autonomie selon laquelle lui a été reconnue la qualité de travailleur handicapé pour la période du 22 avril 2008 au 31 mars 2013; le bulletin de paie du mois d'avril 2011 faisant état d'un salaire égal à zéro et de retenues pour absence injustifiée; les fiches de visite délivrées par le médecin du travail ; la décision de l'inspecteur du travail en date du 2 août 2011 statuant sur sa contestation de l'avis d'inaptitude du médecin du travail ; les courriers adressés par son employeur dans le cadre de la procédure de recherche de reclassement puis de licenciement ; diverses pièces tendant à justifier que la lettre de convocation à l'entretien préalable lui a été remise le 8 décembre 2011. En cet état, l'employeur ne fournit pas d'élément probant justifiant que l'employeur a été défaillant dans l'organisation des examens médicaux valant visite de reprise à l'issue de son arrêt de travail. Si la seconde visite a eu lieu plus de 15 jours après la première visite, ce délai de quinzaine est un délai minimum; surtout, la seconde visite ne pouvait intervenir avant l'étude de poste décidée par le médecin du travail, lequel l'a réalisée le 30 mars 2011; enfin, il est établi qu'un rendez-vous pris par l'employeur pour le 12 avril 2011 a été reporté compte tenu des contraintes personnelles de la salariée. La mention erronée figurant sur le bulletin de salaire du mois d'avril 2011 procède d'une simple erreur matérielle, laquelle a été rectifiée sur le bulletin de paie du mois de mai 2011. Il n'est invoqué aucun manquement de l'employeur à son obligation de reprise du paiement du salaire (celui-ci ayant considéré, comme cela résulte notamment de sa consultation des délégués du personnel, qu'était applicable la législation relative aux victimes d'accidents du travail). Il résulte des bulletins de paie produits que la société a procédé au paiement intégral du salaire pour le mois de mars 2011 puis à compter de mai 2011. Il est allé ainsi au-delà de ses obligations légales puisqu'il résulte de l'article L. 1226-11 du code du travail que l'obligation de reprise de paiement du salaire, en l'absence de reclassement et de licenciement, est acquise à l'issue du délai d'un mois à compter du second des examens médicaux constituant la visite de reprise, ce second examen médical ayant eu lieu en l'espèce le 3 mai 2011. Pour cette raison également, le délai d'organisation de la seconde visite, inhabituellement long, n'était pas de nature à porter préjudice à la salariée. Par ailleurs, l'employeur ne pouvait proposer de poste de reclassement avant que soit intervenu ce second examen. Le seul fait que le courrier du 9 novembre 2011 ne mentionne que l'avis du médecin du travail et non la décision sur recours de l'inspecteur du travail ne caractérise pas que l'employeur ait méconnu cette dernière décision, en ce qu'elle était moins restrictive que l'avis du médecin du travail. La salariée n'établit nullement que la date de réception par elle-même de la lettre de convocation à l'entretien préalable résulte d'une intention préjudiciable de l'employeur, alors même que des démarches avaient été entreprises en vue de son reclassement depuis la décision de l'inspecteur du travail en date du 2 août 2011 (à savoir consultation des responsables opérationnels ou ressources humaines du groupe, consultation des délégués du personnel le 29 septembre 2011, transmission à la salariée par courrier du 9 novembre 2011 de la liste des postes disponibles au sein du groupe Spir communication). On observera qu'elle a saisi dès le 14 décembre 2011 la formation de référé de la juridiction prud'homale d'une demande d'annulation de la procédure de licenciement en cours; elle n'a pas été privée de la possibilité de contester son licenciement. Si la société ne conteste pas entrer dans le champ d'application de l'article L. 5213-5 du code du travail relatif au réentraînement au travail, il n'est ni allégué ni justifié qu'elle avait connaissance du statut de travailleur handicapé de la salariée avant d'engager la procédure de licenciement. En l'état des explications et des pièces fournies, la matérialité d'éléments de fait précis et concordants laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral n'est pas démontrée. La demande relative au harcèlement doit par conséquent être rejetée ».
ALORS QU'aux termes des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge de vérifier concrètement si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en procédant à une appréciation séparée de chaque élément invoqué par la salariée, alors qu'il lui appartenait de vérifier effectivement si, pris dans leur ensemble, ces éléments étaient de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
ET ALORS, en tout état de cause, QUE le retard dans le paiement du salaire aux motifs d'une absence injustifiée d'un salarié qui se trouve dans l'attente du second examen médical de reprise, la méconnaissance par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat, de l‘étendue de l'avis d'inaptitude et de son obligation de réentraînement à l'égard d'un salarié reconnu travailleur handicapé, enfin la convocation à un entretien préalable au licenciement le jour même d'une audience sont des éléments de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a, à nouveau, violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;
D'AVOIR jugé que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement reposait sur une cause réelle et sérieuse et débouté la salariée de ses demandes afférentes à un licenciement nul, subsidiairement, abusif;
AUX MOTIFS QUE «n'est pas nul par application des dispositions des articles L.1152-2 et L.1152-3 du code du travail le licenciement intervenu du seul fait qu'une demande de harcèlement pendante. En l'espèce, aucun harcèlement moral n'est caractérisé. Il ne résulte d'aucune pièce que la salariée a été licenciée pour avoir soutenu être victime de faits de harcèlement moral alors même qu'elle a été déclarée régulièrement inapte par le médecin du travail puis, sur recours par l'inspecteur du travail. Aux termes de l'article L.1134-4 du même code, est nul et de nul effet le licenciement d'un salarié faisant suite à une action en justice engagée par ce salarié ou en sa faveur, sur le fondement des dispositions du chapitre II, lorsqu'il est établi que le licenciement n'a pas de cause réelle et sérieuse et constitue en réalité une mesure prise par l'employeur en raison de cette action en justice. La salariée n'avait pas engagé antérieurement d'action en justice fondée sur le principe de non-discrimination et donc sur le fondement des dispositions du chapitre II du titre III du code du travail. Elle invoquait en effet à l'époque de son licenciement exclusivement des faits de harcèlement moral. Il n'est établi par aucune pièce que l'employeur ait eu connaissance du militantisme syndical de la salariée - dont il n'est au demeurant pas justifié - ni même de son appartenance syndicale, ni encore de son rôle prétendu dans l'action prud'homale engagée alors que la lettre collective de protestation du 17 janvier 2006 a été adressée à l'employeur par une autre salariée, en l'occurrence Mme Y..., comme cela résulte de l'avis de réception de l'envoi recommandé. Parmi les 24 salariés ayant saisi la juridiction prud'homale nantaise en février 2008, certains d'entre eux sont encore en poste. La salariée ne présente pas d'éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale à son encontre. La salariée a été déclarée régulièrement inapte par le médecin du travail puis, sur recours, par l'inspecteur du travail. La salariée n'a pas formé de demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au titre de la méconnaissance éventuelle de l'obligation de reclassement. En tout état de cause, l'impossibilité de reclassement est établie dès lors que l'employeur justifie des démarches et des recherches entreprises pour tenter de procéder au reclassement de la salariée tant au niveau de l'entreprise que du groupe. En effet, l'employeur a interrogé le médecin du travail sur les postes de reclassement pouvant convenir à l'état de santé de la salariée, ainsi que les diverses sociétés du groupe auquel il appartient sur les postes disponibles ou susceptibles d'être aménagés (pièces nº 10, 11, 13 de la société). En outre, l'examen de la liste des postes disponibles au sein de diverses sociétés du groupe (par exemple ingénieur projet, commercial, chef de projet informatique, etc ...) révèle que ceux-ci étaient incompatibles avec les compétences professionnelles de la salariée, telles que connues de l'employeur (étant observé que la salariée n'a pas répondu à la demande de la société de lui adresser un curriculum vitae); ou avec la décision de l'inspecteur du travail, -et ce même après aménagement. Les délégués du personnel ont été consultés. Il ne résulte d'aucun élément que le licenciement ait constitué une mesure prise par l'employeur en raison de l'action en justice intentée collectivement presque 4 ans auparavant. Les demandes au titre de la nullité du licenciement seront rejetées, par voie de dispositions nouvelles ».
ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour le harcèlement moral subi entraînera par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt qui a rejeté la demande de la salariée au titre d'un licenciement nul par application des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;
ET ALORS, à titre subsidiaire, QUE l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher des possibilités de reclassement au sein de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que les juges du fond doivent caractériser l'impossibilité de l'employeur de mettre en oeuvre de telles mesures ; qu'en s'abstenant de caractériser une telle impossibilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L.1226-10 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-10687
Date de la décision : 08/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 17 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 fév. 2017, pourvoi n°16-10687


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.10687
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