LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., marin-pêcheur de profession, a adhéré à deux polices d'assurance n° 4177 et 4201 souscrites auprès de la société Axa France vie (l'assureur) afin de garantir, à hauteur respectivement de 36 % et de 64 %, le remboursement d'un prêt professionnel contracté en 2003 auprès de la Banque populaire du Sud ; qu'il a adhéré en 2007 auprès du même assureur, en qualité de gérant de société, à une police n° 4419 garantissant un nouvel emprunt contracté auprès du Crédit maritime mutuel de la Méditerranée pour les besoins de son activité ; qu'ayant subi une incapacité de travail à la suite d'un accident d'aéronef survenu alors qu'il se trouvait à bord d'un avion Cessna, il a déclaré ce sinistre à l'assureur ; qu'il a assigné ce dernier qui, au titre des polices n° 4177 et 4419, refusait de prendre en charge au-delà d'une certaine date les échéances de remboursement des deux prêts et qui, au titre du contrat n° 4201, lui opposait une clause d'exclusion de garantie ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'assureur, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu que, pour dire que l'assureur ne pouvait se prévaloir de la clause d'exclusion de garantie visant l'utilisation d'engins aériens « autres que les avions de lignes commerciales régulières », l'arrêt, après avoir retenu que M. X... et la société Thon du Roussillon justifiaient que l'avion Cessna utilisé, qui disposait de cinq places passagers et bénéficiait d'un certificat de navigabilité en cours de validité, avait été loué avec pilote auprès de la société Panama Aircraft qui l'utilisait pour assurer des opérations commerciales de transport aérien, que son pilote était titulaire du certificat de licence pilote, et qu'un plan de vol avait été déposé auprès de l'autorité aéronautique civile de Panama, énonce qu'il ressort de ces éléments que le transport effectué correspondait au sens de l'article D. 213-1-1 du code de l'aviation civile à un « vol régulier » ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs dont il ressort que l'avion accidenté n'était pas un avion de ligne commerciale régulière au sens du contrat d'assurance, et qu'ainsi le sinistre était exclu du champ de la garantie, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de M. X... et de la société Thon du Roussillon, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire que la notice d'assurance n° 4201 était opposable à M. X... et à la société Thon du Roussillon, l'arrêt retient que ces derniers ont reconnu être restés en possession d'un exemplaire des notices relatives aux contrats souscrits et mentionnant les exclusions et limitations de garantie ;
Qu'en statuant ainsi, par une simple affirmation, sans préciser sur quelles pièces elle se fondait pour retenir l'aveu qu'elle prêtait ainsi aux assurés, lesquels contestaient que la notice d'assurance leur avait été remise, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :
MET hors de cause, sur sa demande, la société Banque populaire du Sud ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare la notice d'assurance n° 4201 opposable à M. X... et à la société Thon du Roussillon, en ce qu'il déclare non applicable la clause d'exclusion de garantie mentionnée dans ladite notice et en ce qu'il condamne la société Axa à payer à M. X..., au titre du prêt n° 3179500, la somme de 202 587, 11 euros représentant 64 % des échéances à compter du 7 mai 2009 et jusqu'au 16 novembre 2010, l'arrêt rendu le 25 novembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société Axa France vie, demanderesse au pourvoi principal
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu le 10 septembre 2013 par le tribunal de grande instance de Perpignan sauf en ce qu'il a dit que la notice d'assurance n° 4201 n'était pas opposable aux intimés, et dit, réformant sur ce point et statuant à nouveau, que cette notice était opposable aux intimés et que la clause d'exclusion de garantie mentionnée dans ladite notice n'était pas applicable en l'espèce,
AUX MOTIFS QUE l'exclusion de garantie dont fait état la société Axa France Vie est contenue dans la notice n° 4429 et non dans la notice n° 4419 concernant le prêt Nonnalis Premier garantissant le premier prêt à hauteur de 64 % ; que la notice relative à ce prêt vise l'exclusion de garantie pour l'utilisation d'engins aériens « autres que les avions de lignes commerciales régulières » ; que les intimés justifient que l'avion utilisé avait été loué avec pilote auprès de la société Panama Aircraft, laquelle a pour objet d'assurer des opérations commerciales de transport aérien ; qu'un plan de vol avait été déposé auprès de l'autorité aéronautique civile de Panama ; que l'avion était piloté par un pilote de ligne titulaire du certificat de licence ; que l'avion Cessna qui disposait de cinq places passagers et bénéficiait d'un certificat de navigabilité en cours de validité était utilisé par la société Panama à des fins commerciales ; qu'il ressort de ces éléments que le transport effectué correspondait au sens de l'article L. 212- l-du code de l'aviation civile à un « vol régulier » ; qu'en conséquence, la société Axa France Vie ne peut se prévaloir de cette exclusion de garantie ;
1° ALORS QU'un vol ne peut être qualifié de « régulier », au sens de la loi que s'il s'effectue au moyen d'avions destinés à transporter indifféremment des passagers, du fret ou du courrier, dans des conditions telles que, pour chaque vol des places sont mises à la disposition du public, et que s'il est organisé de façon à assurer la liaison entre deux points ou plus, soit selon un horaire publié, soit avec une régularité ou une fréquence telle qu'il fait partie d'une série systématique évidente ; que si ces caractéristiques ne sont pas cumulativement réunies, il s'agit d'un vol non régulier ; que pour retenir, en l'espèce, que le vol litigieux était un vol « régulier », la cour s'est bornée à constater que l'avion avait été loué avec pilote auprès de la compagnie Panama Aircraft, ayant pour objet d'assurer des opérations commerciales de transport aérien, qu'un plan de vol avait été déposé, que le pilote était titulaire d'un certificat de licence et que l'avion, un Cessna, disposait de cinq places passagers et était utilisé à des fins commerciales ; qu'en se déterminant ainsi, sans avoir retenu aucun élément établissant que ce vol s'intégrait, avec d'autres, dans un ensemble organisé par des horaires publiés ou dans une série systématique de vols réguliers ou fréquents, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article D. 213-1-1 du code de l'aviation civile, ensemble de l'article L. 113-1 du code des assurances ;
2° ALORS QUE la notice " Normalis Premier " n° 4201, correspondant à la police conclue auprès de la société Axa France Vie pour garantir partie de la dette contractée par M. X... auprès de la Banque Populaire du Sud, remise à M. X..., et dont il a déclaré avoir pris connaissance, a prévu une liste de risques exclus de cette garantie, parmi lesquels figurait « l'utilisation en tant que pilote ou passager de tous engins autres que les avions des lignes commerciales régulières » ; qu'étaient ainsi exclus de la garantie contractuelle les vols non réguliers ; qu'en décidant dès lors d'écarter l'application de cette exclusion de garantie au vol litigieux, quand il résultait de sa motivation que ce vol ne pouvait pas être qua li fié de vol « régulier » au sens de la loi, la cour a violé les articles 1134 du code civil et L. 113-1 du code des assurances.
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Thon du Roussillon, demandeurs au pourvoi incident éventuel
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu'il a dit que la notice d'assurance « Normalis Premier » n° 4201 n'était pas opposable aux intimés et, réformant et statuant à nouveau sur ce chef, dit que cette notice était opposable aux intimés ;
AUX MOTIFS QUE : « sur la clause d'exclusivité de la police n° 4201 : l'exclusion de garantie dont fait état la requérante est contenue dans la notice n° 4429 et non dans la notice n° 4419 concernant le prêt Normalis Premier garantissant le premier prêt à hauteur de 64 % ; la notice relative à ce prêt vise l'exclusion de garantie pour l'utilisation d'engins aériens « autres que les avions de lignes commerciales régulières ; que les intimés justifient que l'avion utilisé avait été loué avec pilote auprès de la société Panama Aircraft laquelle a pour objet d'assurer des opérations commerciales de transport aérien ; un plan de vol avait été déposé auprès de l'autorité aéronautique civile de Panama ; l'avion était piloté par un pilote de ligne titulaire du certificat de licence ; l'avion Cessna qui disposait de cinq places passagers et bénéficiait d'un certificat de navigabilité en cours de validité était utilisé par la société Panama à des fins commerciales ; qu'il ressort de ces éléments que le transport effectué correspondait au sens de l'article D 213-1-1 du code de l'aviation civile à « un vol régulier » ; en conséquence la requérante ne peut se prévaloir de cette exclusion de garantie ; que sur l'étendue de la garantie : qu'il est mentionné dans les notices d'assurance relatives aux contrats souscrits et dont les intimés ont reconnu être restés en possession d'un exemplaire mentionnant les exclusions et limitations de garantie que celle-ci cesse à la date à laquelle le prêt est totalement remboursé par anticipation et que le montant de la garantie est limité à 270 euro par jour pour le contrat n° 4201 et s'agissant du contrat n° 4177 à 4000 euros par mois si l'assuré n'est garanti que pour un seul prêt et à 5600 euros s'il est garanti pour plusieurs prêts ; qu'en l'espèce, il est constant que les intimés sont garantis auprès de la requérante pour deux prêts ; c'est donc le plafond de 5600 euros qu'il convient de retenir ; qu'il ressort en outre des pièces versées aux débats que les deux prêts ont été remboursés par anticipation le 18 novembre 2010 pour le premier et le 5 août 2010 pour le second ; qu'ainsi que l'a retenu le premier juge par des motifs pertinents que la cour adopte, d'une part, M. X... justifie par de nombreux certificats médicaux qu'il remplissait les conditions prévues au contrat pour bénéficier de la prise en charge des échéances jusqu'à la date de remboursement anticipé des deux prêts et d'autre part la demande de dommages-intérêts pour compenser l'absence de versement d'indemnités après le remboursement anticipé des deux prêts n'est pas fondée ; que compte tenu de ces éléments, la demande d'expertise médicale devient sans objet » ;
1°/ ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que la cour d'appel qui, infirme un jugement doit réfuter les motifs déterminants des premiers juges dont il est demandé confirmation ; qu'en l'espèce, les exposants demandaient la confirmation du jugement entrepris par le tribunal en ce qu'il avait retenu que la notice d'assurance n° 4201 n'était pas opposable aux intimés aux motifs que « contrairement à ce que soutient la compagnie Axa France vie, la signature de M. X... apposée au bas de la proposition d'assurance et non au droit de cette mention, démontre exclusivement que l'assuré a souscrit par signature à la police ; n'ayant pas signé spécifiquement la mention concernant la remise de la notice, dont la date de la remise n'est d'ailleurs pas spécifiée, alors que l'assureur qui délivre une information spécifique à l'assuré et souhaite attirer son attention sur un point particulier doit prévoir une signature supplémentaire dans la rubrique en question, la signature apposée par M. X... ne prouve pas la remise effective du document » (jugement TGI Perpignan du 10 septembre 2013, p. 5, § 6) ; qu'en infirmant ainsi le jugement entrepris en ce qu'il avait retenu que la notice d'assurance n° 4201 n'était pas opposable aux intimés et, statuant à nouveau, juger que cette notice était opposable à ces derniers, sans réfuter les motifs péremptoires des premiers juges, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QU'en toute hypothèse, à supposer que le motif selon lequel les exposants auraient « reconnu être restés en possession d'un exemplaire mentionnant les exclusions et limitations de garantie » s'applique (arrêt p. 7, dernier §), la cour d'appel, qui n'a pas précisé sur quelle pièce produite aux débats elle fondait cette constatation qui était expressément contestée, a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 141-4 du code des assurances.