La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/02/2017 | FRANCE | N°15-20939

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 02 février 2017, 15-20939


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 mars 2015), qu'en février 2007, pour la construction d'une maison, M. et Mme X... ont confié, sous la maîtrise d'oeuvre de Mme Y..., architecte, assurée auprès de la MAF, la réalisation du gros oeuvre à la société JTC, assurée auprès de la SMABTP ; que, se plaignant, avant la réception de l'ouvrage, de l'apparition de malfaçons et d'un abandon de chantier, M. et Mme X... ont, après expertise, assigné notamment Mme Y..., la MAF, la société JTC et la

SMABTP, pour obtenir la résiliation des contrats aux torts exclusifs de c...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 26 mars 2015), qu'en février 2007, pour la construction d'une maison, M. et Mme X... ont confié, sous la maîtrise d'oeuvre de Mme Y..., architecte, assurée auprès de la MAF, la réalisation du gros oeuvre à la société JTC, assurée auprès de la SMABTP ; que, se plaignant, avant la réception de l'ouvrage, de l'apparition de malfaçons et d'un abandon de chantier, M. et Mme X... ont, après expertise, assigné notamment Mme Y..., la MAF, la société JTC et la SMABTP, pour obtenir la résiliation des contrats aux torts exclusifs de ceux-ci, et la réparation de leurs préjudices ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société JTC fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une certaine somme au titre du vol commis sur le chantier au mois de mars 2010 ;

Mais attendu qu'ayant retenu que la société JTC ne pouvait valablement soutenir qu'elle avait terminé ses travaux au mois de juin 2008 et relevé que le marché conclu avec cette société n'avait pas été résilié au moment du vol qui s'était produit avant la réception de l'ouvrage, la cour d'appel, qui s'est fondée sur l'article 1788 du code civil, a pu en déduire que les conséquences du vol devaient être indemnisées par la société JTC ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, qui est recevable :

Vu l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article L. 124-1 du code des assurances ;

Attendu que, pour rejeter les demandes formées contre la SMABTP, l'arrêt retient que la garantie ne peut être mobilisée, même au titre des conséquences de l'absence de protection de la trémie, le contrat ayant été résilié à la date de la réclamation constituant le sinistre au sens de la définition donnée par le contrat d'assurance ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat d'assurance et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période et que toute clause ayant pour effet de réduire la durée de la garantie de l'assureur à un temps inférieur à la durée de la responsabilité de l'assuré est génératrice d'une obligation sans cause et doit être réputée non écrite, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes dirigées contre la SMABTP, l'arrêt rendu le 26 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;

Condamne la SMABTP et la société JTC aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SMABTP à payer la somme de 3 000 euros à la société JTC ; condamne la société JTC à payer à M. et Mme X... la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la société Jean Torres construction.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué, de ce chef infirmatif, a condamné la société JTC à payer à Monsieur Franck X... et Madame Christine Z... la somme de 7. 124, 86 euros à titre de dommages et intérêts du chef des conséquences du vol commis au mois de mars 2010 ;

Aux motifs qu'avant réception de l'ouvrage, le chantier demeure sous la garde des entrepreneurs qui en ont le contrôle et la direction, et ce en application des dispositions de l'article 1788 du code civil, l'architecte n'étant pas tenu des risques inhérents à cette garde ; qu'aucune faute n'est établie à l'encontre de Madame Y... qui par courrier recommandé du 18 décembre 2010 a mis en demeure la société JTC de protéger le chantier, et n'était pas tenue d'en assurer la surveillance ; que les conséquences du vol commis au mois de mars 2010 doivent donc être indemnisées par la société JTC dont le marché n'avait pas été résilié à ce moment-là ; que l'expert a évalué à la somme de 6. 458 euros TTC le coût de la reprise du plancher chauffant, de la tuyauterie abîmée et du remplacement des portes à la suite du vol ; que les consorts
A...-Z...
justifient avoir dû régler à ce titre la somme totale de 7. 124, 86 euros TTC, qu'il convient de leur allouer (arrêt attaqué, p. 14) ;

1°/ Alors qu'en statuant par de tels motifs qui ne permettent pas de savoir si la condamnation prononcée à l'encontre de la société JTC est fondée sur les règles gouvernant la garde de la chose ou sur celles gouvernant le risque de perte ou de détérioration de la chose, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle au regard des dispositions des articles 1384 et 1788 du code civil, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile qu'elle a violé ;

2°/ Alors en outre et en tout état de cause que l'article 1788 du code civil n'est pas applicable lorsque, comme en l'espèce, le problème posé est non celui de la charge du risque de la perte ou de la détérioration d'une chose fournie par l'entrepreneur, mais celui de la responsabilité de l'un des cocontractants dans la perte ou la détérioration causée à un chantier à la suite d'un vol, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, à supposer qu'elle ait entendu fonder cette condamnation sur l'article 1788 du code civil, en aurait violé les dispositions par fausse application ;

3°/ Et alors enfin qu'à supposer qu'elle ait entendu fonder cette condamnation sur l'article 1384 du code civil, la cour d'appel, en se bornant à affirmer, par un motif général, qu'avant réception de l'ouvrage le chantier demeure sous la garde des entrepreneurs qui en ont le contrôle et la direction, sans répondre au moyen des écritures de l'exposante (p. 12), faisant valoir qu'elle n'avait plus accès au chantier depuis le mois de juin 2008 alors que le vol avait eu lieu en mars 2010, circonstance exclusive de tout pouvoir de direction et de contrôle, la cour d'appel aurait encore violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué, par confirmation du jugement dont appel, a rejeté l'ensemble des demandes dirigées contre la SMABTP ;

Aux motifs propres que la SMABTP, en sa qualité d'assureur décennal de la société JTC, ne peut être tenue de garantir les conséquences de la responsabilité contractuelle de droit commun de son assuré ; qu'ainsi qu'elle le fait observer, l'article 1. 2 des conditions générales de la police d'assurance Cap 2000 souscrite par cette société exclut de la garantie les dommages incombant à l'assuré en vertu de la garantie de parfait achèvement prévue par l'article 1792-6 du code civil, lorsque ces dommages ne sont pas de nature à engager la responsabilité décennale ou de bon fonctionnement de l'assuré ; que la garantie de la SMABTP est recherchée au titre des conséquences du sinistre dégâts des eaux ; or l'article 15. 1 des conditions générales du contrat d'assurance de responsabilité civile en cours de chantier prévoit que « les garanties du précédent chapitre s'appliquent aux sinistres survenant pendant la période de validité de votre contrat, sous réserve que vous n'en ayez pas connaissance au moment de sa prise d'effet » ; qu'il ressort des pièces produites que la société JTC a résilié ledit contrat à effet du 31 décembre 2008, et que la première réclamation concernant le sinistre dégât des eaux est en date du 19 janvier 2009 ; que la garantie de la SMABTP ne peut être mobilisée, même au titre des conséquences de l'absence de protection de la trémie, dès lors que l'assureur établit que le contrat était résilié à la date de la réclamation constituant le sinistre au sens de la définition qui en est donnée par le contrat d'assurance ; que les demandes dirigées contre la SMABTP ont été à juste titre rejetées (arrêt attaqué, p. 17) ;

1°/ Alors qu'en se fondant d'office sur la définition du sinistre figurant dans les conditions générales du contrat d'assurance souscrit par la société JTC, selon laquelle le sinistre aurait consisté dans la réclamation du lésé consécutive à la réalisation du ou des événements garantis, sans inviter les parties à s'en expliquer, la cour d'appel, qui a méconnu le principe de la contradiction, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ Et alors en tout état de cause que le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période ; qu'en donnant effet à la définition du sinistre figurant dans les conditions générales du contrat d'assurance quand celle-ci, rapprochée de l'article 15. 1 de ces mêmes conditions générales, subordonnant la garantie à la condition que le sinistre survienne pendant la période de validité du contrat, aboutit à priver l'assuré du bénéfice de l'assurance en raison d'un fait qui ne lui est pas imputable et à créer un avantage illicite, comme dépourvu de cause, au profit du seul assureur, qui aurait alors perçu des primes sans contrepartie et que cette définition doit, en conséquence, être réputée non écrite, la cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil ;

Et aux motifs, à les supposer adoptés des premiers juges, que c'est à juste titre que la SMABTP, assureur décennal de la société JTC, fait valoir qu'elle ne peut être tenue de garantir les conséquences de la responsabilité contractuelle de droit commun qui constitue le fondement exclusif de l'action indemnitaire de M. Franck X... et de Mme Christine Z... ; qu'en effet, le contrat souscrit par la société JTC ne couvre pas, ainsi qu'il résulte de l'attestation d'assurance et des conditions générales, les dommages et désordres qui en sont issue ; que par ailleurs, les conséquences de l'absence de protection de la trémie ne peuvent davantage donner lieu à garantie au titre de la responsabilité civile en cours de chantier, les maîtres de l'ouvrage ne pouvant être considérés comme des tiers au marché conclu par la société JTC ; que l'ensemble des demandes de M. Franck X... et de Mme Christine Z... ainsi que des autres défendeurs dirigées contre cet assureur seront en conséquence rejetées (jugement dont appel, p. 13) ;

3°/ Alors qu'en statuant ainsi cependant que les conditions générales de la police souscrite par la société JTC (p. 6) spécifiaient que les tiers s'entendaient de « toute personne autre que vous-même ; vos associés dans le cadre de votre entreprise ou dans le cadre d'une association ou d'un groupement d'entreprises auquel vous participez ; si votre entreprise est une personne morale, le Président, les administrateurs, directeurs généraux et gérant de la société assurée, dans l'exercice de leurs fonctions ; vos préposés ou ceux de la société assurée, dans l'exercice de leurs fonctions ; celles exerçant un emploi, même non rémunéré, dans votre entreprise, au cours de leur travail », d'où il s'évinçait qu'étaient tiers les cocontractants de l'entreprise, la cour d'appel, qui a dénaturé la clause claire et précise de ces conditions générales, a violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 15-20939
Date de la décision : 02/02/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 26 mars 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 02 fév. 2017, pourvoi n°15-20939


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.20939
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award