La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/02/2017 | FRANCE | N°15-16477

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 février 2017, 15-16477


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 11 février 2015), que M. X... a été engagé par la société SCT Ronco le 2 novembre 1978 ; qu'après deux accidents du travail et une maladie professionnelle, il a de nouveau été placé en arrêt de travail pour maladie professionnelle, au titre d'une rechute, du 23 mars 2011 au 4 février 2012 ; qu'à l'issue de la visite de reprise, il a été déclaré, le 17 février 2012, inapte à son poste ; que l'employeur a, le 12 mars 2012, fait au salarié une proposition de recl

assement, que celui-ci a refusée le 18 mars suivant, et l'a, le 24 avril 201...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 11 février 2015), que M. X... a été engagé par la société SCT Ronco le 2 novembre 1978 ; qu'après deux accidents du travail et une maladie professionnelle, il a de nouveau été placé en arrêt de travail pour maladie professionnelle, au titre d'une rechute, du 23 mars 2011 au 4 février 2012 ; qu'à l'issue de la visite de reprise, il a été déclaré, le 17 février 2012, inapte à son poste ; que l'employeur a, le 12 mars 2012, fait au salarié une proposition de reclassement, que celui-ci a refusée le 18 mars suivant, et l'a, le 24 avril 2012, licencié ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue un motif précis de licenciement l'inaptitude physique du salarié constatée par le médecin du travail et le refus par le salarié d'un emploi de reclassement proposé par l'employeur, qu'en jugeant le contraire au motif inopérant que la mention « impossibilité de reclassement » ne figurait pas dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1226-12 du code du travail ;
2°/ qu'en visant l'inaptitude médicalement constatée et le refus par le salarié de l'emploi proposé conforme aux préconisations du médecin du travail, après recherche des aménagements possibles, la lettre de licenciement a nécessairement fait référence à l'impossibilité de reclassement et a énoncé par là-même le motif précis exigé par la loi, qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1226-12 du code du travail ;
3°/ que, selon les termes précis de l'article L. 1226-12 du code du travail, l'employeur peut rompre le contrat de travail consécutivement à une inaptitude s'il justifie, soit de l'impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, ce dont il résulte qu'un tel refus suffit à justifier la rupture, qu'ayant constaté que le salarié avait refusé le poste de reclassement conforme aux préconisations du travail et en jugeant cependant que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse en ce que la société n'établissait pas avoir procédé à des recherches de reclassement après ce refus, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
4°/ que la société a exposé que le poste proposé au salarié dans le cadre de son obligation de reclassement était un poste spécialement créé et aménagé pour répondre aux prescriptions du médecin du travail, ce dont il s'induit qu'il n'existait donc pas d'autres postes disponibles et d'autres possibilités de reclassement, qu'en énonçant que la société n'établit pas avoir procédé à toutes les recherches de reclassement possibles sans s'expliquer sur les conclusions de cette dernière dont il ressortait l'impossibilité de reclasser le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant souverainement retenu qu'à la suite du refus par le salarié d'une seule proposition de poste de reclassement, l'employeur n'avait pas procédé à une recherche sérieuse de reclassement, le moyen, qui s'attaque par ailleurs à des motifs surabondants, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est abusif au sens de l'article L. 1226-14 du code du travail et est privatif des indemnités spécifiques prévues par ce texte le refus par le salarié d'un poste spécialement aménagé en fonction de son état de santé et n'emportant aucune modification de ses conditions salariales, qu'en jugeant le contraire tout en constatant que le salarié avait refusé le poste de métreur spécialement créé par la société, conforme aux préconisations du médecin du travail et maintenant ses avantages salariaux, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-14 du code du travail ;
2°/ que seules les raisons invoquées par le salarié pour justifier son refus du poste proposé doivent être examinées par le juge, qu'en l'espèce, le salarié a refusé le poste proposé conforme aux recommandations du médecin du travail en prétendant qu'il ne répondait pas à ces prescriptions médicales et qu'il n'avait plus l'âge de suivre une formation d'adaptation à un poste de métreur ; qu'en se fondant sur des circonstances tenant à l'âge du salarié et sur de prétendues absences d'informations sur la fonction et la formation, quand il lui incombait d'examiner seulement les raisons du refus du salarié, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1226-14 du code du travail ;
Mais attendu que, sans être limitée en son appréciation du caractère abusif du refus du salarié, la cour d'appel a fait ressortir l'absence en l'espèce d'un tel caractère en retenant l'imprécision de la proposition de l'employeur impliquant une formation et ne permettant pas à ce salarié d'en appréhender la substance ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident éventuel du salarié ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi de la société SCT Ronco ;
Condamne la société SCT Ronco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société SCT Ronco et la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société SCT Ronco
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse, ET D'AVOIR condamné la société SCT Ronco à payer au salarié des sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel sur indemnité spéciale de licenciement et d'indemnité compensatrice correspondant au préavis,
AUX MOTIFS QU'il résulte du contenu de la lettre de rupture que l'employeur a motivé le licenciement par l'inaptitude médicalement constatée, après recherche des aménagements possibles et offre d'un emploi de reclassement conforme refusé par le salarié ; que ces éléments, sans mention de l'impossibilité de reclassement ne constituent pas l'énoncé précis d'un motif de licenciement dont doit justifier l'employeur, alors que le refus par le salarié d'un poste proposé dans le cadre de l'obligation de reclassement ne dispense pas ce dernier de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement avant de procéder au licenciement et n'implique pas à lui seul le respect de son obligation de reclassement par l'employeur qui doit non seulement établir, mais aussi motiver la circonstance qu'il ne dispose d'aucun autre poste compatible avec l'inaptitude du salarié ; qu'il apparaît au surplus des pièces du dossier que la société n'établit pas avoir, tant avant qu'après le refus de l'offre par le salarié, procédé à toutes les recherches de reclassement possible, ne justifiant pas ainsi de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10 ; que dès lors, le licenciement non motivé au sens de l'article L. 1226-12 du code du travail est dénué de cause réelle et sérieuse ;
1°) ALORS D'UNE PART QUE constitue un motif précis de licenciement, l'inaptitude physique du salarié constatée par le médecin du travail et le refus par le salarié d'un emploi de reclassement proposé par l'employeur ; qu'en jugeant le contraire au motif inopérant que la mention « impossibilité de reclassement » ne figurait pas dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et l'article L. 1226-12 du code du travail ;
2°) ALORS QU'en tout état de cause, en visant l'inaptitude médicalement constatée et le refus par le salarié de l'emploi proposé conforme aux préconisations du médecin du travail, après recherche des aménagements possibles, la lettre de licenciement a nécessairement fait référence à l'impossibilité de reclassement et a énoncé par là-même le motif précis exigé par la loi ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et l'article L. 1226-12 du code du travail ;
3°) ALORS D'AUTRE PART QUE selon les termes précis de l'article L. 1226-12 du code du travail, l'employeur peut rompre le contrat de travail consécutivement à une inaptitude s'il justifie soit de l'impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions ce dont il résulte qu'un tel refus suffit à justifier la rupture ; qu'ayant constaté que M. X... avait refusé le poste de reclassement conforme aux préconisations du travail et en jugeant cependant que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse en ce que la société SCT Rondo n'établissait pas avoir procédé à des recherches de reclassement après ce refus, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
4°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QUE la société SCT Ronco a exposé que le poste proposé à M. X... dans le cadre de son obligation de reclassement était un poste spécialement créé et aménagé pour répondre aux prescriptions du médecin du travail, ce dont il s'induit qu'il n'existait donc pas d'autres postes disponibles et d'autres possibilités de reclassement ; qu'en énonçant que la société SCT Ronco n'établit pas avoir procédé à toutes les recherches de reclassement possibles sans s'expliquer sur les conclusions de l'exposante dont il ressortait l'impossibilité de reclasser M. X..., la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de M. X... était sans cause réelle et sérieuse, ET D'AVOIR condamné la société SCT Ronco à payer au salarié une somme à titre de rappel sur indemnité spéciale de licenciement et à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
AUX MOTIFS QUE le refus opposé par M. X... à la proposition de reclassement ne peut pas en l'espèce, et ce même si elle apparaît être conforme aux préconisations du médecin du travail et n'entraînait pas de modification de la rémunération de l'intéressé, être considéré comme abusif au regard des modalités de l'offre impliquant chez un salarié âgé de 59 ans, proche de la retraite, ayant exercé jusqu'alors dans l'entreprise des fonctions de maçon puis de maçon-chef d'équipe auxquelles il était uniquement formé, un changement partiel de fonction (métreur) dont l'importance n'était pas précisée et une obligation de formation, notamment en matière informatique, dont les modalités et durée n'étaient pas détaillées, ne permettant pas au salarié inapte d'en appréhender réellement la substance ;
1°) ALORS QU'est abusif au sens de l'article L. 1226-14 du code du travail et est privatif des indemnités spécifiques prévues par ce texte, le refus par le salarié d'un poste spécialement aménagé en fonction de son état de santé et n'emportant aucune modification de ses conditions salariales ; qu'en jugeant le contraire tout en constatant que M. X... avait refusé le poste de métreur spécialement créé par la société SCT Ronco, conforme aux préconisations du médecin du travail et maintenant ses avantages salariaux, la Cour d'appel a violé l'article L. 1226-14 du code du travail ;
2°) ALORS DE SURCROÎT QUE seules les raisons invoquées par le salarié pour justifier son refus du poste proposé doivent être examinées par le juge ; qu'en l'espèce, M. X... a refusé le poste proposé conforme aux recommandations du médecin du travail en prétendant qu'il ne répondait pas à ces prescriptions médicales et qu'il n'avait plus l'âge de suivre une formation d'adaptation à un poste de métreur ; qu'en se fondant sur des circonstances tenant à l'âge du salarié et sur de prétendues absences d'informations sur la fonction et la formation, quand il lui incombait d'examiner seulement les raisons du refus de M. X..., la Cour d'appel a encore violé l'article L. 1226-14 du code du travail.
Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de sa demande d'indemnités fondée sur le défaut de consultation des délégués du personnel en raison du non-respect des règles d'organisation des élections professionnelles
AUX MOTIFS PROPRES QUE la société produit les procès-verbaux de carence des 25 février 2008 et 6 avril 2012 et établit qu'elle a lancé sa procédure d'organisation des élections des délégués du personnel le 20 février 2012, soit moins de 4 ans après le second tour de l'élection précédente, respectant les dispositions de l'article L. 2314-2 du code du travail qui dispose que l'employeur informe tous les quatre ans le personnel par affichage de l'organisation des élections
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QU'il résulte des procès-verbaux de carence des élections de délégués du personnel, membre titulaires et membres suppléants versés aux débats (pièces 12 et 13 de la défenderesse) qu'il n'existait pas de délégués du personnel au sein de la SCT RONCO
ALORS QUE, aux termes de l'article L. 2314-2 du code du travail, l'employeur informe tous les quatre ans le personnel par affichage de l'organisation des élections. Le document affiché précise la date envisagée pour le premier tour. Celui-ci doit se tenir, au plus tard, le quarante-cinquième jour suivant le jour de l'affichage ; que seul un procès-verbal de carence à l'issue du second tour de scrutin est de nature à justifier le respect par l'employeur de ses obligations en matière d'élections des représentants du personnel ; que la cour d'appel a constaté que la société versait les procès-verbaux de carence des 25 février 2008 et 6 avril 2012 et établissait qu'elle avait lancé sa procédure d'organisation des élections des délégués du personnel le 20 février 2012 ; qu'il en résultait qu'à la date de la proposition de reclassement le 12 mars 2012, aucune élection n'avait été organisée, ni aucun procès-verbal de carence dressé, en sorte que l'employeur ne justifiait pas de l'impossibilité de consulter les délégués du personnel ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 2314-2 et L. 2324-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-16477
Date de la décision : 01/02/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 11 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 fév. 2017, pourvoi n°15-16477


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.16477
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award