La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2017 | FRANCE | N°14-29315

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 26 janvier 2017, 14-29315


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 24 septembre 2014), que la société JCSM a donné à bail à la société LE3P une parcelle de terrain nu de 500 m², à compter du 1er juin 2006, en vue de l'exploitation d'une station de lavage automobile, à charge pour la société locataire de procéder, à ses frais, aux travaux d'aménagement ; qu'un arrêté municipal du 27 mars 2009 a interdit l'exploitation de l'activité en raison des nuisances sonores qu'elle générait pour le voisinage ; que, la socié

té LE3P ayant fait réaliser des travaux de mise en conformité des installation...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 24 septembre 2014), que la société JCSM a donné à bail à la société LE3P une parcelle de terrain nu de 500 m², à compter du 1er juin 2006, en vue de l'exploitation d'une station de lavage automobile, à charge pour la société locataire de procéder, à ses frais, aux travaux d'aménagement ; qu'un arrêté municipal du 27 mars 2009 a interdit l'exploitation de l'activité en raison des nuisances sonores qu'elle générait pour le voisinage ; que, la société LE3P ayant fait réaliser des travaux de mise en conformité des installations, un arrêté du 9 juin 2010 a autorisé la reprise de l'activité ; que la société locataire a assigné le bailleur en paiement de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que la société LE3P fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le bail stipulait que le preneur supportera toutes transformations et réparations nécessitées par l'exercice de son activité, notamment celles imposées par l'autorité publique, et relevé que la société locataire avait pris possession du terrain nu donné à bail, sans émettre de contestation et qu'elle avait, conformément au bail, fait construire, à ses frais, la station de lavage automobile, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le bailleur avait satisfait à son obligation de délivrance et que les travaux de mise en conformité prescrits par l'administration n'étaient pas à la charge de celui-ci ;

Et attendu que le rejet du premier moyen rend sans portée le second, qui invoque une cassation par voie de conséquence ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société LE3P aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société LE3P et la condamne à payer à la société JCSM la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société LE3P

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté la société L.E.3.P. de l'ensemble de ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE, sur le bail commercial du 26 avril 2006 et l'obligation de délivrance de l'article 1719 du code civil, l'article 1719 du code civil stipule : « le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de : 1° de délivrer au preneur la chose louée, 2° d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, 3° d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail » ; qu'en l'espèce, le bail commercial versé aux débats (pièce n° 1 du dossier de l'appelante) désigne précisément comme objet du bail, « sur un terrain cadastré section BE numéro 62 une parcelle d'une surface de 500 m² environ et la voirie d'accès à ladite parcelle selon plan ci-annexé » avec une destination exclusive convenue par les parties l'exploitation d'une station de lavage ; que la cour constatera immédiatement que le tribunal a opéré dans sa décision une confusion entre l'objet du bail et la destination de celui-ci ; qu'en effet, l'objet du bail, sans aucune ambiguïté, se compose d'un terrain nu d'une surface de 500 m² avec comme destination contractuellement convenue l'exploitation d'une station de lavage dont le bail précise en outre qu'elle comprend « des pistes de lavage haute pression couvertes ou non couvertes, des portiques à rouleaux, aspirateurs et local technique ainsi que l'aménagement d'aires de stationnement et de circulation, l'ensemble étant à réaliser par le preneur » ; que l'obligation de délivrance consiste pour le bailleur à remettre la jouissance de la chose louée qui se limite en l'espèce à cette parcelle de 500 m² évoqué ci-dessus ; qu'en outre, il n'est pas contesté que le preneur a pris possession du terrain ainsi désigné dans le contrat à la date de prise d'effet du bail soit le 1er juin 2006 sans que la moindre contestation sur la chose louée ne soit alors émise ; qu'aucun élément n'est versé aux débats établissant la préexistence d'une station de lavage au moment de la conclusion du bail commercial ; que bien plus, exécutant le contrat de bail commercial, le preneur en l'espèce la société L.E.3.P. va faire édifier à ses frais la station de lavage sans qu'à aucun moment le bailleur n'intervienne dans la conduite des travaux ni dans le choix des prestataires (cf. pièce n° 9 du dossier de l'appelante) ; qu'il ne saurait donc être question d'éluder les stipulations claires et précises du contrat quelles qu'en soient les conséquences pour le preneur en terme d'exploitation et dès lors l'obligation de délivrance ne doit pas être confondue avec l'obligation de garantie d'une jouissance paisible ; que le bailleur a satisfait à son obligation de délivrance telle que résultant des dispositions de l'article 1719 1°) du code civil et des obligations contractuelles mentionnées dans le contrat de bail commercial en date du 26 avril 2006 ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point ; que sur l'extension de l'obligation de délivrance à une obligation postérieure d'entretien à la charge du bailleur, si l'article 1719 2°) fait de l'obligation d'entretien une obligation légale pour le bailleur, la loi comme la jurisprudence n'interdisent pas aux parties d'en aménager contractuellement le principe ; qu'en l'espèce, il convient de se reporter encore une fois au bail commercial pour observer que sous les rubriques « entretien, travaux du preneur et jouissance » il est clairement indiqué que : « si pour une cause quelconque, le remplacement des installations ou appareils qui existeraient dans les lieux loués, devenait nécessaire, même par suite d'usure, de vétusté, de force majeure ou d'exigence administrative, il sera entièrement à la charge du preneur, sans recours pour le bailleur... Le preneur aura à sa charge toutes transformations et réparations nécessitées par l'exercice de son activité, notamment celles imposées par l'autorité publique au titre de la sécurité, tout en restant garant, vis-à-vis du bailleur de toutes actions en dommages-intérêts de la part des autres locataires ou des voisins que pourrait provoquer l'exercice de cette activité... le preneur devra se conformer rigoureusement aux prescriptions administratives et autres concernant l'exploitation de ce commerce... le preneur veillera à ne rien faire qui puisse apporter aucun trouble de jouissance aux autres occupants de l'immeuble et aux voisins, ni commettre aucun acte de jouissance préjudiciable aux tiers, notamment, il devra prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter tous bruits, hormis ceux occasionnés pour l'exercice normale de l'activité autorisée sur les lieux loués, odeurs et fumées... Le preneur devra satisfaire à toutes les réglementations sanitaires, de voirie, de salubrité, d'hygiène, ainsi qu'à celles pouvant résulter des plans d'aménagement de la ville et autres obligations, dont les locataires sont ordinairement tenus, de manière que le bailleur ne puisse aucunement être inquiété ni recherché à ce sujet » ; qu'en conséquence de ces stipulations contractuelles, la société L.E.3.P. est responsable en sa qualité de preneur des conséquences de son activité notamment vis-à-vis de l'autorité publique dès lors que son activité n'est plus conforme aux prescriptions administratives ; que dès lors destinataire des injonctions de l'administration visant à faire procéder à des travaux de mise en conformité suite aux nuisances sonores constatées par les riverains et ne le faisant pas dans le délai imparti, elle doit en supporter seule les conséquences sans que puisse être retenue à cet égard la garantie du bailleur ; que la société L.E.3.P. est encore une fois seule responsable du choix, de l'installation, de la disposition de la station de lavage comme de son fonctionnement ; que tous les travaux de mise en conformité de l'installation s'agissant des nuisances sonores comme notamment la construction d'un mur antibruit même financé par le bailleur n'entrent aucunement dans le cadre de l'obligation de délivrance de la chose louée qui pèse sur ce dernier ; que la décision des premiers juges sera donc infirmée sur ce point ; que dans ces conditions l'appel incident formulé par l'intimée, la société L.E.3.P. visant à infirmer le jugement en ce qu'il avait limité le montant de son indemnisation au titre de sa prétendue perte d'exploitation à la somme de 30.000 euros et refusé le remboursement des frais bancaires du fait de la responsabilité du bailleur devient sans objet ;

ALORS, 1°), QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ; que l'obligation de délivrance qui pèse sur le bailleur lui impose de livrer un bien conforme à sa destination contractuelle, c'est-à-dire, s'agissant d'un bail commercial, un bien permettant l'exercice de l'activité visée au bail ; qu'en retenant que l'obligation du bailleur se limitait à remettre au preneur la jouissance des lieux loués, peu important que ceux-ci ne soient pas conformes à leur destination contractuelle, en l'occurrence l'exploitation d'une station de lavage automobile, la cour d'appel a violé l'article 1719 du code civil ;

ALORS, 2°), QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ; qu'aucune disposition contractuelle ne peut exonérer le bailleur de cette obligation ; qu'en considérant, pour écarter tout manquement du bailleur à son obligation de délivrance, que la clause du bail mettant à la charge de la société L.E.3.P. toutes les transformations et réparations nécessitées par l'exercice de son activité avait pour effet d'exonérer le bailleur de son obligation de mettre les locaux en conformité avec leur destination contractuelle, la cour d'appel, qui a fait application d'une clause illicite, a violé l'article 1719 du code civil ;

ALORS, 3°), QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ; que le bailleur doit, en conséquence, supporter la mise en conformité des lieux loués à leur destination contractuelle ; qu'en retenant que les travaux de mise en conformité des lieux loués aux prescriptions administratives n'entraient pas dans l'obligation de délivrance incombant au bailleur, quand ceux-ci avaient pour objet de rendre les lieux loués conformes à leur destination contractuelle, la cour d'appel a violé l'article 1719 du code civil ;

ALORS, 4°) et subsidiairement, QUE le bailleur doit répondre, envers le preneur, de toute faute contractuelle ; qu'en exonérant le bailleur de toute responsabilité sans rechercher si la circonstance que la configuration des lieux, à l'origine des nuisances sonores constatées par la mairie, avait été choisie par le bailleur n'avait pas pour effet de contraindre ce dernier à garantir le preneur des travaux de conformité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société L.E.3.P. à payer à la société JCSM la somme de 17.006,59 euros ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande reconventionnelle de paiement des loyers formulée par le bailleur, il n'est pas contesté par les parties que la société L.E.3.P a cessé d'honorer ses loyers à compter du mois de juin conduisant le bailleur la société JCSM à faire délivrer le 4 août 2010 un commandement de payer à hauteur de 17.006,59 euros visant les loyers impayés du 3ème trimestre 2009, du 4ème trimestre 2009 et ceux des trois premiers trimestres de 2010 (pièce n° 6 du dossier de l'appelante) ; que compte tenu de l'absence établie de tout comportement fautif du bailleur dans l'exécution de ses obligations contractuelles, plus rien ne s'oppose à ce que le preneur s'exécute en payant les loyers demeurés impayés à ce jour ; que la cour est dans l'incapacité d'apprécier si la société L.E.3.P. a effectivement comme elle le soutient dans ses écritures repris le paiement des loyers à compter du mois de juillet 2010 faute de disposer d'un document bancaire lisible ; qu'en effet le relevé de compte produit par l'intimée (pièce n° 20) ne mentionne aucunement le bénéficiaire du paiement ; que la cour condamnera donc la société L.E.3.P. à payer les loyers ainsi réclamés en deniers ou quittances ; que la décision des premiers juges sera également infirmée sur ce point ;

ALORS QUE la condamnation du preneur au paiement de loyers étant justifiée par l'absence de manquement imputable au bailleur, la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence, l'annulation du chef du dispositif ayant accueilli la demande du bailleur en paiement de loyers, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 14-29315
Date de la décision : 26/01/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 24 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 26 jan. 2017, pourvoi n°14-29315


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:14.29315
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award