La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2016 | FRANCE | N°15-21596

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 décembre 2016, 15-21596


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2015), que M. X..., engagé le 23 avril 2010 par la société Le Poids lourd 93 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, en qualité de magasinier, a été licencié le 10 mai 2010, avant le terme de la période d'essai ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer abusive la rupture du contrat de travail en cours de période d'essai et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1

°/ que la charge de la preuve du caractère abusif de la décision de rompre le con...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2015), que M. X..., engagé le 23 avril 2010 par la société Le Poids lourd 93 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, en qualité de magasinier, a été licencié le 10 mai 2010, avant le terme de la période d'essai ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer abusive la rupture du contrat de travail en cours de période d'essai et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve du caractère abusif de la décision de rompre le contrat de travail en cours de période d'essai incombe à celui qui conteste le bien-fondé de la rupture ; qu'il appartenait ainsi au salarié de démontrer sa thèse selon laquelle il avait été recruté uniquement pour remplacer M. Y... pendant la durée de ses congés payés ; qu'en considérant que le fait que la mutation de M. Y... n'avait finalement pas eu lieu à la suite de la rupture de la période d'essai du salarié constituait un « indice » susceptible de caractériser un abus de la part de l'employeur et que l'explication donnée par la société Le Poids lourd 93 en ce qui concerne les raisons qui l'ont conduite à différer la mutation de M. Y... « n'est pas de nature à convaincre la cour que la société Le Poids lourd n'a pas détourné la période d'essai imposée à son salarié », la cour d'appel a présumé de la mauvaise foi de la société et a inversé la charge de la preuve en violation des articles L. 1222-1, L. 1231-1 et L. 1221-19 et suivants du code du travail, ensemble les articles 1315 du code civil et 9 du code de procédure civile ;
2°/ que les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité ; qu'en matière prud'homale, la preuve est libre ; qu'en refusant d'examiner le courrier de M. Z..., qui comportait sa signature manuscrite, produit par l'employeur en vue de démontrer que le salarié n'avait pas donné satisfaction durant la période d'essai, au motif que cet écrit ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, cependant qu'elle devait néanmoins en apprécier la valeur et la portée, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte précité, ensemble les articles 1315 du code civil et 9 du code de procédure civile ;
3°/ qu'il était constant aux débats que le salarié avait, plusieurs années avant son embauche au sein de la société Le Poids lourd 93, effectué une période de travail auprès de deux sociétés du même groupe mais non au sein de la société Le Poids lourd 93 elle-même ; qu'en se fondant, pour dire que ladite société avait détourné la période d'essai de sa finalité, sur le fait qu'elle aurait « déjà employé antérieurement » le salarié, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant souverainement apprécié les éléments de fait et de preuve produits devant elle et relevé, au regard du registre du personnel, que la personne, qu'il était supposé remplacer, était restée dans l'entreprise à son retour de congés payés et enfin fait ressortir la brièveté de la période d'essai, l'inadaptation du salarié à son emploi ayant été constatée en moins de neuf jours, la cour d'appel, qui a retenu que la résiliation du contrat de travail était intervenue au cours de la période d'essai pour un motif non inhérent à la personne du salarié, a pu décider, sans inverser la charge de la preuve, que la rupture était abusive ; que le moyen, qui critique en sa troisième branche un motif surabondant, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Poids lourd 93 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Le Poids lourd 93 à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Le Poids lourd 93
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail en cours de période d'essai par la société LE POIDS LOURD 93 était abusive et de l'AVOIR, en conséquence, condamnée à payer à Monsieur X... les sommes de 7.200 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la période d'essai, 2.200 € à titre d'indemnité de préavis, 220 € au titre des congés payés y afférents, outre les frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE « s'il est constant que durant la période d'essai, chacune des parties dispose en principe d'un droit unilatéral de résiliation, sans avoir à alléguer de motif, toutefois les circonstances de la rupture peuvent néanmoins révéler une attitude fautive de l'employeur. Pour infirmation, Monsieur X... fait essentiellement valoir que son éviction de l'entreprise n'est pas étrangère à l'opposition de son supérieur au fait qu'il était contractuellement prévu qu'il ne travaille pas le mercredi après-midi, qu'en réalité, sa période d'embauche correspondait aux congés payés accordés au salarié qu'il était supposé remplacer, et qu'il n'aurait pas dû être soumis à une période d'essai, ayant travaillé pour le même employeur de 2004 à 2006. Monsieur X... réfute les arguments opposés par son employeur, arguant qu'il n'était pas possible d'évaluer ses compétences en neuf jours, et conteste le caractère probant de l'attestation dactylographiée de son supérieur hiérarchique, non conforme qui évoque une période d'un mois. En l'espèce, si le fait que Monsieur X... ait pu antérieurement travailler pour le même employeur, y compris sur une période assez longue mais plusieurs années avant, n'interdisait pas à son employeur de le soumettre à une période d'essai pour apprécier l'adéquation de ses compétences à l'emploi occupé et d'autoriser également chacun des contractants à y mettre un terme, l'identité entre la période d'emploi de Monsieur X... et l'autorisation de congés accordée à Monsieur Y... qu'il était censé remplacer, constitue un indice susceptible de caractériser un abus de la part de l'employeur. L'attestation de Monsieur Z..., supérieur de Monsieur X..., intégralement dactylographiée et ne comportant aucune référence à la production en justice et aux sanctions encourues en cas de fausse attestation, et ne comportant en annexe aucun document officiel justifiant de l'identité de son auteur, est dénuée de tout caractère probant, de sorte qu'elle ne peut pertinemment lui être opposée par son employeur, pour établir la mauvaise réalisation de ses tâches par l'intéressé. Par ailleurs, la circonstance que le registre unique du personnel montre que Monsieur Y... est demeuré au sein de l'entreprise, après son retour de congés payés, est de nature à accréditer le fait que Monsieur X... n'ait été recruté que pendant l'absence de l'intéressé. A cet égard, l'argument selon lequel, ce serait en conséquence de l'inadaptation de Monsieur X... à son emploi constatée en moins de neuf jours, que la mutation de Monsieur Y... à la société POIDS LOURDS 92 aurait été remise en cause, n'est pas dans les circonstances de l'espèce, de nature à convaincre la cour que la société LE POIDS LOURD 93 n'a pas détourné la période d'essai imposé à son salarié, qu'il avait déjà employé antérieurement, le pouvoir discrétionnaire dont il disposait, ayant en l'espèce dégénéré en abus de droit. Il résulte de ce qui précède que la rupture du contrat de travail de Monsieur X... intervenue dans ces conditions est abusive. Compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise, nonobstant l'absence de perte d'une quelconque ancienneté mais des conséquences matérielles et morales de la rupture à son égard, en particulier l'interruption des missions d'intérim qu'il effectuait antérieurement ainsi que cela résulte des pièces produites et des débats, il lui sera alloué sur le fondement de l'article 1134 du Code du travail, une somme de 7.200 € à titre de dommages-intérêts. Enfin, le salarié peut prétendre aux indemnités compensatrice de préavis et de congés afférents tel qu'il est dit au dispositif, pour les sommes non autrement contestées » ;
ALORS, TOUT D'ABORD, QUE la charge de la preuve du caractère abusif de la décision de rompre le contrat de travail en cours de période d'essai incombe à celui qui conteste le bien-fondé de la rupture ; qu'il appartenait ainsi à Monsieur X... de démontrer sa thèse selon laquelle il avait été recruté uniquement pour remplacer Monsieur Y... pendant la durée de ses congés payés ; qu'en considérant que le fait que la mutation de Monsieur Y... n'avait finalement pas eu lieu à la suite de la rupture de la période d'essai de Monsieur X... constituait un « indice » susceptible de caractériser un abus de la part de l'employeur et que l'explication donnée par la société LE POIDS LOURD 93 en ce qui concerne les raisons qui l'ont conduite à différer la mutation de Monsieur Y... « n'est pas de nature à convaincre la cour que la société LE POIDS LOURD n'a pas détourné la période d'essai imposée à son salarié », la cour d'appel a présumé de la mauvaise foi de la société LE POIDS LOURD 93 et a inversé la charge de la preuve en violation des articles L.1222-1 , L.1231-1 et L.1221-19 et suivants du Code du travail, ensemble les articles 1315 du Code civil et 9 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENSUITE QUE les dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité ; qu'en matière prud'homale, la preuve est libre ; qu'en refusant d'examiner le courrier de Monsieur Z..., qui comportait sa signature manuscrite, produit par la société LE POIDS LOURD 93 en vue de démontrer que Monsieur X... n'avait pas donné satisfaction durant la période d'essai, au motif que cet écrit ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions de l'article 202 du Code de procédure civile, cependant qu'elle devait néanmoins en apprécier la valeur et la portée, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte précité, ensemble les articles 1315 du Code civil et 9 du Code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QU'il était constant aux débats que Monsieur X... avait, plusieurs années avant son embauche au sein de la société LE POIDS LOURD 93, effectué une période de travail auprès de deux sociétés du même groupe mais non au sein de la société LE POIDS LOURD 93 elle-même ; qu'en se fondant, pour dire que ladite société avait détourné la période d'essai de sa finalité, sur le fait qu'elle aurait « déjà employé antérieurement » Monsieur X..., la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-21596
Date de la décision : 15/12/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 déc. 2016, pourvoi n°15-21596


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21596
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award