Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Patrick X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BASSE-TERRE, chambre correctionnelle, en date du 8 décembre 2015, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 27 mai 2015, n° 14-83. 196), dans la procédure suivie contre lui des chefs de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public et diffamation publique envers particuliers, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 novembre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel ;
Attendu qu'il résulte des articles préliminaire du code de procédure pénale, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 58, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, que le prévenu non condamné pénalement peut, comme la partie civile, quand il est demandeur au pourvoi, user du bénéfice de l'article 585 du code de procédure pénale ; que le mémoire personnel déposé dans le mois du pourvoi au greffe de la Cour de cassation sans le ministère d'un avocat à la Cour de cassation est, en conséquence, recevable ;
Vu ledit mémoire et les observations complémentaires produites ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite de la mise en ligne, sur le site internet domactu. com, d'un texte mettant en cause les conditions de la nomination par M. Y..., alors président du conseil régional de Martinique, de Mme Y..., sa fille, en qualité de chef de service de la coopération régionale, et les conflits d'intérêts qui résulteraient de l'obtention, par M. Mark Z..., présenté comme le concubin de Mme Y..., qui aurait ultérieurement acquis, avec celle-ci, un commerce de vêtements à Fort-de-France, du marché de la reconstruction, aux frais de la collectivité territoriale, d'une école en Dominique, ceux-ci ont déposé plainte et se sont constitués partie civile des chefs susvisés ; que, renvoyé devant le tribunal correctionnel de Fort-de-France, M. X..., président de l'association de défense des justiciables de Martinique, a été relaxé ; que l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France infirmant cette décision et condamnant notamment l'intéressé au paiement de dommages-intérêts a été cassé, en toutes ses dispositions, par la chambre criminelle de la Cour de cassation, la cause et les parties étant renvoyées devant la cour d'appel de Basse-Terre ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 30, 47, 48, 1°, 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, 591 et 593 du code de procédure pénale et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu qu'en ayant recours, pour apprécier la bonne foi de M. X..., à une phrase non poursuivie extraite du texte contenant les propos incriminés, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen, dès lors qu'il appartient aux juges d'apprécier le sens et la portée des passages présentés comme diffamatoires au regard du contexte dans lequel ceux-ci ont été portés à la connaissance du public ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du code civil, 29, 30, 31 et 48 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse et 591 et 593 du code de procédure pénale ; Attendu qu'après avoir retenu, à juste titre, le caractère diffamatoire des propos incriminés à l'égard des parties civiles, l'arrêt, pour infirmer le jugement entrepris, écarter le fait justificatif de la bonne foi et condamner M. X... au paiement de dommages-intérêts, énonce que le texte litigieux ne s'inscrivait pas dans un débat d'intérêt général, retient que, si Mme Y...a été recrutée en juin 2006 aux fonctions de chef de service, alors que son père présidait le conseil régional, aucun élément n'est produit pour étayer l'accusation selon laquelle cette nomination aurait été rendue possible par l'éviction qualifiée de scandaleuse de la précédente titulaire du poste, et que, si une société dans laquelle M. Z...est associé a remporté un appel d'offres du conseil régional de Martinique concernant plusieurs projets de réhabilitation de bâtiments scolaires à la Dominique et à Grenade, rien ne permet de retenir que ce marché public aurait été remporté dans des conditions irrégulières ; que les juges concluent que les propos manquaient de toute base factuelle et que M. X..., qui les a accompagnés du commentaire " si c'est vrai bonjour l'ambiance, si c'est faux, ça mérite des poursuites en diffamation ", en avait conscience ;
Attendu que, si c'est à tort que l'arrêt retient que les propos incriminés, relatifs aux conflits d'intérêts pouvant affecter tant l'exercice par le président d'une collectivité territoriale de son pouvoir de nomination à un poste de responsabilité au sein des services de cette collectivité que le bon usage des deniers publics, ne s'inscrivaient pas dans un débat d'intérêt général, la cour d'appel, qui a constaté que M. X..., qui avait volontairement mis en ligne des propos précédemment diffusés par un tiers, n'avait pas produit aux débats d'éléments permettant de retenir l'existence d'une base factuelle suffisante, a justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize décembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.