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13/12/2016 | FRANCE | N°14-19885

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 décembre 2016, 14-19885


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident relevé par la société de droit belge Credimundi :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Yamaha Motor France, aux droits de laquelle vient la société de droit néerlandais Yamaha Motor Europe NV (la société Yamaha), a conclu avec la société Route 21, dont M. X... était le gérant, divers contrats de distribution sélective les 21 décembre 2001, 18 novembre 2003, 24 novembre 2004 et 18 janvier 2007 conte

nant une clause (art. 9.1) de résiliation de plein droit des contrats en cas...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que sur le pourvoi incident relevé par la société de droit belge Credimundi :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Yamaha Motor France, aux droits de laquelle vient la société de droit néerlandais Yamaha Motor Europe NV (la société Yamaha), a conclu avec la société Route 21, dont M. X... était le gérant, divers contrats de distribution sélective les 21 décembre 2001, 18 novembre 2003, 24 novembre 2004 et 18 janvier 2007 contenant une clause (art. 9.1) de résiliation de plein droit des contrats en cas de non-paiement à l'échéance convenue de toute somme due à la société Yamaha par la société Route 21 ; que, le 24 octobre 2008, M. X... et son épouse se sont rendus sous-cautions solidaires au profit de la société de droit belge Ducroire Delcredere (la société Ducroire), aux droits de laquelle vient la société de droit belge Credimundi, des engagements de la société Route 21 à l'égard de la société Yamaha à concurrence de 100 000 euros ; que, le 10 novembre 2008, la société Ducroire s'est rendue caution solidaire de la société Route 21 au profit de la société Yamaha à concurrence de 100 000 euros, cet engagement devenant caduc à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date de résiliation de plein droit du cautionnement résultant de celle du contrat cautionné ; que, les 10 janvier et 30 mars 2010, la société Route 21 a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; que, le 21 janvier 2010, la société Ducroire a déclaré sa créance à concurrence de 100 000 euros ; que, le 18 février 2010, la société Yamaha a déclaré sa créance à concurrence de 394 445,52 euros ; que, le 26 avril 2010, la société Yamaha a assigné la société Ducroire en exécution de son engagement de caution, tandis que, le 2 juillet 2010, la société Ducroire a assigné en garantie M. X... en sa qualité de sous-caution ;
Sur la recevabilité du pourvoi incident, contestée par la défense :
Attendu qu'il est soutenu que le pourvoi incident est irrecevable, en ce que la société Ducroire a expressément manifesté sa volonté d'acquiescer à l'arrêt attaqué par une télécopie du 22 avril 2014, adressée par son conseil à celui de la société Yamaha, mentionnant que sa cliente n'entendait pas se pourvoir en cassation contre cet arrêt et offrait de régler les sommes auxquelles elle avait été condamnée au profit de la société Yamaha ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 409, alinéa 1er, du code de procédure civile que l'acquiescement au jugement emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours sauf si, postérieurement, une autre partie forme régulièrement un recours ; qu'il est établi que, postérieurement à la télécopie du 22 avril 2004, M. X... a formé un pourvoi en cassation, le 25 juin 2014, dont le premier moyen, s'il venait à être accueilli, aurait pour conséquence de remettre en cause la condamnation de M. X... à garantir la société Ducroire, laquelle se trouverait alors seule condamnée à l'égard de la société Yamaha ; que ce pourvoi étant de nature à conférer à la société Ducroire un intérêt nouveau à user d'une voie de recours qu'elle n'avait pas précédemment cru à propos d'exercer, son pourvoi incident est recevable ;
Sur le pourvoi incident, qui est préalable :
Sur le premier moyen de ce pourvoi :
Attendu que la société Ducroire fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Yamaha la somme de 100 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2010 avec capitalisation pour une année entière, à compter du 30 janvier 2014 alors, selon le moyen, que l'article 9.1 des contrats de distribution sélective conclus par la société Route 21 avec la société Yamaha les 21 décembre 2001, 18 novembre 2003, 24 novembre 2004, et 18 janvier 2007 stipulait que «le contrat sera[it] résilié de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité sans formalité préalable si l'un quelconque des événements énumérés ci-après venait à se produire : non-paiement à l'échéance convenue de toute somme due à YMF par le concessionnaire, soit au titre du présent contrat, soit au titre de tout autre contrat quelle que soit sa forme, intervenu entre YMF et le concessionnaire (…) » ; que la société Ducroire faisait valoir qu'en application de cette stipulation, les contrats de distribution s'étaient trouvés résiliés de plein droit au 16 mai 2009, date d'échéance d'une facture de 14 281,76 euros que la société Route 21 n'avait pas acquittée ; qu'elle en déduisait qu'en l'absence de mise en jeu par la société Yamaha du cautionnement accordé par la société Ducroire, dans le délai de trois mois, stipulé dans l'acte de cautionnement, suivant la résiliation des contrats de distribution, son engagement de caution était devenu caduc ; que pour rejeter ce moyen et condamner la société Ducroire à payer à la société Yamaha la somme de 100 000 euros au titre de son engagement de caution, la cour d'appel a retenu que l'article 9.1 des contrats de concession ne prévoyait pas que la résiliation de plein droit présentait un caractère automatique et qu'à défaut de notification d'une décision de résiliation par la société Yamaha à la société Route 21, les contrats de distribution sélective s'étaient poursuivis et que le cautionnement accordé par la société Ducroire était demeuré valide ; qu'en statuant de la sorte, quand l'article 9.1 des contrats de distribution stipulait expressément qu'en cas notamment de non-paiement de l'une quelconque des sommes dues à la société Yamaha, le contrat serait résilié «de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité [et] sans formalité préalable », la cour d'appel a dénaturé cette clause, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la clause litigieuse (art. 9.1) des contrats de distribution sélective prévoyait leur résolution « de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité sans formalité préalable » en cas de non-paiement à l'échéance convenue de toute somme due à la société Yamaha par la société Route 21 au titre de l'un d'eux et retenu que cette résiliation de plein droit ne pouvait jouer de façon automatique, la cour d'appel, qui a décidé que la société Yamaha, si elle entendait s'en prévaloir, devait notifier à la société Route 21 sa décision de résiliation, n'a fait qu'appliquer cette clause, sans la dénaturer ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen du même pourvoi :
Attendu que la société Ducroire fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts dirigée contre la société Yamaha alors, selon le moyen :
1°/ que la caution peut rechercher la responsabilité du créancier qui, en tardant à exercer des poursuites contre le débiteur, lui cause un préjudice en laissant s'accumuler des impayés, augmentant ainsi le montant de la dette cautionnée ; qu'en l'espèce, la société Ducroire faisait précisément valoir, à titre subsidiaire, que la société Yamaha avait engagé sa responsabilité délictuelle à son égard, en laissant les dettes de la société Route 21 s'accumuler, en ne mettant pas en oeuvre les clauses des contrats de distribution sélective permettant de limiter l'endettement du débiteur, en particulier l'article 6.5.3 prévoyant le paiement préalable avant livraison ainsi que la suspension des livraisons jusqu'au règlement intégral des impayés, et l'article 7.1.5 instituant une clause de réserve de propriété sur les marchandises livrées ; que pour rejeter la demande indemnitaire de la société Ducroire, la cour d'appel a considéré qu'il ne pouvait être reproché à la société Yamaha de ne pas avoir pris des mesures telles qu'elles auraient empêché la société Route 21 d'exercer son activité, dès lors qu'il n'est pas démontré que la société Route 21 était dans une situation irrémédiablement compromise ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si indépendamment de la date de cessation des paiements de la société Route 21, la société Yamaha n'avait pas adopté un comportement fautif en s'abstenant, pendant la durée de l'exécution du cautionnement, d'exercer les prérogatives contractuelles dont elle disposait, qui lui aurait permis de limiter l'endettement de la société Route 21 et de préserver les intérêts de la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°/ que la société Ducroire faisait valoir que la société Yamaha avait engagé sa responsabilité à son égard en s'abstenant de mettre en oeuvre la clause de réserve de propriété sur les produits livrés à la société Route 21, stipulée aux articles 7.1.1 et 7.1.5 des contrats de concession, qui lui permettait en cas d'impayé de récupérer les marchandises livrées, même celles ayant fait l'objet de factures non encore échues ; qu'elle soulignait en particulier que si la société Yamaha avait exercé les droits afférents à cette clause de réserve de propriété dès la première facture impayée de 14 281,76 euros exigible le 15 mai 2009, en exerçant son droit de propriété sur les marchandises précédemment livrées en exécution de trois factures non encore échues, l'endettement de la société Route 21 et corrélativement, l'engagement de caution, auraient été cantonnés à la somme de 14 281,76 euros, montant de la seule facture impayée à cette date ; que pour rejeter l'action indemnitaire de la société Ducroire, la cour d'appel a retenu qu'au 10 novembre 2008, l'encours de la société Route 21 dans les livres de la société Yamaha s'élevait à la somme de 334 760,67 euros et qu'à la date du redressement judiciaire de la société Route 21 la créance de la société Yamaha était de 367 103,25 euros, ce dont elle a déduit que la société Ducroire ne rapportait pas la preuve d'une faute de la société Yamaha ni celle d'un préjudice indemnisable ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si la société Yamaha, en s'abstenant de mettre en oeuvre, à la date du premier impayé survenu le 15 mai 2009, la clause de réserve de propriété dont elle disposait sur les marchandises précédemment livrées, ce qui aurait permis de cantonner l'endettement de la société Route 21 et par voie de conséquence, l'engagement de caution de la société Ducroire à la somme de 14 281,76 euros, soit un montant inférieur à la limite du cautionnement, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'un créancier qui agit en recouvrement de sa créance dans le délai de prescription ne commet pas de faute, sauf abus dans l'exercice de ce droit ; qu'ayant relevé que la société Ducroire ne justifiait, à ce titre, ni de l'existence d'une faute commise par la société Yamaha, ni d'un préjudice en résultant, la cour d'appel, qui a rejeté la demande de dommages-intérêts formée par la société Ducroire contre la société Yamaha, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles 72 et 564 du code de procédure civile ;
Attendu que les défenses au fond peuvent être proposées en tout état de cause ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande d'annulation de l'acte de sous-cautionnement, l'arrêt, après avoir retenu que l'argumentation de M. X... en première instance, tenant à l'absence de caractère exigible de la créance, ne remettait pas en cause la validité de son engagement de sous-caution et que, dès lors, elle ne tendait pas aux mêmes fins que la demande d'annulation de l'acte de sous-caution, retient que cette demande est nouvelle en appel ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le moyen tiré de la nullité de l'acte sur lequel était fondé la demande tendait à faire écarter les prétentions adverses, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation des dispositions de l'arrêt attaqué rejetant la demande de dommages-intérêts de M. X... contre la société Yamaha pour soutien abusif à la société Route 21 ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Ducroire Delcredere à payer à la société Yamaha Motor France la somme de 100 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2010, ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, à compter du 30 janvier 2014, dans les conditions de l'article 1154 du code civil et rejette la demande de dommages-intérêts de la société Ducroire Delcredere contre la société Yamaha Motor France, l'arrêt rendu le 27 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Yamaha Motor Europe NV et la société Credimundi, dont la présence devant la cour de renvoi est nécessaire à la solution du litige ;
Condamne la société Yamaha Motor Europe NV et la société Credimundi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

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Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de Monsieur X... de nullité de son engagement de sous-caution et en conséquence de l'avoir condamné à garantir la société Ducroire de la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de la somme de 100.000 euros et au titre des dépens, dit que Monsieur X... pourra régler la somme de 100.000 euros à la société Ducroire dans le délai d'un an, à compter de la justification par la société Ducroire du paiement de cette même somme à la société Yamaha Motor France ;
AUX MOTIFS QUE le 24 octobre 2008, Monsieur X..., gérant de la société ROUTE 21, s'est porté caution solidaire de la société ROUTE 21 à l'égard de la société DUCROIRE, dans la limite de la somme de 100.000 euros ; que Monsieur X... soutient que son engagement de caution est nul, sur le fondement des dispositions des articles 1108 et 1129 du Code civil ; que la société DUCROIRE soulève l'irrecevabilité de cette demande en application de l'article 564 du Code de procédure civile ; que l'argumentation de Monsieur X... en première instance, tenant à l'absence de caractère exigible de la créance, ne remettait pas en cause la validité de son engagement de caution et que dès lors elle ne tend pas aux mêmes fins que la demande de nullité de l'acte de caution ; que la demande de nullité de l'engagement de caution de Monsieur X... constitue donc une demande nouvelle en appel et qu'elle doit être déclarée irrecevable ;
ALORS QUE le moyen de défense tiré de la nullité d'un acte juridique sur lequel se fonde le demandeur peut être proposé en tout état de cause ; que la société Ducroire a appelé Monsieur X... en garantie sur le fondement de son engagement de sous-caution ; que pour faire écarter cette prétention, Monsieur X... a, en appel, fait valoir que son cautionnement était nul ; qu'en déclarant cette demande irrecevable comme nouvelle en appel, quand le moyen de défense tiré de la nullité de la convention était invoqué pour écarter la prétention adverse visant à voir exécuter ce cautionnement, la Cour d'appel a violé l'article 72 du Code de procédure civile, ensemble l'article 564 du même Code.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'action en responsabilité introduite par Monsieur X... à l'encontre de la société Yamaha Motor France et de l'avoir condamné à garantir la société Ducroire de la condamnation prononcée à son encontre à hauteur de la somme de 100.000 euros et au titre des dépens, dit que Monsieur X... pourra régler la somme de 100.000 euros à la société Ducroire dans le délai d'un an, à compter de la justification par la société Ducroire du paiement de cette même somme à la société Yamaha Motor France ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... soutient qu'en sa qualité de souscaution, il a subi un préjudice, en raison du soutien abusif de la société YAMAHA MOTOR FRANCE à l'égard de la société ROUTE 21 ; que Monsieur X... ne caractérise pas l'existence de l'un des cas de responsabilité énoncés par l'article L 650-1 du code de commerce, permettant de mettre en cause la responsabilité d'un créancier lorsqu'une procédure collective a été ouverte ; que Monsieur X..., gérant de la société ROUTE 21, était parfaitement informé de la situation de la société et qu'il ne peut sérieusement soutenir que la société YAMAHA MOTOR FRANCE disposait sur la situation de la société ROUTE 21, d'informations que lui-même aurait pu ignorer ; que Monsieur X... est ainsi mal fondé à invoquer une faute de la société YAMAHA MOTOR FRANCE à son égard et qu'il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
1°) ALORS QUE les dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce applicables en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire, ne s'appliquent pas à la sous-caution qui peut se prévaloir d'une faute commise par le créancier principal, sans être tenue de démontrer la fraude, l'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou que les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnés à ceux-ci ; qu'en décidant que Monsieur X... ne caractérise pas l'existence de l'un des cas de responsabilité énoncés par l'article L. 650-1 du Code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte ;
2°) ALORS QUE Monsieur X... dans ses conclusions faisait valoir que la société Yamaha France en connaissance des difficultés de règlement des factures de la société Route 21 avait continué à la livrer et reporté les échéances des factures moyennant un taux d'intérêt ayant aggravé la situation de la société, mais ne faisait pas valoir que la société Yamaha France disposait sur la situation de la société Route 21 d'informations qu'il aurait pu lui-même ignorer ; qu'en affirmant qu'il ne pouvait sérieusement soutenir ce moyen, la Cour d'appel a dénaturé ses conclusions et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE constitue une faute le soutien d'un fournisseur consistant à reporter systématiquement les échéances impayées, moyennant un taux d'intérêt exorbitant, et à continuer à livrer des marchandises restant impayées, sans jamais rompre le contrat avec son débiteur en difficulté ; que ne justifie pas d'écarter l'existence d'une telle faute la circonstance que le créancier principal ne disposait pas sur la situation de son débiteur d'informations que son gérant pouvait lui-même ignorer ; qu'en rejetant pourtant pour ces motifs l'action en responsabilité de Monsieur X... contre la société Yamaha Motor France, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.

Moyens produits AU POURVOI INCIDENT par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Credimundi.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société DUCROIRE à payer à la société YAMAHA MOTOR FRANCE la somme de 100.000 €, avec intérêts au taux légal à compter du 28 janvier 2010, D'AVOIR ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, à compter du 30 janvier 2014, dans les conditions de l'article 1154 du code civil, et D'AVOIR condamné la société DUCROIRE à payer à la société YAMAHA MOTOR FRANCE la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel,
AUX MOTIFS QUE « sur la demande principale de la société YAMAHA MOTOR FRANCE : aux termes de l'acte de caution du 10 novembre 2008, il est prévu que l'engagement cessera automatiquement et de plein droit en cas de résiliation, pour quelque cause que ce soit, du contrat de concession, et ce à la date d'effet de la résiliation et que les créances ayant leur origine pendant la période de validité du cautionnement resteront garanties sous réserve qu'une demande en paiement intervienne au plus tard dans un délai de trois mois ; que la société DUCROIRE est ainsi recevable à invoquer le bénéfice de la résiliation des contrats de concession qui serait, selon elle, intervenue de plein droit ; que la clause 9.1 des contrats de concession prévoit que "le contrat sera résilié de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité sans formalité préalable si l'un quelconque des événements énumérés ci-après venait à se produire : non paiement à l'échéance convenue de toute somme due à YMF par le concessionnaire, soit au titre du présent contrat, soit au titre de tout autre contrat quelle que soit sa forme, intervenu entre YMF et le concessionnaire, (...)" ; que la clause 9.2 stipule que "dans tous les autres cas où l'une des parties viendrait à manquer à une de ses obligations contractuelles, l'autre partie pourra résilier le présent contrat par lettre recommandée avec accusé de réception, après avoir mis l'autre partie en demeure de remédier ou de mettre fin audit manquement, dans un délai de quinze jours" ; que la clause 9.1 susvisée ne prévoit pas que la résiliation de plein droit présente un caractère automatique ; qu'il ne peut être tiré argument de la comparaison de cette clause avec la clause 9.2, pour invoquer le caractère impératif de la résiliation de plein droit, puisque cette clause 9.2 concerne des cas dans lesquels chacune des parties peut résilier le contrat, et seulement après mise en demeure de mettre fin au manquement ; qu'en conséquence que la résiliation de plein droit de l'article 9.1 ne peut jouer de façon automatique et qu'elle implique que la société YAMAHA MOTOR FRANCE s'en prévale et qu'elle notifie à la société ROUTE 21 sa décision ; qu'il est établi par les pièces au dossier que la société YAMAHA MOTOR FRANCE n'a pas entendu se prévaloir de la résiliation de plein droit, à la suite du non-paiement des factures à échéance du mois de mai 2009 et qu'au contraire elle a accepté des reports d'échéances ; qu'ainsi, notamment, la facture émise le 14 février 2009, à échéance du 15 mai 2009 et impayée à cette date, a fait l'objet de reports successifs aux 15 août et 20 novembre 2009, puis au 18 février 2010 ; que la société DUCROIRE ne peut sérieusement soutenir que le fait que les contrats de concession ne prévoient pas la faculté de report des échéances interdirait à la société YAMAHA MOTOR FRANCE de faire usage de ce report, alors que les parties peuvent à l'évidence, dans le cadre de leurs rapports contractuels, convenir de reports d'échéances, qui constituent en pratique de simples délais de paiement ; qu'en outre que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 décembre 2009, la société YAMAHA MOTOR FRANCE a notifié à la société ROUTE 21 la résiliation des différents contrats de distribution sélective conclus entre les deux parties entre 2001 et 2007, à l'expiration d'un délai de préavis de 12 mois ; qu'il est dès lors démontré que la société YAMAHA MOTOR FRANCE ne s'est pas prévalue de la clause résolutoire de plein droit ; que cette clause résolutoire est stipulée au profit exclusif de la société YAMAHA MOTOR FRANCE et que cette dernière est seule en droit d'invoquer le bénéfice de cette clause ; que la société DUCROIRE est donc mal fondée à soutenir que la résiliation des contrats de concession a pris effet de plein droit le 15 mai 2009 ; qu'à défaut de résiliation à cette date, le contrat a continué à recevoir application et que l'engagement de caution de la société DUCROIRE a produit ses effets, à tout le moins jusqu'au jugement de redressement judiciaire ; que par ailleurs que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 janvier 2010, la société DUCROIRE a résilié son engagement avec prise d'effet au 8ème jour de la réception de sa lettre ; que dans ces conditions que l'engagement de caution de la société DUCROIRE n'était pas caduc à la date du 16 mai 2009 et que cette dernière doit être déboutée de sa demande de ce chef ; que par ordonnance du 26 septembre 2011, la créance de la société YAMAHA MOTOR FRANCE a été admise au passif de la société ROUTE 21 pour un montant de 367.103,25 euros ; que la société YAMAHA MOTOR FRANCE est dès lors en droit de demander la condamnation de la société DUCROIRE, en sa qualité de caution de la société ROUTE 21, à lui payer la somme de 100.000 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure adressée le 21 janvier 2010 ; que la capitalisation des intérêts est de droit à compter de la demande judiciaire qui en est formée et dès lors qu'il s'agit d'intérêts dus au moins pour une année entière ; qu'il convient d'ordonner cette capitalisation des intérêts à compter des conclusions du 30 janvier 2014, conformément à la demande de la société YAMAHA MOTOR FRANCE, dans les conditions de l'article 1154 du Code civil » ;
ALORS QUE l'article 9.1 des contrats de distribution sélective conclus par la société ROUTE 21 avec la société YAMAHA MOTOR FRANCE les 21 décembre 2001, 18 novembre 2003, 24 novembre 2004, et 18 janvier 2007 stipulait que « le contrat sera[it] résilié de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité sans formalité préalable si l'un quelconque des événements énumérés ci-après venait à se produire : non-paiement à l'échéance convenue de toute somme due à YMF par le concessionnaire, soit au titre du présent contrat, soit au titre de tout autre contrat quelle que soit sa forme, intervenu entre YMF et le concessionnaire (…) » ; que la société DUCROIRE faisait valoir qu'en application de cette stipulation, les contrats de distribution s'étaient trouvés résiliés de plein droit au 16 mai 2009, date d'échéance d'une facture de 14.281,76 € que la société ROUTE 21 n'avait pas acquittée (ses conclusions d'appel, not. p. 12 ; p. 13-14 ; p. 20-21) ; qu'elle en déduisait qu'en l'absence de mise en jeu par la société YAMAHA MOTOR FRANCE du cautionnement accordé par la société DUCROIRE, dans le délai de trois mois, stipulé dans l'acte de cautionnement, suivant la résiliation des contrats de distribution, son engagement de caution était devenu caduc ; que pour rejeter ce moyen et condamner la société DUCROIRE à payer à la société YAMAHA MOTOR FRANCE la somme de 100.000 € au titre de son engagement de caution, la Cour d'appel a retenu que l'article 9.1 des contrats de concession ne prévoyait pas que la résiliation de plein droit présentait un caractère automatique et qu'à défaut de notification d'une décision de résiliation par la société YAMAHA MOTOR FRANCE à la société ROUTE 21, les contrats de distribution sélective s'étaient poursuivis et que le cautionnement accordé par la société DUCROIRE était demeuré valide ; qu'en statuant de la sorte, quand l'article 9.1 des contrats de distribution stipulait expressément qu'en cas notamment de non-paiement de l'une quelconque des sommes dues à la société YAMAHA MOTOR France, le contrat serait résilié « de plein droit et sans aucun préavis ni indemnité [et] sans formalité préalable », la Cour d'appel a dénaturé cette clause, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté la société DUCROIRE de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre la société YAMAHA MOTOR FRANCE ;
AUX MOTIFS QUE « sur la demande subsidiaire de dommages et intérêts de la société DUCROIRE : que la société DUCROIRE soutient que la société YAMAHA MOTOR FRANCE a commis une faute à son égard en aggravant le passif de la société ROUTE 21, sans l'en informer et en s'abstenant de mettre en oeuvre les dispositions contractuelles ; qu'aux termes de l'article L 650-1 du Code de commerce, "lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf le cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnés à ceux-ci" ; que la société DUCROIRE affirme qu'elle n'invoque pas un soutien abusif qui s'inscrit dans le rapport créancier/débiteur, mais une faute à son égard ; que le grief tiré du soutien abusif n'est en pratique pas éloigné du grief tiré de l'aggravation du passif qui résulterait d'un soutien abusif ; qu'en l'espèce il est établi que les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité résultant des dispositions de l'article L 650-1 susvisé, ne sont pas remplies ; que la société DUCROIRE fait valoir qu'au 15 mai 2009, date d'exigibilité de la facture impayée la plus ancienne, l'encours de la société ROUTE 21 auprès de la société YAMAHA MOTOR FRANCE s'élevait à la somme de 121.332,70 euros et que les factures impayées n'ont cessé de s'accumuler à partir de cette date ; que cependant que les reports des échéances des factures conduisaient en pratique à octroyer des délais de paiement à la société ROUTE 21 ; qu'il ne peut être reproché à la société YAMAHA MOTOR FRANCE de ne pas avoir pris des mesures telles qu'elles auraient empêché la société ROUTE 21 d'exercer son activité, alors qu'il n'est pas démontré que la société ROUTE 21 était dans une situation irrémédiablement compromise à cette date ; qu'en outre qu'il ressort des éléments versés aux débats par la société YAMAHA MOTOR FRANCE qu'au 10 novembre 2008, l'encours de la société ROUTE 21 dans ses livres s'élevait à la somme de 334.760,67 euros et qu'à la date du redressement judiciaire la créance de la société YAMAHA MOTOR FRANCE était de 367.103,25 euros, montant de sa créance admise au passif de la société ROUTE 21 ; que l'engagement de caution de la société DUCROIRE, ayant pris effet le 10 novembre 2008, cette dernière n'établit pas dans ces conditions que l'augmentation de l'endettement allégué a entraîné pour elle une aggravation du risque, qui était limité à 100.000 euros, aux termes de son engagement de caution ; qu'en conséquence la société DUCROIRE qui ne justifie ni l'existence d'une faute commise par la société YAMAHA. MOTOR FRANCE ni le préjudice en résultant, doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la société YAMAHA MOTOR FRANCE »
1°) ALORS QUE la caution peut rechercher la responsabilité du créancier qui, en tardant à exercer des poursuites contre le débiteur, lui cause un préjudice en laissant s'accumuler des impayés, augmentant ainsi le montant de la dette cautionnée ; qu'en l'espèce, la société DUCROIRE faisait précisément valoir, à titre subsidiaire, que la société YAMAHA MOTOR FRANCE avait engagé sa responsabilité délictuelle à son égard (ses conclusions d'appel, p. 30, 1er § ; dernier §), en laissant les dettes de la société ROUTE 21 s'accumuler (p. 31 et s.), en ne mettant pas en oeuvre les clauses des contrats de distribution sélective permettant de limiter l'endettement du débiteur, en particulier l'article 6.5.3 prévoyant le paiement préalable avant livraison ainsi que la suspension des livraisons jusqu'au règlement intégral des impayés, et l'article 7.1.5 instituant une clause de réserve de propriété sur les marchandises livrées ; que pour rejeter la demande indemnitaire de l'exposante, la Cour d'appel a considéré qu'il ne pouvait être reproché à la société YAMAHA MOTOR FRANCE de ne pas avoir pris des mesures telles qu'elles auraient empêché la société ROUTE 21 d'exercer son activité, dès lors qu'il n'est pas démontré que la société ROUTE 21 était dans une situation irrémédiablement compromise ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si indépendamment de la date de cessation des paiements de la société ROUTE 21, la société YAMAHA MOTOR FRANCE n'avait pas adopté un comportement fautif en s'abstenant, pendant la durée de l'exécution du cautionnement, d'exercer les prérogatives contractuelles dont elle disposait, qui lui aurait permis de limiter l'endettement de la société ROUTE 21 et de préserver les intérêts de la caution, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
2°) ALORS QUE la société DUCROIRE faisait valoir (ses conclusions d'appel, not. p. 34 ; p. 41 et s.) que la société YAMAHA MOTOR FRANCE avait engagé sa responsabilité à son égard en s'abstenant de mettre en oeuvre la clause de réserve de propriété sur les produits livrés à la société ROUTE 21, stipulée aux articles 7.1.1 et 7.1.5 des contrats de concession, qui lui permettait en cas d'impayé de récupérer les marchandises livrées, même celles ayant fait l'objet de factures non encore échues ; qu'elle soulignait en particulier que si la société YAMAHA MOTOR FRANCE avait exercé les droits afférents à cette clause de réserve de propriété dès la première facture impayée de 14.281,76 € exigible le 15 mai 2009, en exerçant son droit de propriété sur les marchandises précédemment livrées en exécution de trois factures non encore échues, l'endettement de la société ROUTE 21 et corrélativement, l'engagement de caution, auraient été cantonnés à la somme de 14.281,76 €, montant de la seule facture impayée à cette date (ses conclusions d'appel, p. 35) ; que pour rejeter l'action indemnitaire de la société DUCROIRE, la Cour d'appel a retenu qu'au 10 novembre 2008, l'encours de la société ROUTE 21 dans les livres de la société YAMAHA MOTOR FRANCE s'élevait à la somme de 334.760,67 € et qu'à la date du redressement judiciaire de la société ROUTE 21 la créance de la société YAMAHA MOTOR FRANCE était de 367.103,25 €, ce dont elle a déduit que la société DUCROIRE ne rapportait pas la preuve d'une faute de la société YAMAHA MOTOR FRANCE ni celle d'un préjudice indemnisable ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si la société YAMAHA MOTOR FRANCE, en s'abstenant de mettre en oeuvre, à la date du premier impayé survenu le 15 mai 2009, la clause de réserve de propriété dont elle disposait sur les marchandises précédemment livrées, ce qui aurait permis de cantonner l'endettement de la société ROUTE 21 et par voie de conséquence, l'engagement de caution de la société DUCROIRE à la somme de 14.281,76 €, soit un montant inférieur à la limite du cautionnement, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-19885
Date de la décision : 13/12/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 mars 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 déc. 2016, pourvoi n°14-19885


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.19885
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